Grâce à Merlin sait quel miracle, Rémus avait réussi à faire en sorte que Laya ne lui en veuille (presque) plus avant son départ avec ses parents pour des vacances en famille. C'est donc l'esprit un peu plus léger que Rémus se rendit à Bourg St Calmar pour y retrouver les Maraudeurs avec qui il devait passer une partie de l'été. Gardant son habitude des petites promenades solitaires, le jeune loup-garou partit explorer les rues piétonnes de la petite cité balnéaire sorcière. Le soleil réchauffait les pavés et rendait l'ombre très appréciable, et l'envie d'une glace le prit. Il commença par fouiller dans ses poches à la recherche des derniers gallions qui lui restait. Il rechigniait à demander à ses parents un nouvel envoie d'argent de poche, d'autant plus qu'il avait apprit que son père s'était éloigné du Ministère, refusant de donner de plus amples explications à son fils. Cela ressemblait fort à une démission, ce n'était donc pas le moment d'avoir des goûts de luxe. De nature très économe, Rémus hésita quelques instant, ses pièces à la main, puis se dit que pour quelques mornilles, il pouvait bien se prendre une glace.

Il était dans la file d'attente lorsqu'il entendit une voix familière dans son dos. Il se serait retourné avec un grand sourire vers son amie Lily si ses mots ne l'avait pas fait rentrer la tête dans les épaules de 10cm au moins. Il se retourna la tête basse, avec un pauvre sourire. Elle avait de bonnes raisons de lui en vouloir, Rémus le savait très bien.

- Bonjour Lily... Content de te voir... Je... Il déglutit, pas franchement fier. Je suis vraiment désolé pour le bal... Je n'ai été correct ni avec toi, ni avec Laya, vraiment je suis... un imbécile.

Déjà que Rémus avait tendance à très vite culpabiliser, mais Lily était une des dernières personnes qu'il voulait décevoir. Et comme cette dernière jouait rarement dans la demi-mesure, que ce soit dans les démonstrations d'amitié que dans les reproches, le pauvre garçon était d'autant plus penaud.

Alors qu'il hésitait encore entre une observation minutieuse de ses chaussures ou des grains de sables entre les pavés, la réplique beaucoup plus amicale de Lily, en forme de pardon accordé, lui arracha un haussement de sourcils avec un sourire mi-gêné mi-amusé. Un mythe ?... Depuis quand passait-il donc pour quelqu'un d'infaillible ? Pour le jeune homme, c'était une remarque on ne peut plus ironique, même si Lily ne pouvait pas savoir à quel point il n'était pas digne d'être érigé en mythe. Bien sûr, Rémus désirait plus que tout être aimé, ou en tous cas ne pas être détesté, et pour lui c'était la moindre des choses d'être le plus irréprochable possible auprès de ses amis, tout simplement pour ne pas les perdre, mais aussi pour compenser ces moments de bestialité et de violence pure qu'il ne pouvait éviter une fois pas mois.

Lorsque Lily mentionna les évènements qui suivirent son départ précipité du bal, et notamment le cas Rolanda/Sirius, il secoua la tête d'un air désolé. Il connaissait bien son ami et était déjà au courant de ses projets concernant leur camarade de Gryffondor. Mais même s'il désapprouvait l'attitude de Sirius, il n'avait aucune influence sur lui dans ce domaine là. Au moment où il allait partager sa compassion pour Rolanda à Lily, celle-ci le prit de vitesse en l'interrogeant sur Laya... Il se mordit les lèvres et profita du fait que c'était à son tour de choisir sa glace pour réfléchir à la manière de présenter les choses.

- Menthe-Chocolat s'il vous plait. Evidemment, il lui était impossible de mentir à Lily... Il paya sa glace et lui fit signe de choisir à son tour. Je paye pour elle, merci. En voyant du coin de l'oeil Lily sur le point de protester, il l'interrompit avec un clin d'oeil. C'est ma première étape pour me faire pardonner.

Une fois qu'ils eurent tous les deux leur glace, ils s'installèrent sur un banc ombragé, et Rémus soupira sous le regard insistant de Lily avant de se lancer.

- Je vais continuer à briser le mythe, comme tu dis... Ce n'est pas complètement ma faute... En fait si c'est de ma faute... On ne se voyait plus beaucoup ces derniers temps avant le bal. Il y avait les révisions bien sûr, ces histoires avec l'Ordre, et j'ai... Enfin je me sentait mal à l'aise vis-à-vis d'elle, même si j'ai confiance en elle, je ne peux rien lui dire. Tu es peut-être la mieux placée pour comprendre ça, Lily... Du coup j'ai mis de la distance, je ne savais pas quoi faire. Le hasard a fait qu'on se s'est pas croisé pendant pas mal de temps. Et puis je me suis dit que je pourrais au bal avec toi, en amis. Pas besoin de te dire que ça a été la goutte qui a fait déborder le chaudron.

Il s'intéressa à sa glace qui commençait à dégouliner sur ses doigts.

Lily avait formulé tout haut les pensées que Rémus avait commencé à avoir. Ces même pensées qu'il avait rejeté avec force, mais qui étaient bien à l'origine de la distance qu'il avait installé entre lui et Laya, et qui l'avait amené à cette fameuse dispute. Etre honnête... Il savait que c'était impossible, mais avait essayé de se convaincre qu'il pouvait tenter quand même, se persuadant que si elle était au courant qu'il y avait des choses qu'il ne pouvait pas lui dire, si elle décidait de l'accepter quand même, ce serait une forme d'honnêteté... Mais c'était un leurre, tout restait fragile, à cause de ses secrets. Comme si sa lycanthropie ne suffisait pas, l'Ordre de Poudlard s'ajoutait à tout ça. Les paroles de Lily étaient douloureuse à entendre, car elles impliquaient que la meilleure chose à faire, c'était de sacrifier ce qu'il essayait maladroitement de sauver depuis des mois. Seulement, réussir à le faire demandait une force morale que Rémus n'était pas sûr d'avoir. Il avait besoin de Laya, elle lui apportait tant, et lui donnait l'orgueil d'avoir l'impression de pouvoir lui aussi apporter de l'amour à quelqu'un.

Il soupira puis regarda Lily avec un sourire triste. Malgré son propre dilemme qui le tiraillait, il entendait et comprenait tout de même toute la portée que le discours de Lily impliquait pour son amie aussi. Rémus avait bien vu que Severus avait involontairement précipité les choses en traitant la rousse de Sang-de-Bourbe. Nul doute qu'il regrettait ses paroles, seulement, il faisait aussi éclater aux yeux de tous, et surtout à ceux de Lily, à quel point il était plongé, lui aussi dans cette guerre idéologique. Lily et lui n'était pas dans le même camp.

- On vit dans une drôle d'époque, hein ?... C'est comme si... on n'avait pas le choix.Il secoua la tête. Je suis sûr que Laya n'a pas encore pris partie, qu'elle n'est pas engagée avec ces SERPENTS. Je t'avoue que j'espère qu'elle ne prendra pas partie du tout. Si jamais elle venait à rejoindre l'Ordre, elle se retrouverait dans une position bien trop délicate et dangereuse dans sa maison. Peut-être même que le simple fait d'être avec moi la met dans une situation inconfortable... Il finit avec air terriblement méprisant envers lui même. La quitter pour la protéger, quel magnifique prétexte chevaleresque...

Lily venait certainement de lui donner de quoi cogiter pendant des jours. Ses paroles lui apportait un mélange de détermination, de tristesse, un peu de réconfort, mais aussi un léger malaise. Garder son engagement pour l'Ordre secret, c'était une évidence. Mais depuis qu'il avait appris que des Mangemorts étaient venu chez ses parents parce qu'il voulait que lui, le loup garou, prenne sa place avec les siens, au service de Voldemort, le fait qu'il ait choisis son camp voulait dire encore plus. Cet épisode, ainsi que le fait que le fait que son père ait quitté le Ministère, qu'ils aient déménagés, tout cela avait rendu Rémus plus en colère qu'il ne l'avait jamais été. Il aurait eu envie de crier sur les toits que oui il était un loup garou et non il ne se ralliera jamais à ce mage noir. La colère était vite retombé, mais pas la détermination de se battre. Quant à ces histoires de traîtres, il commençait à comprendre de plus en plus ce que ça voulait dire, concrètement... Sirius, qui venait de s'enfuir de chez lui, définitivement considéré comme un "traître à son sang" par sa famille qui le reniait... Rémus en avait eu froid dans le dos. Il n'avait qu'à écouter son coeur et tout irait bien. Il savait surtout qu'il fallait qu'il l'endurcisse, ce coeur, pour être prêt à affronter tout ça avec la tête froide. Pouvoir affronter ce qui ne tournerai pas comme il l'aurait souhaité. Un plis soucieux lui creusait le front, mais il se détendit presque instantanément lorsque Lily afficha un optimisme rayonnant. Rémus ne put répondre que par un sourire tout aussi confiant. Il se mit même à ricaner à la remarque taquine de la rouquine (hj : quelle rime ).

- Alors là, je ne risque pas de les affronter sur ce terrain là ! Et je doute que mon sourire ait le même effet que celui de Sirius. Il rit de plus belle. Quoi que niveau galanterie, ils pourraient quand même faire quelques progrès ces deux là.

Il pensait évidemment à l'attitude désastreuse de Sirius avec ses innombrables petites copines. Mais aussi à la façon plutôt laborieuse dont James tentait d'attirer l'attention de Lily. Rémus n'était pas aveugle et connaissait bien son ami, même si ils n'en avaient jamais parlé. Il commença à grignoter le cône de sa glace, un petit sourire en coin.