Moran savait être un patriote même pour les pires choses - qui étaient les meilleures desquelles se vanter, bien entendu - et il ne se gênerait pas pour le faire remarquer à Gabin. D'une certaine manière, se dit-il, son meilleur ami avait la condescendance toute Anglaise qu'on leur reprochait souvent. "Hmpf ! Tu parles !" répondit le jeune homme en préférant ne pas entrer dans ce débat-là. Sans doute qu'il ne comprenait pas, ou n'entendait pas la différence, parce qu'il avait l'oreille entraîné par son accent d'Écossais pur souche. Les non-initiés, avaient tendance à ne pas comprendre, ni son jargon, ni l'accentuation de ses mots rendue difficilement compréhensible à cause de ses "r" roulés à l'extrême. "Mais on est à Invergarry" répondit Moran en commençant à se fendre d'un fou rire, "t'es à l'ouest, t'as pris de la poudre lunaire ?". Disant cela, il manqua de percuter un petit gobelin qui sortait de la deventure vers laquelle ils allaient. La petite créature se saisit de son pantalon et s'acharna en charabia incompréhensible : "Eh ! Je ne comprends pas le gobelbabil moi !" lança-t-il en essayant de se dégager de sa poigne de fer. Les yeux noirs qu'il leva sur lui le firent déglutir violemment et son instinct lui hurla qu'il allait se prendre une soufflan... "20 GALLIONS ! ILS M'ONT EXTORQUÉS VINGT GALLIONS" hurla-t-il en secouant sa bourse vide sans doute, "VOUS LES SORCIERS, N'ÊTES QUE DES VOLEURS, DES PILLEURS DE NOTRE OR ! VOUS NE NOUS MÉRITEZ PAS ! VOUS NE MÉRITEZ PAS VOTRE BAGUETTE !". Etc. Etc.

Gabin adorait se moquer (gentiment) de son meilleur ami, et il fallait admettre que s'il y avait une chose avec lequel il ne rigolait pas, c’était bien sa fierté d'Ecossais. La réaction de celui-ci fut très minime, il réussit à se contrôler plus qu’à son habitude. Mais c’était sûrement du au fait qu'il connaissait son ami et qu'il savait pertinemment qu'il rigolait. Si une autre personne se risquait à de tels propos, il n'aurais pas payé cher de ses dents ! Il lui fit donc un grand sourire satisfait. Alors que Gabin parlait de leur destination ou plutôt de leur emplacement immédiat, Moran le regarda avec des yeux écarquillés. " Ah ok" Non mais de la poudre lunaire ? Sérieusement ? Il se moquait de lui, il ne s’était pas séparés depuis le départ du pub, quand est ce qu'il aurait eu le temps de sniffer ? Surtout que ce n’était ni le lieu ni le moment ! "Et comment je suis censé savoir ça ! Tu m'as simplement fait transplaner sans me dire ou nous allions ! Je pensais que nous allions chercher à manger e5 qu’après coup on irait la bas je ne pouvais pas savoir qu’on allait faire les deux en un !" Certes, Gabin et l'orientation, ce n’était pas trop ça mais au moins il y avait un nord et un sud, un est et un ouest, alors que le transplanage, on disparaissait d'un endroit et on apparaissait à un autre, un vrai cassse-tête pour quiconque ne s’y connaissait pas. Sans que cela ne surprenne vraiment Gabin, le petit gobelin se mit à leur hurler dessus dans son langage incompréhensible, la traduction n’était pas mieux ! " Je ne sais pas ce qu'il s'est passé mais évitez de faire des généralités". Dit-il d'une voix dure. Il n'avait vraiment pas envie de se battre surtout pour un prétexte aussi insignifiant. Ce retour au vert devait être synonymes de nature, de marche de découvertes et de complicité. Il bouillonna à l’intérieur lorsqu'il évoqua le fait qu'ils ne méritaient pas leurs baguettes. Bon, il y avait des cons partout que ce soit chez les sorciers ou chez n’importe d’autre ! Il lui lança 10 gallions et continua son chemin sans se retourna en sommant Moran de le suivre. "J'ai faim."

Spoiler:

Moran se contenta de lever les yeux au ciel devant le manque de clairvoyance de Gabin. Ce n'était pas comme s'ils n'étaient pas passés à côté d'un panneau sur lequel était écrit, en anglais "Invergarry". Mais il en vînt à la conclusion qu'il valait mieux ne rien dire, pour ne pas le froisser davantage sur un sens de l'orientation qu'il ne possédait même pas. Aussi le laissa-t-il bougonner dans un coin sans rien ajouter d'autres que quelques sourires. Le quartier sorcier de la petite ville écossaise avait le mérite d'être très agréable, et très authentique. Nul doute que l'affluence de gobelins par ici y était pour quelque chose. D'ailleurs, c'est l'un d'eux qui commença à lui hurler dessus sans que cela ne lui arrache de réaction particulière. Il ne savait que trop bien comme les gobelins avaient un complexe d'infériorité farouche et il préférait ne pas en rajouter. Se heurter à lui risquait de rendre la chose pire. "C'est bon, laisse tomber" lança-t-il à Gabin qui lançait des gallions au gobelin. S'il cru que cela allait le calmer, ça ne marcha pas du tout, et Moran ouvrit la porte du commerce et poussa son meilleur ami dedans pour qu'il ne se fasse pas déchiqueter par les ongles longs et sales de la créature avare d'argent. "J'vais me prendre un haggis moi" commenda-t-il une fois qu'ils furent assis, "et un scotch !". Au diable les paroles de son ami sur son problème d'alcool !

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Et oui, il était sur que ce coup là, son manque de repères était du au manque d'informations et uniquement à cela ! Enfin presque… Il aurait largement de quoi briller par son manque de connaissances plus tard, mais pas maintenant ! Moran ignora le gobelin mais lui n'en avait pas envie bien qu'il ne soit pas des plus agréables. Il lui lança donc les quelques pièces et s'engoufra à sa suite. "Deux" commanda t-il lorsque Moran demanda un haggis. Après tout, quel meilleur endroit que l’Ecosse pour manger le produit traditionnel phare du pays. Quand il commanda un scotch en plus, Gabin le regarda avec des grands yeux. Certes, il n’était pas son père mais bon ! Faudrait-il exprès d'ignorer les paroles que son meilleur ami lui avait adressé à peine quelques heures auparavant ! "Un scotch ? Tu te fous de moi ?" il y avait des heures er des occasions pour tout, et la, un scotch n’était pas particulièrement adéquat. Et ça c’était un buveur notoire qui le disait, c'est dire qu'il y avait un problème, et à cet instant précis c’était Moran. Il était temps qu'on lui remette les idées en place et qu'on lui tire les oreilles, ce que son meilleur ami se ferait un plaisir de faire. Les deux avaient déjà fait des folies à boire n’importe quand n’importe où et n’importe quoi donc boire un alcool fort à midi, pourquoi pas ? Mais la c’était trop, il buvait en permanence et n’en avait jamais assez, à croire qu'il voulait rester dans un état de flottement tout le temps. "Sérieusement, qu'est ce qui t'arrives ?" Il ne lui demandait pas de lui raconter sa vie mais au moins les grandes lignes pour comprendre ce qui le mettait dans cet état !

Commander et manger du haggis aurait le mérite, d'après les savants calculs de Moran, de soulager non seulement sa faim mais aussi l'atmosphère pesante dans laquelle ils évoluaient tous les deux. Gabin le forçait présentement à lui dire ce qui n'allait pas, parce qu'il buvait un petit peu plus que d'habitude et cela le mettait en rogne. Le jeune homme avait voulu faire cette sortie pour s'alléger l'esprit. Or, le Poufsouffle lui rappelait sans arrêt ses problèmes en lui demandant pourquoi il buvait. En réalité, il se restreignait en sa présence, mais il ne s'en rendait même pas compte. Lorsqu'il était seul, ces derniers temps, c'était fort simple : il allait au pub à midi, buvait. Repartait une heure plus tard le ventre plein de bière, et revenait le soir pour en finir avec du scotch. "Ce qui m'arrive ? Putain Gabin j'essaie d'oublier ce qui m'arrive en sortant avec toi, j'ai pas envie que tu me demandes tout le temps ce que j'ai ! Si tu n'aimes pas mon train de vie, juste, ignore les verres okay ?" lui demanda-t-il en élevant la voix. Le serveur revenait justement avec le sien et Moran le but cul-sec d'un air provocateur avant d'en redemander un. Il fit un sourire mauvais au garçon en face de lui qu'il se fichait de voir réagir mal. "J'ai pas envie de te raconter, j'ai encore le droit à ma vie privée, maintenant mange juste ton haggis, commande une bière si tu veux, et on va au château pour en finir avec cette journée" continua-t-il en plantant sa fourchette de manière brusque dans son assiette.

Gabin n’aimait pas dire à d’autres ce qu’il était bon ou non de faire tour simplement car il n’appréciait pas particulièrement qu'on lui rende la pareille. Cependant, si un jour il était ainsi et que tous l'ignorait sciemment, il n’était pas sur qu'il apprécierait. Il avait un peu peur d'en faire trop, de dramatiser la situation, mais sans vraiment comprendre le comment du pourquoi, il savait, il sentait que quelque chose n'allait pas. C’était infime mais il était observateur et des petites habitudes chez Moran semblaient se modifier légèrement. Son ami avait envie d’Hurler très bien, il allait être servi avec lui, il n’était pas du genre à se replier. "Mais qu’est ce que tu crois ? Je ne te demande de me déballer ta vie mais je ne peux pas ignorer ces foutus verres parce que j’ai peur que tu sois en train de faire une connerie, tu comprend ça ?" dit-il en hurlant tout autant. A présent, tous les clients du bar les regardaient avec des yeux ronds de surprise, bon ils s’étaient bien donnés en spectacle mais ce n'était pas grave pour deux raisons ! La première était que l’accès était crevé et qu’ils allaient pouvoir repartir sur de bonnes bases. La seconde était qu’il n’était pas parano, Moran, sans vraiment le vouloir lui avait bien confirmé que quelque chose n'allait pas.

C'est à ce moment que le serveur revient avec leur commande et Moran s'amusait bien évidement à le provoquer en demandant ou plutôt en exigeant un second verre tout en fixant Gabin pour bien lui montrer qu’il se fichait de ce qu'il venait de lui dire ! Il souffla et regarda d'un ait triste l’Ecossais. Cela ne servait à rien, tant que celui-ci n'avait pas décidé qu'il voulait aller mieux, tous les mots et les gestes du monde resteraient vains. "Très bien reste dans cet état alors" dit-il en se calmant le temps de manger. "Et oui on va retourner au château pour faire ce qui est prévu." Il n'avait absolument pas prévu de changer quoi que ce soit à son programme parce que monsieur faisait une petite crise.