Le 10 octobre 1978

Chère Melody,

Je tiens à te dire dès le début de cette lettre que je suis vraiment désolé.

Pour tout ce qui s'est passé, depuis qu'on a commencé à se fréquenter. Lorsque j'ai été envoyé en prison. Lorsque j'en suis sorti. Cette lettre arrive probablement un peu tard, je te devais les explications bien avant de partir. Je ne m'attends pas à ce que tu pardonnes mon attitude. Ce n'est pas pardonnable.

Je ne sais pas comment tu vas percevoir cette lettre ni même si tu vas aller au bout. C'est un mea culpa pour moi, j'espère que ce n'est pas une torture pour toi. Je ne veux pas me justifier d'être parti, il n'y a pas de justification à cela. Tu ne méritais pas de t'inquiéter pour moi, et tu méritais que je te dise où j'allais. Je crois qu'à l'époque, quoique je fasse, je ne pouvais que prendre une mauvaise décision. J'avais déjà jeté hors de chez moi ma soeur. J'aurais pu te quitter. En un sens l'ai-je fait en partant de la sorte.
Azkaban m'a fait réaliser des choses sur moi que j'aurais préféré ignorer. La prison m'a ramené à ma condition d'homme faillible, elle m'a rappelé tous mes plus pires souvenirs. Les fêlures que j'avais lorsque j'étais enfant et que ma mère est morte. Les fêlures d'adulte, lorsque mon père est parti aussi. J'ai vécu en sortant avec un trop de plein de beaucoup de traumatismes que j'avais essayé d'oublier et de ravaler depuis presque trente ans. Outre le vécu, cependant, la prison m'a surtout rappelé combien j'étais sociablement étrange. Je ne me suis jamais senti à ma place. C'est un fait, c'est comme ça, j'ai toujours été profondément incompris, profondément dubitatif sur à peu près tout. Que ce soit dans l'enfance ou à Poudlard, plus tard comme adulte employé au Ministère, je ne me suis jamais senti à ma place. Va savoir pourquoi. Je me doute que mon brusque et inquiétant départ a dû te mortifier, j'en suis encore une fois désolé.
Mais il n'y avait plus rien pour moi à Londres - même pas toi. Tu es une personne solaire, Melody, une personne qui mérite quelqu'un qui te comprenne et surtout quelqu'un qui ne soit pas à côté de la plaque. La façon dont je suis parti mais plus encore, la manière dont on a vécu notre relation, ne peuvent que me donner raison. Je vais bien. Je vais mieux. Je guéris peu à peu, vraiment. Et si tu veux savoir, même Spartacus va bien.

Je sais que cette lettre est un peu longue, mais je crois qu'elle est nécessaire. Il est nécessaire de clôturer ce chapitre de notre vie, mon départ n'a fait que mettre un vulgaire marque-page et je ne veux pas que tu vives avec, je ne sais pas, peut-être des regrets alors que tu ne devrais pas en avoir. Je n'ai pas de nouvelles de ma soeur, je suppose donc qu'elle va bien. J'espère que les choses s'améliorent en Angleterre. Sache qu'ici, la guerre sorcière ne nous touche pas.


Je te souhaite le meilleur, Melody,


Avec toute mon affection,
Kieran.

Codage par Libella sur Graphiorum