L'appartement londonien d'Erin Wheeler était tout particulièrement animé. Comme chaque matin, depuis le début du mois de juillet, une chorale de miaulements et de ronronnements débutait. D'autres se réveillaient au son du coq, de l'horloge ou d'une radio, la libraire avait en son foyer une dizaine de ventres sur pattes pour lui rappeler les heures de lever et de repas. Ce fut Oscar, un gros matou noir, qui se fit entendre le premier. Vint ensuite Jane qui activa ses cordes vocales. Ce fut quand Byron entra en scène qu'elle se leva finalement. Elle se fraya parmi les chanteurs amateurs et rejoignit la cuisine. Ainsi une ribambelle de chats la suivit. Par chance, tout ce beau monde habitait au rez de chaussée. De plus, un puissant et résistant sortilège d’insonorisation protégeait les murs de l'habitation de la colère des voisins. Ces courses poursuites félines quotidiennes n'inquiétaient pas les voisins - bien qu'elle ait cru entendre l'un d'eux l'appelait "la folle aux chats. Il ne fallait pas oublier Archie, le fléreur d'Erin, et Max, son chat à elle, qui venaient également réclamer leur pesant de nourriture. D'un œil encore peu ouvert, elle ramassa les gamelles et jeta leur contenu à la poubelle. Après avoir nettoyé très sérieusement, elle les remplit à nouveau de croquettes toutes propres. Ceci représentait un travail colossal. Heureusement, la magie était de son côté pour cette tâche difficile. Satisfaire les ventres de presque quinze chats sans l'aide de personne relevait presque de l'impossible.   “ Vous êtes des amours, mais j'ai hâte qu'on puisse retourner à la librairie.” Des amours, tout cela dépendait du point de vue... Son canapé et son papier peint ne pouvaient pas en dire autant. Archie ne faisait pas ses griffes sur ses meubles lui au moins. Et Max était devenu las de ces petits jeux.

Avec une habilité sans pareille, Erin enjamba tous ses chats sans en dégommer un seul.  “ Un véritable exercice d'équilibriste.” Dit-elle à Oscar qui leva son museau vers elle presque offensé par un tel acte. Ah ! Les chats, elle les adorait. Mais autant dans une même pièce, elle ne le recommandait à personne. Elle courut dans la salle de bain pour se préparer. Outre les chats très envahissants et demandeurs d'attention, Erin avait une autre mission pour la journée : récupérer son ami Nollan à Sainte Mangouste. Le mot "réceptionné" avait été employé avec humour et dérision. La pauvre âme avait reçu un incendio lors de la libération du chemin de traverse. Le connaissant, il devait tourner comme un lion en cage dans sa petite chambre d'hôpital. Souvent, elle voyait Sainte Mangouste comme une prison dorée. Tout spécialement pour des individus aussi volontaires que son ami Nollan Emerson. Fin prête, elle se dirigea vers le hall d'entrée où l'attendait bien sagement Oscar. Il lui arrivait de se promener avec Erin à l'extérieur. Ce dernier poussa un miaulement venu des entrailles que seule son interlocutrice était en mesure de comprendre. Elle rit doucement en s'asseyant sur le coffre en bois qui lui servait de siège pour chausser ses mocassins en cuir. “ Pas cette fois-ci mon chou, je dois aller à Sainte Mangouste ce matin.” Ses oreilles se redressèrent au son de ces mots familiers. Il parut inquiet. Du moins, c'était ainsi que Erin décidait de l'interpréter. “ Ce n'est pas pour moi cette fois-ci. Je vais chercher un ami. Nollan, tu te souviens ?” L'animal accepta d'un ronronnement et disparut probablement rejoindre sa petite meute.

Sur ce, elle se glissa dans le couloir de l'immeuble, ferma la porte à clef et après avoir vérifié que son voisin de palier ne se trouvait là, elle s’éclipsa dans un pop. Nollan et elle avaient convenu d'une horaire. Alors, il lui était impossible de marcher jusque là-bas. Et comme à son habitude, elle préférait utiliser le sortilège de transplanage plutôt que l’infâme réseau de cheminées. Elle ne se présenta pas au secrétariat, songeant que ce n'était nullement nécessaire, et se dirigea directement à la chambre de Nollan. Elle se rappelait très bien le numéro de sa chambre. Elle-même y avait séjourné à un moment ou un autre de ses expériences passées. Elle toqua à la porte espérant ne rien déranger. Il n'y avait pas de médicomage avec lui. Que Godric en fut remercié. “ Hey Nollan ! Ta sauveuse est enfin là.” Sauveuse ! Le mot était bien excessif. Et pourtant ! Pas tant que ça ! Elle en était intimement persuadée. “ Tu as rassemblé toutes tes affaires ? Ou as-tu besoin de mon aide ?” Erin n'aimait pas tellement faire ses bagages, ou même son sac pour un week-end. Elle savait très bien plier, mais tout finissait en boule, car elle glissait les vêtements un peu au grès de ses envies sans se soucier de leur utilité. Elle ne serait sûrement pas d'une grande aide pour Nollan. Elle pouvait bien faire un effort.