«Rosmerta Turner ! » hurla la jeune fille du haut de son mètre soixante quatre dans le dortoir qui n'était clairement pas le sien (surtout un dimanche matin avant 10 heures). Et puis quoi encore ? Elle devrait hurler dans son propre dortoir ? Non merci : elle tenait à la vie. Et si Poufsouffle était réputé pour sa loyauté, jamais elle n'oserait réveiller la bande de furies déchainées que cette maison abritait. Pas moyen que cela arrive, elle laissait ça à Rosie. D'ailleurs, en parlant de cette ingrate : elle lui sauta littéralement dessus, l'étouffant sous son édredon. Pourquoi direz-vous ? La raison était toute simple : Bouclettes. Oui, elle avait déjà oublié son nom. Non, ce n'était pas parce qu'elle n'en avait rien à faire. Oui c'était parce Rose l'avait faite courir un marathon sous la pluie dans Pré-au-lard la veille : tout ça pour lui organiser un double date, dont aucun des participants n'avait été mis au courant.

Non pas qu'elle n'avait pas aimé admirer ce bambino. Ca, elle avait adoré, ces petits yeux, ses cheveux et oh diable son sourire. Stop. Elle s'attendrissait. Elle ne devait pas. La blonde ne se réveillant pas, ou tout du moins Gina était persuadée qu'elle faisait outrageusement semblant, elle décida d'employer les grands moyens. Oui : les grands. Elle se rapprocha de son oreille pour y murmurer quelques mots doux. «Chocolat chaud. Croissants. Jus de citrouille. Sucre d'orge. » Oh oui Elle était sûre que ça marcherait.

Rosmerta dormait bien. Très bien. Très très bien. C’était le week-end, c’était presque les vacances, donc pas de cours, juste son lit douillet, son oreiller molletonneux et même pas de cauchemars, que demander de plus ?

De la tranquillité. Voilà ce qu’elle demandait ! Qu’on ne crie pas son nom -complet, en plus !- de si bon matin en la réveillant en sursaut d’un profond sommeil dont elle avait besoin. C’était décidé, elle allait faire semblant de ne pas se réveiller, rester bien au chaud au fond de son lit… Ce n’était même pas une décision en fait, c’était comme ça, Rosie n’était du matin que quand elle décidait toute seule de se réveiller.

Mais… en vrai Rosie avait beaucoup de points communs avec les ours. Elle n’aimait pas qu’on la réveille de son hibernation nocturne mais, surtout, elle adorait le miel. Sous toutes ses formes. Elle savait d’ailleurs le cuisiner ou le (faire) boire (alcooliquement ou non) de plein de manières différentes. En bref, elle était gourmande Rosie.

Son estomac fait un énorme grondement d’un manque de classe total, et la voilà qui ouvre des petits yeux bleu brillant d’intérêt. Gina savait lui parler et l’amadouer ! Une vraie Serpentard de bout en bout ! « J’espère qu’tu les a avec toi sinon c’est toi que je mange, sœur ogresse. » La phrase est plus ou moins compréhensive car interrompue d’un large bâillement. Elle se redresse laborieusement, ne veux même pas imaginer l’état de ses cheveux (d’habitude elle faisait en sorte que personne ne la voit avant passage dans la salle de bain pour brosser ses boucles folles et se faire un peu une beauté, mais Gina la prenait un peu de cours).

Elle est enfin redressée, dans son super pyjama troué de partout, et tend les mains avec un air affamé.

D’abord, mettre du sucre dans son système.
Ensuite, affronter la possible colère de la dite ogresse. Nope, Rosie n’est pas assez mal réveillée pour avoir oublié le coup qu’elle lui a fait hier…

« La mia caramella... » susurra la jeune Gina, non pas sans se retenir de sauter à la gorge de sa meilleure amie. Faire semblant de dormir, c'était clairement dépassé, l'idée de nos jours, c'était de fuir le plus loin possible le courroux de la sicilienne. Elle la toisa du regard, dépasser par la gourmandise de la blonde. Et de la sienne par la même occasion : son estomac venait de la rappeler à l'ordre. D'abord manger. Ensuite crier.  C'était l'ordre naturel des choses. Heureusement pour elles, elle possédait deux beignets aux fruits, pas trop mal. «... fait très attention à qui tu traites d'ogresse ou je vais finir par manger les deux. » Et elle le ferait sans aucun remords. Après tout ! C'était son droit quand même : elle n'avait pas traversé le château en pyjama vert grenouille pour faire amie-amie avec sa cible. Oui, oui, cible. Rosmerta Turner était désormais dans son viseur. « Depêche-toi de manger, tu as des comptes à me rendre, Turner. » soupira-t-elle en lui donnant l'un de ses précieux trésors.