Le pas rapide, emmitouflée dans son imperméable, Audrey filait vers « The Vermentino Art Gallery » sur le Chemin de Traverse. Récemment, de nombreux commerces avaient été la cible d'attaques inexpliquées dans la rue principale tandis que d'autres avaient été semble-t-il préservés. Comme d'autres fonctionnaires, la jeune femme avait mené des interrogatoires là ou d'autres venaient simplement questionner les tenanciers des boutiques. Tous coopéraient avec plus ou moins de résistance, qu'en serait-il de la galeriste ? Pénétrant dans la pièce principale, Miss Worthington secoua légèrement son pardessus, poussa ses mèches mouillées derrière ses oreilles, puis sortit doucement son calepin. Ses pupilles balayèrent la galerie, à la recherche d'une âme qui vive. « Bonsoir », lança-t-elle tout en s'avançant devant une peinture inerte, attirée par un personnage dont le corps expressif semblait plonger dans son reflet. Les peintres moldus avaient le don de rendre vivantes leurs œuvres sans les ensorceler, c'était stupéfiant. Observant d'un œil aiguisé les coups de pinceaux, elle poursuivit d'une voix plus forte :  « Il y a quelqu'un ? ».

A l’arrière de sa galerie, le nez plongé dans de la paperasse, Claudia n’entendit pas l’aurore entrer. Il faut dire que les jours de pluie, la fréquentation de sa galerie diminuait drastiquement, ce qui offrait alors à l’italienne tout le temps dont elle avait besoin pour faire le point sur ses comptes, pour gérer ses correspondances ou bien réfléchir à l’avenir de l’établissement. Ces dernières semaines, l’entrain que portaient les londoniens pour The Vermentino Art Gallery semblait s’être calmé. Claudia recevait un nombre raisonnable de visiteurs - en corrélation avec le nombres de visiteurs qu’elle voyait en Italie - et la plupart d’entre eux étaient des intéressés et non de simples curieux, ce qui était mieux pour les affaires.

Mais toute cette paperasse ennuyait terriblement Claudia. Si elle pouvait s’en passer, elle enverrait voler tout ça d’un simple coup de baguette. Lorsque l’auror entra dans la galerie, les formalités administratives avaient eut raison de l’italienne. Cela faisait alors plus d’un quart d’heure qu’elle avait le nez dans ses papiers, littéralement. L’appel de l’anglaise, de l’autre côté de la galerie, la réveilla dans un sursaut et c’est avec une mine fatiguée qu’elle se présenta à Audrey.

« Euh oui bonjour » commença-t-elle dans un anglais rendu difforme à cause de son accent italien. Ces derniers mois, les progrès de Claudia dans la langue de Shakespeare avaient été significatifs. « Claudia Visconti, en quoi je peux vous renseigner ». Cette phrase sortait naturellement maintenant. A force de la répéter à chaque client, elle avait fini par l’apprendre par cœur.

(10 ans après, avec toutes mes excuses)

« Audrey Worthington » Se présenta-t-elle à son tour en s'approchant de la galeriste, la main tendue en avant. « Auror au Service de la justice magique. » Précisa-t-elle en sortant machinalement son insigne de son imperméable qu'elle rangea aussitôt. Tout en passant la jeune femme au scanner, l'ancienne gryffondor formula son introduction : « Mrs Visconti, comme vous l'avez probablement entendu, certaines boutiques ont été récemment ...'visitées' par des individus. La semaine dernière, dans la nuit du 13 au 14 Septembre, étiez vous ici ? Avez vous vu ou entendu quelque chose qui pourrait nous aider ? ». Pendant sa tirade, Miss Worthington observa son interlocutrice, puis balaya les lieux du regard. D'un tableau à l'autre, de la vitrine au couloir menant à ce qui semblait être le burau. Le calepin en main, l'auror se mit à écrire ses premières impressions. Au sujet de Claudia, mais aussi du lieu où elle se trouvait, endroit stratégique, selon elle et le ministère, pour être témoin des vols perpétrés dans la rue cette nuit là.

Le regard de l’italienne fut tout de suite attirée par la lueur polie du badge de l’auror. Naturellement, sa gorge se serra et ses yeux se mit à regarder autour d’elle. Avait-elle fait quelque chose de mal ? Non, bien évidement. Depuis qu’elle était arrivée à Londres, la jeune femme avait mis à point d’honneur à ne faire aucune vague, à ne pas faire parler d’elle ne serait-ce que pour un oui ou un non. « Horreur ? » fit-elle perplexe alors que son oreille encore peu habituée aux sonorités anglaises maltraitait ses sens. « Euh je ne suis pas là la nuit ». La logeuse qui l’hébergeait résidait à plusieurs rues de là si bien que s’il se passait quelque chose à sa galerie, Claudia n’en saurait absolument rien. « Du coup je n’avoir rien remarqué » .

En parlant avec d’autres commerçants du Chemin de Traverse, elle avait eu vent des récents cambriolages.  Parler de cela inquiéta Claudia qui machinalement se fit la réflexion d’être plus prudente à l’avenir. L’art était un domaine attirant de nombreuses convoitises, elle en était parfaitement consciente. « Mais plus haut dans la rue » commença-t-elle en désignant une vague direction d’un geste de la main, « un antiquitaire s’est fait voler, vous devriez lui poser des questions si ce n’être pas déjà fait » [/i][/color].

« Vous avez besoin de quelque truc d’autre ? » demanda finalement Claudia, se sentant particulièrement inutile vu les informations – inexistantes – qu’elle avait pu partager avec l’auror.