Il était tard, le château de Poudlard était profondément endormi. Professeurs comme élèves, fantômes et elfes de maison. Tout le monde dormait. Ou presque. Dans la salle de repos, là où le feu brillait encore d'une douce lueur chaude et orangée, dans un des fauteuils si confortables en face de l'âtre brûlant, se trouvait une frêle silhouette. Ses longs cheveux blonds clairs coulaient comme une cascade d'or blanc dans son dos et sur ses épaules, ses grands yeux étaient perdus dans le vide et sa peau pâle ressemblait à un clair de lune dans cette ambiance tamisée. Elle ressemblait à un fantôme si belle, si pâle. Si absente. Car tel était le mot qui la qualifiait le plus. Absente. Elle semblait ailleurs, perdue dans un autre monde, un autre univers si différent de celui qui se déroulait en ce moment même.

Le regard vague, Lyleïa réfléchissait. Des parchemins étaient étalés devant elle, sur la table basse. Un vieux journal  était ouvert sur ses genoux et ses doigts délicats pianotaient dessus. Elle n'arrivait pas à comprendre jusqu'où tout ça allait les mener. Bon, elle savait à peu près où la malédiction avait commencé mais ça ne lui donnait pas beaucoup d'autre indication. Elle ne comprenait pas, ça l'énervait. Et puis il y avait cette histoire avec Swann. Ca la bouffait de l'intérieur. Ca la détruisait à petit feu, elle n'en mangeait plus, n'en dormait plus. Comment pouvait-on autant se retourner la tête et le coeur pour un mec ? Elle ne savait pas. Elle n'avait jamais aimé auparavant mais elle ne risquait pas de reproduire la chose. Elle avait si mal. Leur dispute, le soir d'Halloween, lui revenait sans cesse en tête, ça la tuait. Il lui en voulait. Et elle ne pouvait lui en vouloir pour ça. C'était elle qui l'avait convaincue de ne pas quitter Anne, elle qui l'avait évité depuis la rentrée, elle qui ne voulait pas l'entraîner dans sa lente descente aux enfers. Et pourtant, ne pas l'avoir là près d'elle comme il l'avait tant été ces derniers mois, ça la tuait. Elle l'aimait. Elle l'aimait beaucoup trop pour son bien. Et ça prenait le pas sur son envie d'en découvrir toujours plus sur sa famille et ses ancêtres. Non, dans sa tête il n'y avait que Swann. Swann et son regard si coléreux. Swann si beau lorsqu'il était en colère. Swann et ses yeux si bleus. Swann encore et encore et encore.

Un bruit tira la jeune fille de ses pensées. Elle leva les yeux vers la silhouette brune qui lui faisait face. Elle arqua un sourcil intriguée. - Luz' ? Qu'est ce que tu fais ici ? s'étonna t-elle d'une voix douce.

Spoiler:

Luzia n'aurait jamais cru pouvoir penser cela un jour. Néanmoins, c'était un fait : la salle commune de Poufsouffle l'étouffait. Et pourtant, les fauteuils et les coussins étaient toujours aussi confortables, le feu dans les cheminées brûlait avec la même ardeur qu'avant et la pièce avait toujours l'allure d'un terrier protecteur...
Mais Luzia avait du mal à supporter les regards de ses camarades de maison. Ce qu'il s'était passé lors du match était connu de tout le monde. La honte qui la secouait à l'intérieure était public.

La salle commune des Jaunes, aussi cosy soit-elle, n'offrait plus le calme et l'intimité dont nécessitait l'Espagnole... Et puis, il y avait Nolan. Certains soirs, elle ne le voyait pas car il patrouillait dans les couloirs de Poudlard, mais ce soir-là, il était là et le voir retournait entièrement la jeune fille.
Elle n'arrivait pas à travailler, elle arrivait à peine à respirer.

C'est pourquoi elle était sortie des cachots. Elle voulait écrire une lettre à Deidre - lui raconter tout ce qu'elle avait sur le cœur. En fait, sa cousine lui manquait atrocement. La jeune fille avait eu l'habitude, pendant six ans, de l'avoir à portée de main. Elles avaient fait partie de l'équipe de quidditch, et leur mésaventure en Espagne avait resserré leurs liens. Mais voilà, Deidre était désormais à Londres et Luzia ne la voyait que pendant les vacances. Trop peu.

Rares étaient les élèves dans les couloirs. Le repas était terminé et le couvre feu ne tarderait pas. Luzia grimpa les dernières marches vers la salle de repos, ravie de n'entendre que le silence - signe qu'elle serait seule.

Il n'en était pourtant rien. Lorsque la jeune fille ouvrit la porte, qui grinça légèrement sous sa poussée, elle vit avec déception que quelqu'un était déjà assise sur un des épais canapés, devant un feu ronflant. Nul besoin de se demander longtemps de qui il s'agissait ; la chevelure blonde comme les blés parlait d'elle-même. Lyleïa.

Ce n'était pas le moment, pour Luzia. Elles se connaissaient trop pour rester côte à côte sans parler. Et Luzia ne voulait pas s'épancher sur son cas ce soir-là. Elle voulait sa cousine et personne d'autre - d'autant plus qu'elle avait déjà embêté Lyleïa avec ses soucis plusieurs mois auparavant et la Serpentard devait avoir d'autres gnomes à dégnommer. Elle avait fait demi-tour lorsque la voix de Lyleïa, trouant le silence, s’exclama :

- Luz' ? Qu'est ce que tu fais ici ?

L'intéressée fit volte face et se tint un moment sans rien dire devant la Verte et Argent.

- Je venais, fit-elle au bout d'un moment, la voix hésitante, chercher le calme pour écrire une lettre. Je... Je ne voulais pas te déranger.

Elle fit trois pas vers la porte qu'elle venait à peine de franchir et lança lapidairement :

- Passe une bonne soirée.

De acuerdo, ce n'était pas très cool. Luzia s'en voulait d'être aussi sèche, mais elle avait tellement la sensation d'être oppressée qu'elle ne pouvait pas être plus expansive. C'était tout simplement au dessus de ses forces.

Spoiler:

Lyleïa était venu ici dans l'idée d'être seule, d'être enfin tranquille. Elle avait du mal à rester dans sa salle commune en ce moment, du mal à affronter le regard des autres ou même à les supporter tout court. Elle aurait bien aimé en secouer certains pour leur dire que c'était des imbéciles, qu'ils devaient ouvrir les yeux et se rendre compte qu'ils étaient en train de gâcher leur vie. Elle n'en ferait rien elle le savait. Elle n'était rien pour eux. Et plus le temps passait, moins ils devenaient importants pour elle.

Un soupir traversa ses lèvres alors qu'elle se passait une main sur le visage épuisée. Lasse. Elle aurait tant voulu pouvoir de nouveau contrôler sa vie comme avant. Avant tout allait bien. Elle allait bien. Aucun mensonge - du moins aucun dont elle avait connaissance - elle était proche de son père - autant qu'on peut l'être avec un glaçon ambulant - elle avait des amis sur qui elle pouvait compter, une famille qu'elle s'était elle même construite et elle n'avait pas ni de malédiction ni de coeur brisé. Elle était heureuse. Du moins c'était ce qu'elle pensait. Mais aujourd'hui tout allait mal. Son monde était s'en dessus dessous, déchiré, bouleversé, dévasté comme après le passage d'un cyclone. Elle sursauta en entendant Luz arriver.

- Je venais chercher le calme pour écrire une lettre. Je... Je ne voulais pas te déranger. Passe une bonne soirée. Apparemment elle n'était pas la seule à avoir une vie pourrie en ce moment. Lyleïa avait eu vent de quelques rumeurs mais elle n'avait jamais été fille à croire aux rumeurs. Pourtant, en voyant la tête de son amie ce soir elle ne put résister à l'envie de se lever et de la poursuivre. - Luz' attends ! Elle attrapa sa main avec douceur et la força doucement à se retourner. - Ne pars pas. Tu peux rester. Tu ne me dérange pas. Je ... franchement la pièce est assez grande. Viens ... essaya t-elle de la convaincre. Elle la ramena doucement vers la salle. Elle ne voulait pas la faire fuir. Elle avait besoin de parler à quelqu'un de neutre, besoin de se changer les idées et elle pensait que c'était la même chose pour Luzia. Mais elle ne voyait pas trop comment aborder le sujet. - Je ne parlerais pas. Fais comme si j'étais pas là.

Elle se rassit dans le fauteuil et attrapa le journal de sa mère. Seulement maladroite, elle fit tomber un des dessins qu'elle avait fait d'elle et quelques parchemins sur les malédictions. - Zut ! râla t-elle en se relevant pour les ramasser. Désolée, maugréa t-elle en se rasseyant, des larmes dans les yeux. Elle fixa le feu. Elle était épuisée. Elle ne comprenait rien. Elle en avait plus que marre. Pourtant elle ne dit rien, fixant l'âtre flamboyant en silence pour ne pas déranger la Poufsouffle.

Si L'Espagnole comptait s'échapper de la salle de repose rapidement, c'était sans compter sur Lyleïa qui, avec la rapidité d'une joueuse de quidditch, se leva et lui saisit la main, l'empêchant de passer le seuil de la porte.

- Ne pars pas. Tu peux rester. Tu ne me déranges pas. Je ... franchement la pièce est assez grande. Viens ...

Luzia resta un moment sans regarder la Serpentard. Elle voulait être seule plus que tout, pour apprécier comme il se devait le cauchemar qu'était devenu sa vie. Mais elle finit par se retourner vers Lyleïa, qui avait raison : la salle de repos était vaste - les deux filles pouvaient être à côté sans être ensemble. Ce qui convenait à la jeune fille. Et apparemment, c'était aussi le cas pour Lyleïa, puisque, tout en l'entraînant vers le canapé sur lequel elle s'était assise quelques secondes auparavant, elle lui assura qu'elle ne la dérangerait pas.

La salle de repos était un des lieux les plus fréquentés de Poudlard en journée, puisque les élèves des différentes maisons pouvaient s'y retrouver en dehors des repas, et lorsque la météo faisait défaut. Aussi avait-il de nombreux canapés, fauteuils et liseuses, disposés devant des tables basses et éclairés par des lampes tamisées. Un coin douillet, dans lequel on pouvait lire la Gazette et le Sorcière Hebdo tout en buvant un soda de branchiflore. Un oasis dans une journée de cours, en bref.

Incapable de dire quoi que ce soit, Luzia se contenta de hocher la tête et de s'asseoir devant une table basse, s'accroupissant sur un coussin, avant de poser son matériel sur la dite table. A ce moment là, Lyleïa, qui s'était elle aussi rassise, fit tomber tout un tas de paperasse - un cahier, duquel s'échappèrent des feuilles de parchemins. De là où elle était, Luzia ne pouvait voir de quoi il s'agissait. Par contre, malgré le brouillard dans lequel elle était plongée, elle vit nettement le désarroi de la blonde. Elle fut alors frappé par son visage marqué par l'anxiété et pleurait.

- Oh... laissa échapper Luzia alors que son amie s'excusait du bruit.

Elle abandonna alors sa petite table pour s'asseoir près de Lyleïa.

- Ça ne roule pas pour toi non plus, n'est-ce pas ?

La salle de repos était un lieu dit "neutre". Toutes les maisons s'y rassemblaient quand ils faisaient mauvais ou quand ils voulaient se retrouver. Ce qui expliquait les nombreux canapés, fauteuils, tables, quelques étagères de bouquin et la grande cheminée toujours allumée. C'était un lieu plutôt apaisante, réconfortant et l'ambiance sereine appelait à la décontraction. C'était peut-être pour ça que Lyleïa était venue ici et non dans sa salle commune où l'ambiance en ce moment était plus que minable. Elle était même carrément pourrie. C'était une horreur. Et Lyl' y était peut-être pour beaucoup elle devait l'avouer mais franchement, les relations sociables en ce moment, c'était pas ce qu'elle voulait favoriser au contraire. La solitude était un gros bénéfice. Pourtant ce fut elle qui se leva pour rattraper Luzia quand celle ci sorti de la salle. On était en pleine nuit, personne n'était là. Juste elles. Elle pouvait rester.

Elles s'installèrent de nouveau chacune à sa place. Luzia s'installa a la petite table basse près de Lyl'. La jeune fille essaya de se re-concentrer sur ses propres problèmes mais elle en avait par dessus la tête et quand tout son dossier tomba, étalant parchemins et dessins sur le sol, elle craqua. Les larmes lui montèrent aux yeux. Fatigue, lassitude, colère, chagrin, douleur, injustice, tout se mêlait en elle. Sa mère, son père, la malédiction, l'ultimatum de Regulus, les disputes avec Swann, les secrets, les mensonges, elle n'en pouvait juste plus. C'était le pompom. Les limites étaient dépassées. Apparemment, Luzia s'en rendit compte car elle laissa tomber ses affaires pour venir s'asseoir près d'elle. - Ça ne roule pas pour toi non plus, n'est-ce pas ? demanda t-elle d'une voix douce. Lyleïa se passa une main sur le visage et fixa les flammes dans la cheminée en tentant de retenir ses larmes. Elle fit non de la tête tout en prenant une grande respiration pour tenter de se calmer. - Non. Non pas vraiment non, répondit-elle enfin. Elle regarda les couleurs des flammes qui dansaient dans l'âtre, elle essaya de prendre leur chaleur, leur force, mais n'y récolta que la solitude et la froideur. - Ma vie est une catastrophe ambulante. Je sais pas comment j'en suis arrivée là. Avant tout allait bien, j'avais une vie tracée, un passé peu être pas tout blanc mais net. Oui j'ai perdu ma maman mais je ne suis pas la seule. J'avais mon père. J'avais une famille que je m'étais construite. Aujourd'hui tout à disparu. C'est un bordel. Les larmes roulaient sur ses joues sans qu'elle puisse les retenir. Aujourd'hui il ne reste plus rien que des ruines encore fumantes d'un brasier qui a tout ravagé sur son passage, murmura t-elle. Ca pouvait sembler poétique mais c'était plutôt désespéré. La jeune fille secoua la tête. La vérité c'est que ne sais plus où j'en suis Luz'. Je ne sais même plus qui je suis, souffla t-elle désespérée. Elle resta un instant là à réfléchir puis elle se reprit. Je suis désolée. Tu étais venue pour être seule, pour réfléchir et moi je t'embête avec toutes ces conneries. Désolée ... Je vais ... je vais te laisser ça vaudra mieux, fit-elle en récupérant ses dossiers d'un air maladroit, agité.

Lyleïa pleurait vraiment, désormais, incapable d'arrêter ses larmes qui dégoulinaient sur ses joues. Elle tentait de se calmer, en respirant le plus profondément possible malgré les sanglots. Quand elle put ouvrir la bouche, ce fut pour déverser un flot de paroles qui se mêla à ses larmes. Luzia avait conscience qu'elle avait appuyé sur le bouton commandant l’ouverture des vannes et fut surprise par la franchise de Lyleïa, qui commençait à déballer ses soucis sans même prendre le temps de mettre ses mots dans l'ordre.

- La vérité c'est que ne sais plus où j'en suis Luz'. Je ne sais même plus qui je suis.

Luzia ne savait pas quoi dire. Elle avait posé sa main sur l'avant bras de Lyleïa lorsque cette dernière avait mentionné le fait que sa mère était morte et que, depuis, la Serpentard se sentait terriblement seule. C'était presque choquant de voir la jeune fille ainsi ; elle qui d'habitude, se composait un masque impénétrable et qui osait toujours recadrer les gens qui lui bloquaient un peu trop le passage. Luzia pouvait cependant se targuer de la connaître bien. Enfin... Tout est relatif, avec Lyleïa. L'Espagnole lui faisait confiance - elle était une des seules au courant pour ce qu'il s'était passé dans les toilettes des filles. Elle avait gardé le secret et tout fait pour trouver les bourreaux, sans succès.

Il fallait cependant que la Jaune admette que, si elle s'était livrée à Lyleïa, l'inverse n'était pas vrai. Elle était un vrai bloc de glace, renvoyant le reflet de celui qui l'approchait, mais ne laissant rien voir à l'intérieur. Luzia s'en voulait, car elle n'avait pas fait grand chose pour percer la glace. Lyl devait être mal depuis un bon moment, sans pouvoir en parler à qui que ce soit...

- Désolée, renifla-t-elle. Je vais ... je vais te laisser ça vaudra mieux.
- Nunca, répliqua Luzia en lui attrapant les mains pour l'empêcher de faire quoi que ce soit.

Elles se rassirent toutes deux. Luzia enleva un coussin qui la gênait dans son dos avant de dire :

- J'ignorais que tu allais si mal ! Que se passe-t-il avec ta famille ?

C'était au tour de Luzia de jouer la confidente - occasion presque opportune de briser la glace.

- Nunca, déclara Luzia en la forçant à se rasseoir comme elle même l'avait ramenée de force peu de temps auparavant. Lyl' se laissa faire comme si elle était vidée de toutes ses forces, qu'elle ne pouvait plus se battre. Elle était épuisée. - J'ignorais que tu allais si mal ! Que se passe-t-il avec ta famille ? La Capitaine des Verts & Argent se raidit puis regarda l'espagnole en silence comme si elle la jaugeait, ou qu'elle pesait le pour et le contre. Elle plongea ses yeux d'or dans ceux, si clairs de la jeune femme puis elle ferma un instant les siens, soupira en se passant une main sur le visage puis se détendit imperceptiblement et s'enfonça un peu plus dans le canapé près de la jeune fille. - C'est une longue histoire, commença t-elle d'une voix douce. Elle avait décidé de laisser tomber la glace. De toute manière à ce stade là ça ne servait plus à rien. Et puis Luzia lui avait fait confiance la première, n'hésitant pas à se mettre à nue, vulnérable devant elle. A elle de lui rendre la pareille et de se confier. - Je suis née en Russie. Mes parents le sont tous les deux. J'ai passée mes premières années là bas. Mais quand j'ai eu cinq ans, ma mère a été assassinée devant mes yeux. Mon père et moi avons alors déménagés en Angleterre. Choquée, trop peut-être, j'ai bloqué plusieurs informations sur cet évènement là, notamment le visage de son assassin qui s'était approché de moi. J'en ai souvent fait des cauchemars depuis gosse, ça me rongeait à petit feu. C'est contre ces cauchemars là, ce souvenir là que tu m'a aidée avec tes plantes l'année précédente, lui souligna t-elle avec un bref sourire. Ca c'était calmé mais ça a reprit de plus belle, de plus en plus violemment il y a quelques mois. Tes herbes m'ont donnée un peu de répit mais m'ont confortée dans l'idée que je devais découvrir ce que mon cerveau avait bloqué. Avec mon cousin, nous avons alors préparé une potion de mémoire. Elle s'arrêta de parler. Elle avait regardé son amie jusque là. Mais a partir de ce moment là elle détourna son visage et se leva même pour aller jusqu'à la cheminée. Elle s'appuya contre l'un des piliers de pierres, croisa les bras et fixa les flammes qui continuaient à flamboyer dans l'âtre. Sa voix n'était qu'un murmure quoique bien audible et empli de douleur, de déchirement et de colère. - Je l'ai bu vers juin dernier. Fin mai. Je ne sais plus. Ca n'a aucune importance à côté des souvenirs qui m'ont envahie, murmura t-elle. Des hordes de souvenirs, des flash back. Des disputes le soir dans un bureau, des regards noirs échangés, de la froideur qui s'installait. Je pensais que mes parents s'aimaient. Mon père m'a toujours dis que ma mère avait été son grand amour, qu'aucune femme ne pourrait jamais la remplacer. Qu'elle avait été sa lumière, son oxygène, qu'il était mort en même temps qu'elle. Il a omit de préciser qu'elle était sur le point de le quitter en m'emportant avec elle parce qu'elle ne supportait pas ce qu'il devenait, ne supportait pas la magie noire. Elle se tut un bref instant avant de reprendre. Oui il a omit beaucoup de choses. Comme leurs disputes, la colère de ma mère. Il a omit de préciser à quel point leur couple battait de l'aile. Omit de préciser que si ma mère était morte, c'était parce qu'il l'avait lui même tuée d'un avada kedavra en pleine poitrine, déclara t-elle en tournant la tête vers Luzia, plantant ses yeux d'or dans les siens, implacable. La terrible vérité. Sa voix était rauque, distance, comme détachée. Mais elle ne pleurait pas. Elle n'avait plus de larmes pour cette vérité là. Elle n'avait plus que la haine et la colère qui l'aidaient à ne pas sombrer dans la folie. Et encore, elle n'avait parlé que de ses parents. Pas du reste pour le moment.

Spoiler:

 

Lyleïa sembla hésiter un moment à déballer ses problèmes. Les deux jeunes filles restèrent un moment l'une en face de l'autre, puis la Serpentard inspira longuement et se lança.

- C'est une longue histoire.

Luzia se cala alors contre le dossier moelleux du canapé, histoire de montrer à son amie qu'elle avait tout son temps et qu'elle lui accordait toute son attention. C'est alors que Lyleïa entama son histoire. Luzia connaissait le début : elle était au courant du fait que Lyl soit Russe - il suffisait de jeter un coup d’œil à son patronyme. Mais le visage de la Poufsouffle se remplit d'horreur lorsqu'elle apprit que la mère de Lyl avait été assassinée, devant sa fille et que, depuis, cette dernière faisait d'affreux cauchemars, sans parvenir à retrouver l'identité de son agresseur.

- C'est contre ces cauchemars là, poursuivait la Vert et Argent, ce souvenir là, que tu m'a aidée avec tes plantes l'année précédente.

Luzia se racla la gorge, stupéfaite d'apprendre son implication dans une intrigue qui, manifestement, la dépassait. A la base, elle pensait que Lyleïa avait juste du mal à dormir et souffrait d'insomnie ; elle était loin de se douter qu'il s'agissait de quelque chose de bien plus grave. Lorsque son vis-à-vis mentionna l'usage d'une potion de mémoire, Luzia faillit intervenir. Une potion de mémoire était quelque chose de très difficile à réaliser - d'ailleurs, l'Espagnole, malgré ses compétences en potions, ne s'était jamais lancée dans une recette pareille. Les conséquences d'un mauvais mélange pouvaient être désastreuses et elle crut que c'était ce à quoi Lyleïa allait en venir. Il n'en fut rien, la potion avait été parfaitement exécutée et Luzia en soupira de soulagement. Néanmoins, Lyleïa s'était levée et ne la regardait plus, le regard braqué sur les flammes. L'Espagnole sut qu'elle allait révéler ce qu'elle avait découvert.

- Il a omit de préciser à quel point leur couple battait de l'aile. Omit de préciser que si ma mère était morte, c'était parce qu'il l'avait lui même tuée d'un avada kedavra en pleine poitrine.

A ces mots, la Jaune, épouvantée, se plaqua une main sur la bouche. Elle ne put bouger, pétrifiée par les informations funestes qu'elle apprenait sans aucune préparation psychologique. Autour des deux jeunes filles, l'air semblait s'être épaissi, figé, à mesure que le récit de la Serpentard gagnait en intensité.

Le père de Lyl a tué la mère de Lyl, répétait-elle continuellement dans sa tête, sans y trouver un véritable sens. Il pratique la Magie Noire.

C'était le genre de nouvelle que l'on apprenait en lisant la Gazette, et que les gens se racontait pour meubler une conversation ; mais, ce qui pour Luzia n'était que de simples articles journalistiques, était, pour d'autres ni plus ni moins que la réalité.

- Dios, souffla la Poufsouffle lorsqu'elle se rendit compte qu'elle devait dire quelque chose.

Elle tenta de formuler quelque chose, mais ses paroles se perdirent en un faible balbutiement. Lyleïa s'était retournée vers elle, son visage assombrit par la pénombre et les cheveux flamboyants grâce aux flammes qui les éclairaient en contre jour.

- C'est horrible, finit-elle par articuler péniblement.

Elle était à cent lieues d'imaginer cela. Comment Lyleïa avait-elle pu sembler vivre normalement après tout cet épisode ?
- Que devient ton... père dans tout ça, demanda Luzia, la gorge serrée.

Au fond du cœur, elle bénissait Merlin de ne pas avoir un telle famille...

Spoiler:

Lorsque Lyl lui fit remarquer que son histoire était une longue histoire Luzia s'installa confortablement dans le canapé pour lui signifier qu'elle n'était pas pressée. La Capitaine des Serpentard décida donc de lui raconter l'histoire du début. Moscou, ses parents, la mort de sa mère, la potion de mémoire, ce qu'elle avait apprit, l'amer sentiment de trahison. Elle parla, parla, parla sans s'arrêter. Finalement, elle en vint à la terrible vérité : son père avait assassiné sa mère. Elle regarda Luzia en disant ça pour voir comment elle réagissait. - Dios. Oui c'était une manière de voir. - C'est horrible, continua t-elle. Oui, ça aussi c'était une manière de voir. Lyleïa lui laissa le temps de digérer la nouvelle. Elle avait deux autres bombes en réserve. Elle n'eut pas le temps de les poser. - Que devient ton... père dans tout ça ? demanda t-elle après un moment. Lyleïa ne répondit pas immédiatement, plongeant son regard dans les flammes. Elle resta silencieuse un moment avant de parler. - Je n'en sais rien. Je ne lui ai pas parlé depuis juillet dernier. Je suis allée le voir en rentrant de Poudlard. Je lui ai demandé pourquoi il n'avait pas cherché les meurtriers de maman. Je lui ai dis que je savais tout. On s'est disputés. Je l'ai traité de monstre et j'ai claqué définitivement la porte du manoir. Il a du m'envoyer une bonne centaine de lettres. Je n'en ai ouvertes aucune. Elles sont dans une malle sous mon lit. Elle soupira et se passa une main sur le visage. Regarda son amie.

Puis elle lâcha les deux autres bombes, incapable de se retenir. Elle avait besoin de parler, de se confier et Luzia lui avait dit d'y aller alors elle allait tout dire. - Sans compter que dans le même mouvement j'ai appris qu'il y avait une malédiction sur ma famille, que j'étais la prochaine sur la liste à mourir si jamais je ne la brise pas ... Elle entendait sa voix partir de plus en plus dans les aiguë, elle s'énervait, sa voix se brisait, son coeur se serrait, elle devenait complètement hystérique. Elle en avait trop supporté. Elle avait trop retenu. Les larmes ne suffisaient plus. Elle avait envie de hurler. Mais c'est vrai que c'est minime ça ! Maudite ! Je suis née dans une famille maudite ! Sans aucune indication que le vieux journal intime de ma mère ! Et je n'y comprends RIEN !! J'en PEUX PLUS Luz' ! Sans compter qu'à côté de ça j'ai eu la merveilleuse intelligence de tomber amoureuse du mauvais mec ! Un vrai SALAUD qui m'a brisé le coeur sans aucun remord ! Qui en a fait des confettis ! La PREMIERE fois que je tombe amoureuse, la PREMIERE Luz' et cet abruti décide que NON finalement il n'a aucune envie de s'engager, il n'a pas envie de moi ! Et je me suis fais avoir comme une pauvre goule ! Elle leva les yeux au ciel. Bah oui bien sur. Il n'est resté avec aucune fille, il les a toutes larguées les unes après les autres qu'est ce que je pensais moi ? Que je serais LA fille qui le ferait craquer ? Bah oui mais oui Lyleïa tu vis encore aux pays des merveilles dis moi ! Elle se moquait d'elle même, complètement hystérique. Je suis vraiment trop conne. Elle enfoui son visage entre ses mains. Voilà. Un craquage total à la Romansky.

Spoiler:

 

Lyleïa avait déclenché en Luzia un véritable ouragan. Elle n'arrivait pas à enregistrer ce que la Serpentard lui révélait : les mots n'étaient que des sons dépourvus de sens. La jeune fille réussit quand même à comprendre que Lyleïa avait rompu tout lien avec son père depuis la découverte - normal, songeait l'Espagnole, mieux valait se mettre à l'abri. Elle nota cependant que si Lyleïa n'avait pas pas lu les lettres de son paternel, elle les avait quand même conservées.
Luzia allait lui faire remarquer que ce n'était pas plus mal, qu'elle les lirait quand elle serait prête - après tout, il y avait peut-être une explication à tout cela - mais la blonde, énervée, enchaîna :

- Sans compter que dans le même mouvement j'ai appris qu'il y avait une malédiction sur ma famille, que j'étais la prochaine sur la liste à mourir si jamais je ne la brise pas ...

Luzia se redressa brusquement. Une malédiction ? Sans rire ? A en juger par la voix de Lyleïa qui devenait par moment hystérique en montant dans les aigus, ce n'était pas une blague. Une malédiction... Et elle était en train de chercher un contre-sort. La Poufsouffle entendit vaguement son amie se plaindre au sujet d'un mec dont elle était tombée amoureuse et qui n'était pas restée avec elle. Ce devait être Swann. Mais là n'était pas l'important.

- Je suis vraiment trop conne, termina la blonde en se cachant le visage avec ses mains.

Le silence retomba alors sur la salle de repos. Si, tout à l'heure, Luzia avait eu l'impression que l'air s'était épaissi, là, il était carrément devenu plus dur que la glace.

-Viens, souffla Luzia, assieds-toi.

Elle n'eût que la force de tapoter sur la place à côté d'elle. Se lever lui paraissait impossible. Les révélations de Lyleïa la clouaient au canapé. Son cerveau carburait à mille à l'heure, mais semblait en fait tourner à vide. Et dire que la jeune fille se plaignait de ce qui n'allait pas avec Nolan ! A côté, sa vie était un paradis ! D'ailleurs, cela ne lui échappait pas, mais Lyleïa s’apitoyait aussi sur sa relation avec Swann. Mais finalement, n'était-ce pas la chose la moins grave de toutes ces histoires ?

- Une malédiction, répéta Luzia à voix haute. Depuis quand le sais-tu ? Et en quoi ça consiste ?

Ils avaient vu, en Défense contre les Forces du Mal ce que c'était qu'une malédiction : il en existe des centaines, et les contre-sorts sont difficiles voire impossibles à trouver. De plus, on ne maudissait pas quelqu'un par hasard. La famille de Lyl avait forcément fait quelque chose... Combien de temps disposait Lyl ? Et qu'est-ce que c'était que cette histoire de journal intime ?

- Mierda, jura Luzia, je ne comprends pas. C'est impossible !

Impossible, et en même temps... Si on y réfléchissait, des choses horribles arrivaient aux gens biens. Luzia s'était faite torturée, Lyl était maudite, chaque jour des personnes mourraient... Luzia avait envie de vomir. Soudainement, la Magie ne lui sembla plus être une faculté extraordinaire. Là, elle lui semblait terrible et effroyable.

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La dernière fois qu'ils s'étaient vus, après une dispute violente et un baiser presque aussi brutal, Swann lui avait balancé qu'elle était complètement folle avant de l'abandonner dans les couloirs du cachots, livrée à elle même et aux démons qui la détruisaient intérieurement. Au vu de sa propre réaction, Lyl' se dit qu'au final, il n'avait peut-être pas tord. Peut-être qu'elle était folle effectivement. Peut-être qu'elle n'était pas aussi forte que ça. C'était peut-être comme ça que la malédiction s'en prenait à elle. Elle allait devenir cinglée, comme sa tante Leda. Et elle allait finir par s'ôter la vie pour ne plus souffrir. Comme sa tante. Lentement, elle prit conscience de ses pensées et elle déglutit difficilement en comprenant leur sens. Mais c'était logique. - Viens, souffla Luzia, assieds-toi. Lyleïa la regarda d'un air perdu puis elle avança difficilement jusqu'au canapé et s'assit près de son amie. Elle semblait vidée, comme si elle avait épuisé toute son énergie dans son pétage de câble.

- Une malédiction. Depuis quand le sais-tu ? Et en quoi ça consiste ? demanda son amie. Lyleïa prit une grande inspiration et se passa la main sur son visage pâle et cerné. - Je l'ai appris en juillet dernier. En prenant quelques affaires j'ai retrouvé le journal que ma mère tenait. Elle parle d'une malédiction sur la famille Vassiliev qui ne touche que les femmes. On ignore qui l'a jetée, quand et pourquoi. Ma mère écrit dans son journal qu'elle a apprit que ça remontait à quatre ou cinq générations. Je pense avoir a peu près déterminé qui en a été la cible mais je ne suis pas sûre. Cette malédiction peut prendre plusieurs formes mais le résultat est toujours le même. L'aînée de la famille Vassiliev meurt d'une manière ou d'une autre. Et; au jour d'aujourd'hui, l'aînée de la famille Vassiliev ... c'est moi. C'est tout ce que nous savons. Elle se tut. Ca faisait beaucoup pour une seule soirée. Elle aurait du se taire. - Mierda ! je ne comprends pas. C'est impossible ! jura l'espagnole. - Bien sur que si c'est possible. Les malédictions étaient monnaie courantes auparavant. Il a juste suffit qu'une de mes ancêtres fassent une connerie et on en paie toutes les pots cassés, rétorqua la russe d'un ton blasé. A bien la regarder, elle paraissait détachée, ailleurs, comme si elle était trop épuisée pour se battre. Je ne suis pas assez forte Luz'. Je viens juste de le comprendre. Avec un peu d'aide de la part de Jones. Je vais mourir, je l'ai accepté. Apparemment, je vais faire comme ma tante, devenir cinglée. Ca a déjà commencé. Je ne suis pas assez forte, répéta t-elle. Elle se tourna vers son amie, plus pâle qu'un fantôme. Je suis désolée de t'avoir entraînée là dedans. J'aurais du me taire. Tu ne peux rien faire. N'y pense plus. En ce moment, pour survivre, il vaut mieux prétendre n'avoir rien vu, ne rien savoir. Elle se redressa et posa un baiser sur le front de l'espagnole. Prends soin de toi Luzia. Vis un maximum. Ne laisse personne te faire abandonner tes rêves ou oublier ce que c'est que de vivre. Sois heureuse. Elle caressa sa joue, lui fit un pauvre sourire, pâle copie de ce qu'il avait pu être auparavant, prit ses affaires et se leva. Avant de sortir, elle se tourna une dernière fois vers elle. - Mieux vaut demander pardon, que permission. Elle lui fit un clin d'oeil puis elle parti, sans voir qu'elle avait oublié quelques parchemins derrière elle dont le dessin de sa mère quand elle avait son âge.

HJ/ J'ai pensé qu'on pouvait arrêter là, je crois que ça suffit pour une soirée :lol:mais on pourra en refaire un, j'ai laissé une ouverture ^^ tu le clos ? Ca te va ? Sinon on continue pas de blem dis moi

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