Il pleuvait beaucoup lorsque je me matérialisai dans l'allée des embrumes, juste à l'entrée de l'hôtel de luxe « Le Buckley's » qui me servait un peu de résidence secondaire, ces temps-ci. J'avais abandonné les chambres miteuses du Chaudron Baveur suite à un manque de discrétion honteux du personnel qui m'avait valu une sacrée remontrance de la part de mon paternel. Au Buckley's, j'étais à peu près sûr que mes affaires resteraient d'ordre privé, peu importe en quoi elles consistaient.
L'employé de l'hôtel posté à l'entrée ouvrit la porte et nous laissa passer, moi et la jolie russe qui m'accompagnait. Elle avait les cheveux longs et blonds et portait un fabuleux manteau de fourrure par-dessus sa robe noire trop courte et ses dessous apparents. A la réception, on me tendit la clef de ma suite prépayée sans même me poser une seule question puis j'entraînai la jeune fille jusqu'aux ascenseurs.
« C'est très chic, par ici, dit-elle d'une voix grave et suave, avec un délicieux accent de l'est qui me rendit impatient d'arriver jusqu'à ma chambre.
— Attend un peu de voir la suite », lui glissai-je à l'oreille tandis que les portes de l'ascenseur s'ouvrait devant nous.
J'appuyai alors sur le bouton « 13 » et les portes se refermèrent. L'ascension commença.
« Fletcher vous a indiqué les tarifs, je présume ? dit-elle alors que nous passions le troisième étage. Ainsi que les conditions ? Non, parce qu...
— Ecoute, trésor, la coupai-je avant qu'elle n'aille trop loin et ne me fasse regretter de l'avoir choisi. Ici, c'est moi qui dicte les règles, d'accord ? Tu vas être docile et tu vas faire tout ce que je vais te demander de faire... Je pense qu'on s'est compris, n'est-ce pas ? »
Tout en parlant, j'avais glissé ma baguette dans l'ouverture de son manteau et avait caressé son ventre avec le bout de mon arme, ce qui l'avait fait tressaillir, d'après ce que j'avais pu lire dans son regard.
Le reste de l'ascension se passa en silence. Juste avant l'ouverture des portes, je jetai un coup d'oeil à ma montre à gousset enfouit dans la poche intérieure de ma veste et remarquai non sans une certaine joie qu'il me restait une trentaine de minutes avant mon rendez-vous avec Evan et Severus. C'était bien assez pour ce que j'avais prévu de faire à la jolie demoiselle.

Moins d'une demi-heure plus tard, tandis que je m'apprêtais à remettre chemise et pantalon pour me rendre à mon rendez-vous, la main de la Ruskov glissa le long de mon entrejambe et, faible comme je le suis toujours dans ces moments-là, je décidai que la réunion pouvait attendre quelques minutes de plus, le temps que je « punisse » la jeune femme pour la future remontrance que Rosier ne manquerait pas de m'infliger et qui, j'en étais sûr, n'allait pas être des plus agréables...

« Non, reste encore un peu... Thomas... susurra la demoiselle au creux de mon oreille.
— Il ne faut pas abuser des bonnes choses, darling, lui dis-je en agrippant fermement sa main qui glissait le long de mon bras et en la dégageant afin que je puisse me relever et quitter notre couche. Maintenant, rhabille-toi et va-t-en.
— Et mon argent ?
— Quel argent ? demandai-je innocemment en boutonnant ma chemise blanche. Petite sotte, tu apprendras qu'il ne faut jamais faire confiance à un Avery. Maintenant, fous le camp avant que je ne change d'avis. »
La jolie blonde inspira profondément, semblant peser le pour et le contre quant à la décision qu'elle devait prendre. M'affronter ? Ou plutôt battre en retraite ? Elle avait intérêt à faire le bon choix si elle ne voulait pas baigner dans son sang dans les draps luxueux du Buckley's. Nombreuses furent les jolies filles retrouvées mortes dans cette même chambre par les elfes de nettoyage de l'hôtel.
Finalement, après m'avoir lancé un dernier regard noir, elle quitta les lieux en claquant la porte derrière elle. Quelle impolitesse. Si je n'avais pas été si en retard, je l'aurais rattrapé puis je lui aurais fait regretter son insolence. Au lieu de quoi, je préférai privilégier mon rendez-vous qui devait déjà être entamé.

Quelques minutes plus tard, c'est avec un franc sourire que je pénétrai dans le petit salon privé de l'hôtel que venait de m'indiquer l'un des employés. Ma tenue était classe, sans bavure et mes cheveux étaient peignés comme si je revenais tout droit de chez mon barbier. Il était impossible de soupçonner quoi que ce soit dans mon allure quant à mes précédentes activités.
« Bien le bonjour, messieurs ! dis-je d'une voix claironnante avant de me laisser tomber dans le troisième fauteuil de libre. J'espère ne pas vous avoir fait trop attendre. Les obligations, vous savez ce que c'est ! »
Je claquai des doigts et un verre de Whisky Pur-feu apparut sur la table, verre dont je m'emparai avant de le porter à mes lèvres et d'en boire une gorgée. Puis je soupirai d'aise, comme un homme du désert n'ayant pas bu depuis des jours.
« Alors, quel est dont l'objet de cette réunion, dites-moi ? » demandai-je, les deux bras sur les accoudoirs et les jambes croisées.