« Bonjour bonjour ! » chantonna l'égyptienne alors que la clochette de La Main du Nil venait de teinter joyeusement pour annoncer l'entrée d'un nouveau client. Ou plutôt, d'une nouvelle cliente. « Bienvenue ! » continua-t-elle en se mettant derrière son comptoir alors que ses breloques à ses poignets comblaient le silence d'un bruit délicat. Les yeux bruns de la sorcière regardaient de manière innocente la jeune femme qui se tenait devant elle. Il lui semblait évident qu'elle n'était pas habituée à ce type de magasins. « Première fois sur le Chemin de Traverse ? » demanda-t-elle en faisant la conversation. Maât remplit un petit verre de thé noir, en le poussant vers sa cliente : « Si vous en voulez, n'hésitez pas ». Maât aimait bien proposer du thé aux gens qui pénétraient dans son petit magasin. Ça la rendait heureuse de les faire se sentir à l'aise. Après tout, le monde des sorciers croulait déjà assez comme cela sous les tendances sombres de la guerre.

Magda était cernée : elle n’en pouvait plus d’habiter dans un appartement rectangulaire sans aucun mur pour délimiter tout pièce autre que la salle de bain. Oh, elle était reconnaissante de la générosité d’Athos lequel acceptait sans ronchonner d’héberger son ancienne flamme et sa progéniture et, elle devait même avouer que la cohabitation avec le père de son gamin se déroulait étrangement bien. Le problème était qu’elle manquait d’air : essayez de partager la même pièce qu’un gamin qui fait ses dents et qui éprouve que très rarement le besoin de dormir, H24. Elle n’avait aucune échappatoire et pouvait à peine bouger lorsque le gamin fermait enfin ses yeux, de peur que le craquement du vieux plancher ne le réveille, ce qui était déjà arrivé plus d’une fois. En bref, elle rêvait de pouvoir enfermer son rejeton dans une pièce qui comportait une porte, pour son bien à elle tout comme au bébé. Magdaleenjte allait devoir annoncer à Athos qu’elle se cherchait un nouvel appartement, elle ne pouvait plus tenir ainsi et n’avais pas la liberté qu’il avait de transplaner prendre l’air. Un sourire forcé au visage, la jeune mère avait laissé sa petite famille occupée à lécher un peu de glace chez Fortarôme pour s’accorder un ‘me-time’ et déambuler sans but dans les rues peuplées d’homme-à-robe du Chemin de traverse. Un doux effluve de lavande lui chatouilla les narines et la brunette décida d’entrer dans une boutique.

L’énergie positive de la jeune femme qui l’accueilli la fit sourire, sincèrement cette fois-ci. « Bonjour ! » la salua-t-elle en retour en ne pouvant s’empêcher de la trouver jolie et d’être, étrangement, attirée vers elle. Son accent étranger la fit sentir un peu plus à la maison : entre étranger, on se retrouve. « Vos bracelets sont magnifiques » lui dit-elle poliment en trouvant un charme réel à l’agencement libertin de son interlocutrice. Magda jeta un coup d’œil à ses délicats poignets en se demandant si de tels accessoires y seraient jolis. Probablement, mais elle devait conserver ses billets pour louer un appartement plus grand, s’il-vous-plait seigneur. « Ce n’est pas ma première fois, mais je ne suis pas une habituée. C’est du thé? » la néerlandaise pris la tasse qu’on lui proposa et la huma avant de la portée à ses lèvres, sans penser une seconde qu’il pourrait peut-être s’agir d’une concoction magique. Ses réflexes n’étaient pas encore aiguisés dans cette sphère. « Ça sent bon, merci » Après avoir bu une deuxième gorgée, la jeune femme laissa courir ses grands yeux curieux sur les étalages de la petite boutique, impressionnée par le nombre d’objet qu’elle ne pouvait nommer. « C’est une boule de Crystal? » s’exclama-t-elle les sourcils très hauts « eh bien, ces magiciens… », murmura-t-elle pour elle-même. Magdaleenjte n’avait jamais été très spirituelle et avait toujours assumée que les voyantes étaient des charlantantes…or, peut-être qu’elles n’étaient qu’une légende de plus qui s’avérait vraie dans ce monde d’ensorceleurs. Elle tendit ses petits doigts vers la boule.

Maât baissa ses yeux sombres vers ses bracelets au compliment de la jolie cliente : « Merci beaucoup, ils viennent d'Alexandrie » répondit-elle fièrement. Elle afficha un sourire radieux parce que la sorcière était toujours ravie d'entendre ce genre de gentilles paroles plutôt que les plus froides qu'on lui servait parfois. Les anglais avaient souvent ce "je ne sais quoi" d'assez hautain. Mais peut-être que cette cliente n'était pas anglaise. Ce n'était pas ses affaires de toute manière. « C'est bien du thé oui » répondit-elle en acquiesçant avant de prendre sa propre tasse pour la porter à ses lèvres et en boire une gorgée. Il n'était ni jamais trop tôt, ni jamais trop tard pour boire un thé, et on en buvait jamais assez dans la journée, affirmait-elle toujours. Les thés noirs de l'égyptienne n'avaient rien à voir avec ceux d'Angleterre. C'était, si on peut dire, sa touche personnelle. Ravie qu'elle s'intéresse à la boule de cristal, elle opina derechef : « En effet ! Je suis voyante ! » fit-elle en souriant largement, « une petite prédiction ? Je vous l'offre avec grand plaisir ! ». Maât sourit encore. Elle avait trop souvent tendance à offrir des consultations gratuites aux gens qui avaient le mérite d'être sympathiques. Son incapacité marchante rendait Âamet folle, mais bon, elle n'était plus à ça près.

Alexandrie. Les grands yeux de la brunette s’arrondir de plus belle, alors qu’elle pensait qu’il serait incroyable de visiter l’Égypte. Rapidement elle se mis à faire des liens qu’elle n’aurait jamais penser faire auparavant : la communauté sorcière était-elle à la base de la construction des pyramides? Pour la première fois, Magda sembla réaliser que la magie n’était pas unique à la Grande-Bretanique et que son expression devait sans aucun doute s’exprimer différemment au gré des cultures qu’elle épousait. Elle nota mentalement de questionner Gayson à ce sujet et pourquoi pas Shannon, il avait encore plus voyagé, il était même allé dans son pays…D’un grand sourire, elle chassa sa curiosité et rapporta son attention sur la tenancière. « Vous êtes voyante ?! » s’exclama Magdaleenjte en éloignant très vite son aventureux index de la boule de Crystal qu’elle n’avait – dieu merci – pas touché. « Oh…je ne sais pas, c’est gentil… » non seulement la jeune mère ne croyait pas à ces histoires de visions, mais surtout, elle ne voulait pas être l’objet de l’une d’elle. La néerlandaise n’avait aucune envie de connaître son avenir. Elle voulait en être maître et non victime. D’ailleurs, elle ne saurait que faire d’une vision sombre concernant son fils, ou le père de son fils. Elle préférait ne pas savoir, vraiment.

Or, le regard de l’égyptienne était si pure et l’ambiance ésotérique de la boutique avait un je ne sais quoi de réconfortant, à laquelle s’ajoutait une touche d’exotisme, ce qu’elle aimait bien. Magda s’offrit une autre gorgé de ce délicieux thé « il est délicieux » la remercia-t-elle encore une fois en fermant les yeux pour mieux apprécier la détente qu’il lui procurait. « O.k., pourquoi pas, merci ». La jeune femme sourie, confiante, bien qu’ayant l’impression de se jeter dans le vide.

Maât afficha un sourire naturellement engageant. Voyante oui, c'était le mot qui lui correspondait sans doute le mieux. La sorcière ne l'utilisait pourtant pas souvent, mais nombreux étaient ceux qui la désignaient ainsi. Elle n'avait jamais eu peur de ce qu'elle pourrait voir, ni de ce que cela engageait. Maât était une sorcière bienveillante, qui espérait toujours que ses visions soient joyeuses et porteuses de bonheur. Ce n'était pas toujours le cas. Elle acquiesça donc, sans rien dire et elle apprécia grandement que la jeune femme lui dise que son thé était délicieux. Bien entendu, qu'il l'était. L'égyptienne était réputée pour être très douée aux fourneaux et derrière la théière. Sans doute avait-elle cette étrange capacité à cumuler délicieusement les saveurs. Plus détendue, sa cliente accepta sa proposition et un sourire angélique se posa sur les délicats traits de Maât. « Très bien, asseyez-vous, je vous en prie ».
Maât prit place derrière la boule qui était sur la table et continua : « Bien, je vous invite à regarder attentivement la boule de cristal et à vous concentrer intensément. D'accord ? ». Elle afficha un air engageant avant de se détendre pour poser ses mains mates sur les bords de l'objet magique. « Inspirez calmement par le nez, et expirez par la bouche, trois fois ». Elle fit de même, patiemment. Immédiatement elle sentit une tension et elle ne venait pas de sa cliente. Les sourcils un peu froncés, elle grimaça un peu. Elle avait peur, sans savoir pourquoi, son coeur battait la chamade, sans savoir pourquoi, et l'atmosphère se faisait lourde et pesante, sans qu'elle ne comprenne ce qui se passait autour d'elle. « Je... » - fit-elle troublée alors que les images se succédaient rapidement dans la boule - « c'est confus et violent, je ne comprends pas... ». Maât avait rarement des visions confuses, elle interprétait en général fort bien les images qu'elle voyait dans la boule. « Il y a du sang, vous allez perdre un... Un pilier de votre vie qui sera rapidement remplacé par un autre... Je crois... ». Maât releva ses yeux bruns aux pupilles totalement dilatées vers la jeune femme avant de lâcher la boule brusquement. Ses breloques faisaient des cliquetis à ses poignets, qu'elle se massa comme s'ils étaient brûlés. Elle était bouleversée. « Je... Je crois que vous devriez vous en aller, Mademoiselle » lui dit-elle poliment, les yeux rivés partout ailleurs sauf sur la jeune femme. Elle osa un sourire réconfortant en reculant d'un pas.