L'art de la répartie bien placée, elle savait pourtant le manier avec finesse.. Enfin d'ordinaire... avec ce garçon là, c'était une autre histoire...Daisy avait l'impression que tout ce qui sortait de sa bouche était idiot ou manquait de délicatesse.. ou alors était assez ambigu pour être mal interprété. Qu'avait-il de si exceptionnel pour qu'elle se sente si bête et vulnérable en sa présence?
La vipère l'observa se relever tout en frottant rapidement sa tenue, demeurant silencieuse. De toute façon, il valait peut-être mieux qu'elle n'ajoute rien !
Alors qu'il s'approchait pour la faire descendre de son perchoir, elle posa ses mains délicatement sur ses épaules et lui dit en guise de réponse :

- Ne me tente pas .. ! s'amusa-t-elle sans toutefois y planter ses ongles

L'heure du couvre-feu.. déjà... c'était passé tellement.. vite.... Prenant appui sur lui, elle se laissa glisser sur ses deux pieds. Laissant ses mains trainer quelques secondes, légèrement troublée par son contact, son cœur tambourinait dans sa poitrine. Elle mit sa main sur sa joue et déposa un baiser sur la seconde et lui chuchota :

- Bonne soirée, brillant serdaigle..

Posant un dernier regard sur le visage du garçon, elle se libéra et se dirigea vers l'arbre ou se trouvait toujours sa cape sur le lit d'herbe. Elle la saisit, la secoua et l'enfila rapidement, jetant un dernier coup d'œil en direction du jeune homme.
A mesure qu'elle marchait vers le château, elle tenta de faire le vide autour d'elle, profitant juste des émotions libérées en elle. Elle devait sans doute afficher un de ses sourires béats qu'ont les adolescents lors de leurs premiers émois amoureux. Sourire qu'elle s'empresserait de dissimuler aux yeux de tous......
Vivons heureux, vivons caché.... voilà ce que serait sa devise pour les prochains jours à venir.



Daisy était allongée dans les herbes hautes jaunies par le soleil rasant, les bras derrière la tête, les yeux clos, le visage baigné de lumière, apaisé.
Elle attendait quelqu'un... qui l'avait invité ici par note interposée.
L'écriture ? Elle l'avait reconnue sans mal, puisque le précédent parchemin signé de sa main, elle avait pris soin de le garder toujours sur elle, dans une poche. Comme aujourd'hui, la main plongée dans son manteau violet, Daisy caressait du bout des doigts, repliant, déroulant, inlassablement le précieux message.
Elle songeait à leur précédente rencontre, à elle et à lui au bord du lac....
Mais aussi à la multitude de questions qui s'étaient posées les quelques jours suivants : Voulait-il la revoir ? Que pensait-il de leur rencontre ? Jouait-il un jeu avec elle ? Savait-il à quel point il n'était pas sorti de son esprit ?
Puis, la journée de la vieille lui revint également en mémoire. Un grande partie des élèves s'étaient vu attribué à leur insu un filtre d'amour assez puissant pour faire des ravages. Pour elle, le filtre avait incommensurablement amplifié ses sentiments pour le serdaigle, lui déclamant son amour en chanson.. oui, oui, vous avez bien lu.. en chanson, dans laquelle elle avait mis tout son cœur et toute son âme. Mais le jeune homme, qui n'avait d'yeux que pour Sue, ne lui proposa que d'accompagner de sa voix le mariage qui l'unirait à la brunette.
Bien que les souvenirs qui en restaient, demeuraient légèrement embrumés, il n'en étaient pas moins teintés d'amertume. C'est alors plutôt l'anxiété qui l'envahit à l'idée de le revoir, tout deux avec toute la lucidité des lendemains de cuites.

Lorsqu'il la fit descendre, les deux mains sur ses hanches il aurait aimé ne jamais plus l'a quitter. La sentir proche de lui et devoir la lâcher était insoutenable. Pourtant elle se dégagea avec une grâce féline et eut un léger sourire. Ce qu'il aimait ce sourire, à croquer! Mais l'heure avançait, et bien que personnellement le temps ne semblait pas avoir d'impact sur lui, sa montre lui indiquait qu'il venait de passer deux heures à flâner le long du lac puis vers la forêt. Ses amies allaient forcément le questionner, et leur mentir n'était pas la plus aisée des choses. Cependant il savait que c'était indispensable pour pouvoir prolonger cette relation. Alors il dirait qu'il était allé à la bibliothèque, pour un serdaigle et pour Bobby plus particulièrement, c'était une excuse imparable.
Avec une douceur furtive, Day posa sa main sur sa joue. C'était comme de sentir les rayons du soleil sur le visage, et le baiser qui s'ensuivit fut tout aussi savoureux, même si le serdaigle aurait sans doute eut le réflexe de décaler légèrement son visage vers des lèvres plus subtiles, s'il en avait eu le temps.

- A toi aussi... fleur sauvage...

A peine l'eut-elle quitter que l'endroit retrouva sa morne réalité. Sans elle, il n'y avait plus rien de magique. Son sombre regard se posa un long moment sur le lac placide avant de prendre à son tour le chemin du château.


Fin du flashback

Il la regardait comme on regarde un paysage lointain, avec cette certitude qu'on ne l'atteindra jamais tout en espérant pouvoir le faire un jour. Elle semblait si près et à la fois si loin. Son corps reposait dans les herbes folles du champs tandis que son visage s'offrait à la lumière encore chaude de la soirée. Un champs parmi tant d'autres et pourtant si différent. Il l'avait choisi pour ce côté exposé aux rayons tièdes du soleil, pour cette étendue presque circulaire qui lui avait plu dès le premier jour, et pour son isolement, bien sûr.
Bien des jours s'étaient écoulés depuis le premier rendez-vous. Et l'un particulièrement désagréable pour leur relation: le philtre d'amour. Il avait envoyé balader Day avec tant d'ignorance qu'il s'en voudrait sans doute à jamais. Il aurait donné cher pour que la potion efface aussi la mémoire, on peut toujours rêver.
Il s'avança sans bruit vers la jeune femme. Elle avait les yeux fermés mais Bobby aurait pu décrire exactement le bleu ciel de ses yeux. Il se plaça de façon à lui cacher la lumière qui irradiait sa tête, un sourire goguenard sur le visage:

- Hey! Fini la bronzette!

Il s'acroupit à sa hauteur et souffla sur les mèches dorées qui cachaient son visage. Il ne savait comment engager la conversation vers le sujet de discussion qui l'interressait. Alors autant y aller franco.

- Day je suis désolé... pour le repas... je n'étais pas dans mon état normal.

Il eut une moue penaude et s'assis sur l'herbe, les jambes en tailleur, le regard fixé sur le visage de la jeune femme.

Alors qu'elle se repassait en boucle la scène, les détails restaient flous, mais les émotions étaient bien réelles. Elle avait été tiraillée entre un amour immense et incontrôlablement amplifié pour le garçon et une triste douleur de voir son amour non partagé. Le voir ainsi dans les bras de Wilson l'avait démoli intérieurement, et cette cassure avait duré au delà de l'atténuation du filtre, laissant s'insinuer de nombreux doutes en elle.
Comment savoir si les deux bleus et bronze n'étaient pas amoureux l'un de l'autre?, puisque pour elle, son désir s'était amplifié avec la potion......il en était sans doute de même pour Sue et Bobby ! Le souvenir de la déclaration de Chuck à son égard vint infirmer son hypothèse, puisque ce dernier était réellement fou de Sue. Mais alors comment le filtre avait-il choisi ses cibles? Le hasard? non, elle n'y croyait pas! Mais alors pourquoi fallait-il que le choix de Bobby se porte sur Sue. Déjà que elle et Daisy ne s'entendaient pas franchement, cela ne ferait que renforcer la dégradation de leur lien.

Le manque de chaleur soudain sur son visage lui fit comprendre que le garçon venait d'arriver, elle ouvrit difficilement les yeux, aveuglés par la lumière et constata à sa silhouette qu'il était plus proche qu'elle ne le pensait. Elle sourit à sa remarque et l'observa descendre à sa hauteur. Son souffle la fit frissonner, mais elle tenta de faire passer son tressaillement sous le compte de la légère brise qui balayait le champs.
Alors qu'il s'excusait, son visage afficha une moue peinée. Elle bascula sur le coté, appuyée sur sa main et attendit quelques secondes pour lui répondre. D'ailleurs que lui répondre?... elle se sentait particulièrement idiote pour ce quelle avait fait sous l'influence de ce stupide filtre, elle s'était ridiculisée, devant tout le monde. En même temps, si on y réfléchissait bien, tout ce petit monde était bien trop occupé à déclarer leur flamme qu'ils s'étaient sans doute moquer de la façon dont elle, elle l'avait fait !
Arrachant de sa main libre quelques herbes, sans le regarder, elle lui répondit :

- On était tous un peu ...... délirant ..... et je t'avoue que je préférerais oublier cette journée ....

Toujours les yeux baissés, elle marqua une pause pour le laisser mariner, puis tout en lui jetant une poignée d'herbes au visage, elle ajouta avec amusement :

- Mais je ne te connaissais pas ce don pour la danse !! ria-t-elle.

hop, elle lui faisait ainsi comprendre, malgré tout qu'elle se souvenait de ce qu'elle avait vu... de tout.

En évoquant la danse avec Sue, Daisy ne put s'empêcher de grimacer malgré elle. Pourtant, elle avait toujours réussi jusqu'à présent à cacher ses émotions mais son visage parla pour elle, dévoilant ainsi contre son gré, ses états d'âme à son interlocuteur. Elle avait d'ailleurs la curieuse impression que depuis qu'elle avait rencontré Bobby, elle avait de plus en plus de mal à masquer ce qu'elle ressentait. Comme si tous les sentiments qu'elle avait réprimés jusqu'alors ne demandaient qu'à remonter violemment à la surface de façon aussi intense qu'explosive.
Alors qu'elle allait lui répondre (une phrase dont il ne saura jamais le contenu ), Bobby la releva et la saisit par la taille, glissant sa main dans la sienne. Il lui révéla un brin de sa vie, petit morceau minutieusement choisi et l'entraina dans une valse légère. L'apprentissage des danses qu'il citait ne lui étaient bien évidemment pas inconnu, ainsi elle se laissa guider au gré des pas de son cavalier.
Son cœur s'accéléra à mesure qu'il accéléra la cadence, la chaleur lui monta aux joues qui s'empourprèrent aussitôt. Son regard sombre, aussi profond que perçant, plongé dans le sien comme pour sonder le fond de son âme, Daisy se sentait plus vulnérable que jamais. Finalement il s'arrêta et lui donna le plus doux des baisers, qu'elle prolongea sans aucune hésitation.
Une évidence, c'était devenu une évidence. Tous ses doutes, toutes ses questions venaient de s'évanouir en un simple baiser. Ils étaient là, tous les deux, seuls au monde, quelque part au milieu d'un champ, et c'est ce qui comptait.
Puis, il rompit le silence de ces quelques mots qui font sourire les amoureux.
Ces mots, elle les avait rarement entendu, et encore moins souvent prononcé. Et pourtant ils lui brulaient le lèvres. Alors qu'est-ce qui l'empêchait donc de les lui murmurer ? Le manque d'envie ? .. non, c'était plutôt le contraire... La peur de mettre des mots sur ces émotions débordantes ? Plus probablement.....Mais savait-elle réellement ce qu'ils voulaient dire ?
Oui elle avait bien vu tous ces films moldu à l'eau de rose ou les amants se déclament les trois mots en long, en large et en travers, elle se souvenait aussi avec agacement des gamines hystériques les criant à tue-tête à l'adresse de leur rock-star préférée. Mais les entendre ou les dire avec profondeur et sincérité, avec toute la passion sous-entendue...C'était autre chose...
Ses mots là sont précieux, ils ne se chuchotent qu'à l'oreille de son amour, ils se déclament avec passion une fois ou deux, sans en faire trop, lors d'instants uniques, et surtout ils se prouvent, sans être dits, par des gestes tendres et de l'attention constante, par des baisers fougueux et des œillades langoureuses.
Sans le quitter des yeux, elle finit par compléter sa phrase, comme on effeuille une pâquerette, d'un: "un peu" accompagné d'un baiser sur la joue, puis d'un "beaucoup" ponctué d'un baiser un peu plus appuyé dans le cou, suivi d'un "passionnément" qu'elle scella en un baiser aussi doux que celui qu'il lui avait offert.
Saisissant la main du jeune homme dans la sienne, elle se dégagea finalement de son étreinte et l'entraina dans une marche lente au milieu des herbes hautes. Caressant de sa main libre les feuilles jaunes, Daisy lui demanda, avec l'envie irrésistible de tout découvrir sur le beau garçon :

- Bon, maintenant que je connais tes talents de danseur, dis moi quelque chose d'autre sur toi qui pourrait me surprendre ...