Comme tous les matins, Amelia s'était réveillée en espérant qu'aucun de ses professeurs ne serait absent. Elle détestait plus que tout être prise au dépourvu et prévenue à la dernière minute. Fort heureusement, elle avait toujours un plan B (les révisions à la bibliothèque universitaire), voir même un plan C.  Ce lundi matin, elle eut deux imprévus : le secrétariat lui annonça l'absence de l'enseignant de TD de l'après-midi. Mais l'invitation d'Ambroise à se rencontrer aux Trois Balais tomba à pique. Elle vint combler ce trou béant - légère exagération en vue - dans son emploi du temps. D'un coup de plume correctrice, elle avait donc remplacé l'intitulé du cours par cette rencontre avec le libraire à 14 h 30. Elle se trouvait alors à l'école supérieure de magie de 8 h 30 à 10 h 30 pour une conférence sur le fonctionnement du magenmagot suivie d'un entretien avec un professeur d'une demi-heure pour une présentation orale. Il avait voulu évaluer chaque élève aussi bien à l'oral qu'à l'écrit. Il s'agissait d'une simple étude de cas, ce qui était bien suffisant pour la stresser. La conférence lui avait permis d'occuper son esprit sur un sujet qui la passionnait depuis des années. Depuis qu'elle avait décidé qu'elle deviendrait juge. Et le professeur se montra bienveillant et sembla satisfait de son exposé. Il lui donna toutefois des conseils pour améliorer sa diction et son vocabulaire professionnel. Rien de bien méchant. En effet, il la félicita pour la plupart de ses analyses et conclusions. Une fois fini, elle retrouva une de ses camarades qui avait fini un cours pour discuter jusqu'à son rendez-vous avec le dit professeur qu'Amelia venait de quitter. Aileen était sûrement l'une des personnes les plus sympathiques qu'elle avait croisé en droit. Aussi il lui était toujours agréable de converser avec elle, même pour vingt minutes. Ce fut le temps que passa l'autre étudiant avec le professeur. Un garçon blond maladroit au possible qui ressortit du bureau la mine basse, visiblement déçu. Elle croisa les doigts pour qu'Aileen réussisse cette épreuve. Elle la prit dans ses bras pour l'encourager et la regarda rejoindre la pièce. Elle se mordit la lèvre inférieure et rangea ses affaires. Après quelques minutes de réflexion et d'inspiration, Amelia se rendit à l'extérieur pour transplaner à Londres et y rencontrer une personne chère à son cœur : Remus, pour la pause déjeuner.

Vers 14 h, Amelia était donc à Pré au Lard. Elle commença son après-midi par une promenade d'une vingtaine de minutes dans la campagne écossaise. Elle trouva le soleil quelque peu faiblard par rapport à celui de Londres. Mais cela l'arrangeait. Elle aimait le printemps, plus que l'été ou l'hiver. Elle gardait toutefois un œil attentif à sa montre. Les aiguilles avançaient vite, si bien qu'elle eut du mal à arriver à l'heure au point de rendez-vous. Ambroise était déjà là, toujours aussi excentrique. Mais cela n'avait rien de bien perturbant. Elle en avait croisé des personnes avec quelques extravagances à Serdaigle. Elle-même avait des manies que beaucoup jugeraient particulièrement bizarres.  L'habit ne faisait pas le moine - ou le sorcier - comme elle l'avait rapidement appris au fil de ses années à Poudlard. Amelia s'adaptait à ses interlocuteurs. Et le vouvoiement instauré par Ambroise lui était agréable. Elle aurait été bien incapable de le tutoyer. Si elle était parvenue à le faire avec Soyle, elle s'adressait toujours à Nora avec un "vous" malgré la dizaine d'années qui les séparaient depuis leur toute première rencontre. “Il aurait été bien impoli de refuser votre invitation. ” Elle l'appréciait, ainsi que sa librairie. Il lui fallut du temps pour le connaitre, mais maintenant, elle s'imaginait mal ne plus se rendre dans sa boutique. Après leurs salutations, elle eut le droit à un baisemain. Ce qui était assez inhabituel, qu'on se le dise. Mais elle le gratifia d'un sourire avant de proposer qu'ils changent de place. “Nous pourrions peut-être nous installer à une table ?” Le comptoir n'était pas particulièrement dérangeant. Mais il lui avait toujours semblé qu'il s'avérait plus facile de discuter tranquillement autour d'une table. Et puis, elle pourrait poser son sac sur une chaise plutôt que par terre, ce qui n'était pas négligeable. “Comment vous portez-vous aujourd'hui ?” Demanda-t-elle doucement.