J'ai fait un cauchemar (un garçon bien gentil qui voudrait la protéger ? ou pas)

Elle s'était réveillée en sursaut, les larmes coulant sur ses joues. Un sombre cauchemar l'avait hanté durant une bonne heure, et enfin, elle arrivait à s'en sortir en se réveillant. Les ronflements de Brittany et les machouillements de Gigi firent comprendre à Cherry que ses soeurs adorées n'avaient même pas entendu la détresse de la cadette.

Après un cauchemar pareil, il était impensable que Cherry puisse se rendormir ! Pour retomber dans cette horreur qui lui donnait encore de sueurs froides ?! Il fallait qu'elle trouve du réconfort dans les bras d'un mâle, un vrai ... des bras qui lui ferait penser à son père et qui lui permettrait de finir sa nuit.

Alors la belle blondinette se leva et fila dans le dortoir des garçons ... Il était difficile de savoir qui se trouvait où. Un petit amstram gram désigna le gars qui aurait pour mission de sécher ses larmes et de la protéger durant la nuit.

Elle se dirigea vers le lit qui lui avait été désigné par hasard et se faufila sous les couettes. Elle prit le bras du gars -dont elle ignorait l'identité- pour qu'il l'entoure à la taille et lui dit :

- " Sers-moi fort, j'ai peur ! "

Keith était sur son balai, en plein match. Sauf qu'à la place des joueurs de l'équipe adverse, il y avait les Rolling Stones. Non, pas les Stolling Rones, les Rolling Stones. Brian Jones avait ressuscité pour l'occasion. Dans son attirail de Quidditch, Keith observait le terrain à travers ses lunettes de vol. Il ne parvenait pas à voir les membres de son équipe à lui. C'est alors que Richards s'élança, le souafle en main, fit la passe à Bill Wyman, qui lui-même passa à Mick Jagger (et pas Jick Magger), qui regarda Keith droit dans les yeux et arma son bras pour tirer... C'est alors qu'un cognard le percuta de fouet: Luzia venait d'apparaître derrière lui, et batte en main, et elle l'avait mis hors-jeu pour de bon. Elle sourit de toutes ses dents à Keith. Récupérant le souaffle, il tenta de lui faire la passe, mais un cognard envoyé par Brian Jones mit le Nain Jaune hors-jeu. Il dégringola de son balai, vers le sol. Dans sa chute, un énorme serpent, Python version anaconda géant, s'enroula autour de sa taille et le serra de toutes ses forces. Keith en eut le souffle coupé. Il voyait le sol se rapprocher en plus, il tombait la tête la première...

Sers-moi fort, j'ai peur!

Il se réveilla avant le choc. Ce qui l'inquiéta d'emblée, ce n'est pas l'étrangeté du rêve qu'il venait de faire: c'est qu'il y avait bel et bien quelque chose autour de sa taille qui le serrait. C'était sérieusement angoissant: il y avait quelqu'un dans son lit. Et ce quelqu'un n'était pas un vieux gitan tombé de sa roulotte, ce quelqu'un sentait très bon, et ce que Keith sentait plaqué contre son dos appartenait sans aucun doute à un individu du sexe féminin. Il sentit le rouge lui monter à la tête instantanément. Il manqua de s'évanouir. Il y avait. Une fille. Dans son lit. Et visiblement, elle avait eu une frayeur nocturne. Keith était au bord de l'épilepsie. Il mit un moment à savoir quoi faire, quoi dire. Il tremblait de tous ses membres. Sa respiration était irrégulière. Il fit un effort surhumain pour trouver le courage de se retourner, et plaça lamentablement une main amicale sur l'épaule de la jeune fille qui le serrait de plus belle, histoire de mettre au passage un peu de distance entre eux. Il finit par fredonner doucement une chanson pour tenter de calmer la jeune fille (dont la tignasse blonde, parfaite, lui était familière, mais il n'aurait su dire dans le noir de laquelle il s'agissait), et de se calmer lui-même.

Close your eyes, and I'll kiss you, tomorrow I'll miss you; remember I'll always be true,
And meanwhile I'm away, I'll write home everyday, and I'll send all my loving to you...
[...]

C'est ce que sa maman, Mary Jane Burdon, lui chantait quand il faisait un cauchemar quand il était petit. Cette chanson était la plus réconfortante de toutes pour lui, associée à tellement de souvenirs chaleureux. Lorsqu'il se sentait triste, il l'écoutait, et ça allait mieux. C'est ce qu'il essaya de faire passer dans sa voix, lorsqu'il la chanta assez doucement pour ne pas réveiller les autres du dortoir qui dormaient. Il ne dit rien de plus.

♪

C'était juste trop mignon. On ne lui avait jamais chanté une chanson pour la calmer ou la bercer. Elle était tombée dans le meilleur des lits. Le garçon avait marmonné ces paroles qui semblaient être clair de sens. Et dans un sourire, Cherry ferma les yeux :

- " Tu vas m'embrasser, c'est ça ? " demanda-t-elle, plutôt emballée par l'idée. " C'est ce que dit la chanson, hein ? " ajouta-t-elle. Le jeune homme avait réussi à lui faire oublier l'affreux cauchemar qu'elle fuyait grâce à la chaleur qu'elle retrouvait dans ce lit, dans les ... bras ? du garçon. Il ne la prenait pas vraiment bien dans ses bras ! Il avait l'air plutôt timide, même !

- " Tu me sers pas, là ? Prends-moi dans tes bras ! " marmonna-t-elle. " Tu sais ? Faut que tu m'entoures de tes bras. Pour que je me sente protéger. Tu veux bien faire ça pour moi ? " demanda-t-elle par la suite, en se rapprochant de nouveau près du garçon. " Si tu sais pas comment faire, je te montre, hein ? Je peux t'expliquer, c'est pas compliqué. " finit-elle par dire, sans réellement laisser le temps au garçon de répondre à ses questions. Ben quoi ? C'était une Taylor, non ?

T'em--- t'embrasser?!!
Dieu du ciel, non!!! C'était une catastrophe!!! Et c'est là que Cherry se saisit des bras de Keith pour les mettre autour de sa taille. Keith avait l'impression que ses joues allaient prendre feu, littéralement, tant il était dans un état de gêne absolue. Il suffoquait même, car il avait du mal à respirer sous le coup de l'émotion. Heureusement qu'il n'était pas asthmatique, il serait sûrement mort sur le coup. Heureusement que Cherry avait la tchatche pour deux -voire plus, toute une armée même-. Keith se laissa faire, mou, incapable de bouger. Il tremblait comme une feuille sous le coup de l'émotion. Maintenant, lui et Cherry se regardaient dans le blanc des yeux. Il était incapable de dire quoique ce soit, il respirait bruyamment, son visage à quelques centimètres à peine de celui de Cherry... Ce n'est pas qu'il n'avait pas envie, non, Cherry était très belle, comme ses soeurs, et tout ça, mais... Keith n'osait pas, même moins que ça. Alors... Et puis c'était bizarre, il n'était pas du tout amoureux de Cherry, ni d'aucune des soeurs Taylor d'ailleurs. Donc, dans sa petite tête d'ado prépubert, encore trop naïf, les gentlemen n'embrassaient que leurs amoureuses. C'est qu'il vivait encore dans un conte de fée Keith. Oui, quelque part, il aurait bien aimé être le beau ménestrel qui chantait la sérénade à la princesse qu'il veut séduire...
Il planta son regard brun dans les yeux de Cherry, tentant d'arrêter ses tremblements, sa respiration bruyante, et son coeur qui battait la chamade, essayant de retrouver le contrôle de son corps. En vain. Il ne comprenait pas pourquoi les soeurs Taylor, de deux ans ses aînées, avaient décidé de le prendre comme ça sous leurs ailes. Pourquoi elles s'intéressaient autant à lui, lui, qui était persuadé d'être la personne la plus inintéressante de l'univers, qui n'était pas spécialement beau, ni charismatique ou viril. Elles méritaient mieux, beaucoup mieux, elles méritaient des Dowey, des mecs incroyablement bien roulés, autant qu'ils étaient gentils, qui les auraient rendues fières et heureuses, même en tant qu'amis.

Cherry avait remarqué l'état de panique de Keith, sentant qu'il tremblait sous la couette, les mains moites. Elle avait même l'impression qu'il blêmissait au fur et à mesure. Un petit sourire amusé se dessinait sur le visage de Cherry.

- " Toi, t'as jamais embrassé de filles, hein ? " lui fit-elle remarquer, étant tout d'un coup excitée à l'idée de pouvoir montrer comment faire à Keith et de lui apprendre les meilleures techniques. " Faut pas s'affoler comme ça, hein ? Y a rien de plus simple qu'un baiser ! " le renseigna-t-elle, se pensant être une grande experte à ce sujet !

- " Je peux être ta prof si tu veux. " lui proposa-t-elle, se sentant carrément dans son élément. Elle n'était pas la plus intelligente de toutes, mais à ce sujet, elle en connaissait un rayon.

- " ça t'intéresserait d'essayer ? " demanda-t-elle, les yeux grands ouverts d'expression. Oh, qu'elle adorait cette idée de partager le premier baiser de cette jeune recrue ! " On commence par le tout simple. Juste deux lèvres qui se touchent, hein ? " ajouta-t-elle, sans prendre encore d'initiative, attendant tout de même sa réaction ... Fallait pas l'effrayer, ce garçon !

...Keith tressaillit lorsque Cherry dit ce qu'elle venait de dire. Bien sûr qu'il avait déjà embrassé une fille, quelle question!... C'était pas une femmelette quand même!!! Ah, si?... Il avait déjà embrassé sa soeur Brittany même, mais ça, personne ne devait le savoir, et surtout pas les deux autres Taylor...
L'envie d'embrasser Cherry était physique. Elle sentait si bon, et elle était vraiment belle (tout le monde critiquait les Taylor parce qu'elles étaient au-delà du niais, mais personne ne pouvait nier qu'elles étaient magnifiques, de façon purement objective). Et puis elle avait du charisme aussi, une sorte d'aura qui faisait de l'effet sur Keith. Mais... L'image de Daithe surgit dans sa tête au moment où il s'y attendait le moins. Pourquoi est-ce qu'il pensait à elle dans un moment pareil? Elle n'avait rien à voir dans la situation. Mais pourtant, elle était là, bien là. Et Keith ne pouvait pas se défaire de son image. Ses petites tâches de rousseur, ses jolis cheveux et son regard déterminé... Elle l'impressionnait réellement, elle lui faisait peur même quelque part, mais il ne pouvait nier...

Non, c'était impossible.

Ça ne pouvait pas être ça.

Il avança sa tête vers Cherry et l'embrassa maladroitement. Mais pas à moitié. Son premier vrai baiser. Comme pour essayer de se prouver l'inverse que ce qui s'imposait comme une évidence dans sa tête.
Non, il n'était pas amoureux de Daithe. Il rejetait cette idée de tout son coeur.

Si Cherry s'attendait à ça !!! Keith venait de l'embrasser !! Il avait osé ! Ce jeune garçon timide qui tremblait comme une feuille à côté d'elle, avait osé faire le premier pas.

- " Et bien, Keith ! " s'était-elle exclamée, un grand sourire jusqu'aux oreilles. " Tu sais que d'habitude, pour un premier baiser, on ne met pas la langue ? " lui fit-elle remarquer, en le taquinant un peu. " Je savais que t'étais ce genre de garçon gourmand, hein ? " ajouta-t-elle, l'air taquin, lui touchant le nez du bout de son doigt, comme pour le titiller.

- " C'était pas mal, hein ? " lui avoua-t-elle. " Mais laisse moi te montrer comment mettre à la renverse une fille ! " dit-elle en s'approchant un peu plus du garçon. Elle déposa une main sur sa joue, l'autre dans les cheveux de Keith. Puis elle approcha ses lèvres des siennes, tout doucement, laissant monter l'envie, le désire ... Et enfin, leurs lèvres se touchèrent, et petit à petit, Cherry lui roula la galoche du siècle ! Sans se presser, elle y mit de l'attention et de la délicatesse, avant de quitter ses lèvres, rouvrant ses yeux pour le regarder dans le fond de ses prunelles.

- " Tu vois ? ça c'est un baiser ! " lui expliqua-t-elle, comme si elle lui donnait cours ! Elle retira lentement ses deux mains de son visage. " Allez, à toi. Montre-moi si t'as bien compris ! " finit-elle par dire, sérieusement, attendant que Keith montre ce qu'il savait faire !

Keith n'écoutait même pas Cherry. Et peu lui importait visiblement, car elle fourra à nouveau sa langue dans sa bouche sans attendre aucune réaction de sa part. Il se laissait totalement faire, aussi mou qu'une poupée de chiffon. Cherry plongea ses yeux dans les siens, mais lui, il était loin. Il ne savait plus quoi faire. Il ne se reconnaissait pas. Il pensait qu'il était malade, qu'il avait de la fièvre, mais on ne pouvait pas embrasser une fille comme il venait de le faire dans un état de maladie. Il n'avait même pas envie de pleurer, ni de rire, ni de quoique ce soit il savait juste qu'il était perdu. Que Cherry était là, près de lui, dans la réalité. Mais dans sa tête, il était ailleurs. Et le visage de Daithe le hantait. Il se rappelait de tout. De leur rencontre, de leur premier entraînement, et puis de leur angoisse partagée pour le premier match. Ses "Burdon maintenant tu te bouges!!!" résonnaient en lui comme la plus douce des paroles. Elle l'effrayait quelque part. Et même s'il ne voulait pas l'admettre, elle le fascinait et l'attirait. Et pour lui, c'était la plus jolie fille de Poudlard. Et même, il avait peur. Parce qu'elle ne l'aimait pas, il en était certain. Comment quelqu'un pouvait-il l'aimer? Jusqu'à il y a peu, il pensait que personne ne l'apprécierait jamais, à part sa famille. Et tout avait basculé, avec le Quidditch.
Mais ce qu'il refoulait du plus profond de lui-même, et qui pourtant était une évidence, aux yeux de certains de ses amis même, c'est ce qui lui faisait le plus peur. Ça le terrorisait. Il avait toujours été habitué à être spectateur du monde autour de lui, réagissant à ce qu'il se passait de façon assez neutre. Rarement il s'était senti triste ou en colère, et éprouver des vrais sentiments, il s'en pensait incapable. Combien étaient morts à cause de ça? Et même si c'était ça, l'amour et toutes ces choses qu'il sentait bouillir au fond de lui, même si c'était ça qui avait inspiré ses plus grandes idoles, et qu'il le comprenait maintenant, qu'il avait la preuve devant lui qu'il y avait bien quelque chose de plus magique que la magie, c'était trop, trop pour lui. Et s'il se trompait? Si il n'était pas amoureux de Daithe après tout? Parce qu'il n'avait jamais ressenti ça, pour personne. Et même s'il était amoureux, il se passerait quoi s'il n'était plus amoureux d'elle un jour? Sa vision naïve de tout ça l'empêchait de vivre ce qu'il avait à vivre. Il aurait voulu hurler, se libérer de tout ça, sortir du dortoir et hurler à Daithe et à tout le monde qu'il l'aim... Mais non. Toujours ce: "Et si?..." Et de toute façon, l'amour, ça faisait mal. C'était peut-être ce qui l'effrayait encore plus que de devenir acteur de sa propre vie. Il n'avait pas envie de finir en Roméo moderne alcoolique, se vidant les veines dans une baignoire ou un lavabo ou autrement, parce que celle qu'il aimait était partie. Et puis il restait Keith Burdon, et il était incapable de passer le cap de sa timidité qui lui faisait ton intérioriser. Il enrageait. Et la rage avait ce goût amer, et elle se retournait dans son estomac comme un serpent en train de ramper à travers tout son corps, incapable de passer ses lèvres. Cette rage était physique.
Alors c'est ça, l'amour? murmura-t-il à voix haute, pour lui même, comme si c'était une pensée, d'une voix neutre qui n'était pas du tout le reflet de son état de détresse, ignorant la présence de Cherry, et la réalité toute entière. Il était encore persuadé qu'il pouvait lutter contre ce qui lui arrivait, en se barricadant dans son esprit comme toujours quand il avait des problèmes.

HJ: