Ce n'était pas parce que sa matière n'était qu'optionnelle que Soyle ne travaillait pas autant que les autres enseignants. Non parce que c'était quelque chose qu'elle avait déjà entendu. Ce qui avait le don de l'agacer d'ailleurs. Non mais oh, pour qui ils pouvaient bien la prendre avec de tels arguments. Sa matière n'était déjà pas celle qui passionnait le plus ! Oui, elle était assez lucide sur le sujet. Du coup, il lui fallait se donner un minimum de mal pour essayer de réveiller un peu d'intérêt chez ses étudiants. Ce qui n'était pas gagné tout de même. Alors il lui arrivait de travailler assez tard. Régulièrement. Y compris après le dîner. Mais elle ne s'en plaignait pas, loin de là. Non, elle aimait son travail. Toutes les facettes de son travail.

Soyle Hoover était encore dans son bureau ce soir-là. Les cours étaient finis mais elle terminait une préparation, histoire de ne pas avoir à trop se presser avant ce cours. Une théière déjà à moitié vide sur un coin du bureau et une tasse en main, elle grattait son parchemin de sa plume, concentrée, les sourcils froncés, si bien que les coups donnés à sa porte la firent légèrement sursauter. Un filet de thé brûlant coule le long de la tasse sur sa main le temps qu'elle la pose. Une légère grimace dans un souffle et c'est passé. Intriguée, elle va ouvrir. C'était un élève ! A cette heure ! Et même pas un des siens ! Un serdaigle de septième année qui se présentait à elle à cette heure... étrange... mais pas désagréable. Alors elle lui accorde un sourire une fois sa surprise passée.

-Mr Abbot, vous me cherchiez ?

Puis dans un léger mouvement elle s'écarte légèrement de la porte, lui laissant entrevoir l'intérieur du bureau. Une petite pièce assez mal éclairée à cette heure mais tout à fait charmante. Bien rangée, des livres sur presque tous les murs, une odeur de thé flottant dans la pièce, un thé de Ceylan pour ce soir.

-Vous voulez peut-être entrer une minute ? J'ai encore un peu de thé chaud si vous voulez.  

La porte s’ouvrit et Darius, de même que la professeure, fut surpris de la voir. Il se racla la gorge et se gratta l’arrière du crâne comme lorsqu’il était gêné. « Oui, enfin je… Enfin, bonsoir miss Hoover, en fait je… Olala, c’était une catastrophe ! Le Serdaigle était tellement surpris qu’elle ai ouvert aussi vite qu’il en perdait tous ses mots. Il s’arrêta de parler un instant avant de reprendre, tentant de reprendre son sang-froid. J’avais quelques questions à vous poser à propos des moldus, professeur. Darius s’était toujours étonné à quel point les enseignants de cet établissement retenaient les noms et prénoms de chaque élève scolarisé à Poudlard, quand-bien même ils ne les avaient pas tous dans leur classe. La rousse l’invita finalement à rentrer, il n’allait pas refuser ! Avec plaisir, professeur. » Alors qu’elle se dégageait de l’entrée pour le laisser passer, l’étudiant franchit le pas de la porte en observant méticuleusement cette salle dans laquelle il n’avait jamais eu cours. L’étude des moldus devait être très passionnant, et cette pensée n’aurait certainement pas plu à ses anciens compères du cercle des Sang-Purs au temps où il les fréquentait encore.

Il n’était finalement pas si rare qu’un étudiant cherche à voir un professeur en dehors des cours. Ils avaient souvent besoin de précisions, de répondre à des questions, parfois juste d’être rassurés sur un devoir. Cela pouvait aussi arriver. Et il était du devoir d’un enseignant de savoir calmer certaines angoisses. Cela dit, rencontrer un étudiant qui n’assistait pas aux cours du professeur qu’il cherchait, c’était déjà plus rare. Soyle donnait déjà des cours un peu plus particuliers à Gardenia, cette dernière s’intéressant de très près à sa matière sans avoir pu la prendre. Elles se retrouvaient donc pour parler moldus et innovations technologiques autour d’une tasse de thé. Mais avec le jeune Abbot, ils n’avaient pas même tellement pris contact. Elle le connaissait de nom, l’avait déjà vu de loin plusieurs fois. Ils s’étaient parfois salué. Mais rien de bien plus sérieux. Soyle était donc assez surprise de le voir à sa porte.

-Oui, enfin je… Enfin, bonsoir miss Hoover, en fait je…

Ouhlà, il ne s’attendait peut-être même pas à la trouver dans son bureau en fait. Ou peut-être était-il venu sans réel but? Cela serait étrange. Il ne s’était sans doute pas perdu non plus. Depuis le temps qu’il était là, il devait connaitre tout de même…

-Tout va bien, vous vouliez me demander quelques chose?

Son beau sourire doux aux lèvres et d’une patience d’ange, elle attendait qu’il ne lui confie l’objet de sa visite.

-J’avais quelques questions à vous poser à propos des moldus, professeur.

Bon, jusque-là c’était son domaine effectivement. Soyle était toujours contente de voir que sa matière pouvait susciter un certain intérêt, même tardif chez certains. Elle faisait donc le plus possible attention de bien répondre aux attente de ces trop rares étudiants curieux.

-Ah dans ce cas c’est bien à moi de vous répondre.

Elle l’avait ensuite gentiment invité à rentrer et à prendre un thé en sa compagnie. Tant qu’à faire, ce n’était pas comme si elle n’en avait pas déjà de prêt sur son bureau. La rouquine ferma la porte derrière son élève d’un soir avant d’aller chercher une seconde tasse. Une fois le service fait, elle s’installe en face de lui, pousse un peu ses papiers pour ne se consacrer durant les prochaines minutes qu’à lui.

-Alors, en quoi puis-je vous éclairer?

Tu t’installas à la table du professeur après qu’elle t’ait invité et la regardas pousser ses affaires pour se préoccuper de toi. Tu ne voulais pas lui prendre trop de son temps, après tout tu la dérangeais un peu pendant la correction de ses copies ou pendant la préparation de ses cours qui allaient arriver. Il faut dire que tu avais un tel respect pour le corps enseignant que tu ne voulais pas te mettre dans leurs pattes, sans te rendre compte que ça leur faisait du bien d’avoir un élève comme toi, intéressant, intéressé et curieux de tout. Ce n’était pas tous les jours que Soyle Hoover avait une visite semblable à la tienne. Il y avait bien sûr ton amie Gardenia qui prenait des cours privés avec elle parce que cette matière l’intéressait, mais tu n’avais pas eu le temps de faire de même. Tu étais assez occupé avec tous les domaines qui avaient ton intérêt.
Tu te raclas la gorge avant de faire court et concis.
« Alors voilà, la question m’est venue après un match de Quidditch. Vous le savez, les sorciers se déplacent soit par le biais du transplanage, soit par le Magicobus, soit par les tapis volants dans les sociétés orientales, ou bien par le balais comme ici. Comme toujours, tu t’emballais beaucoup trop lorsque quelque chose te passionnait et commençait à énumérer tout ce que tu savais. Tu n’étais plus capable de t’arrêter. J’ai une fois lu dans un manuel d’Étude des Moldus que ces derniers se déplaçaient avec d’autres moyens de transport. Il y avait, si ma mémoire est bonne, des voitures, des avions, des hélicoptères… J’ai vu des images, mais je dois vous avouer que, sans magie, je ne vois pas bien comment ces engins fonctionnent. Si vous pouviez me l’expliquer… » Tes yeux brillaient comme avides d’en savoir plus et ton cerveau fonctionnait déjà à toute allure pour retenir tout ce que miss Hoover allait te dire dans les minutes qui allaient suivre.

L’odeur ronde et légèrement fumée du thé flottait dans la pièce alors que son jeune élève prenait place devant son bureau. Une tasse fumante lui fut rapidement tendue dans un sourire. Soyle aimait les gens, elle appréciait avoir des contacts humains,peu importait lesquels. Elle se faisait donc un plaisir de répondre aux questions même tardives des élèves de cette école. Après tout, c’était là encore pleinement son rôle de professeur. Le thé n’était qu’un petit bonus qu’elle accordait bien facilement.

Il avait l’air un peu nerveux ce jeune homme. Mais Soyle faisait de son mieux pour être la plus accueillante possible. Elle ne pressait rien, souriait sagement et essayait de le mettre à l’aise. Il venait de lui-même à sa rencontre, il serait dommage qu’il ne se sente pas à l’aise pour poser ses questions. Finalement, il semble avoir trouvé ses mots, se raclant la gorge. Soyle prend donc une gorgé de thé en attendant d’en savoir plus.

-Alors voilà, la question m’est venue après un match de Quidditch. Vous le savez, les sorciers se déplacent soit par le biais du transplanage, soit par le Magicobus, soit par les tapis volants dans les sociétés orientales, ou bien par le balais comme ici.

Il parlait rapidement, mais elle voyait déjà un peu mieux où se trouvait son interrogation. Pour elle c’était évident, elle avait grandi dans les deux mondes. Mais il faisait sans doute partie de ces jeunes sorciers qui n’avaient que très rarement pris le temps d’aller voir les moldus. Et donc à en savoir très peu sur leurs habitudes…

-J’ai une fois lu dans un manuel d’Étude des Moldus que ces derniers se déplaçaient avec d’autres moyens de transport. Il y avait, si ma mémoire est bonne, des voitures, des avions, des hélicoptères… J’ai vu des images, mais je dois vous avouer que, sans magie, je ne vois pas bien comment ces engins fonctionnent. Si vous pouviez me l’expliquer…

Ah. Question technique tout de même. Elle n’allait sans doute pas elle-même lui explique toutes les techniques d’ingénierie de ces engins. Après tout elle en savait elle-même assez peu dans le détail. Mais elle ferait de son mieux pour tenter de lui expliquer un fonctionnement global… très global…

-Les moldus n’ont en effet pas de magie à leur disposition, ils ont du s’adapter avec leurs astuces à eux. En s’appuyant sur les découvertes physiques ils peuvent se servir de façon très satisfaisante de systèmes mécaniques pour se déplacer ou bien d’autres choses.

S’arrêtant quelques instants, elle finit par se lever pour aller vers une de ses bibliothèques. Elle en sort parfois un livre puis le remet, cherchant le plus efficacement possible. Soyle finit par trouver ce qu’elle cherche. C’était un livre moldu sur les nouveautés automobiles. Soyle ne comprenait certes pas tout, mais c’était bien pratique pour expliquer ce genre de choses… Pour causes, il était illustré. Ouvrant donc sur une page avec une coupe d’un moteur, elle le tend à son jeune élève.

-Vous avez ici le moteur d’une voiture. C’est cette partie qui va créer une énergie qui va permettre d’entrainer un mouvement de toute la structure. L’énergie produite dans ce moteur entraine une rotation, c’est une transformation d’énergie. La rotation entraine les roues et la voiture avance. En fait, les calèches de l’école fonctionnent par le même procédé, ou presque. C’est l’énergie des sombrals qui entraine le tout. Les moldus ont trouvé un autre moyen de produire cette énergie.

Tu étais conscient de lui poser une question assez difficile qui demandait beaucoup de connaissances dans un domaine précis. Les professeurs n’étaient pas non plus des encyclopédies comme tu pouvais l’être, mais ils possédaient certaines connaissances que tu n’avais pas encore. Tout était bon à prendre, c’était l’un de tes dictons favoris. Après tout, vous n’aviez qu’une vie alors il valait mieux en profiter selon les objectifs qu’on se fixait. Pour certains, c’était vivre pleinement des plaisirs charnels, des fêtes et des déboires, pour d’autres c’était le travail, rien que le travail, d’autres encore, la famille, les amis… Et toi, c’était apprendre. Même ce qui ne semblait pas important aux yeux de certains. Tu t’étais fait des priorités, tu avais fait tes choix. C’était le plus important.
La mécanique. Oui, tu voyais ce que c’était. Dans leur monde par exemple, les horloges fonctionnaient bien grâce à des rouages eux-mêmes actionnés par la magie. Chez les moldus, ça devait être pareil… Mais sans magie du coup. Miss Hoover se leva pour prendre un livre dans son immense bibliothèque remplie d’œuvres très intéressantes et retourna auprès de toi lorsqu’elle obtint ce qu’elle cherchait pour l’ouvrir à la bonne page avant de le tourner vers toi.
C’était un schéma instructif sur un moteur et elle t’expliqua rapidement son fonctionnement pour enfin le comparer à la manière dont fonctionnaient les calèches de l’école. Tu fis vite le lien et une seconde idée germa dans ton esprit. Cette énergie, tu l’avais déjà lue quelque part. Elle avait un nom précis mais tu ne t’en souvenais pas bien…
« Ah ! t’écrias-tu soudain, cette énergie qu’ils utilisent c’est… Attendez. L’essence, c’est ça ? Qui est elle-même tirée du… Par Merlin. Pé… Pé… Pétrole ! Il me semble que c’est ça, mais dîtes-moi si je me trompe. »
Mais une petite voix en toi te disait que non, tu ne te trompais pas. Toujours suivre son instinct.  

Tu sentis un soulagement qui te permit de respirer à nouveau. Même si tu admettais toujours tes torts et tes faiblesses et tu que tu t’avouais vaincu lorsque tu te trompais, tu ne te sentais pas très bien dans ces situations. Certainement cette pression que tu te mettais à vouloir tout savoir. Mais heureusement pour toi, Merlin t’avait doté d’une très bonne mémoire et d’un cerveau d’une bonne taille raisonnable qui faisait que tu étais incollable sur pratiquement tout. Sciences, botanique, politique, histoire, potion, philosophie, musique et compositeurs, Quidditch… Mais le domaine moldu était celui qui renfermait le plus de mystère à tes yeux, certainement parce qu’ils ne vivaient pas comme toi et qu’ils avaient un fonctionnement totalement différent. Raison pour laquelle tu étais venu te renseigner auprès de Miss Hoover. Tu te grattas la tête en riant, un peu gêné.
— Disons que plus j’avance dans mes connaissances, plus certains détails deviennent apparents alors… Je souhaite lever le mystère sur tout ce que je ne connais pas.
C’était un peu bidon comme réponse, mais tu n’avais pas trouvé mieux. Tu repris alors, un peu paniqué.
— J’espère que ce n’était pas une question trop technique… Je ne me rends pas bien compte parfois.