▬ Il va falloir faire attention, pour nos sorties nocturnes, remarqua Sirius en bâillant.

L'école avait repris et les Maraudeurs s'étaient retrouvés après les congés de Noël, contents de d'être à nouveau réunis. Ils voulaient profiter du deuxième trimestre pour avancer dans le protocole d'Animagus. Mais Picott avait prévenu l'ensemble des élèves qu'il y aurait tolérance zéro pour les promeneurs nocturnes. Les Maraudeurs allaient devoir se montrer prudents et trouver des stratagèmes pour éviter les préfets.
Ils s'interrompirent en entrant dans la salle de repos. Soucieux d'échapper au froid hivernal qui était nettement moins enchanteur depuis que Noël était passé, les élèves s'agglutinaient sur les fauteuils et les canapés, se serraient près des cheminées, et bavardaient bon train.

Pourtant, il ne leur fut pas difficile de trouver une place. Un groupe de filles de première année leur céda leurs fauteuils en gloussant. Cool ! Sirius s'avachit sur le fauteuil, passant une main dans ses boucles brunes pour remettre de l'ordre et piocha une poignée de dragées dans la boîte que lui tendait Peter.
Croquant dans une dragée à la menthe poivrée, Sirius, qui parcourait des yeux la salle, remarqua la présence d'Ophelia Parkin. Il ne lui avait pas adressé la parole bien qu'elle lui eût adressé avant les vacances une lettre l'informant de son béguin et du fait qu'elle était l'auteur de la bombabouse. À part les Maraudeurs, personne ne semblait être au courant. Si bien que Sirius commençait à douter de ce que lui avait dit la Poufsouffle. Il tenait à en avoir le cœur net.

Par chance, elle était seule. D'habitude, elle était accompagnée de la facétieuse Glinda Crook. Or, Sirius ne voulait pas se coltiner deux gamines. Une seule suffisait.
Il avala sa friandise, lança les dragées restantes à James et se leva pour rejoindre Ophelia, occupée à écrire une lettre. Il ne savait pas si elle l'avait remarqué.
▬ Salut Ophelia, fit Black le plus naturellement du monde, tu as passé de bonnes vacances ?

Il espérait qu'elle ne pousserait aucun cri strident. Pour une fois, Sirius voulait passer inaperçu.

Spoiler:

HJ:

Comme à son habitude lorsqu'elle retournait à Poudlard, Ophelia prenait le temps de rédiger une missive pour ses parents, afin de les rassurer : oui, le trajet s'était bien passé, non, elle n'avait rien perdu en route, oui, ses amies étaient toujours là, et Crotte avait déjà retrouvé le chemin des cuisines. Du moins, c'est aux cuisines qu'Ophelia soupçonnait que sa rate de compagnie disparaissait régulièrement, car la bestiole revenait toujours de ces pérégrinations un peu plus grosse, et passait ensuite de longues heures étendue sur l'oreiller de sa maîtresse comme une bienheureuse, sans remuer une moustache. Ophelia toutefois avait terminé de parler de Crotte dans sa lettre, et abordait à présent l'épineux sujet du bal dont sa mère lui avait rabâché les oreilles au cours des vacances : non, elle n'avait toujours pas de cavalier, et non, elle n'avait pas envie d'y aller, même si elle avait fourré sa robe préférée dans sa malle face à l'insistance d'Elladora, sa mère. Ophelia en était rendue à conclure sa tête lorsqu'une voix bien connue attira son attention : ébahie, la Poufsouffle releva la tête, les yeux écarquillés. Sirius.Black.était.devant.elle ! Sirius était devant sa table, et venait de lui demander comment s'étaient passées ses vacances ! Il venait de prononcer son prénom ! Il avait retenu son prénom ! Était-ce grâce à la lettre brûlante qu'elle lui avait rédigé quelques semaines plus tôt, ou bien se souvenait-il de la fameuse bataille de nourriture dans la Grande salle au cours de laquelle il l'avait attrapée par la main devant toute l'école ? Ophelia n'en savait rien, elle était de toute manière bien trop heureuse (et choquée !) pour trancher à présent. Car à présent, il fallait répondre, selon toute vraisemblance. Mais rien ne lui venait trop en tête, qui la fasse paraître un peu intelligente. Pour plaire à un garçon comme Sirius, il valait mieux feindre l'indifférence, non ? C'était du moins les conseils que le Docteur Love de Sorcière Hebdo donnait à ses lectrices. Était-ce le moment de mettre en application cette tactique ? Ophelia réalisa que la situation devenait gênante : plusieurs secondes s'étaient écoulées depuis que Sirius l'avait apostrophée, et elle le fixait sans discontinuer depuis cet instant. La Poufsouffle s'autorisa à reprendre ses esprits : elle inspira un grand coup (elle avait oublié de respirer !) et cligna des yeux. Parce que ça commençait à piquer un peu.
▬ Euh, mes vacances ? Enfin, salut, bafouilla-t-elle. Quelle nouille ! La Poufsouffle se maudit en son for intérieur et poursuivit avant de passer définitivement pour la dernière des idiotes : J'ai passé de super vacances, je me suis beaucoup amusée, prétendit-elle en posant sa plume pour poser son menton sur sa main... et se barbouillant le visage d'encre. Et toi, c'était bien ? s'enquit-elle en lui dédiant son plus charmant sourire.

Merlin soit loué, pas de cri strident ou autre réaction hystérique de la part de la jeune Parkin. Au contraire, un regard ébahi et un long silence montrèrent sa stupéfaction. Sirius avait envie de rire, mais il se mordit la joue intérieure pour rester sérieux. Il avait des réponses à obtenir de la part de Poufsouffle et il n'y arriverait pas si elle avait l'impression qu'il se moquait d'elle.
N'empêche, la réaction de Ophelia était très très très (très) valorisante. C'était comme si un miracle se déroulait sous les yeux de la Troisième année. Sirius était le miracle, en l'occurrence.
Mais le silence durait, au point que Sirius se demanda si son initiative n'avait pas provoqué chez elle un bug monumental. Il allait lui demander si tout allait bien, avec un sourire un moqueur sur les lèvres, quand elle se ressaisit et répondit avec empressement à ses questions. Maladroite, elle étala sur le bas de son visage un peu d'encre, traînées violettes sur le rose de sa peau. De nouveau, Sirius se mordit la joue.
▬ Oh, moi, mes vacances, ça a été, fit-il en s'installant sans plus de cérémonie sur la chaise bancale qui faisait face à Ophelia.

En réalité, les vacances de Sirius avaient été une traversée du désert semée de cactus piquants dont les proéminences formaient le visage de Walburga Black. Hors de question toutefois qu'il l'avoue à Ophelia.
▬ Je me demandais si... si tu n'avais pas eu des ennuis depuis...

Il baissa la voix et prit un air un peu inquiet, espérant que cela attendrirait la Poufsouffle et la pousse à parler :
▬ depuis la bombabouse que tu as lâchée sur Avery.
Il observa alors la jeune fille pour étudier sa réaction et juger de sa sincérité.

Ophelia se raidit sur sa chaise lorsque Sirius s'installa à sa table. Nom d'une goule. Sirius Black, parmi toutes les tables de la salle de repos, choisissait la sienne. Devant tout le monde. Il s'installait avec elle. Ophelia Parkin, première du nom, probablement la créature la plus fière de toute sa famille (et pourtant, sa cousine Betty se la racontait vraiment beaucoup depuis qu'elle avait eu le droit à sa double-page dans Quidditch Magazine !). La Poufsouffle avait rougi de plaisir, et se préparait à badiner tranquillement avec l'amour de sa vie, lorsque celui-ci lui demanda des nouvelles de Thomas Avery. Ophelia sentit tout le sang déserter son visage, et jeta un regard inquiet autour d'elle pour vérifier que personne ne l'avait entendu.
▬ T'es fou de parler si fort, lui reprocha-t-elle, affolée. A quoi jouait-il, à la balancer comme ça au milieu de la salle de repos ? Tenait-il à ce qu'elle se fasse écharper à la sortie ? Ophelia réalisa avec horreur qu'une bande de Serpentard se tenait pas très loin d'eux, et avait peut-être entendu la question de Sirius. Elle était fichue ! Mais après tout, Sirius ne pensait probablement pas à mal, et s'inquiétait sans doute sincèrement pour elle. La Poufsouffle décida donc de le rassurer. Mais peu désireuse de continuer à parler de cela à vive voix, elle décida plutôt de l'écrire : elle déchira un petit morceau de parchemin, et inscrivit discrètement quelques mots dessus :

« Pas eu de souci non. Il ne sait pas que cela vient de moi. Personne à part toi ne le sait. »

La jeune fille posa sa plume et fit glisser sa réponse vers Sirius. Elle espérait qu'il répondrait par la pareille. Ou qu'il ne réponde pas du tout, parce qu'elle n'était vraiment pas à l'aise d'aborder ce sujet ici !
▬ Mais c'est gentil de t'inquiéter de ma... santé, ajouta-t-elle d'une voix badine, et volontairement plus forte, tout en faisant les gros yeux à son amour de toujours, comme pour le dissuader de parler de Thomas Avery.

Lorsqu'il prononça le nom funeste, le visage de la jeune Ophelia Parkin blêmit. Si bien que Sirius crut que, cette fois-ci, il avait eu raison d'elle. Il était impressionné de voir à quel point le visage de la Poufsouffle reflétait sans aucun filtre ce qu'elle pensait. Pourvu qu'elle ne cherchât pas à devenir Auror : elle serait incapable de bluffer.
Ophelia n'avait pourtant pas perdu sa voix et le morigéna, l'accusant de vouloir la trahir. Sirius leva les yeux au ciel, comme s'il n'était pas capable d'être discret quand il le voulait... Cela dit, il avait sûrement manqué de finesse et, devant l'air fermé de la jeune Parkin, il se demanda s'il n'avait pas loupé sa seule chance d'en savoir plus sur l'épisode de la bombabouse.

Elle lui passe un petit morceau de parchemin sur lequel elle avait rédigé un mot. Sirius l'interrogea du regard, intrigué par ce manège, mais le lut. "Personne à part toi ne le sait." Hum... Personne à pat James, Remus et Peter. Cela voulait dire que même Crook ignorait le fait de son amie ?
▬ Mais c'est gentil de t'inquiéter de ma... santé, fit-elle en lui lançant un regard appuyé.

Okay, il avait compris, il ne dirait plus rien à voix haute concernant la bombabouse.
▬ On sait tout deux comment il réagirait s'il était au courant.

Thomas Avery était probablement plus fourbe et mauvais que Servilus, qui faisait plus pitié qu'autre chose. Sirius savait que Avery pouvait vraiment être dangereux. Ophelia ne lui résisterait pas. Cela dit, si c'était lui-même qui avait fait un tel coup, tout Poudlard l'aurait su et Thomas en aurait été encore plus humilié.
Sirius pensait, un peu au fond de lui, que peut-être que Ophelia s'attribuait le travail d'un autre rien que pour l'épater lui, Sirius. Ce dernier attrapa la plume des mains de la jeune sorcière et griffonna derrière son mot, copiant sa tactique.

Comment tu t'y es prise ? Je veux dire, vraiment précisément ?

Ophelia affecta de regarder ailleurs pendant que Sirius prenait connaissance de la teneur de son message. Surtout, il lui fallait avoir l'air naturel, pour que le groupe de Serpentard d'à côté ne se doute de rien ! De toute façon, se rassura la Poufsouffle en tournant de plus belle la tête vers l'amour de sa vie, même si un autre élève venait à s'emparer de ce message, il n'y avait aucune chance pour qu'il parvienne à déterminer à quoi ces quelques mots pouvaient bien se référer. Et Ophelia n'avait pas l'intention de le révéler à qui que ce soit d'autre qu'à Sirius ! Elle était bien loin de se douter que tous les Maraudeurs étaient déjà au courant de son exploit...
▬ Oui, admit-elle en frissonnant, lorsque Sirius lui répondit qu'ils savaient fort bien comment Thomas Avery réagirait s'il apprenait la chose. Mal, il réagirait mal. Et Ophelia serait assurément dans la bouse de Sombral, une énorme bouse de Sombral.
Sirius écrivit à son tour quelque chose au dos du parchemin, et Ophelia plissa des yeux en essayant de lire à l'envers, mais le garçon écrivait bien trop mal. Elle tenta donc de déchiffrer son écriture lorsqu'il lui fit passer le mot. Une moue étonnée s'étala sur son visage, et Ophelia commença à écrire :

« Avec Pando on a conçu une Bombabouse à retardement, et je l'ai déposée... »

Soudain, Ophelia fronça les sourcils et arrêta d'écrire. Elle devenait folle, à écrire ainsi des aveux circonstanciés sur parchemin ! En dévoilant la complicité de Pandora, en plus ! Autant signer son arrêt de mort. Elle était convaincue de pouvoir faire confiance à Sirius, mais ne tenait pas pour autant à tenter le Détraqueur. Il suffisait que quelqu'un pique ce parchemin à Sirius... Et la Poufsouffle n'y tenait pas vraiment : elle s'empara de sa baguette magique, posée à côté de sa trousse, et avant que Sirius n'ait eu le temps de faire un geste...
▬ Incendio ! glapit-elle en visant le parchemin compromettant. Une gerbe de flammes jaillit de sa baguette, et Ophelia se félicita intérieurement de réussir si bien son sortilège. Jusqu'à se souvenir avec horreur que sa table était de bois !

Sirius n'était pas vraiment du genre à se faire du mouron pour quelqu'un, surtout si ce quelqu'un ne faisait pas partie de ses amis proches. Pourtant, c'était peu dire que Ophelia Parkin s'était mise dans une situation périlleuse en provocant Avery avec une bombabouse. Au moins était-elle au courant des risques encourus car elle hocha la tête quand Sirius laissa entendre que Avery ne manquerait pas de se venger.
Cela dit, tout ce qu'attendait le jeune Black, c'était de savoir comment elle s'y était prise. Ce pourrait être l'occasion de reproduire le méfait - à plus grande ampleur, bien entendu. Sirius imaginait déjà une montagne de bombabouses postée devant l'entrée de la salle commune des Verts et qui ne se déclencherait qu'aux passages de Serpentards les plus mauvais.

Ophelia avait commencé à lui répondre et Sirius était si impatient de connaître le fin mot de l'histoire que son cœur battait à tout rompre. Mais alors, d'un coup, elle s'arrêta d'écrire et posa sa plume pour se saisir de sa baguette. Black haussa les sourcils - avait-elle besoin d'un sort pour lui expédier le mot ?
▬ Incendio, fit-elle en visant le petit bout de parchemin.
▬ Quoi, mais qu'est-ce... NON !, cria Sirius tandis que des flammes réduisaient en miettes la réponse tant attendue. Mais tu es folle ! Qu'est-ce qui t'a pris ?!

Et ce n'était pas fini. À présent, le feu s'attaqua à la surface de la table, provoquant une épaisse fumée grise.
▬ Aguamenti, incanta Sirius en se levant de sa chaise.

Les mains serrées sur le bois de sa baguette, il envoya un puissant jet qui glissa sur la table, éteignit le début d'incendie, et éclaboussa les genoux de la Poufsouffle.
▬ Désolé, fit Patmol qui ne l'était pas vraiment, mais il fallait le faire.

Les regards étaient braqués sur eux. Qu'est-ce qui avait bien pu passer par la tête de Ophelia ? Ce qu'elle venait de faire aurait pu très mal tourner.
Puis il comprit. Forcément, une source écrite était compromettante. Pas folle, la blairelle ! Sirius saisit Ophelia par le coude et l'entraîna hors de la salle de repos, prétextant à voix haute qu'il fallait arranger sa tenue.
Dehors, il la tira encore quelques temps, jusqu'à ce qu'ils parvinssent dans un couloir vide. Ciel ! Les voilà presque en tête à tête - jamais il n'aurait cru cela !
▬ Aller, Ophelia, dis-moi comment tu as fait, s'il te plaît !

Et pour la peine, il lui fit son plus beau sourire !

Le cri de protestation de Sirius étonna Ophelia, qui ne s'attendait pas à une telle réaction. Une bonne seconde passa avant qu'elle ne réalise que la table prenait feu, mais déjà Sirius réagissait et d'un sortilège éteignait l'incendie... Avec tant d'enthousiasme qu'une salve d'eau glacée atterrit sur les genoux d'Ophelia, qui glapit de surprise et se leva d'un bond, bousculant sa chaise qui tomba par terre dans un boucan d'enfer, achevant d'attirer sur eux l'attention de toute la salle.
▬ C'est pas grave, c'est pas grave, le rassura-t-elle en secouant sa robe pour la sécher. Elle ne parvint qu'à se tremper les pieds, mais Sirius n'avait pas l'air d'y prêter grande attention. Ou peut-être que si, car il lui saisit soudainement le bras pour la traîner dehors en déclarant qu'ils allaient remédier à son humide problème. A cette idée, Ophelia rougit un peu : elle n'allait quand même pas enlever sa robe devant Sirius Black, quand même ? Allait-il la raccompagner à son dortoir ? L'idée même de se promener avec lui dans le Château n'était pas pour lui déplaire : plein de gens risquaient de les voir ensemble, et il n'en fallait pas plus pour faire naître une rumeur. Peut-être Olivia McMillan l'apprendrait-elle et serait jalouse ? Ophelia, enchantée à cette simple perspective, trouva cependant la présence d'esprit d'attraper son sac et de ramasser son devoir. Elle avait assez travaillé pour aujourd'hui !
▬ Mais tu m'emmènes où là ? s'enquit-elle quelconques secondes plus tard, en trottinant derrière Sirius qui lui tenait toujours le bras, les toilettes sont de l'autre côté... s'étonna-t-elle en tournant la tête vers l'arrière. Elle manqua de percuter de plein fouet Sirius, qui s'arrêta au beau milieu d'un couloir vide et lui enjoignit de lui raconter comment elle s'était débrouillée. Ophelia récupéra son bras et remonta la lanière de son sac sur son épaule, un peu vexée. Il ne voulait pas du tout l'aider, juste avoir des réponses !
▬ Mais pourquoi tu veux savoir tout ça, en fait ? lui demanda-t-elle, soupçonneuse mais un peu ébranlée par son beau sourire, il fallait bien le reconnaître. Il valait mieux pour elle qu'il arrête un peu de la regarder comme ça, sinon elle allait tout lui déballer !

Il y était allé un peu vite et sans user assez de subtilité. Malgré le beau sourire qu'il lui fit en lui demandant des détails sur l'affaire de la bombabouse, le visage de Ophelia perdit de son éclat.
Elle prit le temps de remettre de l'ordre dans ses vêtements, lui jetant de temps à autres des regards un peu courroucés. Sirius, lui, attendait, persuadé qu'il obtiendrait quand même ce qu'il voudrait - on parlait bien de Ophelia Parkin, celle qui était amoureuse de lui depuis qu'elle l'avait vu dans le Poudlard Express lors de son premier voyage...
▬ Mais pourquoi tu veux savoir tout ça, en fait ?, demanda-t-elle alors, un peu moins fâchée.

Sirius décida d'attaquer avec franchise, son sourire retrouvant plus d'éclat.
▬ Voyons Ophelia, tu as piégé royalement Avery, puis tu m'as fait savoir que c'était toi.
Il leva le bras et fit mine de frotter quelque chose sur le mur en pierre, juste un peu au dessus de l'épaule de la Poufsouffle. Son regard sombre suivit sa main, avant de revenir doucement vers celui d'Ophelia.
▬ Tu ne pouvais pas penser que j'en resterai là, c'est bien mal me connaître.

Peut-être qu'en lui disant cela, à elle qui collectait - il le savait - toutes les informations à son sujet, il lui ferait mordre à l'hameçon.

Ophelia plissa légèrement des yeux lorsque le sourire de Sirius s'élargit, officiellement pour paraître soupçonneuse face à l'excuse fumeuse de son cher amour, officieusement parce qu'elle était éblouie par tant de beauté et d'éclat dans une seule et même enveloppe terrestre. Comme il pouvait être beau, à cet instant ! Et c'était à elle seule qu'il souriait de la sorte ! Et lui faisait un compliment, qui plus est ! La Poufsouffle rougit et baissa les yeux, intimidée par ce compliment.
▬ Oui, c'est vrai que j'ai fait ça, minauda-t-elle en se tortillant de gêne, malgré tout fière de l'admiration qu'elle décelait dans la voix de Sirius. Ce qu'elle cessa immédiatement de faire lorsque Sirius amorça un mouvement dans sa direction. Ophelia se figea comme une statue le temps d'une seconde en suivant la trajectoire de la main du garçon, qui vint nonchalamment frôler son côté gauche pour aller se poser au-dessus de son épaule, contre le mur. Son sac glissa de son épaule et s'écrasa avec fracas sur le sol. Ophelia n'y prêta pas la moindre attention, complètement sous le choc. Contre. le. mur. Oh Merlin, Merlin, Merlin. Ophelia était coincée. Délicieusement coincée. Allait-il l'embrasser ? Ophelia déglutit à grand-peine. Oh, non, elle avait mangé quoi à midi déjà ?
▬ Je ne pensais rien du tout, répliqua-t-elle un peu trop brusquement, les yeux écarquillés. Ophelia se félicita intérieurement de son sang-froid. C'était pas mal, comme réponse. Mieux valait le contredire sur ce terrain, plutôt que de lui répondre qu'elle le connaissait très bien puisqu'elle payait Peter Pettigrew pour qu'il lui fasse un résumé de sa vie chaque jeudi en fin d'après-midi quand Sirius et James partaient pour leur entraînement de Quidditch. Elle aurait pu. Elle ne l'avait pas fait. C'était une belle victoire.
▬ Euh, tu veux savoir quoi, du coup ? s'enquit-elle en essayant de retrouver un peu de confiance. Elle rejeta coquettement ses cheveux en arrière, battit légèrement des paupières et dédia un sourire charmant à Sirius. Allez, il allait craquer !

Ça avait été automatique. Dès que Sirius avait commencé son manège de séduction, Ophelia avait été comme aimantée par lui. Il la sentit se figer un peu, retenir son souffle, son visage rond s'était empourpré. Sirius était trop fier de la parfaite maîtrise qu'il avait de lui - maîtrise qui faisait perdre la tête à la jeune Poufsouffle.
▬ Je ne pensais rien du tout, argua cette dernière à brûle pourpoint.

Soupirant, Sirius fit semblant d'être exaspéré, roulant ses yeux sombres vers le plafond.
▬ Bien-sûr, murmura-t-il. En tout cas, ça n'est pas passé inaperçu de mon côté.

Nouveau sourire ultrabright, nouveau regard doux en direction de Ophelia. Ce qu'il désirait ardemment la recette de fabrication d'une bombabouse à retardement. Et c'est alors qu'elle prononça les mots magiques, le visage rayonnant.
▬ Ce que je veux savoir, répéta Sirius, mais tout, par Merlin !

Il s'éloigna d'elle, tira sur les pans de sa chemise pour se redonner un peu de classe, et s'assit par terre, contre le mur, invitant Ophelia à faire de même.
▬ On peut prendre le temps de discuter de cela, non ?

Oh non, Sirius avait l'air énervé contre elle, pourquoi ? Parce qu'elle ne voyait pas où il voulait en venir ? Il devait la prendre pour une idiote, réalisa la Poufsouffle avec effroi. Cela n'avait rien d'étonnant, il était tellement brillant, c'était un secret pour personne à Poudlard, Sirius avait d'assez bonnes notes, et pourtant il ne travaillait pas, contrairement à Ophelia qui en bonne Poufsouffle étudiait très sérieusement, mais se maintenait simplement à un niveau moyen, voire irrégulier... Ophelia en aurait pleuré. Mais Sirius à cet instant la regardait avec tant de douceur, que l'espoir lui revint. Peut-être ne voulait-il pas d'une copine trop intelligente, après tout ? Ca se saurait, si Sirius Black en pinçait pour Lily Evans, pas vrai ? Peut-être cherchait-il juste une fille très courageuse, capable de s'attaquer à Thomas Avery devant toute l'école ? Si tel était le cas, ne venait-elle pas de prouver qu'elle était la fille dont il avait besoin ?
▬ Mais c'est une longue histoire, hésita-t-elle lorsque Sirius lui réclama toutes les informations. C'était pas tout à fait vrai, mais Ophelia essayait de gagner du temps : elle essayait à la va-vite de monter une histoire qui n'implique pas sa copine Pandora, ni le club fondé avec Janice, ni si possible les leçons de séduction dispensées par le Professeur Hoover et sa cousine Betty... Mais Sirius lui rétorqua qu'ils avaient le temps, et s'assit par terre, et tapota la place à côté de lui. De la pierre, froide. Même pas de tapis pour se réchauffer les fesses. Des murs qui suintent. Des tableaux qui les surveillaient, l'air suspicieux. Ophelia n'hésita pas une seconde : en trois enjambées, elle rejoignit Sirius et se laissa glisser à côté de lui. Elle resta un instant silencieuse, remonta ses jambes et les entoura de ses bras.
▬ Eh ben en fait tu connais Thomas Avery... Il ne m'aime pas, reconnut-elle fort humblement en guise d'introduction, je ne sais pas vraiment pourquoi, enfin je veux dire si, bien sûr, je suis de sang-mêlé, ma famille n'est pas riche, je suis chez les Poufsouffle... Enfin bref, il n'arrête pas de me faire des farces... parfois très méchantes, reconnut-elle en repensant à la fois où il lui avait envoyé une lettre en se faisant passer pour Sirius pour lui donner rendez-vous au sommet de la tour d'Astronomie. Du coup, on a monté un plan pour nous venger. Avec... une amie, choisit-elle de révéler, fort prudemment.

Il ne fallut pas beaucoup de temps à Ophelia pour se décider de rejoindre Sirius, assis contre le mur de pierre froide. Le Gryffondor lui laissa le temps de s'installer et de chercher ses mots. Il savait qu'elle cracherait le morceau - ce n'était à présent plus qu'une question de temps et il saurait se montrer patient jusque là.
C'est alors qu'elle entama son récit. Attentif, Sirius hochait la tête régulièrement, appuyant les propos de la Poufsouffle. Tiens donc, l'autre troll d'Avery n'aimait pas Ophelia ? Qui aimait-il de toute façon ? Les abrutis qui lui servaient d'amis ?
▬ Il joue de mauvaises blagues à tout le monde, commenta le jeune Black avec un regard sombre. Toujours aidé de ses potes, jamais seul. Un grand courageux, hein ?

Sirius frappa dans ses mains, applaudissant ironiquement la mauviette dont il était question. Ainsi donc, Ophelia s'était vengée de lui.
▬ C'est bien fait, dit-il avec un sourire goguenard, il le mérite amplement, pour toutes les crasses qu'il a fait et qu'il fera. Et franchement, l'idée de la bombabouse, c'était top - que dis-je - c'était du génie !

Rien de plus humiliant qu'une bombabouse qui vous explose en pleine figure devant tous les autres élèves !

Ophelia hocha de la tête lorsque Sirius lui répondit que de toute façon, Avery embêtait toute l'école. Et elle hocha un peu plus franchement la tête lorsqu'il le traita de lâche : ah ça oui, alors ! Même elle, Poufsouffle de son état, avait plus de bravoure que lui alors qu'elle était plus jeune... C'est dire !
▬ Du génie tu trouves ? s'enquit-elle avec espoir quand Sirius la félicita pour son idée. C'est vrai qu'on a beaucoup réfléchi, avec Pand... mon amie, se reprit-elle au dernier moment avant de jeter un regard alarmé à Sirius. Zut, elle avait dû se griller ! Bon, fichue pour fichue, après tout, autant être honnête jusqu'au bout : l'idée vient de moi, mais c'est ma copine qui a mis au point la Bombabouse. Je ne suis pas super-bonne en sortilèges... reconnut-elle avec une moue vaguement désolée. C'était un euphémisme que de le dire, Ophelia avait visiblement le don de désespérer le tout petit Professeur Flitwick. Mais elle ne faisait pas exprès !
▬ En attendant, j'ai pensé à une farce à laquelle même les Maraudeurs n'avaient jamais pensé ! s'exclama-t-elle finalement avec un rire joyeux. si ça, c'était pas la preuve qu'elle avait sa place dans la vie et dans le coeur de Sirius, alors décidément elle n'y comprenait rien de rien !

Il était sérieux quand il disait que l'idée de la bombabouse relevait du génie. C'était tellement génial que ni lui ni James n'en avait eu l'idée. Alors qu'une bombabouse à retardement, c'était la possibilité de faire de nombreuses bêtises, sans être gaulés.
▬ Tu parles de Pandora ?, réagit Sirius en se tournant vers la Poufsouffle, tout émoustillé à l'idée de bientôt connaître le sortilège. Mais, euh... Il faut bien un cerveau pour imaginer et des bras pour faire, hein.

Sirius avait saisi la lueur de panique qui avait brillé dans les yeux de Ophelia quand il avait deviné pour Pandora et il tenait un peu à la rassurer. Un peu.
▬ En attendant, j'ai pensé à une farce à laquelle même les Maraudeurs n'avaient jamais pensé !

Le Gryffonfor se mit à rire sans retenue.
▬ Ahah, pourquoi crois-tu que je parle de génie !

Il retrouva cependant son sérieux et, frottant ses mains pour les débarrasser de la poussière du sol, il demanda à sa camarade :
▬ Avery ne te cherche pas trop depuis, du coup ?