Impossible… Selon Neo et sa philosophie de vie, rien n’était réellement impossible. Il suffisait de s’en donner les moyens, voilà tout et la majeure partie du temps, c’était la psychologie humaine et les tourments intérieurs qui empêchaient les gens de vivre de belles choses. N’est-ce pas Neo ? Mais le sujet n’était pas là. Stubby exprimait toutes ses craintes à coeur ouvert, pas question de penser à ses tracas à elle. Au fond, malgré ses maladresses, la roumaine avait toujours été une bonne amie, oreille attentive, capable de dire les choses avec réalisme et douceur. Peut-être aurait-elle du avoir une amie comme elle, peut-être ! Encore aurait-il fallu pour ça qu’elle en parle, ma foi. « S’il fuit pour ça, c’est qu’il y a un autre problème que le fauteuil dans l’histoire. » Car oui, qui fuirait devant une telle démarche si franche et bienveillante ? Ouvrir son coeur, c’était aussi laisser à l’autre l’opportunité de nous blesser. Et s’il le faisait, et bien… C’est sans doute qu’il ne méritait pas les larmes qui bien souvent coulaient ensuite.
La véritable question était tout autre, en réalité. Est-ce que Stubby avait seulement envie de s’engager ? Neolina l’avait toujours vu comme un garçon volage, attaché à sa vie d’artiste un peu bohème, cherchant l’affection dans bien des bras. Tout ça sans le juger bien sûr, chacun sa vie, ses envies, tant que cela ne faisait de mal à personne. Mais là, elle ressentait son tourment, et ça la peinait, il fallait bien l’avouer. Stubby était perdu, comme le prouva sa phrase qui disait tout et son contraire. Avec bien des gens, elle aurait fait la remarque de cette contradiction d’ailleurs, mais s’abstint avec l’animal fier qui lui faisait face. C’était un coup à ce qu’il se braque, et ça n’était pas le but. « Il n’attend peut-être pas de toi que tu le gères, tu sais. Juste que tu fasses avec. Non ? » Elle essayait de réfléchir comme elle pouvait. C’était qu’elle ne connaissait pas ce professeur, ni son caractère, ni son tempérament, rien du tout. Mais vu comme Stubby l’avait décrit, c’était un homme intelligent. Et si cet homme savait se débrouiller seul, il n’attendait sûrement pas qu'il soit son aide-soignant, mais juste son amant ou peut-être plus ? Sans qu’elle ne le dise pourtant, Stubby coupa court à ce qu’elle pensait. Rien de tout ça n’était clair, et il était évident que Stubby et son “ami“ étaient sûrement plus souvent occupés à faire autre chose qu’à parler. C’était à n’y rien comprendre tout ça, surtout pour Neo qui avait toujours été particulièrement claire sur sa peur de l’engagement avec ses anciens compagnons. Toujours, elle leur avait dit qu’elle partirait peut-être, et qu’il ne faudrait pas lui en vouloir. Et c’était ce qu’elle avait toujours fait, depuis Andrea. « Tant que toi tu le vois plus que comme un fauteuil… » lui glissa-t’elle dans un sourire, serrant toujours sa main dans la sienne. « Sais-tu que la majorité de nos peurs sont en réalité infondées ? » C’était quelque chose qu’elle avait appris récemment, dans un papier qui traînait dans la salle d’attente de son groupe de soutien à Sainte-Mangouste. « C’est souvent une projection de notre esprit qui cogite trop. Et là, j’ai l’impression que tu cogites beaucoup. Peut-être que tu devrais tout simplement profiter du temps que vous passez ensemble et, quand la question se posera et bien… » Son sourire s’accentua, empli de bienveillance. « Je serais là si tu as besoin de moi. »