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Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO

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Raven Fawkes

Raven Fawkes


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MessageSujet: Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO 129196351Dim 12 Mai 2019 - 23:24

1975

L’année scolaire touchait bientôt à sa fin avec son lot d’examens, de dossiers à rendre et d’inscriptions à faire. Ce passage à Poudlard lui avait fait du plus grand bien et elle avait pu renouer un peu avec les racines de sa jeunesse. De ses trois racines, il n’en restait plus qu’un, Asterion. Un ami fidèle sur qui elle avait toujours pu compter. Aaron et Carolyn aussi bien sûr, mais le groupe qu’ils avaient formé avec Marianne, Eliott et Asterion était… spécial. Toutes leurs histoires étaient nées de là, leurs amours aussi. Le plus sinistre avait été de retourner sur ce banc, sous le grand arbre du Parc. Sinistre car ils avaient été si heureux à cette époque-là. Sinistre car aucun des quatre élèves n’aurait pu se douter un seul instant de tout ce qui allait survenir à leur sortie de Poudlard. Le destin avait été bien cruel de leur donner un tel espoir, de leur faire croire que cette joie et cette béatitude allaient durer éternellement. La vie n’était pas comme ça, l’auror l’avait bien compris depuis. Elle l’avait encore mieux compris après le Musée. Rien n’était éternel, mais la souffrance et la douleur laissaient des marques indélébiles. La paix n’était qu’un lointain souvenir nostalgique, et là venaient les tourments.
Son tourment à elle était un masque de fer. Un masque avec une voix d’homme qui était venu avec une vérité bien trop lourde pour qu’elle puisse continuer à se battre, elle l’infaillible auror. Raven l’avouait, elle avait abandonné, dans ce couloir. Elle avait été lâche, cette même couardise dont elle avait fait preuve, enfant, face à sa grand-mère. Un masque et un fantôme dont la sorcière avait besoin de se débarrasser.
Raven devait en être à sa cinquième séance avec Artemis Croupton. Les deux femmes ne dépassaient pas le cadre professionnel, mais il était évident qu’elles s’appréciaient bien. Si les progrès de l’auror étaient infimes, ils étaient pourtant bien présents. Guérir des blessures ouvertes il y avait plus de trente ans allait mettre du temps, mais l’aînée Fawkes avait décidé de reprendre sa vie en main suite aux bons conseils du Médicomage Dearborn qui lui avait conseillée la rousse. Elles y allaient pas à pas. Ce n’était toujours pas facile pour elle de s’ouvrir, mais la sorcière brune avait commencé depuis peu à faire de réels efforts. C’était assez encourageant.
En fermant la porte derrière elle, la veuve se dit que, tout compte fait, les choses allaient finir par rentrer dans l’ordre. Qu’elles en avait mis du temps, mais que tout allait finir par s’arranger. Aussi petit l’espoir était-il, elle avait récemment appris à le conserver.
Ses talons claquèrent sur le sol de Sainte Mangouste, et quelques minutes plus tard, elle se retrouva dans le hall de l’hôpital, réajustant son blazer blanc crème. Raven avait pris sa journée, pour une fois. Qu’allait-elle faire à présent ? Traîner dans les rayons de Madame Guipure ? C’était sans doute ce qu’il y avait de mieux à faire. Personne ne l’attendait chez elle. Tout le monde travaillait. La sorcière sortit du bâtiment, mais au moment où elle s’apprêtait à transplaner, elle aperçut un homme en train de fumer qui lui semblait familier. Intriguée, Raven s’approcha de lui et le reconnut aussitôt. Difficile de passer à côté d’un tel personnage.
– Monsieur Vacaresco, salua-t-elle en souriant poliment, quelle surprise de vous revoir ici.
 
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MessageSujet: Re: Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO 129196351Lun 13 Mai 2019 - 13:51

Le patronus qui illuminait la chambre de Razvan Vacaresco éclairait la pièce d'une lumière si vive que le médicomage mit plusieurs longues secondes à se concentrer sur le message que le buffle était venu lui délivrer. Une urgence. A l'hôpital. A quatre heure moins dix du matin. Lorsque l'animal lumineux disparu en ne laissant que quelques particules brillantes à l'endroit où il se tenait, le roumain sauta de son lit pour aller dans sa salle de bain s'éclabousser le visage avec de l'eau. Moins de dix minutes plus tard, il avait sa fille endormie dans ses bras et il transplanait pour la maison de la sorcière à qui il laissait toujours Mihaela. Elle fut surprise de le voir et il s'excusa assez largement de la déranger si tôt. Mais il n'avait pas vraiment le choix. Razvan ne pouvait pas amener sa fille dans un endroit infesté par les bactéries et les mourants, tout comme il ne pouvait décemment pas ne pas se rendre à Sainte Mangouste sans l'avoir déposé chez quelqu'un avant. Il y travaillait, et lorsqu'il avait signé son contrat, il savait à quoi il s'engageait. Tout serait malheureusement plus simple s'il n'était pas un père veuf. Hélas, on n'a pas toujours ce qu'on veut. C'était ce qu'il se répétait toujours pour garder la tête sur les épaules et pour ne pas craquer devant une énième crise de larme de sa fille de trois ans. De la maison de la sorcière, il prit le réseau des cheminées pour arriver à l'hôpital sorcier.

La journée fut anormalement longue. Les cas les plus bizarres et stupides défilaient devant ses yeux blasés par tant d'inconstance et d'imprudence. Que cela soit le duel qui avait mal tourné entre deux ivrognes dans un café moldu, ou bien les deux équipes de Quidditch amateur de l'Île de Man qui en étaient venus à croiser la baguette pour départager le match - apparemment incroyable de ce qu'on lui avait dit ! -  ou encore l'aventurier téméraire qui s'était retrouvé devant un sorcier indien et qui avait faillit perdre son œil pour l'avoir insulté sans le vouloir, définitivement, c'était une journée bizarre. On le libéra trois heures avant la fin de son service habituel comme il était sur place depuis quatre heures du matin.  Vers quinze heures, Razvan se retrouva donc à fumer son cigare devant l'entrée de l'hôpital avant d'aller récupérer Mihaela chez sa nounou sorcière qui habitait non loin de là. On pouvait largement dire que le roumain prenait son temps pour fumer. Déjà parce qu'il ne voulait pas fumer chez lui et qu'il n'en profitait pour le faire que lorsqu'il finissait son service et donc, lorsque que son petit monstre n'était pas dans les parages. Adossé contre le mur, les jambes croisées, une légère brise traversait la rue sans apporter avec elle une quelconque fraîcheur. Le temps devenait de plus en plus chaud en Angleterre, bien que tout reste relatif par rapport aux pays du sud de leur continent. Pourtant, il ne pleuvait pas. Razvan ne s'était jamais vraiment habitué aux températures d'ici, mais il fallait bien dire qu'il ne s'était pas habitué à grand chose. Sauf peut-être la langue. Et encore, tout était relatif. Il suivait vaguement les patients qui sortaient de l'hôpital du regard, avant de détourner la tête pour regarder ce qu'il fumait. Ce n'était définitivement pas conseillé par la médecine de leur époque. Est-ce qu'il en avait quelque chose à faire ? Non, en fait. Il fumait depuis des années et cela s'était aggravé lorsque sa femme était morte. il n'y pouvait pas grand chose. Le médicomage en était à la moitié de son cigare lorsqu'une voix terriblement familière le sorti de ses pensées. Le roumain tourna la tête vers sa propriétaire pour qu'un sourire amusé égaie son visage aux traits durs d'Europe de l'Est  : « Une surprise ? Je crois que je devrais l'être plus que vous » souligna-t-il malicieusement avant d'ajouter, « j'y travaille ». Il accompagna ses mots d'un coup de tête en direction de l'hôpital qui se trouvait derrière eux. Il tira une taffe avant de détourner la tête pour souffler la fumée qu'il venait d'avaler autre part que sur le beau visage de Raven Fawkes. « Vous allez bien depuis la dernière fois que l'on s'est croisé ? » demanda gentiment le roumain en reportant son attention sur la sorcière qui sortait de l'hôpital sorcier. Razvan ne lui demanda pas ce qu'elle y faisait et il ne comptait pas le faire. C'étaient là des questions indiscrètes qu'il fallait garder pour soit, il ne l'avait que bien trop souvent constaté en travaillant auprès de mourants. De toute façon, ils ne se connaissaient pas assez pour qu'il se permette ce genre d'écarts. Un verre offert à Pré-Au-Lard ne créait certainement pas d'amitié immédiate, qu'ils se sentent à l'aise en la présence de l'autre, ou non.


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MessageSujet: Re: Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO 129196351Lun 27 Mai 2019 - 23:11

Raven n’était pas du genre à se lier d’amitié facilement avec les autres. Tout d’abord, elle se méfiait. La méfiance. Le maître-mot de leur communauté depuis un certain temps maintenant. Faire confiance était devenu une véritable épreuve de force mentale et l’accorder à quelqu’un voulait aussi dire mettre un pied dans la tombe. Son métier l’obligeait à garder son sang-froid et à sociabiliser – si l’on pouvait réellement de sociabilisation – tout en restant sur ses gardes, mais il était évident que toute personne lambda serait restée cloîtrée chez elle si elle avait vécu les mêmes événements que la sorcière. Il ne fallait pas craindre de se faire avadakadevriser à chaque coin de rue, et même si la guerre ne pouvait empêcher les gens de continuer à vivre leur vie, on pouvait sentir une certaine tension dans les commerces et dans les différentes institutions. L’incident du Musée avait laissé une telle trace sur une grande partie de la population ; voilà longtemps qu’une attaque terroriste de cette envergure n’avait pas eu lieu en Grande-Bretagne. Ces nouveaux mages noirs n’avaient peur de rien maintenant qu’ils avaient goûté à l’impuissance des défenseurs de la paix. Les aurors devaient passer pour des faibles, mais ils étaient si peu nombreux face à leur ennemi qui montait en nombre. Cette situation était à double tranchant : le Bureau avait besoin de recrues, mais il ne pouvait se permettre de baisser les exigences des concours pour que le niveau reste le même. Sauf qu’il n’y en avait pas beaucoup qui, par promotion, réussissait les examens. Ils se retrouvaient donc bloqués.
Les aurors attendaient les nouvelles directives maintenant que Vince et Jenkins avaient démissionné. Les élections allaient bientôt avoir lieu, et sans parler de savoir pour qui elle allait voter, Raven se demandait qui allait être à la tête du Département de la Justice. Le vieil homme qui s’y trouvait prévoyait de partir à la retraite, selon la rumeur. Aaron allait succéder tout naturellement à Vince, selon la tradition, mais il restait à savoir qui allait lui succéder à lui. Raven voyait là une opportunité qui se présentait, mais elle ne se faisait pas trop d’illusion. Ces hautes zones hiérarchiques étaient principalement réservées aux hommes, et Alastor Maugrey, qui était un confrère extrêmement compétent, possédait tout à fait le profil requis pour ce poste. Et de toute façon, l’aînée Fawkes n’avait pas vraiment la tête à ça. Son cœur était trop occupé à refermer de vieilles blessures pour l’infecter de grosses responsabilités comme l’exigeait le poste de sous-chef. Dans quelques mois, années, peut-être. Aujourd’hui, elle ne s’en sentait pas digne.
– C’est ce que j’avais cru comprendre lors de notre première entrevue.
Elle avait fait la rencontre de cet homme quelques mois plus tôt, et il fallait bien s’avouer que son personnage l’avait bien intriguée. Raven était bien souvent davantage touchée par ce que dégageait la personne et moins par ce que ladite personne pouvait bien raconter. Les yeux, aussi, en disaient beaucoup. C’était peut-être ça qui avait le plus marqué la sorcière. Ce que son regard avait révélé la dernière fois. Une petite pointe de douleur, un peu similaire à la sienne. Parfois, le monde était si petit que l’on rencontrait des personnes qui avaient vécu la même chose que vous. Ces cas-là étaient rares, mais bien possibles.
– Très bien, je vous remercie, mentit-elle en regardant au loin. Raven ne tenait pas particulièrement à ce qu’il sache qu’elle sortait tout juste d’une séance avec la psychomage rousse du nom d’Artemis Croupton, ni qu’elle était en reconstruction depuis des années. Maintenir l’illusion que tout allait. Parfaitement. Bien. Et vous ? Travailler à Sainte Mangouste ne doit pas être facile tous les jours, retourna-t-elle la question en regardant son profil.
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MessageSujet: Re: Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO 129196351Mer 29 Mai 2019 - 2:09

Razvan Vacaresco était un homme solitaire. La solitude n'amenait ni la tristesse, ni les ennuies, pensait-il innocemment. L'on ne s'attachait à personne pour ne pas souffrir par la suite, l'on se préservait donc de l'incertitude de l'avenir et de la violence qu'elle pourrait amener avec elle. Il avait bien quelques connaissances, des presque amis pourrait-on dire, mais le roumain veillait en réalité à ne pas trop se rapprocher de n'importe qui. Il observait, comme un oiseau de proie, les personnes dignes de son intérêt. Lorsque Raven Fawkes avait pénétré dans le pub de Pré-Au-Lard ses yeux sombres avaient aussitôt été captivés par elle, sans qu'il ne trouve d'autre raison logique que celle qui consistait à dire qu'elle avait un air à sa défunte femme. Elle ne lui ressemblait pas vraiment, c'était plus comme une prestance, une présence. Étrange sentiment que celui qu'il avait ressenti ce jour-là. Il essayait toujours de mettre des mots dessus, et il en était venu à la conclusion que seule la mélancolie lui faisait ressentir de pareils sentiments face à une étrangère. La conversation qu'ils avaient eut tous les deux ne l'avait pas plus aidé. Dans les yeux bleus de la sorcière, il avait cru y lire des choses si similaires à ce qu'il montrait lui-même dans son regard qu'il en avait été quelque peu circonspect. De la souffrance. Quelque chose qu'ils revivaient sans arrêt, un moment du passé qui les hantait. Tout le monde avait à souffrir de son passé. L'intensité était néanmoins différente, et Razvan ne croyait pas se méprendre en disant que celle qu'ils ressentaient tous les deux était très violente. La mort de sa femme avait semblé faucher sa vie de la même manière que la sienne. Elle n'avait guère plus de goût, cette vie qu'il vivait par procuration uniquement pour sa fille. Elle était la seule raison qui expliquait non seulement sa présence en Angleterre mais aussi la raison pour laquelle il respirait toujours. Pourquoi serait-il parti de Roumanie si ce n'était pas pour protéger la vie de sa fille ? Razvan était parti à cause des russes, mais s'il n'avait pas une bonne raison de vouloir rester en vie, il aurait été arrêté et très probablement tué quelque part en Russie. Mihaela, d'une certaine manière, lui avait sauvé la vie et continuait de le faire. Inhalant la fumée de son cigare, il posa ses yeux joyeux, mais fatigués sur Raven qui lui parlait. Il entendit immédiatement lorsqu'elle lui mentit mais il ne releva pas. Il était, en effet, bien rare que les gens qui sortaient de Sainte-Mangouste aillent bien. Que cela concerne leurs proches ou eux-même, leur détresse était généralement soit mentale, soit physique. Son regard lointain parlait bien plus que ses mots, mais compréhensif, le roumain ne s'offusqua pas de ce mensonge. La fierté était quelque chose qu'il pouvait entendre et la pudeur quelque chose qu'il comprenait. La jeune femme ne le connaissait pas assez bien pour se permettre d'étaler ainsi ses sentiments. S'il n'en aurait pas été dérangé - car il avait l'habitude de discuter avec ses patients ou leurs familles de ce qu'ils ressentaient - il n'était qu'un médicomage. Pas psychomage. Quel que soit le problème que traversait son interlocutrice, il ne pourrait pas sérieusement l'aider, pensait-il. En tout cas, pas tant qu'il ne la connaîtrait pas mieux. « Non en effet » soupira-t-il en observant d'un œil pensif son cigare, « une urgence m'a conduite à enfiler la blouse à quatre heures du matin. Inutile de préciser que je m'en serais passé ». La plaisanterie, à peine déguisée, soulignait d'autant plus les traits tirés de notre homme fatigué par la courte nuit qu'il avait eut. Il n'était pas à plaindre, néanmoins. Il avait un travail. Un salaire. C'était plus que la plupart des gens. Il tira une taffe sur son cigare, silencieux.
Razvan se tourna pour voir davantage les traits de Raven Fawkes et il ajouta en souriant doucement : « Heureusement, on me laisse partir plus tôt en compensation. Peut-on réellement dire néanmoins qu'une journée est finie lorsque l'on doit encore s'occuper d'une enfant de trois ans ? Je ne crois pas ». Ses épaules furent secouées d'un léger rire et le roumain tira une nouvelle taffe avant de s'écarter du mur pour commencer à marcher : « De quel côté partez-vous ? Je peux peut-être vous raccompagner jusqu'à ce que nos routes se séparent » - prit-il soin de préciser ! - « si vous le désirez ? » proposa-t-il.


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MessageSujet: Re: Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO 129196351Sam 6 Juil 2019 - 19:44

Raven savait par expérience que les médicomages n’avaient jamais de repos. Ils devaient sans cesse avoir les sens aux alertes et se tenir prêts en cas d’une quelconque urgence. Prêts à intervenir, à soigner, rassurer, sauver des vies. Ils consacraient leur propre vie à celle d’autrui et devaient être efficaces tout en restant humains avec leurs patients. C’était loin d’être un métier facile car il était éprouvant autant physiquement que psychologiquement. Nombre d’entre eux avait dû tenir les nuits blanches consécutives sans rentrer chez eux, assaillis par les blessés qui arrivaient. Les périodes d’attentat étaient les pires. Certaines visions d’horreur forgeaient les esprits des plus jeunes, faisaient partie du quotidien des plus expérimentés. Razvan devait faire partie de cette dernière catégorie. Tout compte fait, les deux sorciers menaient une vie assez similaire. L’enfant en moins pour Raven, et heureusement. Sa vie était suffisamment chargée comme ça et elle avait du mal à voir comment son interlocuteur faisait pour gérer ses deux vies parallèles. Leurs situations n’étaient pas des plus évidentes pour élever seul un enfant.
Elle lui sourit tristement. Non, leur vie n’avait rien de bien normal pour un sorcier lambda. Ils faisaient partie de ceux pour qui les pauses n’étaient pas vraiment des pauses, où les vacances pouvaient vite se transformer en mission de sauvetage et dont les nuits n’étaient plus récupératrices depuis longtemps. Mais ça, il ne devait pas le savoir. Faire connaître aux autres, surtout à ceux qu’elle ne connaissait pas, qu’elle était auror, était comme se jeter dans la gueule d’un dragon. Ces jours-ci, on ne savait plus bien à qui l’on pouvait faire confiance. Avoir une telle position d’élite dans cette communauté revenait à se mettre en danger tout seul. Là résidait un peu toute la complexité. Les Aurors passaient leur existence à protéger la vie des uns en condamnant celle des autres, mais au final, personne ne les protégeaient eux. Ils devaient se fabriquer leur propre protection, et c’était une question de vie ou de mort. Trop d’entre eux étaient tombés pour que le Bureau ne se permette d’autres pertes.  
– Je suppose que le climat actuel n’aide pas, souligna Raven en regardant au loin avant de se tourner vers lui, croisant son regard sombre. Votre fille doit être fière de savoir que son papa passe ses journées à sauver des vies.
Ou alors elle était trop jeune pour saisir les enjeux. Ou bien elle en avait conscience mais que son père lui manquait trop pour qu’elle puisse l’accepter.
L’auror replaça une mèche de cheveu derrière son oreille et lui sourit. Sa compagnie n’était pas des plus désagréables, il fallait bien se l’avouer. Elle indiqua le chemin qui s’ouvrait sur leur gauche d’un délicat mouvement de menton.
– Avec grand plaisir.
Les deux adultes s’engagèrent donc sur la route piétonne, leurs pas rompant le silence à intervalles régulières. Il faisait beau, pour un jour à Londres. Ces rayons lumineux apportaient un peu d’espoir et de joie même dans les cœurs les plus désespérés.
– Je suis un peu curieuse, fit-elle soudainement savoir. Où avez-vous étudié, si ce n’est pas à Poudlard ? Durmstrang ?

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MessageSujet: Re: Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO Les Roumains fument, les Anglais boivent | RAZVAN VACARESCO 129196351Dim 28 Juil 2019 - 22:01

Elever un enfant était quelque chose qui demandait du temps, autant que de la volonté. D'autant plus de temps lorsqu'il n'y avait qu'un seul parent, et d'autant plus de volonté pour tenir le coup. Razvan n'avait pas de soucis à se faire pour la deuxième obligation. Sa fille, il l'avait voulu avec sa femme, et si cette dernière était morte, son désir d'être un bon père n'avait pas été enterré dans la tombe avec elle. Non, la volonté, le roumain l'avait, sincèrement. Il éduquait sa fille avec patience et cette dernière lui rendait bien sa patience, bien qu'elle ait un comportement hyperactif qui demandait beaucoup d'attention. Sa patience ne rattrapait pas, pourtant, le temps qu'il ne savait lui accorder. Son métier était une vocation d'enfance, quelque chose qu'il avait toujours eu cœur à faire, et sans doute voulait-il faire son travail avec autant de volonté que celle qu'il avait pour élever Mihaela. Razvan voyait le temps lui filer entre les doigts lorsqu'il réalisait avec horreur qu'on n'était pas le cinq mai mais le douze. Il avait réalisé cela le matin même, en remplissant un rapport de garde de nuit à l'hôpital Sainte-Mangouste. Et ce temps, il ne pouvait l'accorder à sa fille, pour diverses raisons : déjà parce que des gens, parfois mourants, avaient besoin de lui. Ensuite, parce que tout le monde ou presque se reposait sur un homme que chacun pensait célibataire - avec raison - et sans enfant - ce qui était faux. Le roumain n'avait pas le cœur de se  confier à ses collègues sur le fait qu'il était père, car il était un homme secret qui n'aimait pas beaucoup parler de lui-même. Évoquer sa progéniture devant Raven, d'ailleurs, avait été un exploit étonnant. L'Anglaise l'avait bizarrement mis en confiance, et sans doute que cela était dû au rapprochement terrible, voire macabre qu'il avait fait silencieusement avec son épouse. La confiance, il la ressentait facilement envers cette femme à l'allure droite mais agréable, charmante, tout en étant pourtant distante. C'était étrange, se disait-il en y pensant, ce qu'une simple rencontre dans un pub en Ecosse pouvait amener à ressentir comme sentiments. Par quelle magie le mettait-elle en confiance alors qu'il l'accordait peu ? Elle ne souriait même pas vraiment ! Razvan ne se comprenait pas. Mais les faits étaient là, et il ne pouvait guère les ignorer. Il soufflait sa fumée loin du visage de cette femme qui était encore une inconnue pourtant, à ses yeux, alors qu'elle lui répondait. Un sourire ironique égaya brièvement ses traits avant de disparaître pour un rictus plus discret. Mihaela, être fière de son père ? Non, pas franchement. C'était une enfant certes heureuse, très positive et joyeuse, elle était cependant infiniment possessive avec son paternel. Sans doute parce qu'il était son unique repère, et son unique parent. Mais elle râlait souvent qu'il doive aller travailler. "Non pas vraiment" s'esclaffa-t-il sans moquerie pourtant, "elle râle toujours que j'aille travailler. Je ne sais pas où elle a entendu ça, mais pas plus tard que la semaine dernière, elle m'a très sérieusement suggéré de faire grève !". Razvan sourit plus franchement à ce souvenir mignon. Mihaela s'était accrochée à sa jambe comme si sa vie en dépendait et il avait eu bien du mal à la décoller. Elle avait cette vieille habitude qu'il n'arrivait pas à lui faire passer. Il espérait qu'en grandissant, l'impossibilité de s'accrocher ainsi à lui allait la corriger plus simplement.

Ils se mirent à marcher ensemble, et le roumain écouta poliment sa question en regardant son cigare. Il ne le remit pas de suite à la bouche et digéra plutôt la question et la réponse qu'il devait apporter. "Je sais la réputation de l'école dans ce pays" dit-il d'une voix doucement prudente, "mais oui, j'y ai étudié. Toute ma scolarité, pendant sept ans. J'ai entendu dire que ce n'était pas vraiment similaire à Poudlard... Sans doute que cela explique la réticence des Britanniques pour l'Ecole du Grand Nord". Sa voix paisible, accompagnée d'un délicat sourire, s'éteignit alors qu'il portait de nouveau son cigare à ses lèvres pour en prendre une dernière taffe. Il s'arrêta près d'une poubelle et jeta son mégot dedans en soufflant sa fumée hors de ses poumons. Le roumain ne mit pas ses mains dans ses poches et se contenta d'avancer aux côtés de l'anglaise, les bras ballants : "Je comprends qu'il y a une différence idéologique fondamentale entre les deux écoles... Cependant, il serait erroné que d'associer tous les élèves à la politique menée par le Directeur" continua-t-il, gentiment. Il n'était pas raciste - comment le pourrait-il dans un pays où il était lui-même étranger ? - et il n'était pas très regardant sur le sang. Le roumain ne connaissait pas ses parents. Peut-être avaient-ils été des moldus. Compte tenu des pouvoirs de la plupart des membres de sa lointaine famille qui l'avait élevé, il en avait plutôt conclu qu'il était de sang-mêlé. Ce qui n'était pas un problème pour lui et ne devrait pas l'être. Mais certains élèves de l'école Poudlard, tout comme certains se promenant à Durmstrang, portaient une grande attention à la pureté du sang. Razvan, lui, avait plutôt tendance à penser qu'ils confondaient pureté et consanguinité. Cela dit, il ne fit pas la réflexion à voix haute, car après tout, il ne connaissait pas les positions de Raven Fawkes sur ce sujet-là.



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