Août 1978, Chemin de Traverse, boutique " Moon & Stars".

 - Minie, l'elfe d'Edgar Blackstone a un message pour toi.
 - Blackstone ? fit-elle surprise en relevant le menton de ses parchemins.
 - Oui, je le fais entrer ?
 - Non, laisses, j'arrive.

La créature tremblante s'inclina si bas que son long nez fin et étrangement tordu manqua d'effleurer le sol, ses oreilles lui semblèrent plus tombantes encore, et d'une manière générale la pauvre créature semblait bien misérable. Minerva se garda bien de se laisser transparaître sa compassion, non pas qu'elle soit une militante pour les droits des elfes, loin de là, mais elle n'avait jamais supporté la violence de certains maîtres envers ces pauvres choses soumises.

 - Miss, mon maître a un message pour vous Miss Moon... Le maître a dit de vous parler à vous seulement... Le maître veut vous voir tout de suite, dans son bureau, au ministère... Le maître n'aime pas attendre.
 - Très bien, j'arrive tout de suite. Gloria n'oublies pas la commande de Mrs Yaxley, et si je me retarde trop envoies un hibou au ministère pour que je sois à l'heure pour la livraison Nott.

Et voilà qu'elle devait tout abandonner en l'état pour satisfaire Viviane seule sait quel désir impérieux de Mr Blackstone! Elle soupira en se sortant d'une des nombreuses cheminées du ministère. Elle n'était pas une de ces petites mains qu'il pouvait convoquer comme bon lui semblait, elle n'était pas non plus à son entière disposition! Enfin, à quoi bon pester, Edgar Blackstone faisait partie de ces clients soucieux de leurs apparences, à la bourse pleine et ouverte, haut fonctionnaire de surcroît et membre de ces familles nobles... Bref, un client à chouchouter pour la boutique Moon & Stars! 

Elle regrettait toutefois de ne pas avoir eu le temps de se mettre sur son trente et un, et se désola de sa robe blanche de soie aux manches courtes, certes belle et élégante, mais simple et sans fioritures. Et c'était en fin de compte probablement ce qui mettait le plus en valeur la belle jeune fille qu'elle était devenue, la coupe ajustée, le tissu pur et noble. Un " Entrez " la tira brusquement de ses réflexions, elle entra dans le bureau du sorcier, impressionnée par le rang social de Blackstone, et peut-être aussi par l'allure encore séduisante de l'homme, et lui fit son plus beau sourire:

 - Bonjour Mr Blackstone, j'espère ne pas trop vous avoir fait attendre.


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- « Monsieur, je suis vraiment navrée mais nous n’avons pas réussi à mettre la main sur le moldu, il a pris la fuite après avoir crié que sa femme avait été assassiné par un homme tenant un bâton dans  ses mains. »

Blackstone soupira, comment était-il possible d’avoir un si gros incapable sous ses ordres ? Edgar n’avait aucune idée de comment ce type avait pu finir dans son service mais une chose est sûre cet idiot n’y resterait pas longtemps. Sombre crétin que croyait-il en venant à cet instant dans son bureau, que le directeur du département des oubliators ferraient preuve d’indulgence, qu’il l’applaudirait. Non surement pas, il fallait être fou ou idiot pour espérer obtenir un sourire de la part d’Edgar Blackstone. L’homme ne donnait que du mépris et parfois du respect quand il s’agissait de ses collègues ou de ses amis.  Encore une fois, le mangemort devrait faire le travail lui-même. Calmement, l’oubliator se leva et se dirigea vers la sortie. Il tourna avec soin la poignée de la porte et se tourna vers son collègue lui lançant un regard froid emplie de mépris.

- «  Une nouvelle fois je vais devoir m’en occuper moi-même, sort de ce bureau et que je ne te vois plus jamais ici. »

L’employé se leva et lui lança un regard interrogateur.

- « Mais Monsieur…Comment… ? »

- «  Je t’ai demandé de sortir ! »

L’homme finit par obéir et Edgar ferma la porte juste derrière lui. Franchement, comment ce type avec un échec pareil pouvait espérer revenir ici, il devrait être mort de honte. Le mangemort retourna tranquillement s’asseoir à son bureau, d’ici quelques minutes il accueillerait un représentant de la famille Moon. En effet, quelques secondes plus tard des coups furent frappés à la porte et Edgar invita la jeune Minerva a entré. Bien qu’elle soit vêtue sobrement d’une simple robe blanche, la jeune fille était resplendissante. Elle semblait sûre d’elle et déterminé, une bonne chose car dans le monde d’aujourd’hui mieux vaut savoir ce que l’on veut. Le Blackstone invita d’un geste de la main la Moon à s’asseoir sur la chaise occupée quelques minutes plus tôt par l’un de ses employés.

-   « Navré de t’avoir fait venir, ces derniers temps je n’ai pas une minute à moi pour venir faire un tour dans votre boutique. Tu veux boire quelque chose ? »

Le mangemort éluda le fait qu’il détestait se promener sur le chemin de traverse au milieu de cette foule d’impur et qu’envoyer son elfe de maison pour ce genre de commande l’agaçait.  N’attendant pas la réponse de Minerva, l’homme se leva et se dirigea vers un meuble en acajou où il tira deux verres et en profita pour se servir un whisky pur-feu. Tout en attendant la réponse de la jeune femme, Edgar se retourna dévisageant avec calme la jeune Moon.

- «  Je ne m’attendais pas à ce que soit toi qui te déplace alors comme ça c’est toi qui gère la boutique ? »

Si le Blackstone avait fait venir la jeune femme ce n’était pas simplement pour un bon de commande mais plutôt pour prendre des nouvelles de la famille Moon. Edgar était curieux et il aimait avoir la main sur tout.

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Edgar Blackstone n'était pas effrayant à cet instant, car c'était le haut fonctionnaire, l'homme du ministère qui se tenait devant elle et non pas le fidèle mangemort du Lord. Pour autant Minerva n'était pas particulièrement à l'aise. Qui était ce pauvre bougre qu'elle avait croisé, et qu'avait-il bien pu dire ou faire pour avoir une mine aussi dépitée et inquiète ? La rouquine balaya cette pensée, en songeant qu'après tout ce n'étaient pas ses affaires, et qu'elle se faisait probablement des idées. Tout le personnel du ministère paraissait inquiet, au bord de l'épuisement ces derniers temps! Et pour cause, il suffisait de lire les journaux, les drames se comptaient par dizaines!

-   « Navré de t’avoir fait venir, ces derniers temps je n’ai pas une minute à moi pour venir faire un tour dans votre boutique. Tu veux boire quelque chose ? »

Sur, déterminé, confiant, autant d'adjectifs qui collaient à la peau du Blackstone et qu'elle ressentait. La jeune femme s'installa sur le fauteuil, le dos bien droit, sans trop prendre ses aises afin de ne pas gâcher sa grâce naturelle. Elle l'observa se servir un whisky-pur-feu, en se demandant s'il n'y avait pas autre chose que de l'alcool à boire. D'une parce qu'une femme ne boit pas d'alcool, quelle vulgarité, et de deux parce q'elle n'aimait pas trop ça.

- Un jus de fruits frais s'il-vous-plaît, dit-elle de sa voix aimable, policée.

- «  Je ne m’attendais pas à ce que soit toi qui te déplace alors comme ça c’est toi qui gère la boutique ? »

Son sourire prit un petit air victorieux, ravie que l'on remarque enfin le changement progressif de la situation. La boutique était encore officiellement gérée par sa mère, Morgan, mais cette dernière voyageait toujours plus loin, et toujours plus longtemps. Morgan était définitivement contaminée par le virus du voyage, et Minerva soupçonnait même sa mère d'en faire un prétexte bien pratique pour s'aérer l'esprit, et se détacher du clan Moon pour mieux se ressourcer. En attendant il fallait bien un chat pour surveiller les souris, et qui mieux que l'enfant naturelle de Morgan, son héritière pour assurer la relève en son absence ? Minerva connaissait la boutique par coeur, les tissus n'avaient plus de secrets pour elle, la clientèle de sa mère voyaient en elle la petite Minie, adorable et serviable gamine toujours dans les pattes de sa mère.

- Mère semble contaminée par le virus du voyage, dit-elle en esquissant un sourire, Et lors de ses déplacements c'est moi qui m'occupe des livraisons, des réceptions, des commandes, des papiers et de plein d'autres petites choses! Je ne pensais pas que c'était aussi épuisant par moments! Elle osa un timide rire, clair, doux, amusée par cette vérité. Pour ce qui est des livraisons, j'accompagnais souvent mère avant d'entrer à Poudlard, et après pendant les vacances. Alors ce n'est qu'une formalité. Mais je vous rassure, je trouverai toujours quelques instants pour me déplacer lorsqu'il s'agit de vous Mr Blackstone. Nos clients sont souvent des personnes influentes, et qui ont des responsabilités, et pas toujours le temps de faire les boutiques finit-elle en affichant un sourire plus large, son rire doux, contenu dans la voix.

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Se retrouver face à Edgar Blackstone avait quelque chose d'étrange. Son esprit faisait un bond en arrière, pour retourner au mariage de Daisy, et ça laissait mal à l'aise. Le mariage avait été orchestré d'une main de maître, toute la cérémonie en elle même avait été parfaite, mais l'amour... Ou plutôt l'absence d'amour l'avait glacé. Naïf et romantique, oui, c'était idiot de croire que l'amour avait quelque chose à voir avec l'union de Daisy Blackstone et Damien Donagan. Un arrangement, une alliance, un intérêt commun à voir les deux familles se rapprocher.

- « Ce sera jus d’annas dans ce cas, je n’ai plus que ça. »
- Merci. Elle attrapa le verre et s'empressa d'en avaler une gorgée pour masquer son trouble et ne pas dévoiler ses pensées au Blackstone. Il était bien la dernière personne en cet instant avec qui elle avait envie d'aborder ce sujet, non seulement il l'impressionnait, mais en plus " l'affaire Orchdid " n'arrangeait certainement pas les choses. Au moins il semblait ne pas en être affecté, comme si tout ça n'était qu'un misérable contre-temps.

- « En tout ça à l’air de te plaire si je ne me trompe pas, tu as terminé cette année l’école ? »
- Oui, c'était ma dernière année à Poudlard, fit-elle, nostalgique, le regard un peu vague en songeant qu'elle ne prendrait plus le Poudlard Express. Une nouvelle vie débutait, mais la jeune femme n'était pas certaine d'en maîtriser tous les codes. Toute sa vie on l'avait préparé à être une Moon, à ne plus simplement être une élève, mais désormais dans le grand bain elle regrettait le temps où rendre un parchemin à temps était l'une de ses principales préoccupations.

- « C’est la commande, ma femme viendra surement la récupérer dès que tu l’auras réalisé mais dit-moi quelque chose m’intrigue dans ce que tu m’as dit, les membres du clan Moon te laisse gérer seul la boutique ? Ce n’est pas que je doute de tes talents en la matière loin de là. »
- Ce sera un plaisir de recevoir Mrs Blackstone répondit-elle, tous sourires, avant de boire une nouvelle gorgée, histoire de réfléchir à sa réponse. Nous y voilà songea-t-elle. Edgar Blackstone ne l'avait pas fait venir pour la commande, puisqu'il s'agissait d'une banale enveloppe que n'importe quel hibou du ministère aurait pu lui apporter. Depuis le début elle avait eu raison de suspecter une manœuvre de la part du directeur des oubliators, et Minerva s'autorisa un petit sourire avant de lui délivrer sa réponse. Visiblement sa position au sein du clan ne passait pas inaperçu. Tant mieux, c'était bon signe.

- Aucun Moon ne connaît mieux la boutique et sa clientèle que moi. Et puis je ne la gère pas à proprement parler, c'est toujours à Mère que les décisions finales reviennent, mais lors de ses absences c'est moi qui suis chargée de m'occuper de la boutique. Elle but à nouveau une gorgée de son jus d'ananas, hésitante. Devait-elle lui parler de son héritage, de ses manoeuvres ? Pourquoi pas, autant faire connaître au monde sa position de force. - Je sais mieux que quiconque ce qui peut être utile ou au contraire nuire, et j'ai d'ailleurs fais des propositions à Mère qui ont été acceptées. Les protections de la boutique ont été renforcées, je m'en suis chargée. Nous allons prochainement faire installer le transplanage d'urgence. Jusqu'à présent ce n'était pas nécessaire, mais plusieurs de nos clients étrangers sont inquiets de la situation actuelle du pays, et bien que la boutique soit un lieu sur, elle insista bien sur ce dernier mot, le regard sans nuage, limpide, car elle savait que Blackstone faisait partie de ces familles sang-pur qui ne se sentent pas concernés par les menaces, j'ai jugé préférable de ne pas perdre leur confiance. Ils ne savent pas à qui se fier et pour eux la sécurité est un facteur déterminant, et ce serait vraiment dommage de voir leurs gallions aller ailleurs.