Elle avait proposé deux solutions : aller directement aux trois balais pour réviser là-bas ou étudier à Poudlard et venir après. Gauwain avait choisi la première option. Et comme Amelia Bones n'était pas du genre à revenir sur une promesse (ça en était d'une certaine manière), elle se dirigeait donc vers l'enseigne avec le serpentard se demandant bien ce qu'elle lui dirait. Sur le chemin, elle resta silencieuse un moment, plus pour réfléchir, que pour vraiment l'ennuyer. A la vue de Pré au Lard, elle finit par lui demander : “ Par quoi voudras-tu commencer ? ” Sachant pertinemment que cela pouvait être interprété de plusieurs façons, elle choisit de marquer une pause, à l'affût d'une réaction lui indiquant ce qu'il pouvait bien avoir en tête. “ Autant débuter par ce qui t'ennuie le plus, l'histoire de la magie. Oui, tu n'avais pas l'air ravi à l'idée de revoir les guerres des gobelins, il me semble. ” C'était pour ainsi assez peu romantique, mais elle n'essayait pas de l'être. Loin de là d'ailleurs. Alors qu'elle attendait sa réponse, elle sortit une petite bourse de sa poche pour savoir ce qu'elle allait pouvoir dépenser ou pas. Elle achèterait bien une nouvelle plume ou du tissu. Mais à l'approche des examens, ce n'était peut-être pas une bonne idée. “ Puis on pourrait finir par les sortilèges. C'est bien plus enthousiasmant. ” Pourquoi ne pas faire l'inverse ? Eh bien, elle n'en savait trop rien. Mais elle adorait l'histoire de la magie, tout autant que les sortilèges. Deux de ses matières préférées, alors ça ne changeait pas grand-chose pour elle. Mais elle avait parfaitement conscience que Gauwain ne partageait pas son avis sur la question.

“ Oh ! Nous y voilà. ” Dit-elle presque ravie alors qu'ils arrivaient devant l'enseigne. Mme Rosemerta les accueillit. “ Pour deux personnes ? ” Elle balaya la salle du regard. Elle pouvait repérer quelques visages familiers. Les élèves aimaient profiter du soleil qui apparaissait de plus en plus en ce mois de mai. Et une bièraubeurre avec des amis pour commencer la journée, c'était bien également. “ Pouvons-nous avoir une table un peu à l'écart s'il vous plait ? ” L'aubergiste esquissa un sourire et leur indiqua d'un mouvement de main de la suivre. Elle les guida vers le fond de l'auberge près d'une fenêtre. Parfait, pensa t-elle. Elle s'installa sur une chaise et récupéra rapidement son pour en sortir son premier livre. Mme Rosemerta revint avant même qu'elle n'ait pu dire quelque chose à son camarade. Amelia décida de prendre les devants et lui demander directement la question fatidique : “ A l'approche des aspics, nous révisons beaucoup. Ça ne vous dérange pas si nous le faisons ici ? C'est un endroit très agréable, plus que les salles de classes inutilisées de Poudlard vous en conviendrez. Et vous êtes toujours très aimable, alors nous avons pensé que ce serait l'endroit idéal pour nous, n'est-ce pas Gauwain ? ” Elle ne lui demandait pas vraiment son approbation, elle essayait juste de le "provoquer" sur tous les sujets espérant comprendre ses réactions au mieux. La sorcière ne semblait pas dérangée du monde par cette demande.  “ Tant que vous êtes discrets, ça me va parfaitement. Voici les cartes, je reviens plus tard pour les commandes. ” Et elle s’éclipsa après leur avoir donné le menu.  

Amelia regarda ce qu'on y proposait. Elle lut plusieurs lignes avant de prendre la parole :  “ Est-ce que tu veux autre chose qu'une biéraubeurre ? ” Elle avait bel et bien l'intention de débourser de l'argent de sa poche. Elle appréciait la galanterie, mais pas tant que ça non plus. “ Fais-toi plaisir, c'est moi qui paye. ” Elle avait l'impression de dire ça comme si elle était avec l'un de ses frères. Et dans un sens, elle le regrettait, mais pas entièrement. Peut-être que ça pourrait la servir précisément. Et elle voulait être dans le contrôle. Après la discussion à Poudlard, elle avait eu l'impression d'avoir été un peu baladée sans comprendre pourquoi. Mais maintenant, elle essayait de ne pas être la souris. Elle espérait que sa stratégie - quoique quelque peu décousue - allait être couronnée de succès... Une petite victoire serait tout à fait parfaite. Elle avait juste besoin d'être certaine de la personne qui se trouvait en face d'elle. Et pour l'instant, elle était confuse. Et elle détestait ça.   

Il semblait d'accord pour aborder l'histoire de la magie en premier, ce qui lui força un sourire. Elle ne lui laissait pas forcément le choix, il fallait dire. Et elle aurait sans doute été un tantinet déçue s'il avait rejeté sa proposition. “ Bien. ” Répondit-elle simplement alors qu'ils arrivaient devant l'auberge. Rosmerta ne manquait pas de tempérament, mais Amelia lui connaissait une grande chaleur humeur. Elle se montrait fort sympathique avec ses clients - ce qui valait mieux pour ainsi dire - les plus fidèles. La serdaigle ne fréquentait pas les lieux autant qu'elle le pouvait. A chaque fois qu'elle se rendait au seul village magique du Royaume Uni, elle prenait son temps pour visiter toutes les boutiques pour faire quelques emplettes. Et il ne lui restait au final pas une minute pour boire une bièraubeurre seule ou avec de la compagnie. Toutefois, cela lui arrivait. Tous n'aimaient pas avoir un emploi du temps prédéfini lorsqu'ils sortaient de l'école de sorcellerie de Poudlard et préféraient profiter de leur journée loin des classes et dortoirs du château. Rosmerta les accueillit avec cette bienveillance qui la caractérisait tant  et les guida à travers la pièce principale jusqu'à un endroit assez calme pour réviser, lire et répondre à des questions. Au moins, ils pouvaient être assurés qu'ils ne seraient dérangés par personne. Qui s'intéresserait à deux adolescents en train d'étudier ? Personne, elle le pensait. Elle regardait à présent la carte des trois balais avec curiosité. Elle ne voyait rien qui ne la tentait spécifiquement.

Mais Gauwain paraissait plus imaginatif, insistant au passage sur le fondant au chocolat - elle lui avait tendu la perche en même temps, comment l'en blâmer ? -, et annonça qu'il prendrait bien de l'hydromel aux épices. Elle fit une légère grimace quand il prononça ces mots. Elle arqua un sourcil quand il dit que c'était à lui de l'inviter. Il ajouta à cela "c'est normal". Elle l'avait la conclusion à ses interrogations. D'habitude, il n'en se serait pas officialisé. Du moins pas comme ça. Ça aurait été plus un "très bien, mais je paye la prochaine fois". Elle les reconnaissait bien les traditions patriarcales qui avaient bien du mal à disparaître. Celle-ci était pour ainsi dire la plus tenace. Les hommes devaient absolument inviter les femmes. C'était pour ça qu'elle voulait financièrement indépendante. Elle n'avait aucune envie de se retrouver dans ce genre de situation où elle n'avait pas d'autre choix que dire oui si elle voulait manger ou même boire un verre. “ Nous sommes en 1978. ” Dit-elle simplement en essayant toujours d'encaisser la nouvelle. Il croyait que c'était un rencart. Et elle ne savait pas si elle devait être embarrassée ou... touchée qu'on puisse s'intéresser à elle de cette manière là. Ce n'était pas non plus comme si elle avait l'habitude de recevoir ce genre d'attention. C'était... embrouillé. “ Beaucoup de filles de nos jours paient pour deux. ” Poursuivit-elle en essayant de chasser tout cette confusion loin dans son esprit. Elle y reviendrait plus tard pour y penser la tête froide.   

Pour l'aider à penser à autre chose, elle sortit son manuel d'histoire de la magie dans lequel elle avait rangé des petits questionnaires. “ J'ai apporté quelque chose pour l'histoire de la magie. Plutôt que relire pour la énième fois les guerres des gobelins, j'ai pensé qu'on pouvait tester nos connaissances afin de savoir où ça pêche et  où ça va. ” Annonça t-elle fièrement en ouvrant le livre. Elle en sortit deux parchemins sur lesquels elle avait rangé deux colonnes, d'un coté des dates et de l'autre des noms et des événements. De chaque côté, il y a des cases vides et des cases remplies.  Elle lui tendit un exemplaire et prit la décision de lui expliquer. “ Là par exemple, tu dois associer l’événement à la date et la question d'après, tu dois écrire la date à l’événement indiqué ici.   ” A chaque fois, elle pointa sur son parchemin à lui espérant qu'il comprenne rapidement. Dans son esprit, c'était clair car elle le faisait régulièrement depuis plusieurs années, mais elle espérait qu'elle avait réussi à expliquer correctement. “ Je le fais assez souvent à l'approche de mes examens. Ça me permet de savoir où j'en suis, mais aussi de me remémorer les dates et les événements. Je fais ça aussi avec les notions, les effets de sortilèges, parfois les citations. *  ” A force de les écrire, elles avaient fini par retenir un maximum d'informations. Elle décida de préciser un détail tout de même : “ Si tu ne trouves pas toutes les réponses, ce n'est pas grave, je les ai toutes mises sur un autre parchemin. Comme ça on pourra vérifier. ”          

C'est qu'il insistait en plus... ! Elle se mordilla la lèvre inférieure en cherchant une solution à ce problème épineux. Elle avait essayé de l'en dissuader en se montrant cool. La manière douce ne fonctionnait pas. Alors comment faire ? Il ne restait plus qu'une seule option. Sans l'humilier devant tout le monde. “ Gauwain ? Nous sommes amis n'est-ce pas ? ” Elle essayait de lui donner une porte de sortie. Et a vrai dire, elle ne serait certainement pas contre un rencart... dans d'autres circonstances. S'il lui avait demandé, elle aurait pu lui dire oui. Mais là, ça lui semblait si confus, un peu hors de propos. “ Alors laisse moi payer au moins ma part. ” Elle ne savait pas vraiment s'il comprendrait. Elle verrait d'après ses réactions. Elle ne voulait pas le vexer, il faisait des ces rares garçons avec lesquels elle aurait pu imaginer quelque chose de plus qu'une amitié. Elle ne le nierait pas. Mais la situation la mettait vraiment mal à l'aise. Et si elle avait essayé de ne pas trop réfléchir à la question, elle devait avouer que son insistance et son genou volontairement collé au sien la forçait à revenir sur le sujet. Mais elle estimait qu'elle avait le droit de choisir où et surtout quand dans le cas d'un premier rendez-vous. Ils n'étaient pas du tout sur la même longueur d'onde. Les aspics étaient déjà assez stressants comme ça, elle n'avait pas besoin de rajouter un prétendant lui faisant des avances un peu lourdingues en plus.   

Elle choisit de s'écarter un peu de lui lorsqu'il récupéra le parchemin. Elle espérait que mettre de la distance le découragerait. Le 'c'est tellement toi' la laissa perplexe, mais il semblait tout de même ravi de ce qu'elle lui présentait et proposait. Etat-ce bon signe ? Puis il s'expliqua en la décrivant comme futée et intelligente, ou du moins son système. Bon elle laissa les compliments flotter quelques instants avant de prendre la parole : “ Eh bien, c'est assez simple en fait. Quand j'ai compris que la répétition était la clef de la mémorisation, j'ai rapidement mis cette stratégie en place. ”  Elle était confiante que cela fonctionnerait avec Gauwain aussi. Après tout, elle avait révisé avec lui assez souvent pour pouvoir croire que ça pouvait l'aider. Puis il posa une question importante. Devaient-ils faire ça ensemble ? Ce fut à ce moment que Rosmerta débarqua pour leur demander leur commande. Ils lui dirent ce qu'ils voulaient. Elle se demanda si le fondant au chocolat était bon ici. Elle réalisait seulement à ce moment-là qu'elle ne l'avait jamais essayé. Puis quand ce fut fini, elle repartit en hochant la tête et rangeant le petit calepin dans sa poche. “ Ce sera l'occasion de tester le fondant au chocolat d'ici. ” Dit-elle avec un sourire.

Elle revint rapidement à la grille qu'elle avait produite sur le parchemin et se rappela soudainement de la question qu'il lui avait posé. Ah oui, c'était vrai. “ J'ai l'habitude de le faire seule. Mais se poser une question, chacun son tour c'est bien aussi. Surtout qu'on le même. Alors autant le faire ensemble. ” Elle lut le premier item et décida de commencer la lecture à voix haute. “ Alors quand le chef du conseil des sorciers, Burdock Muldoon, décide de classer les créatures magiques selon deux statuts et quels sont-ils ? ” Elle avait laissé la place pour la date - ici le siècle - ainsi que pour les statuts. La réponse n'était pas très difficile. Du moins pour Amelia, elle qui était pour l'égalité entre les créatures magiques et les sorciers avait appris l'évolution des mentalités sur le sujet. Et alors Gauwain répondit du mieux qu'il pouvait et ils poursuivirent. Rosmerta arriva pour leur donner leur commande à la dixième question.  “ Merci beaucoup. Peut-on vous régler à la fin ? ” Cela leur permettrait d'une part de commander d'autres choses au cas où, et d'autre part de régler la petite déconvenue qu'ils avaient eu sur le sujet. Elle accepta avec plaisir assurée qu'ils payeraient à la fin comme ils l'avaient toujours faits.  “ A ta santé. ” Dit-elle avant de boire une gorgée de son breuvage.       

Amelia fut surprise face à l'absence de réaction de Gauwain à son insistance pour payer. Elle essayait de lui faire comprendre, tant bien que mal, et surtout sans le vexer ou l'humilier devant tout le monde, qu'il ne s'agissait pas d'un rencart. Ils n'étaient vraiment pas sur la même longueur d'onde depuis le moment de son arrivée dans la salle inutilisée de Poudlard pour leur révisions habituelles. Elle aurait dû se douter pourtant qu'il ne lui avait offert un tel cadeau par amitié. Et cela posait vraiment question. Elle n'avait jamais rien fait pour l'encourager - à moins qu'elle n'ait dit quelque chose sans s'en rendre compte ? Mais à la réalisation de son intérêt - indéniable maintenant qu'elle rassemblait toutes les pièces du puzzle - pour elle, elle se sentait confuse. Elle ne le trouvait pas repoussant loin de là. Mais le problème venait plus de son manque d'honnêteté , si on pouvait appeler cela ainsi. Pourquoi ne pas lui avoir demandé directement plutôt que se faire des idées ? Cela lui aurait donné le temps de la réflexion et surtout la possibilité de répondre positivement ou non. A ce moment-là, elle se sentait prise au piège plus qu'autre chose. Et quand il ne sembla pas une seule seconde noter la perche qu'elle lui tendait... Elle se demanda si elle venait de faire une erreur. Mais quel type d'erreur ? Là était toute la question. Elle préféra une nouvelle fois retarder l'inévitable. Toute cette introspection l’empêchait de se focaliser sur l'essentiel - les révisions pour les aspics - et surtout ça lui filait des mots de tête. Mais au final, la réaction qu'elle attendait se produisit, pas vraiment au moment qu'elle l'avait espéré, mais soit. Elle étudia son visage - était-ce réellement une bonne idée ? - pour savoir à quel point il était gêné. Il lui parût déçu, offusqué ou juste triste peut-être ? Elle ne comprenait rien. Demandez-lui de compter jusqu'à 100000, ce serait certainement plus facile. Elle était capable d'énumérer toutes les dates des rebellions de gobelins sans problèmes, même le quidditch s'avérait moins ardu. Et pourtant elle ne faisait pas autant d'effort qu'à ce moment précis. Elle détestait le vol et si elle pouvait éviter de croiser un balai volant de tout le reste de son existence, elle signerait sans la moindre hésitation. Tout ce qu'elle pigeait au final, c'était la chose suivante : il venait d'intégrer quelque chose. Ce qui lui permit d'une certaine façon de taire la petite voix dans sa tête.

Alors qu'il allait répondre à une question du questionnaire, Rosmerta arriva pour obtenir leur commande. Un apple pie, c'était une bonne idée. Mais elle ne fit aucun commentaire ne voulait pas relancer le débat sur le moyen de règlement. Puis quand l'aubergiste fut partie, il prit finalement la parole pour répondre à la première question.  “ Presque. ” L'histoire était une matière qu'elle gérait plutôt bien. “ C'était au XIV ème siècle, il était chef du conseil des sorciers. ” Les dates n'étaient pas exactes dans les livres d'histoire, souvent, ça restait des siècles, mais à de rares occasions, elle pouvait lire des dates précises : jour, mois et année. C'était les plus difficiles à retenir. Puis, il lui posa à son tour une question. Elle la chercha, mais il lui fallut sauter quelques cases avant de la trouver. “ Oh tu ne fais pas dans l'ordre ? ” Demanda t-elle à vois basse, plus pour elle-même que pour lui. Elle leva légèrement le visage pour observer le plafond, elle roula des yeux et attendit quelques secondes supplémentaires pour apporter la réponse attendue  “ XVIII ème siècle. Une guerre des géants. ” Si elle avait une bonne mémoire, les géants se battaient toujours... La raison la plus souvent utilisée demeurait la même "ils ne sont pas très intelligents". Même les hommes et sorciers qui étaient supposés être plus intelligents s’entre-tuaient quand même. Elle estimait qu'il s'agissait d'une excuse bien faible forgée dans l'ignorance et une certaine forme de mépris que des recherches et études poussées.  Mais elle se garda bien de faire un commentaire là-dessus. C'était à son tour de lui poser une question. Ce qu'elle fit sans plus attendre. Ils eurent le temps de s'interroger encore un peu. Elle trouvait cela quand même plus amusant que de le faire seule. Ça rendait les révisions plus rapides certes, mais plus sympathiques.

Lorsqu'elle s'apprêtait à lui en poser une autre, Rosmerta arriva pour déposer les boissons et les gâteaux. Avant de boire une gorgée de bièraubeurre, elle lui souhaita "santé" comme elle l'avait toujours fait. Après quelques secondes, elle décida de reprendre la liste et réalisa qu'ils arrivaient à la fin. “ Dernière question ! Alors quel gobelin a forgé l'épée Godric Gryffondor et pour quelles raisons ? ” Elle savait que cela avait un rapport avec des lois en lien avec les moldus. Et à ses yeux, c'était certainement l'une des questions les plus compliquées. Associer une date à un nom, c'était assez facile. Même les raisons, ça lui paraissait un peu plus compliqué. Mais si elle creusait la tête, elle trouverait sans nul doute la réponse à cette question sans grand problème. Elle lui laissa le temps de la réflexion. Ce n'était pas comme si on les menaçait de les dégager. Ils ne dérangeaient absolument personne. Elle regarda par la fenêtre, des élèves courraient un peu partout... pour quelle raison, elle ne saurait le dire. Puis Gauwain répondit quelque chose. Elle pencha la tête sur le côté, rassurée qu'il ait trouvé des informations sur le sujet dans sa mémoire. Elle tendit légèrement les bras et soupira profondément. “ Ah enfin ! Ça n'a pas été trop difficile au final... si ? ” Elle n'espérait pas vraiment une confirmation pour dire vrai. C'était en quelques sortes une bien gentille de le taquiner. “ Veux-tu qu'on passe de suite aux potions ? ” 
  

Parfois, Gauwain lui donnait l'impression d'aborder les situations comme s'il était sur un plateau d'échecs. La plupart du temps, elle ne s'en officialisait pas. A vrai dire, c'était sa personnalité qui voulait cela. Mais elle ne pouvait s'empêcher de le regarder avec des yeux ouverts comme des soucoupes quand il utilisait le vocabulaire approprié à son état d'esprit. Elle ne manqua pas de noter l'évocation des termes "partie" et "forces en présence". Elle supposait que ce trait de caractère ne pourrait que lui servir dans son métier futur et éventuellement pour survivre à serpentard. Amelia était analytique aussi, elle passait aussi beaucoup à essayer de comprendre ce que les autres pouvaient avoir en tête... Mais elle n'était pas aussi... méthodique.  “ On a encore les potions et les sortilèges... Tu vas finir par en avoir marre de contourner les règles, crois moi. ” Après cela, une suite de questions furent posées sans qu'ils ne rencontrent de problème majeur. Puis finalement la dernière étape avant qu'ils puissent passer aux potions. Un gage... Elle avait des idées. A force de parler avec Graham, elle ne manquait certainement pas d'originalité dans ce domaine. “ Oui si tu perds, tu devras te rouler dans l'herbe et te jeter dans l'eau du lac... devant public, je te prie. ”  A vrai dire même s'il se ratait complètement sur la dernière question, elle ne le laisserait pas faire une telle chose, ce ne serait pas très gentil. Mais vue qu'il lui tendait le bâton pour se faire battre, elle n'allait pas se faire prier. “ Ce serait pas drôle si tu le faisais quand tout le monde a le dos tourné. ” Ajouta t-elle sur un ton convaincu.

Il sembla se remémorer quelque chose... Ou du moins il essaya. Il faisait un effort, elle devait lui concéder au moins ça. “ Serpentard et Gryffondor étaient très amis avant que le vieux serpent décide de partir parce qu'il n'arrivait pas à imposer l'idée de ne pas accepter des nés moldus. ” C'était l'une des raisons, si ce n'était la seule, que la maison serpentard foisonnait tant de sorciers prétendant être de sang pur. Elle l'observa un instant avant de poursuivre : “ Tu devrais peut-être apprendre quelques trucs sur Godric, son histoire est très liée à celle de Salazar. ” A vrai dire, elle ne comprenait pas tellement pourquoi certains élèves ne s'intéressaient pas davantage aux fondateurs des autres maisons. Ils avaient créé Poudlard tous ensemble après tout. Elle se frappa le front quand il essaya d'inventer un nom. Elle eut un rire  amusé toutefois. Elle ne pouvait certainement pas s'empêcher d'en retenir un quand elle entendait des bêtises pareilles. Compenser un complexe... Elle se répéta la formule plusieurs fois dans la tête. Elle n'avait jamais entendu une telle insulte à l'histoire, mais en même temps ce n'était pas bien méchant. “ Non, c'était le roi Ragnus I. L'épée de Gryffondor est une véritable relique et un chef d'oeuvre. Puisque Godric est mort, il n'y a rien d'étonnant au fait que les gobelins veuillent la récupérer. ” Elle sortit un autre parchemin du livre avec la correction des questions, elle lui montra la raison pour laquelle Gryffondor avait eu besoin d'une épée. “ Les fondateurs de Poudlard ont vécu au Moyen-Age, du coup, les moldus utilisaient des épées pour se défendre dans les batailles. Alors t'imagines bien qu'affronter un moldu en duel avec une épée, ça aurait été déloyal. ” Courageux et téméraire, mais fair play. Elle n'aurait certainement pas fait long feux dans cette maison. Elle n'avait pas ce type de courage. Mais dans le fond ça ne la dérangeait pas plus que ça.

Elle fronça les sourcils quand il la taquina en sous entendant qu'elle ferait une bonne professeure d'histoire de la magie. Elle ne le pensait pas une seconde. Elle était patiente certes, mais pas à ce point.  “ Non, j'y tiens vraiment pas. ” Se contenta t-elle de répondre alors qu'elle rangea les parchemins sur le côté. Elle sortit ensuite les questionnaires correspondant aux potions. Elle lui tendit. Discipline différente, même système, mais sur les noms des potions associés à leurs effets, mais aussi les ingrédients. Elle n'avait pas pu y mettre les recettes. Certaines potions demandaient un nombre d'étapes conséquents. Il lui semblait absolument impossible de faire tout d'un coup comme avec l'histoire de la magie.  “ Tu es prêt... commençons par le polynectar. ” 

Si Amelia était en train de boire de la bièraubeurre, elle se serait certainement étrangler avec. Dans un contexte habituel, elle se contenterait d'un rire ou d'un hochement de tête. Mais dans ce cas précis, après avoir compris que ses intentions n'étaient définitivement pas les mêmes que les siennes, elle resta silencieuse. Elle haussa un sourcil hésitant entre lui accorder le bénéfice du doute ou prendre les jambes à son cou. Il faisait certainement une blague, comme elle, pour détendre l'atmosphère, très certainement. Elle avait été claire quand même, non ?  “ On verra ça. ” Dit-elle sur un ton incertain. Mais leur discussion durant les révisions suivantes, d'abord en potion, puis en sortilèges fut beaucoup moins ambigu et rien de particulièrement choquant ne se passa. Les questions et réponses s’enchaînèrent sans problème. Ils eurent besoin du parchemin avec les informations correctes une ou deux fois, mais rien de vraiment inquiétant. Ça les aidait plus qu'autre chose. Puis on apprenait de ses erreurs n'est-ce pas ?

Une deuxième tournée de bièraubeurre... et la fondant au chocolat tant attendu ! Il fallait le dire : elle le méritait bien. Quand il fut déposé devant elle, elle prit sa cuillère et l'attaqua sans crier gare. Pas même un "bon appétit". La gourmandise ! Son plus gros vice très certainement. Et elle ne s'en cachait pas. Alors qu'elle l'eut bien entamé, il lui posa une question et lui proposa de partager son apple pie. Elle s'essuya la bouche avec une serviette avant de parler. Les courtoisies passaient même avant l'appel du ventre. “ Non, non, tu peux le garder pour toi tout seul. ” Dit-elle sans faire vraiment attention aux mots. Ils n'étaient peut-être pas parfaitement adaptés, mais ça convenait bien à la situation en fin de compte. “ Le fondant est plus que satisfaisant. ” Et elle ne croyait pas si bien dire d'ailleurs. Il était si bon qu'elle ne se voyait pas manger une autre friandise sur son retour vers le château. Il l'observa le temps qu'elle termine son gâteau. Et même si elle essayait de ne pas y faire attention, ça la dérangeait quand même un peu. Qu'est-ce qu'il pouvait bien trouver d'intéressant à la regarder pendant des longues minutes en train de se régaler ? Ce ne devait pas être un spectacle agréable pour les yeux.  

Et il lui posa la question fatidique, celle qui la rendit mal à l'aise, bien plus que lors de leur discussion dans une des salles inutilisées de Poudlard. Elle qui croyait qu'il avait compris. Demandait-il vraiment confirmation ? Ou il n'avait absolument rien capté à ses tentatives ? Elle se nettoya à nouveau les livres avec la serviette et en profita pour se donner un peu de contenance. Elle préféra ne pas regarder dans les yeux. Elle fixa un point un peu à droite de lui pour lui donner l'impression qu'elle ne le fuyait pas. “ Je ne fais pas de charité. ” C'était en quelque sorte un mensonge. Amelia était tout à fait le genre de personnes à participer à une association caritative et travailler en bénévolat quelques temps. Mais, ce n'était pas ce genre de charité. Elle ne passait pas du temps avec les gens parce qu'ils lui faisaient pitié, mais parce qu'elle en avait envie. “ Et je ne me sens pas redevable... ni obligée d'être là. ” Il attendait une réponse plus précise. Quelque chose qui lui donnerait de l'espoir. Mais elle n'en avait pas à donner. Elle ne voulait pas faire ça. Elle inspira profondément et décida de lui dire la vérité avant de fuir comme la lâche qu'elle était... parce qu'elle n'était pas aussi courageuse que son frère au final. “ Je ne suis pas là pour les mêmes raisons que toi. Mais ce n'est pas par obligation, devoir ou charité, sache le. ” Elle soupira un instant et reprit rapidement : “ Je suis bien trop honnête pour ça. ” Elle sortit sa bourse de son sac pour déposer de la monnaie sur la table, préférant ne pas lui laisser le choix. “ Je crois qu'il vaut mieux que je parte, je suis désolée... ” Elle ne finit pas sa phrase, car dans le fond, que pouvait-elle lui dire de plus ? Elle était trop gênée pour faire un long discours plein de mots rassurants. Non la fuite, c'était mieux. Et ne pas lui laisser le temps de réagir, ça valait encore mieux pour elle. Prise par une certaine forme d'égoïsme, elle prit son sac et son manuel et partit aussi vite que ses jambes le lui autorisaient... Voilà une journée qui se finissait assez mal et elle ne pouvait pas s'empêcher de se sentir coupable... Si elle lui avait parlé dès le départ, ce ne serait pas arrivé.