Cette partie du vieux village sorcier était quasiment déserte. Les quelques rares silhouettes présentes se hâtaient, tête basse, le corps ployant sous la menace invisible. Gray portait une longue cape noire élimée, mais encore assez chaude, qu'il affectionnait particulièrement car sa large capuche lui mangeait le visage. Il marchait sans hâte, par automatisme. Hier encore il lançait une poignée de terre sur la tombe de sa soeur Veronica. Hier encore il posait les plus puissantes protections dont il était capable sur les habitations de ses proches. Hier encore il hésitait. Non pas sur la décision à prendre, mais sur les moyens de parvenir à ses fins. Il se fichait pas mal de violer la loi, s'il fallait balancer un Oubliettes à son beau-frère pour qu'il prenne le premier avion le plus loin possible alors il le ferait! Hier soir il avait enfin trouvé la solution. L'Ordre du Phénix. Pas pour Mildred, sa plus jeune soeur, une moldue, quittait le pays le soir même pour les USA, direction Yale. En revanche seul il ne pourrait pas assurer la sécurité de ses parents et celle de son beau-frère, ainsi que Victoria et Daniel.

- Un Pur Feu, dit-il d'une voix rauque, le visage caché par sa large capuche. Alberforth Dumbledore lui tendit un verre dans lequel aucune personne saine d'esprit ne boirait, mais lui s'en fichait royalement. Il prit son verre et s'installa dans une table du fond. Kingsley ne saurait tarder.

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- Tu n'as pas de chien. Sauf si tu en as adopté un depuis la dernière fois que je suis venu chez toi... Il eût un sourire narquois en songeant à quel point sa vie privée était vide.
Si on m'avait dit qu'un jour c'est toi qui me reprendrais sur le protocole de sécurité élémentaire...
- Ouais...

Il se détendit et rangea sa baguette dans sa poche, prête à être dégainée au moindre mouvement suspect. Gray observa longuement Kingsley. La fatigue se lisait sur ses traits tirés. Le ministère, l'ordre... Des traîtres à tous les coins de rue, tapis dans l'ombre à guetter la plus petite faiblesse, mortelle.

- Ton autre sœur a bien quitté le pays ? Je pense que si on doit prévoir d'autres escortes on ne peux plus passer par le Ministère...
- Elle part ce soir même.

Sa mâchoire se serra, le regard brûlant de haine il se plongea dans les reflets ambrés du pur feu. Plus personne n'était à l'abri! Ils s'en prenaient même aux familles des aurors. Et cet idiot de Richard qui refusait de quitter le pays avec ses enfants. De toute façon ce moldu n'avait jamais rien compris à leur monde, et au fond Veronica l'avait conforté dans cette idée. Il ne voyait pas le danger.

- Non, en effet. Mon beau-frère et ses enfants doivent quitter le pays, seulement cet idiot ne réalise pas qu'ils sont en danger. Je me laisse encore deux jours pour le convaincre, s'il ne se décide pas je le soumets à l'imperium. En attendant il me faut quelqu'un pour surveiller l'école des enfants et leur maison. Je me charge d'évacuer mes parents. Vous pouvez faire ça ?

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- Je m'occupe des enfants. Je peux veiller sur eux les 24h prochaines heures, puis il me faudra un relais. Gideon, si il n'est pas en mission. L'idéal serait qu'on puisse mobiliser plus de monde pour assurer des rondes mais... Je suis désolé Magnus, je ne pense pas que je pourrais trouver beaucoup de renfort disponible. Mais ils ne leur arrivera rien, tant que je serais là.

Des renforts... Il laissa un silence s'installer. Le silence lui convenait. Ces deux derniers jours il avait assez entendu la douleur et la peur dans la voix de ses proches, alors le silence, l'absence de son ça lui allait. Leurs renforts, parlons-en, des gamins à peine sortis de Poudlard et une poignée d'hommes et de femmes, quelques aurors et voilà! Ce n'était pas dans ses habitudes d'être si dur envers l'ordre, mais il devait bien se rendre à l'évidence, ils étaient en infériorité numérique. Comment lutter contre les ténèbres lorsqu'ils s'évanouissent ou encore disparaissent dans des volutes noires ?

- Ouais, le petit Prewett, ce serait bien. Ce ne sera que l'affaire de deux jours, ensuite si Richard ne se décide pas je ne lui laisserai pas le choix. Dis moi, est-ce que l'enquête avance ? Vous avez des indices, une trace ?

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Kingsley ne décelait aucune once d'optimisme dans le ton de Magnus. Il était résolu à faire ce qu'il pouvait pour protéger son beau frères et ses enfants, mais il savait que ça ne pouvait pas ramener sa sœur. King devait se concentrer sur la sécurité des gosses, et ne surtout pas penser qu'il allait se retrouver face au dilemme de laisser ou pas son collègue et ami jeter un Sortilège Impardonnable. Lorsqu'il lui demanda des nouvelles de l'enquête, l'auror se laissant aller sur sa chaise avec un petit soupir. Il avait pu analyser dans les moindres détails comment Veronica était morte, mais il avait envie d'épargner ça à Magnus. Il avait le droit de savoir bien sûr, rien que le fait d'imaginer sa propre soeur à la place de celle de son collègue faisait monter une rage folle dans le cœur de King. Il comprenait ce qu'il pouvait ressentir, mais il comprenait aussi qu'il se trouvait sur la corde raide, et qu'il ne lui faudrait qu'une légère pichenette pour basculer.

- On a quelques éléments oui... Les assassinats se ressemblent de plus en plus. Les modes opératoires deviennent de plus en plus stéréotypés. Ces fils de goule, ils prennent de l'assurance... Il inspira un bon coup pour ravaler sa frustration. On commence à pouvoir faire des liens entre plusieurs affaires, mais... on n'arrive pas à aller plus loin pour l'instant.

Il écouta les paroles de Kingsley, amère, dresser un constat désolant. Le visage fermé, il repensait à tous ces meurtres jamais élucidés, à toutes ces fois où l'imperium avait été utilisé masquant ainsi le véritable coupable. Une partie de lui se raccrochait à l'espoir, mince certes, qu'un de ces fumiers ait laissé un indice capable de mettre un nom sur un masque hideux et une marque plus dégoûtante encore. Mais ce n'était rien de plus qu'un espoir que l'homme de terrain savait vain. Ils ne trouveraient rien, si ce n'est des échos lugubres, des modes opératoires similaires et un rythme plus effréné encore.

- Je sais qui a fait ça Kingsley, sa voix était grave, rauque et les mots sortaient difficilement. Il en avait la gorge serrée, il se sentait coupable, responsable de la mort de sa soeur. Ils n'étaient pas les meilleurs amis du monde, ni très proche, mais ils demeuraient frère et soeur, liés par le sang et la chair, et la nuit il rêvait d'elle, pâle et transparente l'accusant de son triste sort. Et c'est de ma faute.

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Le travail de sape, lâche, cruel et inhumain avait déjà commencé. Les bases de leur société vacillaient sous les attaques répétées. Les vieilles croyances, les rancoeurs, tous ces non-dits et ces préjugés sur les sang-mêlés et les nés moldus remontaient, comme les ordures débordent des égouts. Tout ça était nauséabond, écoeurant mais se mettait doucement en place. Il avait espéré comme beaucoup que les nuages finiraient par partir, qu'après la tempête viendrait l'éclaircie, mais avec l'assassinat de sa soeur c'était la réalité qui le frappait en plein coeur. Plus personne n'était à l'abri désormais, les mangemorts s'autorisaient tout. La cible:le ministère. Alors King pouvait bien lui dire ce qu'il voulait, lui savait que sa famille ne serait plus jamais à l'abri.

- Toi et moi on sait très bien pourquoi ils ont choisi Veronica. Il vida d'un trait son verre, l'oeil soucieux et se rapprocha un peu de manière à ce que seul Kingsley puisse entendre, Et tu sais aussi bien que moi que les aurors n"ont pas assez de moyens. Si Croupton était au pouvoir tout serait différent...

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HJ

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