C’était plus fort qu’elle, Minerva ne pouvait s’empêcher d’en vouloir à sa mère. Un été, puis une rentrée s’étaient écoulés mais sa rancœur ne fondait pas comme neige au soleil. Morgan Moon lui avait menti. TOUS l’avaient tenu dans le secret, l’ignorance. Mais pour qui donc la prenaient-ils ? Une enfant ? Elle ne l’était plus depuis belle lurette, et si les ans n’avaient pas opéré alors les tragiques évènements de cette fin de décennie s’en chargeaient. C’était prévisible, classique même. Ses cousines, ses tantes, sa mère, sa grand-mère, son arrière-grand-mère et ainsi de suite… Toutes ses aïeules, hormis quelques noms à jamais tus, avaient connu le même sort, et à en voir le résultat un mariage arrangé n’était pas toujours source de malheur. Mais elle… Que voulait-elle, qu’espérait-elle de ces seventies ?
Un vent de liberté comme celui qui soufflait en ce moment même alors qu’elle montait, à bout de souffle, les joues rosies par l’effort et l’hiver naissant, à la volière ? Ses talons claquaient sur les marches de pierre, et de temps à autre elle se tenait aux murs pour s’économiser. Tout cela était ridicule, grotesque même et indigne de celle qu’elle se devait d’être, mais par Merlin, qu’elle avait hâte de l’ouvrir cette lettre ! Elle posa enfin le pied sur la dernière marche et pénétra à grands pas dans la volière où Omega, son bel hibou grand-duc l’attendait. Le rapace lui tendit la patte et elle s’empressa de libérer le parchemin de ses chaînes. Minerva remercia le coursier ailé d’un biscuit et d’une caresse avant de le regarder disparaître dans le lointain. Quelque part, au-dessus de cette immense forêt odorante, belle mais terrible planait son Omega, lui qui s’envolait rejoindre Franz. Elle se demanda un instant où il pouvait bien être en ce moment, vers quelle contrée ses affaires l’envoyaient.
De la pulpe rosée de ses doigts elle caressa le dessin mystérieux puis le pendentif gravé du même signe.
« Franz,
C’est un émerveillement de voir cette figure s’élever. Je doute de parvenir à un résultat convenable seule. Personne dans mon entourage ne semble s’intéresser à cette magie, mais je ne peux en vouloir à mes camarades de porter une grande attention à leurs ASPICS. C’est un examen crucial pour les sorciers anglais. Les résultats ne font pas tout et il est toujours utile de porter un nom tel que le mien, ou encore le tien, mais dans certains domaines les relations ne peuvent rien si les compétences ne sont pas réelles.
Maintenant que je suis majeure je peux décider ou non de passer les vacances à Poudlard. Ma décision n’est pas encore prise, et bien sûr il me faudra prendre en compte l’avis de ma famille. Alors peut-être que nous pourrions nous voir avant l’été ? Mère ne se remet toujours pas des évènements tragiques qui ont durement touché les Moon, son moral décline en dépit de son activité. Son commerce ne peut tomber en ruines, je ne m’y résous pas. Bien sûr toute l’influence et la fortune des Moon ne repose pas sur son affaire, mais elle s’est tant investie que je ne peux rester les bras croisés. Qu’adviendra-t-il des nôtres si nous ne nous battons pas pour conserver ce qui nous appartient ?
Peut-être auras-tu l’occasion d’être chargé de quelques missions par Ollivander. Ce serait alors l’occasion de nous mesurer à cet enchantement.
Je suis heureuse de constater que le savoir des Shipton traverse les frontières du pays. Sa famille est propriétaire de la librairie depuis des générations, ce sont des sorciers érudits qui ont une grande connaissance de notre histoire passée. Marcus en particulier est un sorcier dont les connaissances sont insondables. D’ailleurs n’aies de craintes pour mes ASPICS, j’ai pris conseil auprès de Marcus pour me préparer à ces épreuves. Son avis est précieux et toujours le bienvenu. Il m’a constitué une liste d’ouvrages à consulter en plus des manuels scolaires. La bibliothèque de Poudlard est respectable bien qu’aux Grimoires du temps le choix soit plus vaste, et Mrs Pince, la bibliothécaire connaît bien les lieux. Je regrette seulement qu’à Poudlard nous n’ayons pas les mêmes enseignements qu’à Durmstrang. Nous gagnerions beaucoup à savoir distinguer les maléfices et la manière de s’en prémunir. Malheureusement ce n’est pas l’avis de Dumbledore. Certainement craint-il, et peut-être à juste titre, que nos esprits s’égarent et que nous tombions dans l’excès.
Gregorovitch ? LE fameux Gregorovitch ? Nous les anglais ne jurons que par Ollivanders, et pour cause, ses baguettes sont d’excellente qualité. Tous les Moon achètent leurs baguettes chez Ollivanders et nous avons toujours été satisfaits du résultat. J’ignore si c’est du à la pureté de notre lignée ou la baguette mais toujours est-il que plusieurs sorciers se sont illustrés par l’efficacité de leurs sortilèges, mais hormis Marcus, je suis certainement la seule à m’intéresser aux reliques… Mon grand-père de son vivant a rencontré Gregorovitch, il était jeune à l’époque et pas encore marié. Il ne l’estimait guère. Bien de l’eau a coulé sous les ponts depuis, et Gregorovitch n’est plus aujourd’hui l’homme d’hier.
Toutefois je rejoins ton avis. Je doute que Gregorovitch ai un jour eu en sa possession une telle baguette. Cette relique sème la mort, déchaîne les passions et a le pouvoir de transformer un honnête homme en meurtrier. Ce sont des traces de sang et de larmes qu’elle laisse. S’il l’avait un jour possédé, non pas comme un vulgaire objet, mais bel et bien possédée comme je suis maîtresse de ma baguette alors Gregorovitch serait mort.
Non Franz, j’ai l’intime conviction qu’une telle relique ne peut avoir d’affinités qu’avec de grands sorciers dont le destin est de façonner notre monde. Comment de tels pouvoirs pourraient servir des sorciers de peu d’avenir ? Ta connaissance des baguettes est plus poussée que la mienne, et ce n’est pas un avis de spécialiste, mais plus une impression, un sentiment que j’ai. Ma baguette était faîte pour moi tout comme la tienne. Nous ne choisissons pas nos baguettes, ou peut-être que c’est un consentement qui nous dépasse, une alchimie si subtile que nous en ignorons les rouages. Toujours est-il que la baguette de sureau ne s’attache guère à un seul maître, elle se choisit le plus fort, le plus belliqueux.
[…]
Portes toi bien,
Minerva."
P.S : Alshaïn se moque des sortilèges d’illusion mais je suis certaine qu’elle les trouvera plus drôles lorsque des première années auront des têtes d’animaux !
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