Gemini était très, très joyeux aujourd’hui, et pour cause ! Lui qui n’était quand même pas le meilleur pour préparer ses cours avait passé un temps fou pour mettre en place celui-là, l’un des derniers de l’année d’ailleurs, ce qui expliquait qu’il était aussi excité qu’un gamin devant la vitrine de chez Honeydukes. Il faisait étrangement chaud pour un mois de juin en Ecosse, ce qui ne l’avait pas empêché de revêtir une côte de maille légère - mais quand même super chaude - qu’il avait magiquement allégée pour que ses frêles épaules puissent la porter. C’était qu’il avait fière allure, en se tenant droit comme ça, main sur le fourreau de son épée. Mais il n’y avait pas que Gemini qui était méconnaissable, ah ça non ! Pour l’occasion, toute la pièce avait été transformée pour les plonger dans un siècle très très passé. Sur la gauche, une immense partie qui faisait office d’armurerie, où les élèves pouvaient aller s’équiper pour affronter leur nouveau cours. Derrière le bureau, un cheval pas très grand - mais un cheval quand même - qui s’abreuvait pour supporter les lourds tissus qui le drapaient. Et sur la droite, une grande table ronde avec ce qu’il fallait de chaises pour assoir tous les élèves - ça allait, ça n’était pas l’option la plus populaire de Poudlard.

Et surtout, au centre, une épée qui trônait fièrement, plantée au coeur d'un lourd rocher.

« Damoiseaux et damoiselles, bienvenue à la cour du roi Arthur ! » Gemini était tellement enthousiaste, retrouvant au passage le plaisir de jouer un rôle. Ça lui avait un peu manqué, en fait.  Il aurait été facile pour lui de donner des consignes sur la suite des événements, mais ça aurait été bien mal le connaître. Après tout, les élèves avaient à disposition tout un univers dont ils pouvaient bien faire ce qu’ils voulaient. Et bien que le grand professeur indien se tenait droit comme un I, presque impassible, il trépignait intérieurement de voir ce qui allait se passer. De voir leurs têtes, aussi. Il avait bien fait de ne pas mettre son heaume !

Spoiler:

Jyn aimait bien le Professeur Deshpande. Après tout, il n'était pas relou, mettait volontiers la baguette au placard et avait au moins la classe d'avoir déjà posé ses lèvres sur un joint de péteuforik. Autant dire que pour la belette, c'était sacrément incroyable. Elle qui portait un regard tout farouche sur l'institution sorcière était tout de même ravie d'un pareil spécimen. Et puis en plus, il dispensait le cours le plus intéressant de Poudlard : celui d'études des moldus. Et si son Professeur était un original - un hurluberlu pour reprendre les termes de Jyn - elle ne s'attendit tout de même pas à cela. La pièce semblait avoir été plongée dans le Moyen-Âge. Jyn ne s'y sentit pas réellement à sa place et elle jeta un coup d'oeil perçant mais perplexe à l'homme armé d'une épée et d'une côte de maille : "Chouette déguisement prof !" fit-elle en balançant négligemment sa baguette dans la boîte appropriée. Elle posa ses fesses sur la table et croisa ses jambes alors que d'autres élèves prenaient place. "Moi j'joue pas Geneviève là, c'est mort".

Adrian se réjouissait de la fin d’année approchant à grands pas. Il avait de nombreux projets pour ces vacances d’été. Il avait appris récemment dans une lettre de ses parents qu’ils avaient planifié un voyage de trois semaines en France. Ils comptaient beaucoup bouger. Mais ce qu’Adrian attendait par-dessus tout, c’était de visiter les châteaux. Il adorait les châteaux ! Il espérait bien que ses parents l’emmènent voir Versailles et les Châteaux de la Loire. M’enfin, cela lui semblait être des destinations obligatoires. Ils se feraient tous assassiner lors de leur retour de vacances si leur tante apprenait qu’ils avaient fait l’impasse. Vous savez, avec une tante médiéviste…
Ce fut tout guilleret qu’il arriva dans la salle de cours du Professeur Deshpande. Il fut tout à fait surpris mais surtout emballé par ce qu’il vit. Le professeur déguisé en preux chevalier, chevauchant son fidèle destrier – était-ce un poney ? présidait une grande table ronde avec une décoration au goût du Moyen-Âge.
« Bonjour monsieur ! J’adore votre costume ! » s’emballa Adrian en prenant place à côté de Jyn à qui il donna un coup de coude complice avant de lui dire à l’oreille « Il a la classe, ce prof. »
Comme à son habitude, Jyn était d’humeur ronchonne et rejetait le jeu de rôle.
« Vous auriez dû nous prévenir professeur, j’aurais ramené mon meilleur costume. »
Melusine allait être verte de jalousie quand Adrian allait lui raconter.

Bon, Études des moldus, donc. Ca n’était clairement pas le cours préféré de Zéphyr, mais au moins ici, pas de risque de croiser ces imbéciles de suprémacistes au sang-pur qui crachaient sur les autres. Et alors qu’il était encore à la traîne sur ses autres camarades, le Serdaigle se demandait bien ce qui allait les attendre cette fois. C’était que leur professeur était ce qu’on appelait un original. Ce qui lui plaisait autant que ça le mettait mal à l’aise, pour des raisons qu’il n’arrivait pas trop à s’expliquer. La vérité, c’était qu’il suivait ce cours là pour tenir compagnie Jyn, et au moins il savait qu’il l’entendrait moins ronchonner que d’habitude, ce qui lui faisait toujours plaisir sans qu’il ne l’avoue pour autant. Sacré Zéphyr.

Une fois la porte passée, l’Aiglon ne put s’empêcher de lever un sourcil bien en l’air alors qu’il se délestait de sa baguette. Mais qu’est-ce que c’était que ce délire ? La classe était purement et simplement transformée, et à chaque fois que c’était le cas, ça n’annonçait pas que des bonnes nouvelles. Féru de littérature qu’il était, Zéphyr ne mit pas bien longtemps à comprendre dans quel univers ils allaient être plongés, et lui vinrent aussitôt à l’esprit les histoires de Merlin qu’il avait lues quand il était plus jeune - ça datait un peu, mais heureusement, il avait bonne mémoire. « Bonjour messire. » lança-t-il au prof en lui faisant une presque courbette, avant de rejoindre Jyn et Adrian qui, sacrilège, étaient grimpés sur la table ronde. « Bande de gueux, descendez de là ! »  lâcha-t-il de son air mi-pédant, mi-moqueur, avant de répondre à la remarque de Jyn qui, une fois n’était pas coutume, était à moitié à côté de la plaque. Mais hors de question de lui faire remarquer, au risque de se faire fusiller du regard. « Pas de risque qu’on te fasse jouer les princesses, Jynette. Je crois qu'il y a des dragons dans les légendes... » blagua-t-il avant de se retourner pour observer ses camarades qui s’échinaient à tirer sur la fausse Excalibur comme si c’était la force qui comptait. Ces amateurs… « Vous croyez que le prof nous a choisi un élu… » Petit regard à Jyn dont il sentait venir le courroux. « Ou une élue hein, qui sait ? » Trève de taquinerie envers le dragon endormi - pour l’instant - Zéphyr eut un signe de tête envers son camarade de chambre pour lui indiquer le chemin du… dressing ? Comment on appelait ça d’ailleurs ? « Je suppose qu’on ne va pas y couper, alors… Maître du Donjons et Dragons, tu nous aiguilles avant l’adoubement ? » Il eut un début de rire avant de se rappeler les facéties du professeur Deshpande. Pas impossible qu’il leur fasse le coup de l’épée sur l’épaule, tiens.

Les élèves s’activaient dans tous les sens, curieux pour la plupart, intrigués pour les autres. Ohlala ce que Gemini était content ! Après toute une année à faire cours assis - eux sur une chaise, lui sur son bureau ou pire, un bureau d’élève - il était ravi de sortir un peu de la zone de confort étudiante pour proposer un format un peu sympa. Bon, bien sûr, il y avait eu le cours au lac sur les sports moldus aquatiques - en plein sous la pluie, trop bien… - et puis deux trois moments dans le genre, en intérieur. Mais là, c’était son chef d’oeuvre ! Tout transformé, et c’était bien fait même. Jacob lui avait donné quelques bonnes idées, Tiri aussi et puis le reste, il avait pu compter aussi sur son ancienne compagnie qui lui faisait salement du gringue pour qu’il réintègre leurs rangs. Ca se discutait… Mais bon, il avait aujourd’hui un autre rôle à jouer ! « Merci mes braves ! » clâma-t-il tout fier face aux compliments de certains élèves sur sa tenue. Peut-être qu’ils se moquaient, allez savoir, mais Gemini ne pensa même pas au verre à moitié vide, préférant y voir un signe d’intérêt.

Il y avait donc quelques élèves, les plus jeunes d’ailleurs, affairés à essayer des tenues plus ou moins seyantes. D’autres, plus vieux peut-être, qui tiraient avec acharnement sur Excalibur pour devenir le seigneur d’un jour, peut-être. Mais hehe, ça ne marcherait pas comme ça ! « Cessez de vous époumonner, vos muscles céderont bien avant la pierre, honnêtes gens ! » leur balança-t-il en s’avançant un peu d’un air cavalier - mais à pied, parce que le poney resta à brouter tranquillement alors qu’une jeune Poufsouffle lui tressait la crinière. Gemini n’avait pas envie d’un cours magistral, pas vraiment, mais les laisser vaquer à leurs occupations sans faire cours, bon, pas ça non plus. Voyant que certains préféraient ne rien faire plutôt que de profiter du décor, Gemini essaya de relancer un peu les choses. « Nul doute que vous avez déjà tous entendu parler de la légende de Merlin. Légende oui, car tel est le nom que les moldus lui donnent, rapport au fait que la magie est pour leurs coeurs bien plus une croyance qu’une réalité. Toutefois, le mythe Arthurien est tout autant inscrit dans leur monde que le nôtre. Bon nombre d’éléments de cette histoire nous sont communs, comme cette épée qui, en son rocher, attend le bras qui viendra la sortir de son sommeil. » Se plantant devant l’épée plantée, donc, dos à elle, Gemini brandit la sienne qu’il vint appuyer contre le sol, les mains dignement posées sur son manche, attendant sagement. « Allons, mes braves, la réunion de la table ronde ne saurait commencer sans un souverain pour la gouverner. Quelqu’un pour essayer, ou nous en conter la légende ? »

Spoiler:

"Plus de classe que nous oé" répondit-elle machinalement à la remarque du Serdaigle Adrian Conway en regardant leurs habits classiques et certainement pas originaux de Poudlard. Jyn n'avait aucune idée du plan loufoque de leur professeur, et Zéphyr non plus apparemment. La façon dont il alpagua Adrian et elle lui fit lever les yeux vers le plafond. Le jeune homme se fendit de quelques remarques à son égard qui lui firent poser une main sur son torse, scandalisée. Scandalisée, oui oui ! "T'vas voir qu'le dragon y va te brûler" fit-elle d'un ton mauvais en faisant mine de lui souffler dessus. Le prof leur demanda de leur conter la légende arthurienne et en bonne galloise qu'elle était, Jyn la connaissait. Enfin, plus ou moins...
Les affres de la fin d'année lui donnaient presque la flemme d'être de mauvaise humeur et elle haussa les épaules en levant la main pour prendre la parole, à croire qu'elle était bien élevée. "Merlin, il est trop fort. Il peut changer d'apparence, voir l'avenir et le futur et tout et tout..." - elle se mordit la langue pour ne pas dire du mal de la professeure de divination et continua - "le Merlin il a chaperonné Arthur, pis Arthur il a trouvé Essekalibourre". Elle sentait que le souffle de la foule était pendu à ses lèvres : "M'enfin, j'vais pas faire cours à vot' place".

Spoiler:

Adrian était excité comme une puce. Il adorait d’ors et déjà le sujet du cours, d’autant plus qu’il pouvait se vanter d’être un peu calé sur le sujet… héhé. Il rit à la plaisanterie de Zéphyr.
« Elle fait un parfait dragon ! » railla-t-il.
Son regard s’illumina quand Zéphyr évoqua l’armurerie. « On a le droit ?? » Il ne fallait pas lui dire deux fois pour qu’il y aille s’affubler d’un heaume reluisant et d’une cote de mailles avant de revenir à sa place, tout content.
Sur ce, le professeur Deshpande commença le cours en demandant aux élèves de conter la légende du Roi Arthur. Jyn se lança en première. Un défaut de prononciation fit glousser Adrian. « C’est Excalibur, pas Essekalibourre ! » En dehors de cela, l’histoire de Jyn était très lacunaire et le garçon leva la main pour la compléter.
« En fait, Arthur c’était l’héritier légitime du trône à la mort de son père mais on savait pas que c’était lui. Du coup ils ont dit que celui qui allait arriver à retirer Excalibur de la pierre allait régner. Et c’est Arthur qui l’a retiré, donc il est devenu Roi. Puis il a rassemblé les chevaliers les plus forts et les plus courageux autour d’une Table Ronde pour chercher le Graal. »
Jamais compris pourquoi ils cherchaient le Graal – c’était juste un bol – mais bon…

Ca c’était sûr, Jyn faisait un dragon extrêmement convaincant. Zéphyr s’attendait à se prendre une réplique bien sentie mais au lieu de ça, il eut droit à un souffle fictif qui le fit reculer d’un pas - c’était vraiment pour lui faire plaisir hein. Et alors qu’il invitait Adrian à exposer ses talents de maître médiéval, Zéphyr le suivit en secouant la tête, proprement blasé de le voir aussi excité par cet espèce de jeu de rôle. Non pas qu’il n’aimait pas ça, quand c’était autour d’une table du moins, parce que ça se passait dans sa tête. Là, c’était juste une extravagance de ce prof un peu dingue, mais bon… Jouant le jeu, le Serdaigle enfila un heaume trop grand et un plastron trop petit -vraiment la classe - et se paya même le luxe d’attraper une épée au passage. Mais que c’était lourd ce truc ! Traînant son grand corps et son attirail qui pesait une tonne, lui semblait-il, Zéphyr revint auprès de sa petite clique pour écouter la suite du cours. C’était intéressant, parce que c’était de l’histoire. De l’histoire mêlée à de la légende, ok, mais ça lui plaisait quand même.

Evidemment, Jyn fit une faute en reprenant la parole, mais ce fut son camarade de chambrée qui la reprit pour une fois. Non mais Eskalilibourre, franchement… Elle le faisait exprès ou quoi ? Heureusement, Adrian rattrapa le coup et expliqua plutôt bien le truc. Avant même qu’un autre élève n’en ait eu l’occasion, Zéphyr enchaîna donc, comme si c’était normal et qu’ils formaient un trio qui complétaient leur argumentaire. De toute façon, le cours était toujours un joyeux bordel, alors hein… « Les chevaliers étaient à la quête du Graal, mais pas seulement. Ca, c’était une quête divine, mais ils devaient aussi veiller sur le peuple, et débarrasser la terre du mal, comme des dragons par exemple. » Petit regard en coin à Jyn, évidemment. « Il y a tellement de légendes que c’est compliqué de savoir exactement démêler le vrai du faux. On ne sait même pas si Arthur a existé en fait. Ni le Graal d’ailleurs. Ni Camelot, le château où il régnait. » Non pas que Zéphyr était un rabat-joie - hum, hum… - mais il lui semblait important, en tant que grand amoureux de l’Histoire, de préciser ce point. Ayant fini son petit speech, et vu que l’équipement lui pesait sacrément, l’Aiglon finit par s’assoir sur une chaise, et non pas sur la fausse Sainte Table, se moquant bien de n’avoir pas été adoubé. Ca aurait fait plaisir à Adrian pourtant, une petite cérémonie comme ça.

C’était quand même agréable de voir toutes ces jeunes âmes s’émuler autour d’un projet qu’il avait créé. Non vraiment, les élèves avaient l’air de se prêter au jeu, ce qui lui provoquait un vrai beau grand sourire de gamin alors qu’il aurait pu rester un peu dans son rôle solennel. Mais c’était comme ça, il avait de l'affection pour ces gosses, peut-être parce qu’ils le jugeaient étrangement moins que les adultes alors que pourtant, à l’époque, d’autres avaient été bien cruels avec lui. Peut-être qu’il était un bon prof, au fond, même si aujourd’hui il n’avait pas grand chose à faire. Les élèves avaient l’air inspirés par la thématique du cours, bien que tout tourna au début autour du sacro-saint Merlin dont ils avaient logiquement entendu parler depuis leur enfance. La jeune Poufsouffle qu’il aimait bien raconta à moitié n’importe quoi, mais fut corrigée par un camarade qui connaissait apparemment la légende, suivi par son acolyte je-sais-tout qui y mit une bonne dose de pragmatisme. « Eh bien, on dirait que je n’ai rien à vous apprendre, jeunes chevaliers ! » C’était faux, bien sûr, mais il fallait bien encourager la jeunesse. Un Gryffondor continua en énumérant quelques têtes de la table ronde, Lancelot, Gauwain et tout le tintouin, alors qu’un de ses camarades timides zieutait la fausse Excalibur sans oser y aller. « C’est un fait, l’épée reconnait son roi. » poursuivit-il en invitant d’un geste noble le jeune griffon à tenter sa chance. Gemini avait ensorcelé le rocher pour qu’il cède face à un coeur humble, ce qui sembla être le cas car, surpris, le Gryffondor se retrouva avec l’épée dans les mains, et l’air de ne pas savoir quoi en faire. « Jeunes gens, nous avons notre souverain ! » déclama-t-il d’un air très sérieux avant de s’agenouiller, attendant que quelques âmes daignent faire de même.

Une fois relevé, Gemini sortit une couronne de derrière la roche et la posa sur la tête du Gryffondor acclamé par toute sa maison - bien moins humble que lui. « On dit que l’épée ne peut être retirée que par l’élu des dieux païens et celtiques. Et Arthur n’était pas plus vieux que toi lorsque ce fut le cas. C’est justement en sa qualité d’élu qu’Arthur Pendragon, fils d’Uther dont il était le bâtard, a pu réussir ce que son père n’avait jamais su faire : unifier les peuples de Bretagne. » S’avançant vers la table, Gemini en frôla le bois sans pour autant s’y assoir. « C’est pour ça qu’il a créé cette table, ronde. Pour que chacun y siégeant soit l’égal de l’autre. Pour la quête du Graal, mais aussi pour parvenir à maintenir cette paix légendaire, et… » Il y eut tout à coup un grand bruit contre les lourdes portes fermées, et le professeur eut toutes les peines du monde à contenir son excitation. « C’est bien connu, la paix est fragile. » Avec un sens du timing tout à fait remarquable, les portes s’ouvrirent avec fracas et une horde d’armures ayant miraculeusement pris vie entra dans la salle avec une cadence toute militaire. C’était une scène fort impressionnante, et Gemini était bien fier de son petit effet. C’était Jacob qui lui avait donné cette idée lorsqu’ils avaient discuté, et avec quelques sortilèges, il avait réussi à enchanter les armures du château pour en faire des combattants sans âme. « Chevaliers, aux armes ! » cria-t-il comme s’il était chef de guerre, brandissant son épée au-dessus de sa tête. Il s’amusait comme un petit fou. Pas pour rien s’il avait mis une armurerie dans la salle après tout.

Spoiler:

Jyn n'en avait pas grand chose à faire de la Bretagne, d'Arthur, du Graal ou de n'importe quelle autre connerie dans le genre. En fait, les histoires, c'était sympa à entendre mais les vivre, c'était quand même mieux. Et les professeurs de Poudlard, souvent, pensaient que ça intéressait les chérubins présents d'entendre parler des gobelins et de leurs guerres de successions, des mages noirs ou de la conquête des trolls en 1055. Quoiqu'il en soit, elle amputa sérieusement le mythe arthurien et la façon dont Adrian la reprit lui fit lever les yeux au plafond tout en marmonnant un : « Lèche-botte de mes deux... ». Zéphyr compléta naturellement parce qu'il avait l'habitude de faire cours à la place du prof. La Poufsouffle écouta tout cela d'une oreille très lointaine tout de même, en s'occupant de ses cuticules comme si c'était le moment - non ça ne l'était pas, mais n'essayez pas de le lui dire. Jyn eut un étouffement en voyant un Gryffondor retirer l'épée et croisa ses bras contre sa poitrine d'un air envieux. Elle aimerait bien pouvoir assommer quelqu'un - Adrian - avec, mais maintenant qu'elle était prise, cela allait devenir compliqué...

Elle se fit la réflexion que si c'était tout ce en quoi consistait le cours, elle pouvait encore retourner dormir sur sa paillasse. Elle écoutait naturellement à moitié le discours du prof sur les peuples unifiés lorsqu'un bruit l'interrompit. Le petit palpitant de Jyn prit un rythme effréné parce que ce bruit, là, qu'elle avait entendu, elle ne l'avait jamais entendu ailleurs. Elle sauta d'ailleurs de sa table comme si elle savait ce qui allait arriver et les portes de la salle de cours s'ouvrirent brusquement pour laisser passer des armures, qui, apparemment, étaient là pour les réduire en miettes. « TROP BIEN » s'écria la gamine en se précipitant vers une épée. Naturellement, elle en prit une qui avait l'air féroce et comme d'autres élèves en même temps qu'elle, elle se précipita vers les armures avec un cri de guerre : « TAYOOOOOOOOOOOOOOO ! ».


1.3 | La charge guerrière ne mène trop nulle part. Jyn est bringuebalée par le Gryffondor Pendragon qui lui tape déjà sur le système nerveux à trop se la jouer Roi de Bretagne. Aussi, elle essaya de lui mettre un gros coup d'épaule de bonhomme pour qu'il dégage de son armure. Mais du coup, forcément, elle ne fit pas attention à l'armure qui avait l'air déterminée à l'assommer sur place. Elle ferma les yeux en inspirant brutalement une gorgée d'air comme si elle allait tomber dans l'eau, mais rien. Tout au plus une caresse sur sa tête. Gemini Deshpande n'était pas si farfelu, finalement.

2.5 | Jyn se précipita vers l'armure qui lui faisait face et au lieu de lui donner un coup d'épée, elle s'essaya à un plaquage de rugbygirl moldu. Bien entendu, elle s'était vue plus épaisse qu'elle ne se l'imaginait et naturellement, elle retomba sur les fesses sans faire bouger l'armure qu'elle venait de viser.

4.6 | Comme si elle était armée d'une épée aux pouvoirs de dragons, Jyn fit un grand geste autour de sa taille pour viser celle de l'armure en face d'elle. Plus génie qu'elle ne le pensait, elle en dégomma deux en fait. Celle d'à côté, qui était attaquée par le Gryffondor Pendragon, s'explosa grâce à son coup magistral et elle n'eut pas le temps de bomber le torse pour s'enorgueillir de son exploit que le Gryffondor se fendait d'une mauvaise réflexion à son égard, à laquelle elle répondit : « Va te faire cuire un oeuf Pendracon ».

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'Le dé ' : 2

Zéphyr se disait qu’enfin, ils vivaient un cours à peu près normal et intéressant. Enfin, normal, tout était relatif. Mais le grand décorum ne semblait avoir que pour but de les intéresser un peu à la légende, et le Serdaigle avait donc déballé toute sa science et et était tout fiérot d’avoir nuancé le propos. Toutefois, le professeur eut des envies de théâtre, pour changer, et voilà qu’un Gryffondor dont il ne se rappelait même pas le nom était proclamé roi de… de quoi exactement ? Levant les yeux au ciel, Zéphyr souffla un soupir appuyé, moins par jalousie que parce qu’il trouvait ça stupide, et que ça n’allait pas aider à ce que l’ego des lions aille en diminuant. C’était qu’ils étaient bien fiers que ça soit l’un des leurs, quoique la majorité était surtout dégoûtée que ça ne soit pas tombé sur eux. Ridicule, en vrai. Arthur Pendragon aurait forcément été un Serdaigle, pas un bête Gryffondor. Mais bon, pour ça, il aurait fallu essayer, et Zéphyr ne s’était pas senti l’envie d’avoir l’air bête à tirer sur un bout de métal, merci.

Assis donc, l’aiglon écouta la suite du cours avec une demie-attention. Ah, les belles valeurs, l’unité tout ça… Dans un château où on classait les gens par maison, c’était quand même sacrément ironique. Il faillit d’ailleurs faire la remarque à Jyn, qui n’était pas bien fan  de Poudlard, mais c’était sans compter sur la créativité du Professeur Deshpande. Il y eut un bruit à faire trembler sa couardise, et Zéphyr déconnecta complètement du cours en braquant ses billes bleues sur la porte. « C’est quoi ce… » Bordel, oui, c’était le mot qu’il n’eut pas le temps de prononcer car déjà des masses d’acier se jetaient sur eux avec lenteur, mais dans sa tête, tout ça allait bien trop vite. Bondissant sur ses pieds, Zéphyr eut un pic d’adrénaline qui lui en fit tourner la tête ou presque. Jyn, elle, fonçait déjà dans la mêlée comme la brute épaisse qu’elle était, et Zéphyr considéra son épée un court instant. Non mais jamais de sa vie il n’arriverait à soulever ça pour frapper une armure !

Reculant par la force de son absence de courage, Zéphyr se retrouva bientôt acculé dans la fausse écurie du poney désormais bien agité. Lui vint alors l’idée la plus étrange qui soit, mais à défaut d’une autre. Tranchant la corde qui maintenait l’équidé en place, Zéphyr compta sur l’instinct animal pour se charger de ce qu’il n’osait pas faire.

1-4 - Belle idée ! Le poney fonça tout droit sur une armure, façon boule de bowling, et envoya valdinguer des morceaux du combattant un peu partout, puis rua sur une seconde qui s’affaissa instantanément. Bah quoi, le combat, ça n’était pas seulement taper, si ?

2-5 - Pourquoi pas Zéphyr… Mais l’animal se contenta de hennir avant de trottiner jusqu’à la porte en esquivant les assaillants, et voilà qu’il faisait désormais face à une armure qui brandissait une monstrueuse épée face à lui. Voyant la mort arriver, le Serdaigle ferma les yeux et sentit finalement un tout petit choc sur son plastron. Rouvrant l’oeil gauche, il remarqua que l’armure se désintéressait de lui, et las, se laissa tomber au sol. Oui oui, il abdiquait. Et alors ?

3-6 - Pire idée ou presque ! Le poney avide de liberté rua comme un fou et vint flanquer ses sabots sur la cote de maille de Zéphyr. Sa propre armure lui permit d’accuser le coup et le projeta en arrière sur un assaillant qui en fut déséquilibré. Résultat, Zéphyr s’avachit au milieu d’un tas de ferraille désarticulé. Pour la classe, on pouvait repasser mais au moins, le résultat était là, non ?

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'Le dé ' : 5

Gemini était totalement dans son élément. Non pas en tant que chevalier de la Table du Roi Arthur ou en fait, si, un peu. Mais jouer la comédie, c’était vraiment son truc. Ca lui manquait même, parfois, mais le fait était que la vie, c’était aussi une vaste comédie. Du moins, c’était comme ça qu’il avait décidé de voir les choses. Alors là, au milieu du chaos ambiant, Gemini prenait vraiment son pied. Un combat pour de faux qui sonnait vrai, ses élèves bien obligés d’arrêter d’être studieux pour laisser parler un peu de leur âme d’enfant. C’était une cour de récré, avec de la magie dedans, un voyage dans le passé dans tous les sens du terme. Certains se prenaient réellement au jeu, d’autres tentaient l'option fuite - et pas que les Serpentard hein ! - et quelques uns avaient réellement déserté, mais voir les armures les prendre en chasse l’amusait beaucoup.

La scène dura un peu, combien de temps, il ne savait pas. Lui-même avait démoli pas mal d’ennemis et quand enfin tout fut fini, c’était un bazar sans nom. « Quelle bataille ! » s’exclama-t-il, victorieux, brandissant son épée qui aurait pu paraître un peu trop lourde pour ses grands bras fins mais non, il réussit. « Bravo à tous, et longue vie au roi ! » Il espérait un peu que la foule suive, mais ça n’arriva pas. Bah, pas bien grave, de toute façon le petit souverain était gêné, tout Gryffondor qu’il était, alors c’était peut-être mieux comme ça.

Le cours se terminait, et Gemini se sentit un chouia triste. Mais pas très longtemps, heureusement. « Chers élèves, ainsi s’achève cette année. » reprit-il d’une voix solennelle après s’être installé à la table qui s’était magiquement agrandie pour accueillir toute la classe. « Si mon cours ne s’inscrira sans doute pas autant dans la légende que les aventures du grand Roi Arthur, j’espère au moins avoir éveillé vos esprits, ouvert un peu vos yeux et fait palpiter votre petit coeur. » Une petite pause, dramatique. « Du moins, le mien bat actuellement à cent à l’heure. Elles étaient coriaces ces armures, non ? » Il eut un rire, et ne fut même pas le seul. Ils étaient gentils ces élèves. Et puis, finir sur une note joyeuse, c’était quand même mieux non ? « À l’année prochaine, damoiselles et damoiseaux ! » conclut-il en se levant dans une révérence élégante. L’année prochaine oui. Qu’il croyait.

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