C’est la tête dans le coton que Maya débuta cette nouvelle semaine. Nouvelle semaine qui, elle le savait, ressemblerait fortement à toutes celles qui venaient de s’écouler. Une certaine routine avait envahie sa 7ème année qu’elle n’avait, au départ, pas du tout imaginer de cette manière. Son couple avec Alexandre avait pris de bonnes marques et elle était plutôt épanouie dans sa nouvelle idylle, bien que très possessive et jalouse. Elle n’avait pas du tout été la même avec Arthur et ne comprenait pas ses réactions. Entre les ASPIC et son couple, elle devait l’avouer, Maya n’avait pas été la meilleure des copines ces derniers temps. D’ailleurs, elles lui manquaient et elle ne savait pas comment remédier à ce problème. Devait-elle se couper en deux ? Etablir un planning ? Utiliser un sort de clonage ? (même si elle l’avait voulu, elle n’aurait pas réussi de toute manière). Elle n’était pas au mieux de sa forme et l’hiver qui s’éternisait n’arrangeait pas son humeur.

Comme tous les jours, elle traîna à sortir du lit regrettant amèrement de ne pas s’être couchée plus tôt, défit les tresses qu’elle s’était faite la veille pour gagner du temps, enfila son uniforme préparé minutieusement sur la chaise de son bureau, passa rapidement par la salle de bain, traversa la salle commune et les couloirs pour finalement rejoindre la Grande Salle, tout ça sans adresser la parole à quiconque, on était quand même le matin.
Depuis longtemps, elle n’avait pas prêté attention à la petite balle mise en place quelques semaines plus tôt avec Delilah qui leur permettait de se faire savoir si l’une ou l’autre avait un besoin particulier, ou non, de parler. Et la poufsouffle comme les autres n’avait pas échappé à la vague de snobisme qui avait dévasté la Andrews. La situation aurait pu rester la même, les jours s’enfilaient à folle allure et elle ne pouvait pas être la seule à en être victime, mais aujourd’hui serait un autre jour.

En général, elle prévoyait sa brosse à dents dans l’une de ses poches et filait dans les toilettes du deuxième étage pour ne pas avoir à repasser par son dortoir. Pourtant, le destin semblait vouloir lui faire passer un message. Lorsqu’elle se rendit compte qu’elle ne l’avait pas, elle ne put l’ignorer, le passage à la salle commune était une obligation qu’elle ne pouvait plus contrer. A toute allure, enfin ce qu’elle pensait être une vitesse grand V alors qu’elle avait plutôt intérêt à se remettre à la course, Maya fit le chemin inverse qu’elle avait parcourue plus tôt et se retrouva assez vite dans le repère des aigles.

Elle ne devait, logiquement, perdre que quelques minutes, 5 tout au plus mais un objet sur sa table de nuit attira son attention comme il ne l’avait pas fait depuis bien longtemps. Delilah avait besoin d’elle. Maya fut immédiatement prise de ce sentiment de culpabilité vis-à-vis de son amie et confidente. Depuis quand la balle était-elle rouge ? Avait-elle été si indigne ? Son cœur se mit à battre dans la veine de son cou et elle n’hésita pas une seconde de plus. Elles avaient cours en commun à la première heure ? Tant mieux, elles allaient faire binômes et zut pour la théorie.

En entrant dans la classe, Maya repéra directement le bureau idéal pour qu’elles puissent se confier et courut s’y installer avant que cet idiot de Moran n’ait la bonne idée de lui voler pour le simple plaisir de l’embêter. "Delilah ! Hé ! Tu t’installes à côté de moi ?" l’interpella-t-elle lorsque la concernée franchit le seuil de la porte. Ce n’était peut-être pas l’endroit le plus adapté mais s’il y avait urgence, il conviendrait.

Maya n’en montra rien mais elle fut soulagée que Delilah accepte de venir à ses côtés. Elle avait conscience d’avoir un peu de retard du côté de l’amitié et espérait que le besoin de parler de la poufsouffle n’était pas lié à un incident grave. Pourtant, une sensation étrange lui envahit le ventre et elle se douta aisément que la couleur de leur balle de communication voulait tout dire. La culpabilité qu’elle avait éprouvé en remarquant l’objet illuminé le matin même lui revint en pleine figure et elle dû prendre sur elle pour ne pas immédiatement se répandre en excuses. « Et j’ai hâte d’entendre tout ça… » lui répondit-elle curieuse de savoir ce qui pouvait bien se passer dans la vie de son amie. Mais bien vite cette dernière lui fit comprendre que ses histoires ne respiraient pas joie et bonne humeur. Maya fronça les sourcils tout en hochant la tête. « Je suis vraiment désolée qu’on ait pas trouvé de moments pour discuter ces derniers temps… commença-t-elle avec la certitude d’avoir manqué à son devoir de copine, tout s’est enchaîné tellement vite et je… j’ai… » Elle ne termina pas sa phrase, incapable de trouver une excuse digne de ce nom. Le temps était passé très vite certes, mais elle se connaissait et savait pertinemment qu’elle aurait pu se libérer. Quand elle croisa le regard du professeur, elle fit mine de griffonner quelques notes sur son parchemin même si celui-ci ne semblait pas leur porter la moindre attention. Elle pivota légèrement vers Delilah. « Qu’est-ce qu’il se passe ? » lui chuchota-t-elle avant d’attacher son épaisse masse capillaire en une queue de cheval. S’il y avait des problèmes, il y avait sûrement des solutions et elle réfléchissait mieux les cheveux attachés.