Si Augustus passait la soirée dans la Maison de Morticia Morrison, c'était uniquement parce qu'il y avait été invité. Un vieux sorcier fêtait son anniversaire et avait envoyé tout un tas d'invitations, réquisitionnant le lupanar et les filles, dans le but de donner une soirée plein de luxure. Guère intéressé par les parties de jambes en l'air - surtout dans ces tristes conditions, Rookwood n'avait pourtant pu refuser l'invitation. Il tenait à soigner ses contacts. Mais, dès qu'il le pourrait, il filerait retrouver Mordred, ses grimoires et sa dignité.
En attendant, il sirotait un Wiskey Pur Feu que lui avait commandé Jack Mctorne, un camarade du temps de Poudlard. Ils avaient été heureux de se retrouver et de discuter du bon vieux temps - voilà déjà dix ans que Augustus avait quitté Poudlard - mais la conversation avait été écourtée quand une des filles, agrippant le cou de Jack, l'avait entrainé derrière le bar. Pathétique. Voilà qui ne lui donnait pas envie de s'éterniser.

Que l'on ne s'y méprenne pas : Augustus Rookwood aimait les femmes et les plaisirs de la chair. Bien que promis à la jeune Daisy Blackstone, il menait sa vie de jeune homme comme il l'entendait. Seulement, il s'enorgueillissait du fait qu'il était tout à fait capable d'attirer à lui une fille grâce à ses charmes et sa sagacité, non parce qu'il payait.

Il termina son verre d'une lampée, le reposa sur la table et allait se lever pour prendre congé de son hôte quand une voix sensuelle glissa à son oreille.
▬ On s'en va déjà, beau mâle, susurra une poupée blonde, entièrement drapée d'une couverture qui laissait deviner ses formes généreuses.
▬ Exactement, répondit poliment le "beau mâle" en question, je débarrasse le plancher. Bonne soirée !

Mais la fille ne semblait pas vouloir lâcher si vite l'affaire.
▬ Une petite gâterie avant de partir ? Je promets que ce sera rapide... et exquis.
Quelle tristesse...
Rookwood aimait les chalenges. Où se trouvait le défi si la femme lui était déjà "acquise" ?
▬ Je vous remercie, mais ça ira. Gardez votre souffle pour un autre.

Hélas, nonobstant ses paroles, la poupée blonde se lova sur ses genoux, se collant à son torse, et pépilla sur la qualité de son parfum à lui, joua avec les boucles de ses cheveux.
▬ J'ai dit non, fit froidement Augustus en attrapant son poignet.
Il enroula son bras autour de sa taille et la vira fermement de ses genoux, tout en lui lançant un regard sombre. Sans lui laisser le temps de faire quoique ce soit, le Langue de Plomb fonça vers le bar où se tenait la tenancière. Il savait que la fille ne le lâcherait pas, et il ne voulait pas dire au revoir à son hôte avec une sangsue collée à lui.

▬ Bonsoir, fit-il pour attirer l'attention de Morticia Morrison. Auriez-vous l'amabilité de faire entendre à votre fille que je ne souhaite pas de ses services ?

D'un geste du menton, il désigna la jolie fille blonde qui, après avoir rajusté son drap autour d'elle, se dirigeait de nouveau vers le Mangemort.

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Dragées:

Dès qu'il avait formulé à la maquerelle sa demande, Augustus sut qu'elle n'arrangerait rien à son affaire.
Elle se pencha sur son bar, un sourire aux lèvres, la plume verte ondulant à ses cheveux, et lui coula un regard facétieux.
▬ Alors ça Rookwood, je crois que tu peux le faire tout seul non ? Tu es un grand garçon, hein ?

Le Mangemort plissa les yeux. Elle semblait le connaître et lui, pour une fois, savait qu'il l'avait déjà vue quelque part, sans parvenir à savoir où. S'étaient-ils croisés dans une soirée quelconque ? En tout cas, la familiarité dont elle faisait preuve à son égard - le tutoiement alors que lui-même l'avait vouvoyée - l'irritait au plus haut point. Et comme pour le titiller davantage, la putain revint à la charge, capturant son bras et y faisant quelques douces pressions.

▬ Tu sais, si elle n’est pas à ton goût je peux te trouver un homme aussi, si il n’y a que cela pour te faire plaisir mon chou.
Il fallut tout le sang froid de Rookwood pour ne pas sortir sa baguette et lui administrer un sortilège qui la défigurerait. Il inspira longuement, arqua un de ses sourcils, et darda sur la Morrison un regard plein de mépris. Il se refusa de répondre à la provocation. Il se refusa également de regarder la fille à ses côtés.
▬ Combien ? demanda-t-il à voix basse. Combien pour qu'elle s'en aille s'intéresser à un autre ?

Si Morticia Morrison ne se laissait pas berner par la politesse, peut-être serait-elle plus sensible à l'argent. Ça tombait bien, Rookwood en avait.

Dragées:

Augustus n'aimait pas l'attitude de la maquerelle et, s'il l'avait osé, il aurait sorti sa baguette. Mais il était bien élevé et garda son sang-froid.
▬ Me semble-t-il, répondit le jeune homme sur un ton sarcastique, j'ai le droit de ne pas agir selon la normalité.

Mais la tenancière ne le regardait déjà plus, et ordonna par un signe à la putain de s'en aller. Cette dernière, sans mot dire, se décolla de Augustus et rejoignit un autre homme. Rookwood murmura un merci et tout en resserrant les pans de sa cape, allait s'en aller, quand la voix cristalline de la Morrison se fit une nouvelle fois entendre.
▬ Sérieusement, qu'est-ce que tu fais là ? Tu ne vas tellement pas avec le décor, tu t'es perdu ? Tu ne prendras pas même un verre pour te dérider un peu ?

La bouche de l'homme s'étira en un mince sourire. Il venait de se débarrasser de la fille, voilà qu'il devait en faire de même pour la tenancière.
▬ Je vous rassure, dit-il, bon prince, je ne me suis pas perdu. Je sais parfaitement où je suis.
Sa main effleura le bois du poli du comptoir.
▬ Évidemment, que je ne vais pas avec le décor, ajouta-t-il, et c'est encore heureux.
Son sourire s'élargit, gonflant la provocation.
▬ Quant au verre, c'est volontiers que j'en prendrais un si vous me l'offrez. Mais je doute que vous soyez suffisamment bonne commerçante pour ce faire.

Il braqua son regard dans le sien, la mettant muettement au défi de répliquer - tout en souhaitant un peu qu'elle ne se laissât pas faire.

Surprise ! La maquerelle accepta d'offrir un verre à Augustus. Ce dernier cessa de boucler sa cape et se colla au comptoir tandis qu'on lui remplissait un verre de rhum brun.
La jeune femme fit allusion à cette époque où ils s'étaient côtoyés. Rookwood n'arrivait pas à se rappeler d'elle...

▬ Je vous remercie, dit-il en levant son verre avant d'en avaler une gorgée, sur l'invitation de Lady Tiger.
Piquante et chaude, elle fit réagir le gosier du mangemort.
▬ Nous étions peut-être à Poudlard ensemble ?, commença-t-il, fronçant les sourcils tandis qu'il cherchait des souvenirs pouvant appuyer ses propos.
Sa mémoire, habituellement fiable, ne lui livrait aucune information... Il faisait sûrement fausse route.
▬ Donnez-moi un indice, susurra-t-il en gobant une autre gorgée de rhum. Peut-être était-ce à l'école supérieure de Magie ?

Ou bien, elle était venue visiter son appartement quand il cherchait un colocataire ? Cela lui semblait peu probable, sachant qu'il avait passé les visiteurs au crible de sa pensée analytique.

Il s’était arrêté net dans son élan. Il semblait répondre positivement à ses provocations. Alors pour pouvoir continuer un peu ces joyeusetés, elle avait accepté de lui offrir un verre. Un rhum brun de très bonne qualité. Morty ne s’était d’ailleurs pas privé de l’accompagner. Certains diraient que boire avec les clients n’était pas très sérieux. Elle n’était pas du genre à faire très attention à ce genre de choses. Et puis, c’était tellement drôle de le voir se tortiller les méninges en quête de cette réponse. Ils se connaissaient, mais il ne savait plus d’où. Assez logique quand on y pense. Mais Morty était taquine…

-Je vous remercie

Il était toujours aussi poli, courtois, et sérieux. Augustus pris une première gorgée de rhum et Lady Tiger l’avait suivi de près dans un sourire malicieux qui ne se décrochait plus de son visage.

-Nous étions peut-être à Poudlard ensemble ?

Morticia ferma un œil prise d’une réflexion assez grande, cherchant à calculer leur différence d’âge et cherchant dans sa mémoire.

-Alors oui mais non! Nous nous sommes sans doute croisé en uniforme mais ce n’est pas là que nous nous sommes le plus vu.

Une réponse qui ne semblait pas beaucoup l’aider. Ce n’était pas parce qu’elle supprimait une option que c’était plus simple. Elle venait même de lui retirer l’option la plus évidente. Un nouvelle gorgée de rhum, au bord du rire.

-Donnez-moi un indice. Peut-être était-ce à l'école supérieure de Magie ?

Il était sans doute temps de mettre fin à ces interrogations. Il s’était bien défendu et avait assez cherché d’où elle sortait cette familiarité. Même si dans le fond, elle aurait pu avoir un comportement familier avec un autre client. Seulement avec lui cela n’avait pas le même goût. Avec lui, il y avait ce rattachement à cette vie de parfaite petite fille de famille de sang pur qu’elle avait quitté (un peu contrainte et forcée). Elle avait donc fini son verre d’une traite avant de refaire un service. Puis elle s’était appuyée sur son comptoir, coudes comme appuis, toujours aussi joueuse, sans prêter attention au fait qu’elle offrait sans doute une très belle vue à toute personne se trouvant de l’autre côté du bar.

-Dans un premier temps je vais t’aider, je n’ai jamais mis les pieds à l’école supérieure. Mais je vais aussi te donner quelques indices supplémentaires… Tu étais encore assez petit quand nous étions réunis autour des mêmes grandes tables austères pour les réunions familiales diverses. Et tu devais avoir à peu près 11 ou 12 ans quand j’ai mystérieusement disparu de ton cercle. A toi de trouver le reste, je t’ai déjà beaucoup aidé…

Elle avait redonné un contexte et un début d’histoire. Si Morticia avait poursuivi en exposant le passage à l’hôpital et sa sortie remuée pour finir à la rue, il aurait sans doute resitué tout de suite avec les indices glissés dans les dates.

-Si ça peut te rassurer, si je ne vous ai pas oublié, vous êtes peu nombreux à vous souvenir de moi. Les grandes familles sont sélectives et un mauvais élément doit être vite caché. Nous avons tous changé Augustus, et soyons francs, nous ne prêtions qu’une attention relative aux autres jeunes gens dans ces réunions barbantes et interminables…  

Force était de constater que Augustus avait épuisé toutes les conjectures - selon lui. La Matrone persistait à nier tout ce qu'il avançait et c'était horripilant pour Rookwood d'être confronté à ces échecs. La jeune femme sembla lassée par ce jeu de devinettes, puisqu'elle lui livra quelques indices. Attentif, le Langue-de-Plomb, mémorisa chacune des informations et, comme elle avait laissé sous entendre qu'il était jeune - et que c'était peut-être avant son entrée à Poudlard - l'homme se plongea dans ses souvenirs d'enfance.

Il chercha une fille un peu plus grande que lui, qui avait manifestement déçu sa famille puisqu'elle en avait été éjectée. Il en arrivait régulièrement - Augustus lui-même se souvenait très bien du départ volontaire de Andromeda Tonks, née Black. Souvent, on ne parlait plus de ces brebis galeuses (les photos étaient brûlées, les objets personnels étaient relégués aux caves et aux greniers des demeures, et chacun, observant le tabou, faisait comme si ces personnes n'avaient jamais été là). Superposant l'impression de déjà-vu aux nouvelles données par Lady Tiger, la mémoire du Mangemort se fit plus précise.
▬ Seriez-vous la cadette Morrison ?
À présent, il se rappelait la jeune fille au tempérament de feu qu'il croisait quelques fois lors des grandes rencontres de sang-pur. Frappé par le contraste entre ce qu'elle était et ce qu'elle était devenue, Augustus ne put s'empêcher de remarquer que cette matrone était quand même la conséquence logique de cette jeune fille rebelle.

Pour faire passer la découverte, Rookwood termina son rhum.
▬ Je n'aurais jamais parié vous retrouver ici, avoua-t-il.
Elle en avait certainement bavé, mais la voilà maîtresse de son empire, plus libre que jamais.

Retrouver cet homme qu’elle avait connu si petit était assez amusant. Morticia savait déjà qu’il trouverait en cherchant un peu. Et c’était impatiente qu’elle attendait de savoir quelle tête il ferait en trouvant. Tout comme elle espérait qu’elle n’aurait pas besoin de lui donner la réponse. Après tout, Augustus était un homme intelligent, il devrait pouvoir résoudre l’énigme facilement.

Morty lui avait déjà donné assez d’indices pour le renvoyer à une période assez précise de son enfance. Il avait l’air de sérieusement se creuser la cervelle le petit père. La matrone en profita pour reprendre une gorgé de rhum. Décidément bon ce petit rhum brun. Elle le regardait avec ce petit air malicieux, patiente mais pas pour très longtemps. Finalement il semblerait que cela se remettre en place dans l’esprit pourtant très actif du beau Rookwood.

- Seriez-vous la cadette Morrison ?

Un grand sourire éclaire son visage alors qu’elle se redresse. A l’époque où il l’avait connu, elle était une jeune fille comme beaucoup d’autres. Elle suivait les traces de son frère, jeune fille sage dans un milieu hostile dès le départ. On lui avait fait comprendre qu’elle n’était pas encore assez discrète, ce qu’elle avait du mal à accepter. Il était donc plutôt normal que cet homme ait eu du mal à remettre les images dans l’ordre.

-Heureuse de te revoir mon cher.

Si son sourire avait déjà plus ou moins répondu à cette question, elle voulait tout de même donner une confirmation. Pour toute réaction il termina son verre, visiblement encore surpris.

-Je n'aurais jamais parié vous retrouver ici

Sans trop lui demander son avis, Morticia remplis à nouveau son verre, émettant un léger rire à sa remarque. Peu de personnes l’auraient vu finir ici il y a quelques années. Et pourtant, elle s’était plus que fait une place dans ce petite monde de l’ombre.

-Moi en revanche j’aurais parié te voir ici plus tôt. Je vois tellement de tes petits camarades ici…

C'était tout simplement incroyable pour Augustus, que de croiser une vieille connaissance - si vielle que le souvenir s'en était presque allé. Morticia lui servit de nouveau un verre de rhum brun, qu'il se mit à siroter sans réfléchir.
▬ Moi en revanche, intervint la jeune femme, j’aurais parié te voir ici plus tôt. Je vois tellement de tes petits camarades ici…

Augustus eut un rire franc.
▬ C'est que cette endroit ne me ressemble pas, confessa-t-il en balayant le bar d'un regard.
Fort de son éducation aristocrate, Rookwood ne batifolait pas avec les endroits sordides. Certes, la soirée prouvait que bien des amis et connaissances à lui venaient se vautrer dans la débauche. Lui trouvait cela hypocrite, de professer une bonne tenue devant le monde et de venir ici en catimini. De plus, Rookwood était fiancé à Daisy Blackstone et, si les aventures hors mariage ne le dégoûtaient pas, il tenait quand même à rester droit dans ses bottes. C'était peut-être pour cela qu'il n'était pas si aimé par les autres hommes de son rang et de son âge. Néanmoins, il se dit qu'il apprendrait bien des choses sur les hommes de son cercle à passer plus de temps ici. Voyons... il y avait peut-être moyen de faire parler les filles...
▬ Vous devez vous régaler à voir ici certains hommes prêts à tout pour un moment avec une fille. Le chantage ne vous a jamais intéressé ?

Il adressa à Morticia Morrison une oeillade malicieuse, espérant qu'elle satisferait sa curiosité.