« Salut, la place est libre ? » ?  avait-il dit avant de s’assoir aux côtés de Philae. Il l’avait trouvée dans la salle commune, seule, et s’était machinalement présenté à elle. Sa question était accompagnée d’un sourire gêné et maladroit. Nulle gêne vis-à-vis de la jeune femme cependant, il avait simplement l’impression de se forcer en étant allé lui parler. Et il avait toutes les raisons de penser cela. Déjà, il ne la connaissait pas réellement, si bien qu’il pouvait compter sur les doigts d’une seule mains les informations qu’il savait sur elle. Enfin, Marcus sortait d’une période troublée pour lui. Ces dernières semaines avaient été difficiles pour lui, mais on l’avait conseillé de ne pas s’enfermer sur lui-même et de parler aux autres, quitte à se forcer.

« Pas mal le dernier match des anglais. McFallen, leur attaquant, serait vraiment excellent en tant que poursuiveur s’il savait monter sur un balais »  ajouta-t-il ensuite dans la lignée des nombreux parallèles qu’il établissait entre le handball et le Quidditch. Ces parallèles étaient sans doute la raison principale à l’intéressement de Marcus pour un sport moldu. Si le garçon n’y connaissait pas grand-chose au handball, il aimait cependant écouter les retransmissions des matchs à la radio, sur des stations de seconde zone que peu de gens – moldus compris – écoutaient. « Tu as déjà pu assister à un match ? »  demanda Marcus, réalisant alors qu’il n’avait jamais vu une seule image de ce sport et qu’il se contentait d’imaginer ce qu’il entendait à la radio. « Je me demande comment c’est … » .

Un livre ouvert que mes yeux fixaient sans vraiment regarder. Je n’étais pas le genre de personne à me plonger dans les ouvrages avec acharnement. Cela m’ennuyait même plus qu’autre chose. Des mots écrits sur une page blanche n’était pas, selon moi, la meilleure manière d’apprendre. Il fallait être dans l’action, vivre les choses pour comprendre, pour apprendre. Savoir comment l’on pourrait réagir. C’était là, pour moi, le réel apprentissage de la vie. Le genou tremblant, la tête posée entre mes deux paumes des mains, je n’avais pas entendu Marcus arriver. Ce n’est que lorsqu’il s’était adressé à moi que mes yeux s’étaient posés sur lui, l’air peut-être un peu interrogateur. Je mime un « oui » de la tête, l’invitant à s’asseoir à côté de moi. Nous n’avions jamais vraiment parlé de nous. La seule chose que je connaissais sur lui, c’était sa passion pour le sport, une passion que je partageais. Le seul point commun que je nous connaissais. En dehors de cela, il était un parfait inconnu à mes yeux.

« Il en écraserait plus d’un, c’est clair et net », dis-je un sourire sur les lèvres. « Mais beaucoup de sportif moldu pourraient être excellent en tant que Poursuiveur, bien dommage qu’ils ne sachent pas monter sur un balai ». Je me demandais souvent ce qu’il en serait si le Quidditch devenait également un sport pour les moldus. Si l’on trouvait le moyen de leur apprendre à voler, mais ce serait dévoiler leur véritable nature. Beaucoup accordaient de l’importance au secret magique.
Je secoue la tête pour répondre à la question du sorcier. « Non, jamais. À vrai dire, je suis la seule de ma famille à m’intéresser au sport, moldu ou sorcier. Je n’ai jamais eu l’occasion d’assister à un match, mais je t’avoue que j’y pense ! Ce doit être grandiose ». Mon sourire s’élargit, les yeux pétillants, rêveurs, reflétant mes pensées actuelles, l’imagination qui s’installait petit à petit. « L’ambiance, le public qui sautent, chantent et les joueurs qui se donnent à fond…oui vraiment, j’espère qu’un jour je pourrais y assister ». Je tourne alors la tête vers Marcus, une idée en tête. « On pourrait même y aller ensemble ! ». Une proposition peut-être folle. Mais à quoi bon, après tout ? Parler de sport était, pour le moment, notre seul et unique sujet de conversation. Pourquoi ne pas mettre en pratique ce que nous partagions ?

Dans sa tête, il se fait le film de l’ambiance que décrit Philae. Il s’y voyait déjà, à célébrer chaque point marqué avec le reste d’une foule pendue aux faits et gestes de leurs joueurs préférés. Si l’ambiance d’un match d’handball était aussi folle que celle d’une partie de Quidditch, alors Marcus ne pouvait qu’apprécier. Lui, d’ordinaire peu expressif et peu enclin aux démonstrations de joie, s’oubliait lors d’un match de Quidditch. Il n’y avait plus rien, à part le match ; Marcus vivait alors entièrement pour la victoire de son équipe préférée. Mais il ne put s’empêcher d’arquer un sourcil à la proposition de la Gryffondor. « Euh oui, pourquoi pas. Ça peut être sympa ! » dit-il, non sans une légère appréhension pour ce que cela impliquait : devoir passer toute la durée du match entouré de moldus.

« On se fera ça, et je t’emmènerai voir un match de football de l’équipe de Liverpool. Je ne connais pas trop bien ce sport, mais apparemment, l’ambiance du stade vaut le détour » ajouta le liverpuldien non sans afficher – par un franc sourire – sa satisfaction à habiter cette ville. Le bleu et bronze marqua alors une courte pause. D’ordinaire, leurs discussions s’arrêtaient ne duraient guère davantage de temps. Ils se contentaient de quelques paroles lancées rapidement au détour d’un couloir, de commentaires sur l’activité sportives. Il porta son attention sur la jeune femme, la détaillant. « Et tu viens d’où sinon ? » demanda-t-il simplement sans qu’il y ait réellement de contexte avec leur discussion. « Ton accent me fait me dire que tu viens du Sud de l’Angleterre, mais je ne pourrais pas être plus précis ! » . Le jeune homme ponctua sa question d’un sourire presque désolé, à la fois pour ne pas avoir entamé cette conversation plus tôt que pour ne pas savoir reconnaître son accent.

Un sourire satisfait qui s’élargit davantage devant son approbation. Je commençais presque à en avoir des crampes aux zygomatiques. C’est que je n’avais pas l’habitude de sourire autant en si peu de temps, surtout pas devant un livre des plus ennuyeux en compagnie d’une personne dont je ne connaissais rien, mise à part sa passion pour le sport. Mes yeux se perdent quelques instants dans l’idée de pouvoir assister à une rencontre sportive. Mieux encore, à deux rencontres ! « Oh oui, avec plaisir ! Il paraît que les supporters de Football sont souvent déchaînés ! Ce n’est pas un sport que je connais plus que ça, mais j’adorerais ! » Difficile pour une personne comme moi de contenir ma joie face à ce genre de plans. J’étais plutôt le genre de personne excentrique, hyperactive à montrer mes émotions de façon explicite. Je ne parvenais jamais à les contenir, c’était plus fort que moi. Sans doute la raison pour laquelle j’étais une terrible, terrible menteuse.

Je pensais que la conversation allait se terminer là, qu’il allait se plonger dans une toute autre activité, voire même se lever et aller s’asseoir ailleurs. N’était-ce pas ce qu’il se passait habituellement ? Pourtant, il n’en est rien. Le sujet change, une simple question posée qui me fait d’abord lever un sourcil, légèrement étonné avant de reprendre une expression amicale. Un petit rire tandis que je répondais « Je viens de Cambridge, pas tout à fait au sud, plutôt à l’est de l’Angleterre ». Une envie de sa part d’en savoir un petit peu plus sur moi, une envie partagée. Cette volonté de savoir qui se cache derrière ses centres d’intérêt, connaître sa personnalité, ses autres loisirs et ses traits de caractère. Je n’ai jamais été quelqu’un de très bavard. Néanmoins, mon sens de l’observation me permettait souvent de savoir si une personne était de confiance ou non. « Et toi ? Je ne pense pas que tu sois de Cambridge, je me trompe ? ». Retourner la question était toujours un bon moyen de continuer la discussion, de ne pas créer de blanc qui nous mettrait, tous les deux, mal à l’aise. Loin de moi l’idée de le faire fuir à cause de mon manque de conversation. « Et quelles sont tes autres passions dans la vie ? Autre que le sport, évidemment. » Un clin d’œil en sa direction. Peut-être que nous avions une seconde passion commune.

« Ok vendu ! » dit le jeune homme sans cacher son enthousiasme, « On essaie de s’organiser ça le plus tôt possible, il doit bien y avoir des matchs en ce moment » . Il eut envie de lui serrer la main à la manière d’un politicien ou d’un commerçant afin de sceller leur deal, mais cela risquait faire trop. Il oublia cette idée aussi rapidement qu’elle lui était venue. De toute façon, avant cela, ils devraient se mettre d’accord sur la date et l’endroit.

Il ne put s’empêcher de grimacer lorsqu’elle le corrigea. Nord, Sud, Est et Ouest … tout ça, ça dépend de l’endroit où on se trouve ! Et puis, Marcus avait ce reflexe enfantin et chauvin de placer les villes en fonction de Liverpool. Cambidge était au Sud de Liverpool, alors Cambridge était au Sud de l’Angleterre, c’était aussi simple que ça. « Cambridge ? Je ne connais pas, je n’y suis jamais allé … »  avoua ensuite le jeune homme qui n’avait jamais quitté Liverpool – sauf pour aller à Poudlard. « Et non, je ne viens pas de Cambridge – sinon j’aurai su où ça se trouvait … » . Ses mots laissèrent la place à un léger rictus, puis il continua : « Mes parents habitent Liverpool » .

Un grand sourire s’afficha sur le visage de Marcus lorsqu’elle lui demanda ce qu’elle aimait. « La musique, j’adore la musique ! » fit-il fièrement, heureux de parler de ce qu’il aimait le plus au monde. Ecouter de la musique était pour le jeune un exutoire, à jamais la musique l’avait accompagné, et à jamais elle l’accompagnera. Il ne pouvait imaginer passer une journée sans laisser la musique envahir ses sens ; c’était une routine qu’il prenait plaisir à exécuter. « Et toi, la musique ? Autre chose ? Quelles sont tes passions ? ¨Que fais-tu quand tu ne penses pas au sport ? » .