18 h 00 .. Couvre-feu.. Les élèves commençaient à se diriger vers la porte d'entrée afin de prendre le souper et surtout ne plus traîner en dehors du château. On l'avait mise ici surtout pour la ménager après l'attaque qui s'était déroulée chez elle, à peine plusieurs semaines après la mort de son co-équipier. C'est vrai que c'était plutôt tranquille. Audrey alternait des rondes de 7 à 12 heures avec un autre Auror Tetricus Johnson puis retournait chez elle ou au Ministère. Plutôt tête brûlée, la jeune femme acceptait mal la décision de ses supérieurs, mais malgré tout s'y était pliée.

Ce soir, Audrey avait commencé sa ronde depuis plusieurs heures et n'alternerait avec Johnson qu'à 22h. Leur surveillance ne suivait pas un trajet habituel ni des arrêts précis décidés à l'avance. Pour le moment elle se trouvait entre l e Saule Cogneur et la fôret interdite et un groupe d'adolescents persistaient à traîner. Alors qu'elle s'approchait, la jeune auror ne fut pas surprise de reconnaître les visages de Potter et sa bande. Ses élèves étaient connus dans le château pour être toujours à la limite du règlement et le plus souvent en dehors.

Passablement sur les nerfs, frustrée du manque d'action et blasée de voir des enfants prendre les menaces du Lord à la légére, la brune fonça vers le groupe de gryffondors. A mesure qu'elle s'approchait, elle sentit quelque chose au plus profond de son être. Son instinct animal se réveillait, accentuant ses sens, brouillant légèrement le fil de ses pensées et son rationalisme.
Perturbation qui atteint son paroxysme lorsqu'elle atteint enfin le groupe d'élèves.

Sans pouvoir détourner son regard et ses narines de l'un d'entre eux, elle articula d'un ton dur, à la limite de la bestialité :

- Dégagez de là !!!!!

A présent elle fixait le jeune homme en question et lui ordonna :

- Toi ! Restes-la !

C'était plus fort qu'elle, son instinct à présent la dominait, la possédait et son regard sombre s'anima comme une bête féroce. La main crispée sur sa baguette, ses veines zébrèrent sa peau et le sang lui monta au joue. Il fallait qu'elle se contrôle. Une mer calme, visualise une mer calme...

- Je... suis désolé, nous n'avions pas vu l'heure...
Elle grogna presque machinalement à sa première réplique et les traits de son visage n'exprimaient guère plus de tendresse que sa voie était dure. La main toujours tendue sur sa baguette, la jeune femme fixa Rémus avec la force et la vigueur qu'elle sentait monter en elle.

- Je ne suis pas une menace. Je suppose même que vous êtes celle qui avez le moindre à craindre de moi non ?
Étrange. Les sensations qui l'envahissaient la rendaient complétement instables. Plus vraiment préoccupée par le couvre-feu, ni à un quelconque règlement intérieur, Audrey planta ses pieds dans le sol, incapable de raisonner ses pensées. Ses narines, pleines de son odeur, l’empêchaient d'éclaircir ses idées et elle ne pouvait s'empêcher d'être sur la défensive.

Après une longue minute de lutte intérieure, la vague de chaleur qui l'avait prise toute entière se fit plus douce et laissa place enfin à la réflexion. Elle réussit donc à articuler un peu brusquement:

- Tu n'es pas référencé !!!

De mémoire, aucun élève de Poudlard n'était répertorié comme créature de la nuit, ou alors n'avait-elle pas trouvé utile de parcourir toute la liste des yeux lorsque son désir de trouver son attaquant avait été assouvi. Greyback était responsable de sa transformation, c'était là la seule information qu'elle avait cherché à avoir à son réveil..
Tout en relâchant doucement l'étreinte de sa main sur son arme de bois, elle dévisagea le jeune homme en attente d'une quelconque réponse...

L'agressivité, il la ressentait aussi, mais cela faisait tellement d'années qu'à chaque pleine lune il en était possédé qu'il avait appris à la contenir. Ses parents, Dumbledore, Mme Pomfresh, ses amis maraudeurs... Grâce à eux tous il avait appris à s'accrocher à son humanité tant qu'il le pouvait. Mais elle, elle rayonnait de rage, Rémus le sentait, mais ce fut sa conscience humaine et non son instinct animal qui lui fit voir le calme qui commençait petit à petit à l'apaiser. Sa remarque sur son non-référencement lui fit agrandir les yeux de surprise. Il se souvenait très clairement, malgrès son jeune âge à l'époque, lorsque ses parents avaient reçu la visible d'une responsable de ce genre d'affaire au ministère pour procéder à son enregistrement. Il avait même pas six ans, et se remettait tout juste de sa morsure, après avoir passé trois longues semaines à Sainte Mangouste. Sa première pleine lune approchait et il se souvait par flash des larmes de sa mère, de l'air grave de son père, et du sentiment d'humiliation lorsqu'on l'avait pesé et mesuré sous tous les angles. Il fronça les sourcils et répondit au début un peu sèchement avant de s'adoucir.

- Je l'ai été. Il y a plus de dix ans maintenant. Peut-être que... Oui je suppose que le professeur Dumbledore a fait en sorte que je n'apparaisse plus sur la liste officielle pour éviter un scandale si les parents d'élèves apprennait que leurs enfants cotoient un... enfin quelqu'un comme moi.

Il remarqua son air toujours méfiant, bien qu'il sentit un changement d'attitude, aussi il ajouta :

- C'est Dumbledore qui m'a fait inscrir à Poudlard. Les autres professeurs sont au courant bien sûr.

Radoucie, Audrey l'écouta débiter sa réponse avec grand intérêt. Ainsi, il y avait une créature à Poudlard et ses transformations étaient gérées par le Directeur lui-même. Le calme et la sérénité apparente du jeune homme commençaient à l'apaiser et son ton se fit plus bienveillant :

- Je ne révélerais pas ton secret....Dit-elle en rangeant sa baguette.

Un long instant, l'auror resta silencieuse. Dumbledore savait pour lui, et il savait pour elle. Peut-être alors que les raisons de sa mutation passagère au château étaient liées à leur nature à tous les deux. Audrey n'avait vécu qu'une seule transformation et contrôlait mal ses pulsions morbides; la mettre en contact avec un de ses semblables, quel que soit son âge, sous la protection du directeur, était peut-être prémédité...

- ..si tu ne parles pas du mien ... Ajouta-t-elle tout doucement

Les loups-garous étaient tous du côté obscur (de la force, ahah ), alors rencontrer Rémus était une aubaine. Elle devait apprendre à se contrôler, apprendre à se maîtriser, car dans de mauvaises mains, Audrey pourrait devenir une arme de destruction massive.
L'air soucieux, elle lui demanda alors :

- Existe-t-il un moyen de se contenir ?

Elle, si souvent experte dans tous les domaines, voilà qu'elle se retrouvait novice, à la botte d'un ado de 16 ans...

La tension s'était relaché et le jeune homme acceuillit avec un léger sourire la promesse de l'auror que ne pas révéler son secret en rangeant sa baguette. Il n'était pas hors la loi puisqu'à Poudlard, c'est la loi de Dumbledore qui gouverne. Elle resta silencieuse pendant un petit moment, pensive. Pendant ce temps là, l'esprit de Rémus aussi marchait à plein régime. Une auror loup-garou ! Jamais il n'aurait cru ça possible. Alors on pouvait faire carrière quand même, on pouvait avoir la confiance du ministère ? Lui qui s'était interdit de nombreux rêve commençait à entrevoir de l'espoir grâce à cette rencontre. Il pouvait se rendre utilise à la communauté des sorciers, et pas seulement la terroriser... A condition de rester cacher, comme le confirma sa demande de respecter lui aussi son secret.

- Bien sûr.

Il aurait peut-être été tenté de le raconter à ses amis Maraudeurs, mais cette fois-ci, ce n'était pas son propre cas qui était en jeu mais celui de quelqu'un d'autres. La situation risquait d'être beaucoup plus compliqué, aussi il décida de garder pour de bon de nouveau secret. La question qu'elle lui posa faillit lui arracher un air franchement surprit. Il se retint à temps, ne voulant pas la mettre encore plus mal à l'aise. Mais le fait qu'un auror lui demande des conseils, à lui, simple élève qui n'avait même pas encore passé ses B.U.S.E., était quand même un peu destabilisant. Mais l'explication lui vint rapidement à l'esprit. Elle devait avoir été mordu récemment. Elle avait beau avoir certainement une dizaine d'année de plus que lui, les années d'expériance de lycanthropie était de son coté. Il secoua la tête, d'un air sombre. Il n'y avait aucun moyen de se contenir.

- Un jour peut-être... J'ai l'impression que parfois c'est pire que d'autres fois, mais je n'ai pas encore comprit pourquoi. La seule chose à faire c'est veiller à être bien enfermé. Sans oublier de ne rien laisser de fragile aux alentours.

Un triste sourire éclaira à peine son visage. Pendant quelques secondes, il avait eut de l'espoir, mais le fait qu'elle ait été mordu il y a peu de temps n'était pas aussi encourageant qu'il le pensait. Rien ne l'assurait que quelqu'un de déjà "contaminé" puisse accéder à un tel métier.

- Est-ce que vous avez été... mordue lors d'une mission ?... Je suis désolé, je suis peut-être trop indiscret.

La réponse serait lourde de sens. Car cela voudrait aussi dire qu'elle était devenu ce qu'elle combattait. Et si Rémus avait longtemps voulu en savoir le moins possible sur ces loups-garou qui avaient refusé ou échoué à toute intégration et qui était partie intégrante des forces du mal, il désirait maintenant savoir ce qu'il en était aujourd'hui. Quel était le vrai rôle des loups-garou...

Sa réponse confirma ses craintes. Rien ne pourrait jamais l'apaiser.. Comme cet autre soir ou elle avait attaqué Paige dans le cimetière. Elle avait senti cette faim insatiable, cette fureur incontrôlable, cette folie non assouvie, ce besoin à combler par tous les moyens, mais heureusement personne n'avait été tué, malgré les nombreuses blessures qu'elles s'étaient faites l'une l'autre.
Elle resta de nouveau pensive, portant ses réflexions sur son avenir et son maintien au service des aurors.
Et si sa nouvelle nature venait compromettre ses capacités ?..Et si ça s'ébruitait ? Et si sa venue à Poudlard, avait pour but de l'écarter des missions ? Et si on la virait ?

La question du jeune homme la sortit de ses pensées, et l'idée de son renvoi la rendit plus amère. Son ton s'endurcit :

- Ça date de quelques semaines ... Je ne peux pas t'en dire plus..... Mais le métier d'auror est beaucoup plus dangereux que ce que l'on croit ! Conclut-elle

Elle s'était rapprochée de lui, et ses paroles étaient devenues des murmures. Tandis qu'elle avait répondu à sa question, ses doutes revinrent l'envahir de plus belle et si près, sa prochaine réplique sonna comme une menace :

- Tu ne dois parler de ÇA à personne ! ... Tu entends.....Je pourrais tout perdre !!!

Elle reperdait le contrôle, mais était-ce sa nature ou bien sa personnalité déjà sauvage qui reprenait le dessus?

La colère recommençait à rayonner autour de l'auror et le jeune homme tenta du mieux qu'il put de garder une respiration calme et contrôler alors qu'une boule se formait au creux de son estomac. Elle n'avait surement vécut qu'une seule pleine lune. Lui en était à plus d'une centaine... Il avait grandit avec ça, et savait ce qui se passait dans son esprit. Il avait lu aussi, beaucoup... C'est ainsi qu'il comprit que la raison de son agressivité était certainement en partie son refus d'accepter complètement ce qu'elle était devenu, et toutes les conséquences que cela impliquait. Elle avait encore peur d'elle-même. Rémus ressentait toujours cette peur, mais elle avait été largement aténué grâce à la confiance de ses amis, aux regards qu'ils posaient sur lui.

Lorsqu'elle s'approcha de lui et reprit une attitude menaçante, Rémus ne cilla pas, la fixant d'un regard qui voulait faire passer la compréhension profonde de ses peurs. Il hocha la tête avant de baisser les yeux, et de répondre dans une souffle.

- Je sais...

Il se redressa et deserra sa machoire qui s'était crispée. Il obligea sa voix à rester égale, mais son regard était perçant.

- Je sais ce que ça fait d'avoir peur de tout perdre. Même si... Il y a certainement beaucoup de choses que vous avez eu que je n'aurais jamais.

Il haussa les épaules, sans amertume apparente. C'était justement cette capacité à avoir dépassé la colère, le désir de vengence, qui différenciait ceux qui pouvaient ou en tout cas voulait s'intégrer, de ceux qui s'enfermaient dans la violence. Il récita la leçon de vie que lui avait donné ses parents, Dumbledore, Mme Pomfresh, et indirectement les Maraudeurs, bref, tout ceux qui l'acceptaient et qui le poussait à être ce qu'il étaient.

- C'est la vie. Tout ce que l'on peut, que l'on doit faire, c'est donner le meilleur de nous-même et faire en sorte que le pire ne fasse de mal à personne d'autre qu'à nous-même.