James se leva de bonne humeur, ce matin-là. Il s'était couché la veille après avoir avalé un repas digne d'un géant des montagnes si bien que son sommeil avait été parsemé d'images cauchemardesques, de Lily morte sur le tapis de la salle commune, de sa mère dévorée par un loup-garou et de son père dans une crèmerie, renversé par un gobelin volant juché sur une paire de ski. Mais fort heureusement pour lui, son inconscient avait engouffré tout ça et c'est sans aucun souvenir de ses mauvais rêves qu'il se réveilla au matin de noël.
Encore la tête dans la citrouille, il adressa un signe de la main à ses copains de chambre qui tous déjà ouvraient leurs cadeaux aux pieds de leur lit. Il remarqua d'ailleurs Peter en train d'engouffrer le morceau de brie que lui avait offert James tandis que Rémus tenait le carnet de note relié que Cornedrue avait trouvé chez Scribenpenne. Quant à Sirius, il était en train de déballer un calendrier de sorcières dénudées... Tout sourire, James se félicita intérieurement de ses cadeaux.
Puis la journée défila et maintenant que sa relation avec Lily n'était plus un secret pour personne, James passa le plus clair de son temps avec sa petite-amie qui devait se "réjouir" d'être toujours accompagnée de Sirius, Peter et de Rémus. Enfin, le petit groupe se sépara : Rémus fila vers l'infirmerie avant d'aller se terrer au fond de la cabane hurlante, Sirius prit le chemin de la salle commune tandis que Lily et James restèrent dans un couloir à se bécoter. Le temps passait vite, à deux. Trop vite. Au bout d'une heure, déjà, James jeta un coup d'oeil à sa montre et sursauta.
— Merde, il est déjà cette heure-là ! s'écria-t-il précipitamment. Il va falloir que je te laisse, je crois que... Il fallait qu'il trouve une excuse, vite. Que Sirius m'attend pour un tour dans le parc.
Déjà au dehors, la pleine lune commençait à se laisser entrevoir au travers des nuages. Il était vraiment en retard.
— Tu sais, j'crois qu'il s'est disputé avec son frangin, tout ça, enfin ça va pas fort, j'vais aller parler un peu avec lui. James hocha la tête pour rendre plus réaliste son invention, puis poursuivit : On se voit plus tard ?
Et après un baiser rapide, il fila vite fait bien fait en direction du parc. Sur le chemin, alors que Lily pouvait toujours le voir s'éloigner, il s'arrêta près des toilettes des garçons où Peter s'était enfermé depuis une demi-heure.
— Queudver ! chuchota-t-il alors que retentissait dans une cabine le bruit de quelque chose de lourd qui tombe dans l'eau. Magne, tu liras ton magazine plus tard, on est en retard !
Deux minutes plus tard, ils étaient tous les deux sur le chemin du saule cogneur. Peter se transforma le premier, couru sous sa forme de rat arrêter le saule qui battait déjà des branches à leur approche puis ils pénétrèrent dans la cabane hurlante par le petit passage secret. Rémus n'était pas encore transformé, Sirius non plus.
— Désolé les gars, j'avais pas vu l'heure...!

James fronça les sourcils et grimaça en remarquant l'état de Rémus. Peter et lui étaient vraiment arrivés à la toute dernière minute. Les bras croisés, James semblait soucieux, comme à chaque pleine lune. Il n'y avait pas d'habitude, on ne s'habituait jamais à voir son meilleur ami souffrir autant.
— Ça va aller, vieux, fit James en posant sa main sur l'épaule de Lunard.
Puis Rémus leur fit signe de quitter la pièce. Le laisser seul comme ça était une vraie torture et à chaque fois, Sirius et James tentaient de plaider leur cause pour tenir compagnie à Lunard, tout en sachant bien que c'était probablement gênant pour lui d'être vu dans une telle situation.
— Tu es sûr que tu veux pas qu'on r... commença James.
— S'il vous plait... le coupa Rémus dans un grognement faible.
Et sans se laisser prier, James, Sirius et Peter quittèrent la pièce pour aller attendre dans le couloir. Peter ferma la porte derrière lui tandis qu'ils pouvaient entendre au travers du bois les hurlements terribles que poussait leur ami. Adossé au mur du couloir, dont la tapisserie jadis lumineuse et fleurie ne ressemblait plus à présent qu'à des lambeaux de papiers sales et déchirés, James perdit son regard dans une lame de parquet, crispant la mâchoire à chaque cri poussé. Puis au bout d'une minute, il soupira et prit le chemin de la sortie.
— J'vais attendre dehors, dit-il pour échapper à cette torture auditive, puis pour se trouver une excuse, il ajouta en pointant du doigt les murs qui les entouraient : j'suis toujours trop à l'étroit pour me transformer, ici.
Peter le suivit d'un pas précipité, il n'était jamais à l'aise, les soirs de pleine lune mais tentait de garder bonne figure pour ne pas passer pour un trouillard. La vérité, c'est qu'il était pétrifié à chaque fois qu'il voyait Rémus dans son corps de loup-garou.
— Attends, je vais t'ouvrir ! dit-il d'une voix tremblante.
Il ferma les yeux et une seconde plus tard, ce n'était plus Peter que James avait devant les yeux mais un bon gros rat gris qui se faufilait entre ses jambes, quittait la cabane hurlante pour aller stopper le saule depuis ses racines. James attendit que le sifflement des branches en furie fut arrêté puis il sortit lui aussi de la cabane. Il respira alors avec force, l'air glacial de l'hiver lui pénétra dans les poumons comme des glaçons jetés dans son dos sous son t-shirt. Il ne vit pas Lily à quelques mètres de lui et se mit à courir ; et alors qu'il courait, James disparut pour laisser place à un cerf majestueux qui poussa un grognement de satisfaction. Que c'était bon d'être lui !
Toujours près du saule, Cornedrue entendit couiner Queudver, grâce à son ouïe beaucoup plus développer et James fit demi-tour en claquant des sabots sur l'herbe gelée. Alors, il se retrouva nez à nez avec elle. Lily Evans. James eut un mouvement de recul, surpris mais c'était trop tard. Rémus quittait la cabane hurlante aux côtés de Sirius...

Rémus avait repéré Lily, il fallait faire quelque chose, et vite. James vit Sirius sous sa forme animale réagir au quart de tour et se jeter sur la bête féroce, alors James se mit à courir en direction de la rouquine et à quelques centimètres d'elle, il se métamorphosa et reprit son apparence humaine. Dans l'élan, il ne réussit pas à s'arrêter à temps et se jeta sur Lily, la faisant tomber à la renverse dans l'herbe du parc. Allongé sur elle, James la regardait, les yeux exorbités par la terreur. Bordel mais qu'est ce qu'elle foutait ici ?!
— Faut qu'on s'tire ! dit-il en se redressant et en empoignant la main de sa petite amie contre sa volonté, afin de la remettre sur pieds. Depêche-toi !
Il y avait bien trois cent mètres entre l'endroit où se trouvaient Lily et James et l'entrée du château. Et par expérience, James savait que son meilleur ami, sous ses mauvais jours, pouvait être très, mais alors très rapide... Mais ils n'avaient d'autres choix que de tenter la fuite et James entraina alors Lily dans une course folle jusqu'à la grande porte en bois massif de Poudlard. Le maraudeur entendait le loup-garou grogner derrière eux mais il n'osa pas se retourner pour vérifier s'il était à leurs trousses ou non. Tout ce qu'il espérait, c'était que Sirius arrive à le maîtriser, ce qui d'ordinaire était plutôt le rayon de Cornedrue à l'aide de ses gigantesques bois. Mais là, le gros chien noir allait devoir de débrouiller tout seul car même Peter était tétanisé par la peur...

— Pourquoi tu m'as rien dit ? s'écria Lily à l'encontre de James qui se retourna vers elle, l'air de dire « t'es sérieuse ? ». Ok, c'est peut-être pas le bon moment pour en parler, ajouta-t-elle.
— Contente-toi de courir !
James sentait bien que sa petite-amie était déjà hors d'haleine alors qu'il restait la moitié du chemin à faire. Derrière eux, on entendait les éclats du combat : des hurlements de loup, des bruits sourds caractéristiques de chutes violentes, les couinements de Peter affolé et James n'osait pas se retourner pour voir les dégâts. Lily était à la traîne, il y avait bien un mètre d'écart entre elle et James qui devait tordre son bras vers l'arrière pour continuer de lui tenir la main.
— Arrête, James. J'y arriverais pas, dit enfin Lily en s'arrêtant net dans sa course.
— Dis pas d'connerie, j'vais pas te laisser là ! s'écria James en lui posant une main sur le dos, l'autre sur son bras pour qu'elle continue d'avancer.
— Retourne là-bas, je vais y arriver toute seule, ajouta la rouquine. Ralentis-le. Je continue. Vas-y.
James la regarda pendant quelques secondes, incapable de prendre une décision et pourtant, il fallait qu'il fasse vite. Il ne pouvait pas la laisser tomber, elle risquait sa vie et était déjà à bout de souffle. Pourtant, un coup d'oeil derrière lui lui prouva bien que Sirius était en position de faiblesse avec Rémus. Il avait besoin d'aide, le loup-garou fonçait sur eux !
Alors James lâcha Lily et se mit à courir sous sa forme humaine jusqu'au loup-garou, espérant peut-être qu'il se focaliserait sur son odeur plutôt que sur celle de Lily. Puis à quelques mètres du lycanthrope, il se métamorphosa et c'est un cerf en pleine puissance qui manqua de peu d'embrocher son meilleur ami. James se mit sur ses pattes arrière puis se laissa retomber en avant, frappant le sol de ses sabots afin de persuader le loup que s'il tentait quelque chose, il finirait avec un bois planté dans la poitrine. James faisait barrage. « Raisonne-toi, Rémus, merde ! » Un pas de plus et le combat était lancé !

« Eh merde, je sens son odeur ! » s'écria James au fond de sa tête, avant de remarquer le museau de Rémus gigoter. Lui aussi devait probablement sentir l'odeur du sang qui émanait de Lily. Qu'avait-elle bien pu faire pour se mettre à saigner ?
Incontrôlable, Rémus fit un bon en avant et Sirius et James se jetèrent aussitôt sur lui. Sirius lui mordit la patte tandis que James planta son bois dans l'épaule du loup. Celui-ci poussa un hurlement mais sa volonté n'en tari pas pour autant car après quelques coups de griffes bien placés, il repartit à la charge.
Maintenant qu'ils savaient se transformer depuis pas mal de temps, à présent, les maraudeurs avaient réussi à créer une sorte de lien qui les unissait tous et qui leur permettait en quelques sortes de communiquer entre eux. Bon, intimer à Rémus de reprendre le contrôle serait probablement peine perdue mais en revanche, James capta un instant les pensées de Patmol et trouva son idée très franchement ingénieuse, surtout que Sirius était lui-même trop amoché pour tenter une course poursuite. Aussi, James contourna le loup-garou et décida de reprendre forme humaine. Il sentit alors du sang chaud couler dans sa nuque et remarqua que dans sa quête de libération, Rémus avait frappé James au cou. Peu importe, ça attirerait le loup plus facilement.
Alors James se pencha en avant et ramassa une roche dans l'herbe gelée. Il la passa rapidement sur sa plaie sanglante, puis la lança dans la direction de Rémus, qui se la reçu en plein derrière la tête.
— Hé, la grosse peluche ! s'écria James en faisant un pas en arrière, près à fuir à toute vitesse. C'est par ici que ça se passe ! Aller ! Viens voir papa, gros nounours !
Parfois, le courage des Gryffondor était à la limite de l'inconscience.