Leur histoire avait toujours été tumultueuse, dès Poudlard leur relation avait dû souffrir de nombreuses disputes, ils avaient cru que cela les avait renforcé, c'était sans doute le cas. Mais comment résister à l'Histoire elle-même, la guerre qu'ils ignoraient encore trop balayait tout sur son passage, et ils n'étaient rien pour oser s'y opposer. Le rapt des mangemorts les avait brisé. Ils ne se sentaient plus en sécurité nul part, y compris dans les bras de l'autre. Réfugiés dans leur propre silence, Bobby s'était éloigné de cette femme qui pleurait ses morts, se bouchant les oreilles lorsqu'il l'entendait crier le nom de Chuck dans ses cauchemars.
S'ils avaient toujours su se reconstruire auprès de l'autre, cette blessure semblait se guérir seul, loin de l'être aimé. Bobby avait dû affronter ses peurs les plus anciennes, celles qui avaient déchirées sa famille et scindées le monde des sorciers en deux. Le Bien et le Mal. Le jeune homme avait toujours trouvé ce raccourci idiot, mais aujourd'hui il avait admis qu'un camp était a éliminé, et qu'il lui fallait appartenir à l'autre.
Il pensait même à soutenir la résistance irlandaise qui grondait dans son pays natal, sans même voir que Sue prenait à autre chemin que le sien, et qu'il n'était au courant de rien.

Leur route aurait pu se séparer là, comme deux amants incompris. Mais la mort de Bradley avait tout chamboulé de nouveau. Il avait cru Sue morte également, et rien n'était comparable au vide qui avait plombé ses entrailles. Rien. Alors quand il sentait sa menotte s'accrocher si fort à son blouson, il remerciait le ciel de pouvoir serrer en retour, ce petit miracle par la taille. Leurs mains lovées échappaient à la fraicheur de la météo. Il ne la lâcherait plus, ses doigts serrés autour des siens étaient une promesse, il ne l'abandonnerait plus jamais.
Il s'effaça pour la laisser passer dans la chambre, assis sur le lit il passa une main sur son visage fatigué. Les Aurors avaient voulu connaitre les moindres détails de leur attaque, les personnes présentes, les sortilèges utilisés, jusqu'aux plus petits détails comme les vêtements qu'ils portaient ou l'odeur qu'ils semblaient dégager. Bobby y avait répondu comme un automate, recrachant les images qu'il avait capturé, serrant si fort la main de Sue qu'on avait dû les interroger ensemble.
La voix de Sue réchauffa son cœur endolori, depuis combien de temps n'avaient-ils pas eu une discussion de plus de trois mots? Sa main dessinait des cercles sur la peau de la jeune femme, apaisant ses craintes. Il avait beau avoir détesté Bradley à Poudlard, il l'avait toujours considéré comme son égal, droit et fidèle à ses propres idées, un adversaire louable en somme.

«Chuut... Sue... tu n'as rien à te reprocher, ils l'auraient tué de toute façon, ils cherchaient juste un moyen de ne pas se salir les mains. J'aurais dû savoir que Bradley n'était pas un meurtrier... »

Bobby laissa le silence s'éterniser un peu en mémoire du jeune homme. Ils avaient combattu ensemble sur les derniers instants de sa vie, et il avait trouvé un homme brave et juste pour l'épauler. Quand à la deuxième partie de ses paroles, le garçon ne put s'empêcher de soupirer. Il n'avait rien à dire, oui il lui en avait voulu, mais il n'avait rien fait en ce sens, ils avaient juste passé cet évènement sous silence et il les avait rongé de l'intérieur.

« Viens là. »

Lâchant enfin sa main, ce ne fut que pour la prendre tout contre lui, goûtant à la chaleur qui lui avait tant manqué. Il l'embrassa furtivement avant de placer sa bouche contre sa tempe, la berçant lentement.

« Il n'y avait pas de mots Sue... excuse moi aussi. »

Le corps de Sue avait beau être lové contre le sien, Bobby avait l'impression que c'était son âme à lui qui retrouvait un refuge. Il s'était senti ermite, paumé dans une cabane en pleine hiver ces derniers mois. Être de nouveau deux faisait renaitre l'équilibre dont avait tant besoin le jeune homme. Sue avait tout été pour lui, bien avant qu'elle ne soit sa petite amie, elle avait été sa sœur et sa confidente. Le vide que créait son départ s'en retrouvait accentué en la retrouvant. Ses bercements s'interrompirent à sa réponse. Le fait qu'elle évoque encore Daisy surprit à peine Bobby, elle avait toujours été ce fantôme entre eux. Mais celle qu'il avait aimé n'existait plus, enfin se le persuadait-il. Il ne put retenir une grimace quand elle évoqua Chuck. Il avait beau comprendre ses sentiments et les émotions qui l'avait traversée, son souvenir était aussi douloureux que la nuit en-elle même. Il ne l'interrompit cependant pas, la laissant se redresser pour fixer ses yeux clairs que Bobby était un des seuls à pouvoir déchiffrer. Imperceptiblement Bobby se tendait, essayant de comprendre ce que la jeune femme tentait de lui dire. Il savait qu'elle et Chuck n'avaient jamais vraiment rompu, en cela, leur histoire était bien différente de la sienne. L'ex serpentard était parti, sans laisser de nouvelle à la jeune aveugle, ne tuant pas ses sentiments pour autant. Les mots qui suivirent dénouèrent sa gorge sèche. Il avait beau se dire que Sue l'aimerait toujours, l'entendre dire faisait du bien.
Les souvenirs de la nuit lui revinrent par flashs nets, précis comme des lames de rasoirs. Ils se comprenaient, n'avaient jamais eu besoin de mots. Mais après cette nuit parler était indispensable. Qui sait combien de temps leur restaient-ils à vivre.

« Je t'aime aussi. »

glissa le jeune homme en la serrant de nouveau dans ses bras, déposant un baiser sur le sommet de sa tête. Il doutait que le monde les laisserait en paix après ça, mais ils fera face, ensemble. Un sentiment de lutte montait en lui. Bien à l'opposé de ce qu'aurait dû lui imposer leur rapt, il avait éveillé chez le garçon une terrible envie de justice et d'engagement. Attendant quelques instants, profitant des derniers instants de paix avec son amour il se décida à murmurer doucement.

« Je ferais tout pour que cela n'arrive jamais plus... qu'aucun de nous, n'ait jamais à le vivre.»

A chaque argument Sue trouvait une parade, et le jeune homme sentait ses ressources s'épuiser. Pourtant il ne pouvait s'empêcher de s'opposer farouchement à sa décision. Il l'aimait, elle avait déjà vécu tant de choses qu'à son âge, personne n'aurait dû vivre, alors s'il pouvait la faire changer d'avis par quelques moyens que ce soit il le ferait. Le problème, c'est que c'était justement ces évènements traumatisants qui avait également fait d'elle cette nouvelle guerrière prête à donner sa vie pour la cause qu'elle défendait.
A la mention d'Albus Dumbledore le sorcier se renfrogna. Le directeur de Poudlard était une icône dans le monde magique, et Sue marquait un point. Bobby savait de source sûre qu'on lui avait déjà proposé le poste de Ministre de la Magie mais que ce dernier avait décliné l'offre, préférant reprendre le flambeau de l'école. Si un homme de sa stature se levait contre le mage noir, il en emmènerait des milliers dans son sillage.

Bobby eut un léger sourire lorsqu'elle surenchérit en parlant de la puissance de l'union. Il s'autorisa un léger rire, se rapprocha d'elle et laissant sa main caresser son visage. « Tu lis trop de livres ma chérie... » Il y avait parfois des moments où le mal était si grand qu'on était submergé, et être uni se résumait à mourir à plusieurs. Ses doigts glissèrent sur sa nuque et son bras passa autour de ses épaules pour l'enlacer.
Une mission... c'était à la fois peu et trop. Une nuit en mission, c'était douze heures, c'était 720 minutes à risquer sa vie. Lorsqu'on savait qu'elle pouvait vous être retirée en à peine l'espace d'une seconde, il y avait des milliers de façons de mourir en une mission.
« Tu n'en feras aucune autre... du moins pas tant que je ne serais pas à tes côtés.» Sa décision était prise, puisque Sue s'engageait dans la bataille, il la suivrait, la protégerait de son mieux, quitte à risquer plus encore sa vie en veillant sur deux âmes à la fois.

(désolée ma Sue <3!)