Il était déjà plus qu’évident que les évènements de cet été allaient laisser des traces dans les esprits sorciers. Et pas uniquement pour ceux qui avaient subi la prise d’otage. Ils avaient tous eu des amis, des proches, de la famille pour les attendre avec fébrilité, guettant le moindre mouvement qui pourrait indiquer aussi bien un mieux qu’un pire, se languissant de ne pas avoir la moindre nouvelle. Morticia avait fait partie de ceux qui avaient attendu, avec une patience plus que limitée. Ce qui avait fini par la pousser à tenter sa chance et prendre quelques risques. Mais jusqu’à la libération elle avait attendu, même si Marius avait réussi à sortir avant cette date. Car si il avait été sa principale source d’inquiétude, il y en avait eu d’autres, et cela marquait forcément.

Depuis cette période, la belle avait dû renvoyer sa fille à l’école pour sa cinquième année… non sans mal il faut dire. L’inquiétude pour les autres, l’incertitude, la jeune Eupraxia s’était faite depuis le temps à l’idée qu’elle devrait la subir de sa mère pour tous les autres. C‘était ainsi. L’amour que la musicienne portait à sa fille n’avait pas que des bons côtés pour une adolescente. Enfin, elle avait fini par repartir avec les autres et Morticia était repartie à sa vie solitaire. Chose qu’elle n’appréciait à vrai dire pas franchement.

C’est donc pour ces différentes raisons que la belle sortait actuellement Luna en plein Londres pour aller chercher un dîner. Ce n’était pas forcément qu’elle n’avait pas le temps de le préparer elle-même. Non, à vrai dire, elle n’avait simplement pas envie de s’en occuper actuellement, pas ce soir, pas pour le moment. Elle voulait ce soir accueillir deux amis et la popote n’était pas leur priorité lorsqu’ils se retrouvaient. Chacun son rôle en fait. Et elle, pour ce soir, elle fournissait le lieu et la nourriture. Luna était habituée et était même naturellement allé saluer le patron du lieu, une ancienne connaissance. Artibeus Kohli n’était pas seulement une connaissance professionnelle de son ex mari. Il tenait la meilleure l’une des meilleures curry house de la ville. Ils auraient ainsi largement de quoi faire pour la soirée et Morticia était assurée de la qualité de leur repas. Le temps de rentrer à la maison et il était déjà presque l’heure. Largement temps donc d’installer la salle de musique. Une cigarette à la main, Morticia s’assurait qu’ils auraient tous de quoi s’installer confortablement, de l’espace pour jouer aussi… car ses invités faisaient bien parti de ce cercle. Et cela promettait d’être une soirée musicale… quoi que pas uniquement. Alors la salle de musique était indiquée. C’était une grande pièce dans cette maison, une pièce importante et bien équipée. De grandes fenêtres laissaient une belle vue sur le jardin, l’ambiance était chaleureuse. Différents grands tapis couvraient le sol, des coussins et chaises se présentaient à plusieurs endroits, prêts à accueillir ceux qui le désiraient. Il y avait un coin avec une table basse qui serait parfaite pour le repas qui était déjà posé dessus d’ailleurs…

Lorsqu’on avait toqué, on aurait pu croire que Luna avait déjà senti qui était de l’autre côté. Elle était tout excitée derrière la porte et aboyait. Fort heureusement, le massif berger allemand était bien connu des invités qui n’en seraient ainsi pas effrayés un instant. Ou alors cela voudrait dire qu’ils ne sont réellement pas venu depuis bien longtemps. Ce qui n’était à coup sûr pas le cas d’Archie. Stubby en revanche… Pauvre homme, son pauvre ami… C’était d’ailleurs lui qui avait eu droit à la première accolade. Stubby était son ami depuis aussi longtemps que son comparse, ils avaient commencé sur la même scène, dans le même label, à la même période… cela pouvait rapidement créer des liens. Surtout avec ces quelques soirées qu’ils partageaient avec plaisir autour d’un morceau ou deux ainsi qu’un petit verre. Grossièrement le planning de la soirée d’ailleurs, en espérant que son initiative de réunir cette joyeuse bande saurait plaire à Stubby qui en avait bien besoin en ce moment.

-Bonsoir Messieurs, entrez, je vous en prie!

Archie était le second à être pris entre ses bras, sans oublier ce brave Parmentier qui était plus qu’attendu lors de ces réunions, quoi que surtout par Luna qui geignait déjà en trépignant en attendant qu’il puisse la rejoindre pour jouer. Quel duo adorable… Morticia pour rejoindre la salle de musique avait pris chacun de ses camarades par le bras, un de chaque côté, tenant à peu près les apparences du haut de es talons qu’elle portait encore et la mettait à une hauteur raisonnable entre eux.

-Alors, qu’avez-vous donc apporté de beau pour notre petite réunion? Racontez-moi donc vos dernières petite aventures du jour?

Une fois dans la salle de musique et les animaux en train de courir dans tous les sens, ils pouvaient démarrer tranquillement leur petite soirée. Morticia les avait invité à prendre place comme ils le souhaitaient, comme à leur habitude quelque part, ce n’était pas leur première entre ces murs. La belle avait ensuite placé un verre pour chacun sur la table avant de reprendre la cigarette qu’elle avait posé avant d’aller ouvrir pour en reprendre une bouffée.

Stubby avait passé un été difficile. Peut-être le plus difficile de toute sa vie. Retenu prisonnier sur le Chemin de Traverse, ayant vécu dans la peur, l’inanition et le mal-être pendant plusieurs semaines. Chaque jour, il avait craint pour sa vie et celle de Pomelo. Terrifié à l’idée qu’un mangemort puisse passer la porte de chez lui pour lui faire vivre un de ses pires cauchemars. Il en faisait des insomnies toutes les nuits, même au sommet de la fatigue. Il y avait eu la solitude, aussi. Celle-là avait été sa pire ennemie. Jamais il n’avait passé de plus triste anniversaire, à se retrouver à souffler une unique bougie sur un morceau de pain, faute de mieux.
Puis, un jour, un dragon les avait libérés. Stubby avait pu retrouver ses amis, sa famille. Il avait cru que ses larmes n’allaient jamais cesser de couler alors qu’il prenait sa mère, sa sœur, son meilleur ami et bien d’autres dans ses bras. C’était fini. Son calvaire était fini.
Un mois s’était écoulé depuis et Stubby commençait lentement à reprendre du poil de la bête. Il était ressorti de la prise d’otage dans un piteux états. Amaigri, mal rasé, visage fatigué et cerné. Loin d’être aussi rayonnant qu’habituellement. Cela avait beaucoup attristé ses proches de le voir ainsi. Mais cela s’était un peu arrangé. Il avait commencé à reprendre le poids qu’il avait perdu, son visage était moins fatigué. Mais le plus dur à regagner était d’ordre psychologique. Comme tous les otages, il avait été très affecté mentalement. A ce titre, il avait été qu’une reprogrammation de la tournée des Croques-Mitaines, qui devait commencer au mois de juillet, n’allait pas être envisagée tant que le chanteur vedette n’avait pas retrouvé un équilibre mental. Cela avait mis ce dernier dans une colère noire, tandis qu’il n’allait « pas si mal que ça ». Mais cela n’avait fait qu’affirmer qu’il avait grand besoin d’un suivi psychomagique. Et en effet… cela n’allait pas fort.
Stubby ne voulait plus rester chez lui, à même pas cinq minutes de l’allée principale du Chemin de Traverse. Il n’y arrivait pas, en fait. Depuis la libération, il n’y avait pas passé une seule nuit. Il chargeait juste Pomelo d’aller lui chercher des affaires. Par conséquent, il dormait un peu partout. Chez des amis, chez sa mère, chez d’éventuels amants… Ces derniers jours, il avait surtout élu domicile chez Archie. Son meilleur-ami était d’un grand soutien et d’un grand réconfort. Il lui changeait les idées. Ils sortaient, ils rigolaient, ils oubliaient cette terrible épreuve le temps de quelques heures.

Ce soir, il était convenu qu’ils allaient chez une amie de longue date qui les avait gentiment invités. Il commençait déjà à faire nuit quand les deux hommes quittèrent le domicile d’Archie.
« Ton chat a laissé plein de poils sur mes fringues. » râla Stubby en essayant de se débarrasser de ces poils tandis qu’Archie fermait sa porte en tenant aussi le coupable. « Tu devrais le raser. »
En sa qualité de chat, Parmentier avait piqué un somme toute l’après-midi sur la pile de vêtements que Stubby avait laissée traîner. Il aurait peut-être dû les ranger…
Ils transplanèrent jusqu’à la demeure de Morticia. Ils toquèrent à la porte. Des aboiements. Puis, la jeune femme leur ouvrit la porte en les saluant aimablement. Le chanteur la salua en retour en lui rendant son accolade avant de recevoir l’affection du gentil berger allemand pendant que sa maîtresse saluait Archie. Il caressa le chien avec aise.
« Whoua, ça fait une éternité que je suis pas venu, on dirait. » dit-il en regardant autour de lui. « T’as changé quelque chose à la déco, non ? Ou c’est juste moi ? »
Quand Archie lâcha Parmentier, les deux animaux abandonnèrent la compagnie humaine. Les salutations faites, Morticia prit les deux hommes à son bras pour les mener dans la salle de musique.  C’était une pièce très cosy, garnies de nombreux coussins et sièges, et Stubby en savait l’acoustique très bonnes. Faisant comme chez lui, il posa son petit sac sur la table. Il en sortit ensuite de nombreuses bouteilles d’alcool diverses et variées les unes après les autres. Il n’y avait qu’un sortilège d’extension pour faire rentrer autant de choses dans un aussi petit sac.
« J’espère que ce sera assez. Archie boit comme un trou en ce moment. » dit Stubby en sortant la dernière bouteille. « L’autre jour, on était allés dans cette boîte moldue de Soho. J’ai presque dû le porter pour le ramener à la maison. »
En vérité, c’était plutôt l’inverse. Mais Stubby était persuadé que sa version était vraie.