Les premiers rayons de soleil après l'orage, Eanna n'avait pas envie de rater ça. En fait, elle guettait la fin de la pluie depuis une heure pour se précipiter dehors, désespéremment à la recherche d'air. Il fallait qu'elle respire, qu'elle se calme. Cela faisait deux jours qu'elle était revenue à Poudlard. Elle s'était un peu remise du choc de la découverte d'une de leur camarade de maison (qu'elle ne connaissait pas personnellement, mais une Poufsouffle quand même !) avait été tué, et que c'était la cause de leur "enfermement" pour le reste de l'été "à l'abris" comme ils disent. Grâce à son amie Alice, entre autre. Mais il fallait qu'elle se change les idées, et pour cela, il fallait qu'elle se retrouve enfin seule.

A vrai dire, ce qui l'aurait le plus détendu, ça aurait été d'enfourcher son balais et de faire quelques pointes de vitesses, mais son père ne lui avait pas encore renvoyé sa Comète. C'est donc clouée au sol qu'elle se dirigeait tranquillement vers le lac, faisant un petit détour par la lisière de la forêt, histoire de sentir la délicieuse odeur des bois humides. Quand on est Irlandaise, on aime le vert et la pluie semblait avoir redonné vie au parc trop sec. L'orage avait d'ailleurs chasser tous les élèves qui avaient tendances à coloniser les bords du lac pour faire bronzette. Tout était calme, et c'était exactement ce qu'Eanna recherchait.

Ce fut donc tout d'abord une petit pointe d'agacement qui la prit lorsqu'elle apperçut quelqu'un d'autre au bord du lac. Pas moyen d'être seul dans cette école ! Puis la curiosité prit le dessus et elle s'approcha discrètement. A moitié dissimulé derrière un arbuste, elle reconnut vaguement un élève qu'elle avait déjà croisé. Il faut dire que ses cheveux aîle de corbeau et sa peau doré ne passait pas vraiment inaperçu au milieu de l'immense majorité des teints pâles brittaniques qui peuplait Poudlard. Un Gryffondor d'après ses souvenirs...

Qu'est-ce qu'il fabriquait seul au bord du lac ? Eanna avait du mal à voir ce qu'il faisait, mais il semblait plus ou moins penché vers l'eau. Personne ne lui a parlé du calamar géant ? En essayant de s'approcher un peu plus, elle effraya une famille de moineau qui s'était abritée dans un buisson et s'envola avec force de piaillements. Légèrement surprise, Eanna fit un pas en arrière, buttant contre une branche de l'arbuste à coté duquelle elle était qui en s'ébranlant arrosa copieusement la jeune Poufsouffle. Elle jura bruyamment en faisant un bond de coté. Niveau discrétion, peu mieux faire...

Gromellant tout ce qu'elle pouvait, Eanna se tortillait dans les branches qui s'accrochait à sa tunique. Plus elle gigottait, plus elle était mouillée, et plus cela l'énervait. Elle ne doutait pas que le garçon au bord de l'eau l'avait entendu, mais il tarda à s'approcher lui proposer de l'aide. Eanna ne savait pas vraiment ce qui la mettait le plus hors d'elle. Le fait qu'il mette autant de temps à s'occuper d'elle ? Le fait qu'il l'ai remarqué et qu'il lui propose quand même son aide, la mettant dans une situation des plus embarrassante ? Ou peut-être le fait que quoi qu'il arrive, elle passait pour une cruche totale, maladroite et empotée... Bref, elle le laissa l'aider à se dépatouiller et s'écarta vivement, rouge de honte et essayant de retirer les feuilles qui s'étaient prises dans sa tignasse, tout en marmonnant un merci à peine audible.

Pendant ce temps là, le gryffondor retournait à ses petites affaires, et semblait être un train de faire... un feu de camp ??! Eanna aurait bien détalé rapidement, trop honteuse, mais ça fierté la forçait à rester, préparant quelques explications pour qu'il ne la prenne pas pour une gourde. Et puis, elle observait tout les geste du jeune garçon avec une certaine curiosité. Il savait ce qu'il faisait c'est certain. Plantée, les bras croisés à le regarder s'affairer, Eanna se demanda si il n'était pas interdit de faire un feu dans le parc... Bof, elle n'en savait rien et ça ne serait certainement pas elle qui ferait une remarque sur un possible non respect du réglement. Elle se rendit compte que c'était bien des poissons du lac qu'il s'apprêtait à faire griller ! La jeune fille était de plus en plus étonnée.

- Tu as faim? Et viens donc t'asseoir ici, c'est plus confortable que ce buisson!

Elle plissa les yeux, et dit d'une voix agressive :

- Je te signale que ce n'est pas franchement dans mes habitudes que m'installer dans un buisson !

Elle se rendit immédiatement compte du visage désastreux qu'elle montrait encore une fois et soupira avant d'ajouter d'une voix plus calme, un peu confuse.

- Euh... Merci quand même, je veux bien ... Avec mes bêtises, me sécher un peu serait quand même pas mal...

Elle s'installa donc près du feu, scruttant toujours le garçon, observant tous ses gestes. Il l'intriguait, sans aucun doute. Et cette situation, dans un coin du parc, autour de ce feu où grillaient des poissons... Elle ne se sentait plus à Poudlard, mais loin, tellement plus loin, isolée, libre... Un faible sourire finit par éclairer son visage.

Elle avait bien remarqué que son surprenant pêcheur l'observait aussi. Mais ça le la gênait pas, surtout que ça semblait être un regard plutôt appréciateur. Le gentleman alla chercher sa cape et la déposa sur les épaule de la jeune fille. Elle lui sourit mais lança avec un petit air de défi.

- Merci ! Mais je ne suis pas transie de froid ! Il en faut plus que ça pour me refroidir quand même ! Mais le feu est quand même bien agréable...

"Et sa cape aussi" faillit-elle ajouter. Mais elle se retint, ne voulant pas passer pour une nunuche. En fait, Eanna n'avait pas vraiment l'habitude de se faire chouchouter de la sorte et si elle appréciait beaucoup l'attitude du garçon, elle refusait de se l'avouer. Il lui tendit un poisson qu'elle accepta.

- Et comment s'appelle cet oiseau majestueux mais si peu discret avec qui je partage mon repas?

Le mélange de galanterie et de moquerie de la question fit rire Eanna et elle lui répondit en prennant un air faussement supérieur.

- Si je suis si "majestueuse" que ça c'est normal que je ne passe pas inaperçue !

Elle rit à nouveau avant de se reprendre.

- Moi c'est Eanna. Et tu avais raison au moins sur un point, Eanna veut dire oiseau il parait ! Et toi ? Martin-pêcheur peut-être ?

Elle lui fit un clin d'oeil et goûta le poisson grillé en attendant sa réponse.

- Pas mal ! Ca change de la cuisine e Poudlard mais ça me va tout à fait !

HJ : pas de soucis !

Les paroles de Mato la touchèrent encore une fois beaucoup. Il semblait avoir une profondeur, une gravité insondable, alors qu'il était à peine plus agé qu'elle. Eanna en était impressionnée, mais aussi fascinée. Mais cette mélancholie était terrible, trop profonde pour qu'elle la comprenne totalement, elle qui avait tellement lutté pour refuser de sombrer après le traumatisme de la mort de sa mère. Mais le compliment qu'il lui fit fut comme une bouffée d'oxygène, aussi euphorisante que l'approche du petit écureuil curieux. Eanna leur fit un grand sourire chacun (à Mato et à l'écureuil). Puis elle admira le splendide spectable du coucher de soleil, de quoi redonner un espoir fou. Elle resta à savourer ce moment unique un petit moment avant de se retourner vers Mato, se penchant vers lui en posant doucement une main sur son bras.

- Tu trouveras un moyen de retrouver une certaine liberté. Je ne sais pas si la terre le sent, mais moi je le sais ! Et puisque je suis exceptionnelle *sourire*, tu peux me croire ! Je te fais confiance.