Melody ne sortait plus beaucoup de chez elle, sauf pour aller au travail, mais même là, elle n'était que l'ombre d'elle-même. Depuis le jugement de Kieran Graves au Magenmagot, rien n'allait plus. Melody en était ressortie effondrée, désespérée mais surtout perdue. Qu'allait-elle faire, maintenant ? Elle n'avait jamais dépendu d'un homme, et c'était loin d'être le cas, mais il fallait admettre que son petit ami était la seule chose positive dans sa vie. Sa grande soeur ne lui parlait plus, ses amis et collègues étaient distants depuis le jugement, son chef l'avait dans le collimateur... Sa vie avait basculée et elle ne savait pas comment s'en remettre. D'ailleurs, elle ne pouvait peut-être s'en remettre finalement.
Alors qu'habituellement elle restait cloîtrer chez elle le week-end, elle avait décidé cette fois-ci de se rendre au Chemin de Traverse afin d'acheter de quoi coudre des vêtement, sa passion qu'elle n'avait pas assouvie depuis longtemps tant elle était déprimée. Pourtant, à partir d'aujourd'hui, elle avait décidé de se reprendre en main. Kieran était au fond d'une affreuse cellule d'Azkaban, c'était lui qui souffrait, pas elle. Elle n'avait pas le droit de le laisser tomber, pas le droit de se laisser s'effondrer sans se battre. Car oui, elle allait se battre pour lui, pour eux, pour le sortir de cet enfer dans lequel il n'avait, selon elle, rien à faire. Il était innocent, et elle allait le prouver. Elle ne cesserait pas de faire appel, encore et encore, de réunir des preuves, de chercher la vérité sans relâche. La première étape était de se reprendre elle même afin de pouvoir retrouver ses forces et sa volonté perdues, quoi de mieux pour cela que de retrouver une de ses passions : la création de vêtements. Et pour se faire, elle devait se rendre au magasin Madame Guippure, au Chemin de Traverse, dans lequel se trouvait toujours de magnifique tissus.
Une fois arrivée au Chemin de Traverse, Melody regarda la foule d'un air absent. Les gens se pressaient en ce week end de novembre, noël approchant à grand pas. La juriste se faisait parfois bousculer, mais cela ne permettait pas de la faire revenir de son monde de déprime. Elle se dirigea doucement vers la boutique de vêtements, dans lequel se trouvaient aussi de nombreuses personnes. Elle déambula dans les allées, jetant des petits coup d'oeil absents autour d'elle sans vraiment regarder les pull, robes et autres cardigan qui se trouvaient pourtant juste devant ses yeux. Tout lui paraissait si lointain, si inutile qu'elle ne remarqua pas qu'elle se dirigea tout droit vers une ravissante jeune brune...

Melody regardait un beau châle couleur prune, qui pouvait particulièrement bien aller avec sa jolie robe marron qu’elle avait créée il y avait quelques mois de ça, quand elle appréciait encore la couture et la confection de vêtements divers et variés… Alors qu’elle continuait à se morfondre, en se disant que Kieran l’aurait sûrement trouvé joli si elle avait porté ça devant lui, une voix la tira de sa torpeur, une belle voix, douce et chaude. Lorsqu’elle releva le visage vers la voix, elle vit une magnifique femme brune dont les traits étaient particulièrement harmonieux. La blondinette remarqua le rapide regard de la jeune femme sur ses doigts, qui étaient nus, tout comme son cou, mais pas ses oreilles, et les boucles qui les ornaient eurent droit à un compliment. Par politesse, elle sourit, doucement, sans que le cœur n’y soit vraiment, avant de répondre un petit « Merci ».
Elle détailla ensuite la brune, qui était particulièrement bien habillée, et qui avait un magnifique collier : un pendentif avec une belle pierre rouge attaché à une très jolie chaîne en or. C’était très sophistiqué, mais en même temps très simple, ce qui allait parfaitement à la jeune femme. « Vous, vous avez un très beau pendentif » déclara-t-elle d’une voix douce, mais dénuée d’émotion. « C’est un rubis ? » demanda-t-elle, étonnée de voir une si grosse pierre au cou d’une si jeune femme. Sa famille était-elle riche ? Son mari, peut-être ? Ou alors elle avait fait fortune très très jeune, ce qui révélait soit un cerveau fourmillant de grandes idées, soit un vrai coup de chance, ce qui pouvait arriver, parfois. Le regard de la blonde dévia sur les mains de la demoiselle à qui elle parlait, et elle remarqua une magnifique bague, qui, étonnement, lui semblait très familière… « Votre bague » murmura alors la juriste, incapable de la quitter du regard.

La jolie jeune femme, vraisemblablement plus jeune que Melody, qui se dit qu’elle devait avoir environ celui de Kierán, toucha son pendentif avec un air surpris. Ce rouge intense, sa forme… Tout portait à croire que c’était bien un rubis. Pourtant, la jeune femme reconnu ne jamais vraiment s’être posé la question, le collier étant un cadeau de son compagnon. Melody la regarda quelques instants sans rien dire. Son compagnon à elle était en train de moisir dans une prison, bien loin de toutes ces vénales préoccupations pour savoir si cette pierre était ou non précieuse. La juriste s’en fichait bien des cadeaux et des petites attentions, mais elle aurait tout donné pour la liberté de l’être aimé, pour avoir de petites conversations futiles avec lui, ou même des disputes, n’importe quoi, tant qu’il était là… Elle n’était pourtant pas du genre à déprimer, ayant pratiquement tout le temps le sourire aux lèvres habituellement, mais tout ce qui avait autour d’elle lui rappelait, d’une manière ou d’un autre, cet amour qu’elle avait en quelque sorte perdu. Melody tenta de se raccrocher à la conversation, à cette jeune femme en face d’elle qui ne savait rien de tout cela et qui ne la regardait donc pas avec cet air de pitié comme ses collègues. Elle releva les yeux vers elle et se força à faire un petit sourire, bien loin de ceux à la splendeur éclatante de d’habitude. « Il est généreux » dit-elle d’une petite voix, imaginant ce couple heureux et sans soucis.
Alors que la bague, que Melody croyait reconnaître, s’approchait de ses yeux en même temps que la main de sa propriétaire, la jeune juriste se pencha quelques peu pour mieux l’observer. Cette pierre bleue, un saphir, montée sur un magnifique sertissage en or blanc très fin et élégant… Oui, c’était elle, la bague de fiançailles de sa mère, la seule chose qui lui restait de ses parents, le seul et unique souvenir que Raven et elle avaient pu récupérer après leur disparition… Raven, l’aînée, n’avait pas tenu à la garder, sans que Melody ne comprenne pourquoi, c’était donc cette dernière qui l’avait récupéré. Pourtant, un jour, cette bague avait disparue, sans que la juriste ne s’ne aperçoive, causant évidemment beaucoup de tristesse. Melody y tenait beaucoup, sentant en ce petit objet la dernière trace de cette mère qu’elle n’avait pas connue, de cette enfance heureuse si lointaine et éphémère. « Un héritage… » répéta-t-elle d’une voix absente. « De votre mère, je suppose ? » murmura-t-elle en relevant un regard froid sur la jeune femme. Un sentiment de colère profonde était maintenant en train de se déverser dans le petit corps de la cadette Fawkes. Le désespoir et la tristesse qu’elle ressentait juste avant, et ce depuis un petit moment déjà, encouragèrent l’énervement à prendre toute sa place, renforçant les sentiments négatifs. Pourtant, elle tenta de rester de marbre, souhaitant voir jusqu’où irait la voleuse dans ses mensonges, souhaitant la prendre la main dans le sac. Melody ne se laisserait pas voler sa mère sans rien dire.

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Melody parvenait tant bien que mal à garder sur ses lèvres un sourire amical, même si elle sentait monter une colère profonde en elle. Cette bague volée et maintenant retrouvée ainsi que la voleuse qui jouait son rôle à la perfection était la goutte qui faisait déborder le vase. La blondinette n’était pas du genre à perde patience, à s’énerver ou à crier, mais cela allait surement être le cas très prochainement. Depuis l’arrestation de Kierán et ensuite sa condamnation, ses sentiments et émotions étaient exacerbés, surtout les négatifs. Elle était continuellement triste et désespérée, la colère ne venait que s’ajouter à une liste déjà assez grande de mauvaises émotions. La jolie brune en face de la juriste maîtrisait l’art du mensonge, c’était certain. Elle mimait parfaitement les mimiques d’une femme sincèrement heureuse de l’héritage de sa famille, comme si elle tenait vraiment à cette bague… « Les relations avec mères sont souvent compliquées » dit Melody avec un fin sourire. Cette phrase n’était pas fausse, enfin si l’on en avait une, évidemment. La jeune femme se demandait souvent comment aurait été sa relation avec ses parents, et plus précisément sa mère, s’ils n’avaient pas disparu, et elle était parfaitement incapable de s’imaginer quoi que ce soit. Melody reporta finalement son attention vers la jolie jeune voleuse en lui souriant. « C’est donc le genre de bague gravée à l’intérieur, j’imagine » dit-elle, tentant encore de piéger celle qui lui avait pris une chose aussi précieuse. Ce que la brune ne savait sans doute pas, ou alors elle n’avait pas fait attention à ce détail, c’était qu’à l’intérieur de la bague, il y avait une inscription. Un arrière-grand-père du côté maternel l’avait offert à une arrière-grand-mère pour la demander en mariage, et celui-ci avait fait graver With love sur l’anneau. « Surement quelque chose de romantique, comme avec amour, ou un truc de genre » déclara Melody avec un regard légèrement froid. C’était même exactement ça, en fait.

La brune sembla émue lorsque la juriste parla des relations avec la mère, ce qui ne manqua pas d’attirer son attention. Une mère… Elle non t plus, elle n’en avait pas eu. La vie lui avait enlevé la sienne rapidement et sans aucune explication, comme ça, du jour au lendemain. Bien sûr, elle avait eu beaucoup de chance d’avoir sa sœur auprès d’elle, quand elles étaient enfant. Elles se soutenaient l’une et l’autre. Mais aujourd’hui, ce n’était plus le cas. Aujourd’hui, alors qu’elle était au fond du gouffre, Melody était seule. Sa sœur ne lui parlait plus, ne l’appelait plus, ne la voyait plus, et peut-être même qu’elle ne l’aimait plus… En cette période plus que jamais, la blondinette ressentait le manque de ses parents, et surtout de sa mère, parce qu’elle avait besoin de soutien et qu’elle n’en avait pas, de personne. Elle était seule, aucune famille pour l’aider ou juste pour lui remonter le moral. Si seulement il y avait au moins Raven… Ou si seulement Kierán n’avait pas été enfermé… Elle était en détresse, émotionnelle surtout, mais pas que. Et aucune mère pour panser ses blessures. Il y avait pourtant un petit rayon de soleil dans le noir de son cœur, et jamais elle n’aurait pensé dire ça un jour, mais la présence d’Oona lui faisait du bien. C’était une bouffée d’oxygène dans ce qui semblait être un puit sans fond.
« Je sais bien que c’est exactement ça… » souffla Melody lorsque la jeune et jolie jeune femme en face d’elle affirma que oui, il y avait une inscription et que oui, c’était Avec amour. La brune déclara espérer que son petit ami serait aussi généreux, et cette déclaration agaça la blondinette. Elle s’en fichait pas mal, de la générosité, puisqu’elle, elle espérait seulement que l’homme dont elle était amoureuse sortirait le plus vite possible de prison… L’inconnue récupéra rapidement sa main, la mettant dans sa poche avant d’annoncer que son frère l’attendait et qu’elle devait donc partir. Melody la retint en l’attrapant, avec une extrême douceur, par le bras. « Avant de partir, pourrirez-vous me rendre la bague que vous m’avez volé il y a quelques mois de ça ? » demanda-t-elle d’une voix claire et forte. Son agacement et sa colère ne transparaissaient pas, elle restait calme, attendant de la jeune femme qu’elle soit honnête. Elle espérait ne pas avoir besoin de batailler, ou même de crier, car son désespoir lui prenait déjà beaucoup d’énergie et qu’elle était continuellement à bout de force, peut-être aussi à cause du fait qu’elle ne mangeait plus beaucoup…

Bien loin de se démonter, de rougir de honte ou encore de s’excuser platement, la jeune femme déclara que Melody pouvait toujours lui racheter sa bague, si elle le voulait. La blondinette lança un regard froid et incrédule à la brune, qui semblait prendre toute cette histoire à la rigolade, comme si c’était une vaste plaisanterie. « Ne soyez pas ridicule… » souffla la juriste en la suivant hors du magasin. Elle n’était pas du genre à faire un esclandre, de toute façon, mais il était vrai qu’elle serait plus à l’aise pour parler de ce délicat sujet dehors. Cette bague, c’était la sienne. Celle de sa famille, celle de sa mère, et elle voulait la récupérer. La brune ne semblait pas comprendre la détresse émotionnelle dans laquelle était plongée Melody, car elle lui demanda de prouver que le bijou lui appartenait bien. La cadette Fawkes lâcha un long soupire avant de s’adosser contre un réverbère. « Je connaissais l’inscription » dit-elle d’une voix lasse. « C’est la seule chose qui me reste de ma mère, en fait » expliqua-t-elle avec un fin sourire nostalgique. La dernière chose, la seule qui restait de son existence… Cette histoire était ridicule. Melody s’en fichait bien de savoir qui lui avait volé la bague, et faire tourner en bourrique cette jeune femme était stupide de sa part. Tout faire pour la prendre la main dans le sac n’était pas du style de la jeune femme, qui semblait plus mal en point qu’elle ne le pensait vraiment. Son esprit était embrumé et elle faisait n’importe quoi, mais elle voulait bel et bien récupérer cette bague. « Ecoutez, je suis fatiguée, vraiment fatiguée, et je ne vais pas m’amuser à vous déballer ma vie, à vous expliquer pourquoi cette bague est si importante que ça à mes yeux… » murmura-t-elle avant de relever les yeux vers la jolie brune. Melody n’avait pas envie de lui expliquer que ses parents avaient disparus, qu’ils ne leur avaient rien laissés, à sa sœur et à elle, à part leurs affaires, et qu’elle aimait cette bague parce qu’elle lui rappelait les mains douces et chaleureuses de sa mère. « Je tiens beaucoup à ce bijou, Miss, alors s’il vous plait, rendez-le-moi » demanda-t-elle ensuite d’une voix claire et forte, déterminée à rester polie et douce, comme elle l’était.

L'inscription dans la bague était, il fallait l'admettre, très commune. Nombre de bague de fiançailles ou de mariage devait ce genre de phrase bateau. Mais ce n'était pas n'importe quelle bague. Elle n'était pas commune, il suffisait de la regarder pour comprendre qu'elle était vieille et faisait partie d'un héritage. Ce n'était pas le genre de bague que l'on acheté de nos jours."Peut-être, mais il y a des tonne d'autre inscription possible..." répondit Melody avec un air exaspéré. C'était sa bague, celle de sa famille, elle le savait et elle était persuadée que la jeune femme en face d'elle le savait pertinemment aussi ! La juriste s'en fichait bien qu'elle l'ait volée, elle voulait simplement la récupérer.
Melody souffla et leva les yeux au ciel, agacée par cette situation qui semblait ne pas vouloir s'arranger. Où aurait-elle pu la voler ? Au Ministère surement. Melody posait parfois ses bijoux avant de se laver les mains, aux cabinets, alors elle aurait pu les prendre là. "Je n'en sais rien, peut-être au Ministère, là où je travaille... Mais qu'importe, non ?" elle dit, trop impatiente pour vouloir argumenter. Elle posa la main sur ses paupières, tentant de calmer ses émotions. "Ecoutez, mademoiselle, cette bague est la mienne, s'il vous plait...". Sa voix semblait se tordre sous toute la peine qu'elle ressentait à cet instant. Ce n'était pas la bague, c'était tout sa vie qui l'attristait en ce moment. Ce n'était que la goutte d'eau...

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