La proposition que j'avais faite à Minerva ne parut pas lui plaire. Elle se redressa, horrifiée, avant de m'intimer de ne prévenir personne de ce que je venais d'apprendre. J’acquiesçais silencieusement, me gardant bien de dire ce que je pensais tout haut. J'avais expérimenté la solitude, les secrets gardés entre moi et les très rares personnes qui me côtoyaient, et la seule chose que j'en avais retiré était que les gens qui comptaient étaient le plus souvent les personnes les mieux placées pour nous aider...

Mais Minerva n'était pas seule, j'étais là. Quoi qu'il pouvait lui arriver, j'étais présent pour elle. En la voyant allongée là, en proie au doute et au dégout, complètement désemparée, je n'aspirais plus qu'à une chose : la soutenir, la protéger, et même la couver si c'était possible. C'était une sensation très étrange, qui me prenait au ventre, qui se répandait dans chaque fibre de mon corps et me pousser à rester près de la jeune sorcière.

Cette sensation m'était de plus en plus familière... Au début, elle était plus diffuse, plus rare aussi, mais plus le temps passait proche de la sorcière, plus cette sensation revenait... Mon esprit recommençait à me jouer des tours, à se poser mille questions à se dire qu'il fallait trouver quelle était la vraie nature de notre relation... Mais avant que je puisse me mettre à réfléchir, Min me supplia de rester avec elle. Je lui serra la main, avant de passer une main contre son front et caresser doucement ses cheveux. Je laissai Fidel servir les potions à la jeune femme.

- Promis, je reste là. Je ne bouge pas tant que tu n'iras pas mieux.

Je souris un peu, avant de regarder Minerva boire ses potions. Cela la calmerait pendant quelques heures, mais ça n'aura pas d'effet définitif...

Vu la grimace que tirait Minerva, les potions étaient vraiment affreuses. En même temps, elles n'étaient pas faites pour être bonnes mais efficaces, ce qui était le cas ici. Le thé devait déjà aider à faire passer la potion plus facilement, mais maintenant il fallait attendre qu'elles fassent effet... Et ça n'était pas pour tout de suite. Le bon point, cependant, c'était que la sorcière mangeait, peut-être pas par faim, mais la nourriture ne la dégoutait pas totalement en tout cas.

Ma main caressant ses cheveux semblait l'apaiser, lui donner un peu de répit. En la voyant s'apaiser peu à peu, je me promis de rester ici à continuer mes caresses jusqu'à ce qu'elle soit totalement calmée. Peu importait le temps que ça prendrais, j'étais patient et l'avais prouvé plus d'une fois auprès de la jeune femme. Je ne comptais plus les minutes de silence passées à attendre avant qu'elle ne me crache finalement ce qui la torturait, ou même les après-midi sans un mot que je passais chez elle, simplement parce que je savais qu'elle n'aimait pas rester seule.

Au final, je comprenais bien mieux Minerva que je ne l'aurais cru un jour. Elle était complexe, certes, et parfois inquiétante, mais après près de deux ans, je pouvais enfin deviner de quoi il retournait parfois dans son esprit... Et ça, sans légilimencie. Il n'était pas compliqué de voir sa jalousie et sa possessivité maladive, et qu'il fallait absolument éviter le sujet avec elle, mais pour le reste... C'était un peu plus compliqué. Mais peu à peu, je pouvais enfin deviner et même devancer certaines de ses réactions, même si c'était quand même assez rare.

- C'est Sainte Mangouste qui se moque de la charité Min... Tu n'as pas vu ta tête on dirait, répondis-je en riant quand elle me parlait de mon travail du lendemain.

Je ne répondis cependant pas à son invitation à partir. Je ne partirais que quand je serait certain qu'elle pouvait tenir le choc toute seule, parce que Fidel était peut-être là, mais il était actuellement en train de sangloter en répétant inlassablement le nom de sa maitresse, il n'était donc pas vraiment opérationnel pour le moment...

Spoiler:

Minerva avait toujours une tête à faire fuir un détraqueur, mais elle n'avait plus de nausées, ce qui était déjà un grand exploit. Je gardais sa main dans la mienne, pour qu'elle comprenne que je ne la laissais pas tomber, et la regardai en silence. Après la rupture avec Julius, son quotidien n'avais pas été de tout repos... Et ce dernier événement avait été la goutte d'eau qui allait achever son moral, j'en étais sûr. J'étais présent auprès d'elle depuis plusieurs semaines déjà, mais certaines choses ne pouvaient pas se résoudre avec l'aide de quelqu'un, malheureusement...

Mais, après sa remarque sur ma façon de parler aux femmes, je ris un peu, soulagé de remarquer qu'elle n'avait pas perdu son sens de l'humour. Je haussais les épaules, désabusé, avant soupirer.

- Tu connais mon tact légendaire non ?

Je n'étais pas le premier pour courtiser, c'était quelque chose de reconnu. Mon besoin de solitude et mon mutisme faisait que j'étais très maladroit quand j'ouvrais la bouche, ce qui n'était pas vraiment indiqué quand on parlais à une femme... Mais je n'étais pas doué pour ça, il fallait que je fasse avec, c'était ainsi. Quand Min me parla de Fidel, je tournais les yeux vers lui. Le pauvre était vraiment désemparé de voir sa maitresse dans un tel état, j'avais rarement vu une telle réaction de la part d'un elfe de maison... Je hochai donc la tête à la demande de la sorcière.

- Oui, ne t'en fais pas, je lui expliquerais. Mais contente toi de te reposer, d'accord ? C'est ce qui le rassurera le plus au final.

C'était à demi vrai, disons que la voir se reposer me rassurerait beaucoup aussi...

Spoiler:

Le sourire de ma jeune amie quand je tentais un trait d'humour ne m'échappa pas, mais je ne répondis pas. Je n'étais pas totalement dupe, et j’avais plusieurs fois surpris Minerva en train de descendre subtilement mes différentes compagnes. Elle avait toujours une hargne contre elles, quel que soit leur statut, la pureté de leur sang et même leur métier. Pas une seule n'avait trouvé grâce à ses yeux au final, et elle les traitait avec cette indifférence mêlée de mépris qui lui était propre.

Mais le pire, au final, c'est que je la laissais faire. Quand elle leur parlait avec dédain, je me contentais de m'en amuser au lieu de prendre la défense de ma petite amie actuelle. Et même pire, quand Min débarquait à l'improviste pour m’emmener manger dans un restaurant, ou à une exposition, ou que sais-je encore, alors que ma compagne était là et qu'elle n'était clairement pas la bienvenue, j'acceptais et laissais en plan cette femme qui était à la base chez moi pour me voir. Et quand, immanquablement, elle me quittait, ma meilleure défense était que Minerva était mon amie et que si elle n'était pas capable de l'accepter, alors il valait mieux qu'en effet elle s'en aille. Et ça ne ratait jamais.

Pris dans mes pensées, je sursautai presque quand Min eut un instant de lucidité et se rappela de son programme du lendemain. Me redressant, je posais doucement mes mains sur ses épaules pour qu'elle se repose dans le canapé. Minerva et son sens des affaires... Elle ne pouvait pas s'empêcher d'y repenser alors que le moment n'était pas vraiment pas approprié...

- Min, ne pense pas au travail maintenant, d'accord ? Ne t'en fais pas, tu te réveilleras demain pour ton rendez-vous. Et au pire, j'irais à ta place. Je peux faire l'affaire, non ? répondis-je en souriant.

J'étais anormalement plein d'humour aujourd'hui, surtout pour détendre la jeune femme. Mais les potions étaient dosées normalement, ce qui suffirait pour la nuit. Elle se réveillera demain à l'heure... Et dans le pire des cas, un petit Aguamenti au dessus de sa tête devrait suffire à la réveiller.

Je souris légèrement quand Minerva commença à me répondre, visiblement amusée par mes bêtises. Tant mieux, c'était l'effet escompté. Je n'étais pas habitué à ce genre de discussion, j'étais loin d'avoir un sens de l'humour aiguisé, mais je me rendais bien compte que si je ne faisais pas un minimum d'effort pour égayer l'ambiance, Minerva allait être plus déprimée et inquiète encore. Alors, bien que cela me demande des efforts, je m'efforçais à être jovial, malgré le fait que la nouvelle ne m'enchantait pas non plus.

Mais je n'allais pas dire cela à mon amie, loin de là. Je ne voulais pas qu'elle soit de nouveau bouleversée, je voyais bien que les potions faisaient petit à petit effet, elle se fatiguait de plus en plus. Tant mieux, le repos était la première chose qu'il lui fallait, on avisera ensuite de ce qu'il fallait faire. Elle sera surement en forme pour son rendez-vous demain, et cela lui permettra en plus de se changer les idées. C'était tout ce qu'il lui fallait, j'en étais persuadé.

- J'aurais trop peur de déformer ta robe Min, et tu sais bien que ce genre de vêtement ne va qu'à toi, et toi seule...

Quand je disais cela, j'étais sincère. Min était la seule femme à ma connaissance à porter avec autant d'élégance des robes en peau de dragon. C'était une lisière fine qu'il y avait entre la vulgarité et l'élégance, et Minerva ne l'avait encore jamais franchi. J'avais remarqué ces derniers temps qu'elle essayait de refaire ma garde robe, avec ce goût de l'élégance qu'elle avait, mais je n'étais pas vraiment à l'aise avec ce genre de vêtements... Pas encore tout du moins. Mais il n'était pas temps de penser à ça. Je souris un peu quand Minerva étouffa un bâillement.

- Repose-toi maintenant, d'accord ? Je te promets de veiller à ce que tu sois à l'heure à ton rendez-vous demain.

Je resterai dormir ici et partirai du ministère de chez elle, ça n'était pas la première fois que je restais dormir ici après tout...

Plus les minutes avançaient, plus Minerva perdait pied avec la réalité. Elle semblait de plus en plus fatiguée, et même si la potion était grandement responsable, je soupçonnais des nuits et des nuits d'insomnie, ainsi que des pensées plutôt sombres. Elle ne m'avais parlé de rien, bien entendu, mais il n'était pas compliqué de se rendre compte, quand on la connaissait bien, qu'elle était bien plus que préoccupée. A mon humble avis, il n'y avait même pas besoin de potion, mais d'un peu de calme et de patience, mais nous n'avions pas le temps pour ça...

Je ne lâchai pas la main de Min qui semblait ne pas vouloir me lâcher non plus, ce qui ne me dérangeait pas le moins du monde. J'avais eu de plus en plus de mal à voire la sorcière lorsqu'elle était en couple, et encore plus au vu de mes récentes activités... Aussi, je profitais de ce moment et de l'occasion d'apaiser Minerva sans demander mon reste.

- Oui, je travaille, mais ne t'en fais pas, je peux toujours partir d'ici et être sûre que tu arrives à l'heure à ton rendez-vous...

Quelques instants à peine ensuite, Minerva était endormie sur le canapé. Sa respiration, aussi calme et profonde que les eaux du lac de Poudlard, cachait cependant autant de secrets que ces dernières. Je me redressais doucement et pris Minerva dans mes bras pour l'amener dans sa chambre, suivi par un Fidel sanglotant. Une fois installée, je laissai l'elfe de maison recouvrir la sorcière de ses draps, action qu'il m'avait demandé d'accomplir en couinant.

Je le forçais cependant à sortir de la chambre et m'arrêtai une fois la porte fermée pour le regarder.

- Fidel, Minerva a seulement besoin de repos. Elle n'est pas malade, tu n'as rien à craindre pour elle, d'accord ?

L'elfe de maison hochait la tête en sanglotant toujours, et disparut dans un "pof" pour faire quelque chose dans la maison. Pour ma part, je pris un plaid et le posais sur le canapé, avant de m'assoir et de prendre un livre. Je n'étais pas fatigué, loin de là même, mais ça n'était pas important, j'avais de quoi m'occuper. Et si Minerva avait besoin de moi, j'étais tout près d'elle.

Pris dans ma lecture, je laissais les heures défiler sans me soucier d'autre chose que des pages que je tournais. Minerva était dans un sommeil artificiel, mais réparateur, et Fidel n'était pas loin, même si je lui avais dit de laisser sa maitresse se reposer. Le pauvre elfe ne comprenait pas ce qui se passait, il était tellement attentionné envers sa maitresse qu'il ne voulait pas la laisser seule quand elle allait mal. C'était aussi la raison pour laquelle je ne m'inquiétais pas plus pour Min. Je ne pouvais pas faire plus pour le moment, mais elle était sous une surveillance plus qu'acérée pour la nuit...

La nuit tomba sans que je ne m'en aperçoive, et je me permis de piquer quelques ingrédients dans la cuisine pour me faire à manger, avant de m'installer dans le fauteuil. Je me remis à lire, mais m'endormis finalement, assommé comme d'habitude par ma lecture. J'avais de plus en plus de mal à m'endormir ces derniers temps, seul l'épuisement me faisait tomber... Et la nouvelle de la grossesse de Minerva n'arrangeait pas les choses, malheureusement. Mais même si la situation paraissait sans issue, elle allait pouvoir trouver une solution, j'en étais sûr. Et j'étais là pour l'aider si elle avait besoin.

Je dormais d'un sommeil agité cependant, en proie à quelques mauvais rêves qui s'effacèrent en fin de nuit. J'avais oublié de mettre un réveil pour être éveillé à l'heure pour réveiller Minerva, mais au final je fus réveillé par des caresses dans mes cheveux. J'ouvris légèrement un œil pour apercevoir Min, perchée au dessus de moi, qui me réveillait en douceur. J'avais rarement été réveillé de la sorte, mais j’appréciais tellement ce genre de réveil que je pourrais avoir tendance à m'y habituer... Je souris un peu, avant d'ouvrir franchement les yeux et de regarder la sorcière.

- Bonjour Min... répondis-je en étouffant un baillement.

Je reposai ma tête sur mon oreiller, et m'étirai un peu avant de regarder de nouveau Min.

- Tu as pu te reposer ?