Fluvia avait retrouvé Niclas mais... après quelques chansons, elle l'avait perdu. La foule, déchaînée, semblait de l'intérieur à une tempête. Ses mouvements étaient comme des vagues successives et aléatoires. Bientôt, la jeune femme fut arrachée de son fiancé et de ses cousins. Encore sous l'influence de la substance magique qu'elle avait prise - et des verres d'alcool qu'elle avait ingurgités - elle ne parvint pas à les retrouver.
La nuit était tombée et les lumières magiques se reflétaient sur le ciel. Le concert n'avait plus aucun intérêt pour elle si elle était seule. De plus, après avoir sauté partout en rythme avec la musique rock, Fluvia se sentait fatiguée. C'est pourquoi, après être sortie du magma humain qui s'agglutinait devant la scène, elle se dirigea vers le camping. Mais déjà, l'air frais lui fit du bien et, guillerette, elle exécuta quelques pas de danse. Elle avait passé une bonne soirée et avait de la musique plein les oreilles. Elle avait décidé d'attendre Daisy dans sa tente. Elles retrouveraient ensuite Rohan, Thomas, Azelma et Niclas pour terminer la soirée.

Mais rien n'arrive comme on le prévoit. Elle vit se détacher dans la nuit la silhouette athlétique de Brankovitch. Manifestement, il venait pour la musique, les cheveux encore mouillés.
▬ Tiens tiens, persifla-t-elle en dévoilant un sourire goguenard, en voilà un qui n'a pas bien compris les horaires du festival. Tu as loupé une bonne partie du concert, mec.

Mais parler et marcher en même temps exigeait trop d'effort pour l'état dans lequel se trouvait l'héritière. Elle tituba et retrouva son équilibre de justesse. Mince... Maximus avait désormais de quoi la charrier...

Brankovitch ne se laissait jamais abattre par une pique, tout aussi brutale fût-elle. Il arrivait même à renverser la vapeur, de façon à ce qu'il conservât l'avantage.

▬ Cesse de reprendre mes mots, gloussa Fluvia qui riait à l'idée qu'elle devait offrir un spectacle bien différent qu'à Poudlard.

Qui l'eut cru, en effet ? Fluvia Avery ne maîtrisait plus grand chose : même le fait de mettre un pied devant l'autre relevait d'une grande agilité !
▬ Je m'amuse, ajouta-t-elle, il n'y a rien de mal à cela.

C'était un peu comme un enterrement de vie de jeune fille. Tous les excès étaient permis !

▬ Que fais-tu donc seule à cette heure tardive de la nuit, reprit Maximus. Tu risquerais de tomber sur le grand méchant loup ...
Fluvia arqua un sourcil. Croyait-il qu'il parviendrait à lui faire peur ?
▬ Oh, fit-elle en s'approchant de lui. Du grand méchant loup, je n'en fais qu'une bouchée.

Sa réplique fut ponctué par un frisson - qu'il faisait frais la nuit, loin de la foule enfiévrée... !

Dès qu'elle avait montré qu'elle avait froid, Maximus s'était aussitôt posté à ses côtés, enveloppant ses épaules de son bras musclé. Une bonne odeur de savon aux agrumes chatouilla les narines de Fluvia, se tournant vers le jeune homme, songea qu'il était bien plus musclé que Niclas. Elle se sentit soudainement petite et, en même temps, en sécurité.
Elle ne dit rien pendant quelques secondes, comme si la proximité avec Brankovitch l'avait désarmée de son attitude bravache. Une petite voix au fond d'elle lui murmurait que ce n'était pas normal et qu'il fallait vite qu'elle trouve quelque chose à lui répondre. Mais rien.
Au contraire, elle colla son flanc contre celui de Maximus, subrepticement, et leva les yeux vers ses cheveux mouillés, résistant à l'envie d'y passer la main.
▬ Viens, l'invita le Capitaine des Jaunes, je vais te ramener dans ta tente, tu as l'air frigorifié …

Dans son brouillard, elle nota un changement dans sa voix. Elle était plus douce et bien moins taquine que celle à laquelle elle était habituée. Ils marchèrent donc vers là où venait Maximus. Fluvia lui en était grée de la guider ainsi. Elle savait qu'elle aurait fini par trouver sa tente - mais qui savait combien de temps elle aurait mis ? Là, elle n'avait qu'à se laisser guider par le Poufsouffle et se contenter de respirer son odeur masculine.
▬ Ohoh, fit-elle, recouvrant la parole, tu as repéré où était ma tente ?

En soit, localiser la tente de Fluvia Avery n'était pas compliqué : elle était grande et, régulièrement, des amis de Père venaient lui rendre visite pour s'assurer que tout allait comme elle le voulait. N'empêche, l'idée que Brankovitch sût où elle habitait lui plaisait.
Quelque chose craqua sous son pied.
▬ Oups, je crois que j'ai écrasé un escargot...

L'héritière se pencha en avant, se libérant de l'étreinte de Maximus, et tenta de repérer la pauvre bête aplatie. Hélas, il faisait trop sombre et elle abandonna. Quand elle se redressa, elle était tout proche du jeune homme - encore plus que tout à l'heure.
▬ Tu sens super boooon, tu savais ?
Et comme happée par les effluves de parfum, elle se mit à respirer le cou de Maximus, effleurant sa peau du bout de son nez.

Elle se sentait si bien collée contre un Maximus rassurant et protecteur. Il avait enserré sa taille de son bras et elle le sentait jouer avec des mèches de ses cheveux. Déjà, elle se sentait moins assurée sur ses jambes, comme si les papillons qui lui chatouillaient l'estomac lui faisait perdre son équilibre.
Maximus dut le sentir puisqu'il glissa un autre bras sous les genoux de l'héritière et la souleva du sol comme si elle ne pesait guère plus qu'une pile de linge repassée.
▬ Ahaha, mais que fais-tu ? dit-elle d'une voix suraiguë.

Sa tête lui tournait et elle mit quelques secondes à s'habituer au changement de latitude. Quand ce fut fait, elle était dans sa tête, les deux pieds sur terre, devant un Brankovitch un peu amusé.
▬ Voilà ! La princesse a rejoint ses quartiers !

Si Fluvia affichait jusqu'à présent un sourire candide, ses lèvres s'étirèrent en une moue féline tandis que son regard devint davantage perçant. Elle avait cru voir le jeune homme esquisser un mouvement de retrait vers l'ouverture de la tente. Or, Fluvia se sentait chaude comme la braise et ne se voyait pas finir la soirée seule. Tous ses excès avaient stoppé toute fonction nerveuse rationnelle dans son cerveau.
▬ Tu pars, demanda-t-elle dans un souffle.

Mais elle ne lui laissa pas le temps de répondre et, le saisissant par le col de sa chemise, elle l'attira à elle avec une force qui ne pouvait que venir de l'étrange potion qu'elle avait ingurgitée quelques temps plus tôt.
▬ Je ne t'ai pas autorisé à t'en aller.

Elle scella leurs bouches dans un baiser fougueux et, titubant toujours un peu, elle entraîna Brankovitch dans l'obscurité de sa tente.

Spoiler:

Enveloppée dans sa torpeur, la jeune Fluvia se sentait bien. Son esprit, avec l'excitation de la journée, se trouvait paisible, à présent. Son corps reposait sur le moelleux matelas de plumes.
Elle rêvait encore, elle le savait. Comment expliquer la présence de ces bras musculeux qui l'entouraient ? Comment expliquer l'effleurement régulier de son dos contre un torse puissant ? Si c'était ça, l'amour, Fluvia en avait un charmant avant-goût avant son mariage. Elle s'endormit de nouveau.

Autour des deux corps enlacés dans la chambre improvisée de Fluvia, le jour se levait doucement. Le camping était silencieux, mais c'est la lumière qui fit émerger l'héritière de son sommeil. Les yeux clos, et l'esprit tout à son rêve sensuel, elle s'étira.
C'est alors qu'elle sentit que, contre elle, l'on bougeait également. Elle ouvrit les yeux, son cœur s'emballant dans sa poitrine. Elle rêvait encore, ce ne pouvait être possible. Fluvia s'assit et se tourna. En découvrant le visage de son amant, elle plaqua sa main contre sa bouche et rabattit la couverture sur sa poitrine. Alors, tout lui revint en mémoire. L'élixir, l'euphorie, Niclas, Daisy et... les caresses et les baisers de Maximus.

Ce dernier dormait profondément, sa tête abandonnée sur l'oreiller, des traces de draps parcourant son torse découvert. Fluvia se leva, s'enroba dans une couverture et, le pas hésitant, elle s'approcha d'un verre d'eau qui traînait sur sa coiffeuse depuis la veille et jeta son contenu au visage de Maximus.
▬ Tu prends tes affaires, lui ordonna-t-elle avec la dignité qui lui restait, et tu te barres. Sans bruit.
Hors de question que Daisy le croise en se levant pour déjeuner.

Le bel Adonis, suavement étendu sur les draps, eut un sursaut énorme quand Fluvia le réveilla brutalement. Ses yeux clignotants sous la lumière matinale, il eut tôt fait de s'habiller un minimum, un air d'incompréhension total fiché sur son visage.
Fluvia le regarda faire, les bras croisés sur sa poitrine, le regard aussi froid qu'un métal pouvait l'être après avoir passé la nuit dehors. Au lieu d'être en colère contre elle-même, elle l'était contre Maximus - comme si elle ne semblait pas savoir qu'il fallait, pour ce genre de choses, être à deux.

Comble de l'ironie, son amant improvisé reprit du poil de la bête et s'approcha d'elle, guère plus troublé que s'il s'était agit d'une situation ordinaire.
▬ Tu es bien pressée que je m'en aille...
Comme il levait la main pour lui effleurer la joue, Fluvia saisit au vol son poignet et l'empêcha de poursuivre son mouvement.
▬ N'essaye même pas, murmura-t-elle.

Elle ne put en dire plus car, au même moment, l'héritière prit conscience de la situation dans laquelle elle était. Qui pouvait se vanter d'avoir anticipé sa nuit de noce, qui plus est avec un autre que son fiancé ? Que dirait Niclas ? Que dirait Père ?
À ces pensées, elle sentit qu'elle allait pleurer.
▬ Pars, demanda-t-elle de nouveau en reprenant un ton impérieux. Et ne dis à personne ce qu'il s'est passé.

Cela aurait étonné la jeune femme si Brankovitch s'était rendu à son avis et avait débarrassé le plancher aussitôt. Certes, il s'éloigna d'elle pour se rhabiller, mais ses paroles indiquèrent qu'il n'était pas prêt de la quitter.
Tandis qu'il enfilait son pantalon court, elle s'efforçait de ne pas le regarder, lui et ses pectoraux saillants. La vue de son corps parfait faisait surgir dans l'esprit de Fluvia des souvenirs de la nuit passée. Souvenirs délicieux et torrides, mais dont elle était honteuse.

▬ Ton mariage avec Travers est fichu tu ne pourras plus jamais m'oublier...
Les paroles du Poufsuffle résonnèrent à ses oreilles et l'achevèrent. Fluvia, toujours enveloppée dans son plaid, se laissa tomber sur le lit en désordre, consciente d'offrir à un tiers une image pitoyable. Elle était pourtant sans force pour le moment.

Cette faiblesse ne fut que passagère - une Avery ne se laissait jamais abattre sans avoir blessé grièvement son adversaire. Elle se leva, se posta devant sa coiffeuse et entreprit de remettre de l'ordre dans ses boucles blondes. Lorsqu'elle se retourna vers son pseudo-amant, ses pupilles étaient dénuées de chaleur et sa bouche formait un rictus méprisant. Elle se leva et dit sur un ton tranquille :
▬ Mieux vaut pour toi que l'on se taise. Comment crois-tu que réagiront Niclas et Père s'ils apprennent la nouvelle ? Et s'ils savent que je n'étais pas pleinement moi-même...

Fluvia fit mine de vérifier sa manucure, laissant égrener quelques secondes le temps que sa question fasse de l'effet.
▬ Probablement qu'ils me tueront. Et toi aussi, d'ailleurs. Tu auras touché à la fille de Tiberius Avery et, crois-moi, tu ne pourras résister à sa colère...

De nouveau, elle darda ses yeux sur Maximus. Allait-il enfin se bouger ?