Prue avait quitté l'isoloir depuis une demi heure. Ses geôliers avaient été moins brutaux à sa libération. Elle avait toujours le bras cassé. Et chaque pas en direction du dortoir lui arrachait une grimace.

C'était l'heure du souper. Les couloirs étaient vides. Et Prudence n'avait pas la force d'aller rejoindre une foule d'élèves pour satisfaire la famine de son ventre. Son bras lui faisait bien trop mal. Elle s'était donc dirigé vers les dortoirs mixtes.

Elle s'avança vers son lit, mais c'est sur celui de son voisin qu'elle s'affala : celui d'Eden. Elle avait besoin de son aide. Lui seul pourrait lui fournir les soins dont elle avait besoin. Des perles de sueur coulaient à la racine de ses cheveux tellement elle avait dû fournir d'effort pour arriver jusque là. Elle ne voulait plus qu'une chose : oublier la douleur que provoquait sa blessure, ainsi que la conversation pénible qu'elle avait eu avec Regulus.

Si elle avait passé ces 24h dans l'isoloir, c'était pour lui. Elle voulait profiter de ces vacances pour lui ouvrir les yeux sur les actes impardonnables et immoraux des mangemorts. Et pour ça, il fallait que la victime soit une personne que Regulus aimait. Il ne pourrait ignorer la souffrance du Prudence, suite aux agissements des soi-disant compatriotes du Serpentard. C'était la seule solution. Et elle était persuadée qu'à force de persévérance, elle y arriverait.

En attendant, elle était recroquevillée sur le lit de son meilleur ami, en position foetale, le nez caché dans les couvertures. L'odeur d'Eden dans le tissu lui permettait d'arriver à penser à autre chose qu'à la douleur. ça l'apaisait. Elle avait besoin de son ami. Elle avait besoin de réconfort. Ces 24h n'avaient pas été si facile. Le plan qu'elle s'était fixé était loin d'être évident, et elle s'en rendait seulement compte ...

Eden avait raison d'élever la voix. La jeune Serdaigle se donnait du mal pour se faire punir et s'attirer les ennuis. ça paraissait stupide. En temps normal, Prudence aurait répondu au quart de tour, sur le même ton. Mais elle n'en sentait plus la force. D'un faible sourire, elle répondit dans un marmonnement :

- " Tu seras toujours mon héros, Eden Moriarty. " , insinuant qu'il la sauvait à chaque soin qu'il lui prodigait. Comment ferait-elle sans lui ?

Elle ne bougeait pas du lit de son ami, mais fit l'effort de relever la tête vers lui, essayant tant bien que mal de cacher cette mine où se lisait sa douleur, et ajouta dans un autre sourire qui manquait de conviction :

- " Je t'attendais. Aide-moi, s'il te plait. ça fait mal. "

Prue posa un regard sur son bras cassé. La douleur diminuerait qu'à partir du moment où les os seraient reconsolidés.
Elle avait fait exprès de ne pas parler de la raison qui l'avait conduite à l'isoloir. Elle avait effectivement provoqué les mangemorts, mais tout le monde ignorait encore de quelle manière ...

Tout lui raconter. C'était compliqué. Elle pouvait pas lui avouer qu'elle cherchait à se retrouver dans des situations où les mangemorts se sentiraient obligés de la punir ... juste pour convaincre Regulus qu'il s'était trompé de camp. Elle voulait lui ouvrir les yeux, et la seule façon était de se mettre en danger elle-même pour lui prouver que les méchants, c'étaient ceux pour qui Reg travaillait !
Ou alors, elle pouvait juste lui expliquer ce qu'il s'était passé, la raison pour laquelle elle s'était retrouvée de force dans l'isoloir.

Pendant qu'elle réfléchissait à ce qu'elle allait dire, Eden se concentra à soigner sa meilleure amie. Le moindre geste où il touchait la peau de Prue provoquait un moment de sérénité. Son contact était chaud et rassurant. Et Prudence aurait aimé qu'il garde sa main sur son bras jusqu'à ce qu'elle se sente mieux.
Mais Eden se redressa, une fois que les soins étaient terminés. Il attendait les explications de Prue. Cette dernière restait allongée sur le lit de son ami ...

- " Et bien ... je ... " avait-t-elle commencé avec quelques hésitations dans la voix. " J'ai voulu chiper de la bouffe des sangs purs. " avoua-t-elle soudainement. " C'était à la fin du repas, quand tout le monde était presque parti ... et je me suis fait prendre par un surveillant. " lui expliqua-t-elle en se retournant pour se mettre sur le dos. " Le surveillant a voulu que je lui rende ce que j'avais pris ... et que je file en salle de corvées. " poursuivit-elle, ponctuant par un soupire ... laissant un silence dans ses explications. Le regard d'Eden se faisait insistant, l'intimidant à terminer son récit.
- " J'ai fini par lui rendre ... en lui lançant dans la figure. " finit-elle par lâcher. " Il n'était pas content. " conclut-elle en affichant une moue embêtée. Elle s'attendait à ce que Eden lui fasse la morale ...

Prudence se mordilla la lèvre inférieure. Si Prue avouait à Eden qu'elle cherchait à ouvrir les yeux à Regulus, il risquerait d'intervenir. Même de prévenir Reg pour que Prudence arrête cette mission suicide. Elle ne pouvait pas prendre le risque.

- " J'ai juste fait ça pour Jeanne. " expliqua-t-elle. La petite Serdy de 13 ans, malade et clouée au lit ... Eden essayait comme il pouvait de lui administrer des soins. Mais ce n'était pas comme si il s'agissait d'une fracture.
Ce que Prudence ne disait pas, c'est qu'elle avait tout fait pour se faire pincer. Son objectif était d'atteindre Regulus !

- " Je vais essayer de me faire toute petite. Je trouve juste la situation injuste !! Je ne supporte pas de me faire marcher sur les pieds et de ne pas riposter. Tu me connais tout de même ? " avait-elle ajouté. Il y avait du vrai dans ce qu'elle disait. Prudence avait toujours eu cette témérité des Gryffondors. Beaucoup se demandait même ce qu'elle faisait à Serdaigle. Plus les années passaient, plus elle attrapait un caractère bien trempé. C'était une fonceuse qui réfléchissait ... elle était consciente des conséquences de ses actes, mais elle s'en fichait. Comme pour son ossature : ça passait ou ça cassait !