Avril 1979, Le Chaudron Baveur, Londres, Angleterre.

Un bruit de porte qui claque réveilla l’auror, qui pris de panique, tomba du canapé, pris au piège par le plaid traître, la baguette dans sa main qu’il pointa tout autour de lui. Mais il était seul avec pour unique compagnie les restes de son repas pakistanais dans une boîte tuperware. Une forte odeur d’épices embaumait le petit salon, rangé, hormis autour de l’îlot bordélique que formait le canapé et son occupant, grognant et les paupières encore collées.

- Ariena ! Ariena !

Il l’appela encore une fois, mais seul l’écho de sa voix lui répondit. Rien. Personne. Le vide, la solitude, le froid. C’était elle le bruit de porte. Avait-elle seulement cherché à le réveiller ? Probablement pas puisqu’il était rentré épuisé de sa garde, le visage hérissé d’une barbe de trois jours, il avait mangé, pas par plaisir mais par nécessité avant de se laisser tomber de fatigue dans le canapé. Mais le plaid, c’était elle. Il sourit à cette pensée, avant de se lever. Il y avait sur la table de la cuisine une part de gâteau qu’il engloutit avant de se faire couler un café corsé. Le thé très peu pour lui. Une heure s’écoula ainsi, entre de longs moments de glande totale et quelques rares sursauts d’activité. Une heure entière pour savoir si oui ou non il avait envie de rendre visite à ses parents. Ses parents… Mildred qui se noyait dans ses études de médecine pour oublier l’éclatement de leur famille. Oh non, il ne pouvait pas les laisser seuls, les abandonner. Alors il prit une douche brûlante, longue, se brossa les dents avec énergie, enfila des vêtements moldus propres, sa baguette plaquée à son avant-bras droit, comme toujours avant de transplaner pour le Chaudron Baveur. A peine arrivé il sentit quelque chose percuter son torse solide, par réflexe sa baguette se retrouva bien calée dans la paume de sa main, prête à réduire en poussière cette chose inconnue. Mais la chose n’était autre qu’une jeune femme qu’il reconnut aussitôt. La pauvre petite se retrouvait sur les fesses, probablement aussi surprise que lui. Gray lui tendit une main amicale pour l’aider à se relever.

- Rien de cassé Warnen ?

Spoiler:

Cela faisait trois jours qu’elle n’avait pas dormi. Trois jours, trois nuits qu’elle déambulait dans les rues de Londres, errant sans aucun but. Au début seulement, elle s’asseyait sur un banc lorsque ses pieds la faisaient souffrir à force de marcher. Mais très vite, ses souvenirs la rattrapaient. Comme si le fait de s’arrêter un instant réactivait son cerveau endormi. Ces trois jours, elle ne les avait pas vus passer. Le temps n’était plus rien. Le temps n’avait plus d’importance. Plus rien n’avait d’importance. Elber semblait évoluer dans une autre dimension. Tout lui semblait irréel, incroyablement nébuleux. Peut-être était-ce dû aux étranges pilules que le médicomage de Sainte-Mangouste lui avait administré à son arrivée. Elle avait bien fait de quitter l’hôpital. Elle n’avait pas besoin de toutes leurs cochonneries seulement bonnes à lui embrouiller l’esprit. Ce qu’elle voulait… Ce qu’elle voulait… La jeune fille s’arrêta devant le bar. Parfait.

Elber poussa la porte du Chaudron Baveur. De larges cernes bordaient ses yeux rougis. Son teint était livide, ses cheveux emmêlés. En croisant son reflet dans le large miroir du bar, elle eut l’impression de croiser un zombie. Un peu comme ceux des films que regardait son petit frère. En pensant à lui, les larmes montèrent immédiatement aux yeux de la jeune fille. Son petit frère était l’innocence même. Comment avaient-ils pu lui faire du mal… Lui qui n’avait jamais représenté la moindre menace pour quiconque. Les mangemorts n’étaient pas des hommes de cœur, elle s’en était aperçue lors des missions pour l’Ordre. Mais elle n’avait jamais imaginé que des hommes puissent être aussi cruels. Etait-ce un souvenir ou le fruit de son imagination, mais la jeune fille juste avant qu’on ne l’emmène de force à Sainte-Mangouste, avait entendu un auror dire à un autre que le père de famille, son père, avait été tué d’une manière particulièrement douloureuse et sadique. Selon cet auror, ce meurtre était signé. Par qui ? Elber n’avait pu entendre son nom… La sorcière ferma les yeux. La voilà qui se remettait à penser, à ressasser les évènements survenus il y a de cela trois jours. Il lui fallait un verre. Peut-être n’était-ce pas la meilleure des choses à faire, mais qu’importe. Il lui fallait un verre.

La jeune fille fit trois pas en direction du comptoir. Une seconde plus tard, elle se retrouvait par terre, légèrement sonnée. Elle venait de percuter quelque chose. Quelqu’un plutôt.
-Rien de cassé Warnen ?
Magnus Gray. Auror et membre de l’Ordre à ses heures perdues. Elber avait pu le croiser à plusieurs reprises lors de missions, de réunions ou de bals organisés par le ministère. Mais jamais dans un bar. Elle accepta son aide pour se relever et rajusta sa cape sur ses épaules.
-Ça va. Lâcha-t-elle d’une voix blanche. Son regard évita celui de l’auror pour aller se poser sur le comptoir. Je vous offre un verre ? Deux whisky pur feu, lança-t-elle au patron sans attendre de réponse de la part de Magnus.