On ne chasse pas les images ϟ Bonnie.

Des bruits de pas, des murmures sur son passage, un visage défait, cerné, fatigué et froid. D'une froideur isolante, une apparence qu'il contrôlait au millimètre prêt. Une voix aiguë provenant d'on ne sait où lui cristallisa les oreilles, il jura et se retourna. Personne, il était seul. Reprenant sa marche, il accéléra le pas. Nouvel écho. Il regarda par dessus son épaule. Personne. Une fois de plus. Il secoua la tête afin de chasser la voix, elle hurlait à présent, lui bombardait le cerveau de ses cris stridents qui ne s’arrêtaient pas. Il ferma les yeux, violemment. Il devait parvenir à se contrôler, il y arrivait toujours. Il se frotta le visage pour se donner un peu plus de constance, il arrivait dans un couloir hanté de monde. La voix continuait. Il ne comprenait pas, le manque de sommeil surement. L'épisode des toilettes avec quatre membres du cartel l'avait profondément épuisé, et il poussait le vice toujours plus loin en mimant de faire ami-ami avec sa victime, il réfléchissait trop, il commençait à douter de ses capacités. Il allait peut-être trop loin dans la torture, qu'il finissait lui même par être complément hors de contrôle. Il fut pris d'une envie irrésistible d'hurler à cette voix de foutre le camp, de se frapper le crâne contre le mur. Tout se passait dans sa tête, mais rien n'était apparent, il était dans son domaine, mais pourtant on le poussait dans ses pires retranchements. Il adressa un signe de tête à Rogue qui sortait de son cours de potion, cependant il ne s'arrêta pas. Personne ne devait ne serais-ce qu'entre apercevoir cette face caché. Personne. Les démons de Rosier, étaient des épines qui le piquait parfois, et il ne pouvait rien faire contre cela.

Et puis, il y-avait Edel', elle aussi il l'avait trahit, elle avait la seule qu'il respectait et pourtant, sa nature de manipulateur avait repris le dessus, il n'avait pas su faire la part des choses. Peut-être aurait-il du, cependant il ne savait pas exactement ce qu'elle représentait pour lui. Elle avait été sa seule amie, la seule qu'il respectait, ils s'étaient toujours compris sur tout, et aujourd'hui c'était fini, parce qu'il avait fait le choix de trop. Il l'avait éloigné contre sa volonté d'une des seule chose qui comptait pour elle, et visiblement ce n'était pas lui. Alors il avait su jouer sur sa faiblesse, et elle avait perdu. Mais lui qu'avait-il perdu dans tout cela ? Il ne réalisait pas très bien, parce qu'Evan Rosier était toujours gagnant. Il décidait, il agissait, tout se déroulait toujours de cette façon. Mais il l'avait perdu, elle. A cette pensée il ferma les yeux, continuant son chemin dans les dédales des couloirs, à l'aveuglette, Evan Rosier était aveugle, il ne comprenait ni les émotions joyeuses, ni celles qui parvenaient à le toucher, il se pensait intouchable, par quiconque, mais par lui même ? Il chassa ses pensées aussi rapidement qu'elles avaient fait irruption dans son esprit, d'un revers de la main. Mais était-il aussi fort qu'il le prétendait ? Tous répondraient un immense oui, à l’unanimité, tous sauf une. Tout se mélangeait, il n'était plus très sur de la tâche qu'il devait accomplir aujourd'hui pour le cartel, mais en posant son regard gris sur le livre qu'il tenait à la main, il se rappela et les cris cessèrent, comme s'ils n'avaient jamais existé.

Nouvelle expérience, nouvel enjeu, nouvelle occupation. Cette après midi, il était chargé d'étudier un ouvrage extrêmement ancien sur les sortilèges de magie noire, découvert dans la réserve le soir précédent, mais il devait faire vite, parce que si quelqu'un se rendait compte de l'absence du livre, le cartel risquait gros, et il en portait la responsabilité. Personne non plus ne devait le voir en possession de l'objet interdit et il décida que l'une des vieilles salles inutilisées serait l'endroit idéal afin d'être tout à fait tranquille. Il s'y dirigea d'un pas presque chancelant qu'on ne lui connaissait pas. Evan fit le choix de la pièce la plus à l'écart et la moins fréquentée, il ne risquait pas d'être dérangé. Il poussa la porte et entra regardant derrière lui s'il n'y avait personne. Rien. Il souffla. La pièce était poussiéreuse et seules les fenêtres dont les rideaux n'étaient qu'à moitié fermés, laissaient filtrer la lumière. Il posa l'ouvrage sur une table dont la propreté laissait un peu à désirer, mais il s'en contenterait. Lorsqu'il se retourna afin de s’asseoir un lueur de surprise s'alluma sur son visage, et disparut aussi tôt. Il n'était pas seul. Worthy se trouvait à quelques mètres de lui. Reprenant toute confiance, il s'approcha de la jeune femme, il devait par tout les moyens cacher ce qu'il faisait ici, surtout à elle, il n'avait absolument aucune confiance. "On révise seule ? On ne donne plus de cours particulier à ce cher Bartemius ? Il a enfin eu le courage de te repousser ?" Il marqua une courte pause. "Tu m'en vois désolé pour toi, sincèrement". Rosier était incapable d'être sincère, tout sonnait faux dans sa bouche. Et pourtant, aujourd'hui, il avait fait une erreur de plus, quelque chose qu'il ne lui ressemblait absolument pas, il l'avait provoqué, alors qu'il savait très bien que ce n'était pas la meilleure façon de la faire partir. Perturbé. Étrangement. Perturbé.

La fin d'après midi de ce printemps froid l'avait poussée jusqu'au fin fond des vieilles salles inutilisées. La poussière et le silence lui apportaient une agréable atmosphère pour travailler. Travailler, ce qu'elle aimait le plus. Plus que pour satisfaire les exigences de son rang, plus que pour la fierté de sa famille, elle prenait un réel plaisir à apprendre. Et se destinait à devenir la digne héritière de son père, Worthy Sr., historien, comme nombre de Worthy avant lui.

Sous ses manuels scolaires, Bonnie dissimulait l'un de ses livres de chevet du moment. Livre qu'elle avait eu en cadeau pour Noël et qu'elle étudiait depuis. A Poudlard, seul Bartemius Croupton l'avait surprise un soir avec. Elle avait redouté sa réaction, mais finalement son jeune camarade s'était révélé intéressé par sa lecture. « Histoires occultes », l'un des ouvrages les plus récents sur les mages noirs et l'art occulte.

Alors qu'elle était sereine et studieuse, des pas se firent entendre, troublant sa concentration et attisant sa curiosité. L'oreille tendue, ils approchaient. La porte, aussi discrète qu'un pachyderme, s'ouvra. Le rythme cardiaque de la jeune et jolie blonde s’accéléra. Avec la peine ombre, elle ne distingua que les formes d'un élève, à sa tenue et sa carrure. Mais lequel ? C'était un garçon. Et il ne semblait pas avoir remarqué sa présence. Elle l'observait silencieuse. Quant elle le reconnu. Evan Rosier. Serpentard hautain et odieux. Un rictus maléfique barrait les lèvres douces de la jeune fille.

Son camarade ne mit pas longtemps à l'apercevoir dans son coin, près d'une fenêtre obstruée par d'épais rideaux. Il s'approcha et sa voix si particulière et reconnaissable vint mettre un terme au calme.

– On révise seule ? On ne donne plus de cours particulier à ce cher Bartemius ? Il a enfin eu le courage de te repousser ? Il marqua une courte pause. Tu m'en vois désolé pour toi, sincèrement.

Sans perdre son discret pincement sarcastique, elle baissa la tête, avant de relever son visage, neutre, froid, pour planter ses prunelles vertes perçantes dans celles du Serpentard. Sur son visage, il y avait une lueur qu'elle n'arrivait à définir, mais il était étrange. Au fond, elle savait que son apparente arrogance cachait quelque chose et elle était bien décidée à découvrir ses secrets.

– Inutile d'être aussi agressif. Je ne vous ai pas attaqué. Rentrez vos crocs. Après un court silence, elle l'invita du regard et d'un geste furtif à prendre place face à elle. Asseyez-vous.

Elle venait de poser les règles en le vouvoyant, il fut extrêmement surpris. L'arrogance dont elle avait fait preuve en lui répondant de la sorte, l'étonnait, n'imaginant pas une seule seconde qu'elle était d'un rand au dessus de ce qu'elle montrait. Elle aussi jouait avec les apparences, c'est ce que Rosier en conclu plutôt aisément. Raison de plus pour se méfier de la petite blonde, peut-être trop sure d'elle. Il avait fait une erreur de plus en se permettant de la tutoyer elle n'était pas des femmes avec lesquelles on se permet ce genre de familiarité et cela lui plaisait bien, malgré l'affront qu'elle venait de lui faire, après tout cela fonctionnait dans les deux sens, alors il s'en accoutuma sans relever, mais en ressorti quelque peu blessé dans son orgueil. Si une occasion de lui faire comprendre qui il était lui tombait dans les mains, il ne manquerait pas de la saisir, il en était certain. Cependant, puisqu'elle le désirait sa façon de parler allait changer. Puisqu'elle le désirait, il se comporterait avec elle, comme avec n'importe qui méritant le respect, cependant s'il s'avérait que ce n'était pas le cas, le ton risquait fortement de changer. Elle avait implicitement exigé, elle assumerait. Il accepta son invitation en prenant place sur le siège face à elle, se sentant observé il plongea son regard d'un gris perçant dans celui de son interlocutrice. Il avait auparavant fait quelques recherches sur sa personne, ou du moins s'était renseigné, surtout auprès de Barty qui ne cessait d'en faire son éloge, et le paternel Rosier quant à lui connaissait le Worthy, mais Evan n'y portait pas une très grande attention, son père côtoyait beaucoup de monde, mais cela ne voulait pas dire qu'il les appréciait. Mais ce dont il était sur, était le fait qu'elle ne s'intéressait pas à la magie noire, en tout cas pas de la façon dont le cartel s'y intéressait, soit en profondeur et en expériences. Elle n'était donc pas d'un très grand intérêt, voir une faiseuse de troubles. Rosier n'avait jamais réellement apprécié la relation qu'elle entretenait avec Croupton, cette fille avait une mauvaise influence et elle risquait de déjouer tout ses plans, de faire un jour de Bartemius un véritable membre du cartel et non pas un homme tel que sa mauviette de père. Et Evan avançait rapidement, il broyait les obstacles qui se trouvaient encore en travers de la route de son prétendu ami. Et si elle s'interposait un peu trop, ce serait à son tour, à elle aussi. Le jeune homme continuait à la fixer pendant que nombre de pensées lui traversait l'esprit, et il fut heureux de constater qu'une fois de plus son visage restait de marbre, il avait repris toute sa constance, peut-être grâce à elle. Il observait chacune des expressions du visage de la jeune femme sans aucune gêne, il remarqua le rictus qu'elle avait au coin de la bouche et que ses muscles faciaux faisaient discrètement bouger sans qu'elle ne s'en rende compte. Il pris enfin parti de lui répondre, son ton froid ne le quittant jamais, toujours aussi sur de lui, il allait jouer. "Ce ne sont pas des crocs ma chère, mais bel et bien des épines et vous les auriez senti si elles étaient sorties." Il jouait sur ses phrases, cherchant à reprendre la main. Courte pause, il se passa la langue sur ses lèvres afin de leur rendre l'humidité qu'elles avaient perdu. "Il est vrai que ce n'est pas moi que vous avez attaqué." Elle n'était pas bête, elle comprendrait très bien où il voulait en venir, mais il ne se mouillait pas, il parlait toujours à mis mot, cela lui évitait de se compromettre. "Pardonnez ma curiosité, cependant j'apprécierais de savoir pourquoi vous m'invitez si cordialement à m'asseoir non loin de vous. N'est-ce qu'un simple élan de politesse ou est-ce, disons, un peu plus intéressé ?" Rosier posa délicatement ses mains sur la table, ne perdant pas non plus son premier objectif de vu, elle ne devait pas s'intéresser au manuscrit qui était posé à quelque table de là, alors s'il était nécessaire de lui faire la conversation, il se ferrait violence et deviendrait un peu plus bavard qu'à l'accoutumé. Puis il devait l'avouer, cette jeune femme était plus intrigante qu'il ne l'aurait crut.

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