Ciel quelle journée! Cette heure, maudite entre toutes s'étirait, se prolongeait à l'infini et Minerva, impuissante face au cours inéluctable des choses s'efforçait de se composer une mine appropriée. Rien y faisait, Minerva Moon n'aimait pas les leçons d'histoire de la magie; d'ailleurs, qui pourrait s'y intéresser ?! Comment ne pas se laisser aller à une somnolence, ouvrir grand sa bouche et bailler aux corneilles ? La Serpentarde s'ennuyait ferme, rien à faire, ce cours, cet enseignant lui faisaient une piètre impression et s'il n'y avait eu les pitreries de certains nul doute qu'elle aurait sombré joue la première contre son livre. Au lieu de cela, admirable de stoïcisme, elle s'efforçait de garder la tête haute, le regard et l'esprit clairs et cette mine impassible qu'elle affichait depuis cinq ans déjà. Ah qu'elle regrettait les vacances d'été, les glorieuses heures à flâner dans les rues romantiques de Paris, les longues journées, écrasée de fatigue et de langueur sous un soleil brûlant...

Binns... Son regard mort, absent, sa verve de croque mort, sa voix monotone et cet entrain glacé qu'il mettait à leur dicter les leçons. Et puis cette météo, y a-t-il seulement un qualificatif adapté, né pour décrire tout l'ennui qu'il provoque, toute la gêne qu'il occasionne ? Non, il n'y a pas un seul mot, c'est impossible. Serdaigle! Oui, les voilà réduits à partager leur salle commune avec les Serpentards. Quel malheur! Miss Moon ne supportait plus l'ambiance malsaine, plombée par la mauvaise humeur des uns et des autres.

Dans un coin de la salle son amie, sa chère Sura ne semblait pas plus enthousiasmée par le professeur Binns. A cet instant Minerva fit un effort si grand pour cacher son ennui qu'elle se promit dans un coin de sa tête de s'offrir une bien belle pause. Oui, elle pouvait bien s'accorder un bon moment après un tel obstacle! Tic, Tac, Tic, Tac, Tic, Tac...

* Enfin! Il était temps * pensa Minerva, soulagée de s'extirper de cette salle de torture.

Son emploi du temps était tel qu'il lui restait une petite heure avant son prochain cours. Oui, une petite heure qu'elle saurait mettre à profit. S'éclipsant avant de se faire happer par un groupe de Serpentards, Minerva Se dirigea vers la salle de repos récemment crée dans un but... Certes. Si but il y avait elle n'était pas certaine d'en deviner les contours, mais la demoiselle souhaitait plus que tout à cette minute précise décharger ses pensées d'un fardeau dont elle se serait bien passée. Hâtant le pas Minerva trouva son chemin en quelques minutes et ne croisa quasiment personne au cours de son errance.

- Personne! C'est parfait , s'écria Miss Moon en français lorsqu'elle balaya d'un rapide coup d'oeil la salle. Personne pour l'ennuyer, pas le moindre Serpentard désireux de faire la conversation, aucun maraudeur en quête de victime; rien, rien de plus que la délicieuse beauté du silence. Violet, réservé aux intimes, se laissa tomber sur un fauteuil en s'emparant du premier livre à portée de sa main.

Minerva goûtait avec une intense satisfaction la solitude de cette pièce. Pour une fois la jeune anglaise était seule, bel et bien seule et pouvait se laisser aller à sa réelle nature sans craindre de ruiner tous les efforts, tous les sacrifices, toutes les peines, les couleuvres subies, avalées et digérées depuis son entrée à Poudlard. Elle s'était laissée choir sur un des fauteuils, avachie dans une posture sans gêne, ses longues jambes croisées et feuilletait d'un air distrait un bouquin oublié par quelque imprudent. Le livre n'avait rien de sorcier, au contraire il était tout ce qu'il y avait de plus moldu. Bien entendu une Moon n'était pas censée porter un quelconque intérêt à pareille littérature, mais Violet adorait lire et les ouvrages moldus aiguisaient ses méninges, lui procuraient un sentiment de liberté tel qu'elle ne pouvait se passer de cette lecture. Cela ne faisait que la conforter un peu plus dans son sentiment car au travers de ces pages interdites elle se reconnaissait dans les sentiments mitigés de l'héroïne, se trouvait des points communs, des divergences, adhérait aux idées ou au contraire les détestait, riait, pleurait avec ses personnages favoris et suivait leurs tribulations avec autant de frénésie qu'il lui était salvateur, nécessaire de s'aérer l'esprit. Ainsi, par pur hasard, voilà se retrouvait-elle seule à goûter le calme de la salle de repos, avachie dans un fauteuil et un livre, ' Pride and Prejudice ' de Jane Austen en main.

Il ne manquait plus qu'un petit air à la française et le paradis serait à portée de main. Avec le bal qui approchait, ce n'était désormais plus qu'une question d'heures cette école s'avérait impossible, décidément imbuvable. Minerva aimait certes valser aux bras de beaux garçons, mais pas un représentant de la gente masculine ne s'était proposé à l'inviter, et bien qu'elle ai un costume à faire pâlir d'envie un daltonien, la demoiselle ne s'en plaignait pas. Certainement son manque de chaleur légendaire en rebutait plus d'un d'autant plus que l'adolescente affichait rarement un air ravi. Et puis un bal sans accordéon... Non, décidément, Violet préférait le charme d'un bal improvisé au pied d'une cathédrale que cette grande soirée où chacun se devait d'être éblouissant. Probablement qu'elle n'irait pas ce soir...

Et puis vint le moment fatidique, les douze coups de minuit sonnent et la magie est rompue. Sa douce solitude n'était plus car une autre fille s'approchait d'elle, tous sourires avec visiblement la ferme intention de converser. Machinalement Minerva se redressa, adopta une position plus digne de son rang et reposa le livre d'un geste sec. Lorsqu'elle croisa le regard de l'autre son visage se glaça. Lily Evans... Pas de chance songea Minerva.

-Salut, je m'appelle Lily, Lily Evans. Je ne sais pas si tu me connais. Tu t'appelle bien Minerva ?

Lily Evans, la petite préférée de Slughorn. Bien sur qu'elle la connaissait, en tout cas de nom. Car Lily Evans était une née moldue, et les nés moldus ne sont pas des individus à qui s'adresser. Cette fois le contexte était différent. Les deux rouquines étaient seules sans personne pour juger Minerva et s'il n'y avait pas de risque à se montrer buvable, elle n'était pas certaine non plus de pouvoir se montrer sympathique. Sait-on jamais, cette Lily Evans pourrait en parler à ses petites copines et ruiner tous les beaux efforts de Minerva. Pourtant, à première vue, la Gryffondor lui paraissait plutôt sympa, pas du tout le genre de filles avec qui elle traînait.

- Oui, Minerva Moon répondit l'adolescente d'un ton neutre avant d'ajouter de la même voix , Je sais, tu es Lily Evans.

Lily Evans ou la proie favorite de James Potter, un des Maraudeurs. En y pensant Minerva se prit à laisser ses pensées vagabonder du côté des quatre garçons en se demandant ce qu'il pouvaient bien faire à cet instant, et surtout s'ils étaient dans les parages, auquel cas elle préférait se faire toute petite et éviter tout conflit. Minerva n'était pas en bons termes avec tous les membres.

- Tu fuis Potter ? Si c'est le cas je ne n'ai pas vu dans les parages, ni aucun de ses acolytes d'ailleurs, finit-elle par dire d'une voix plus chaleureuse, moins froide que la soupe qu'elle servait habituellement à tous les élèves non sang-pur, autrement dit les trois quart de l'école.

Avec la salle de repos vous n'êtes jamais certain de rencontrer la bonne personne. Minerva ne comptait plus les fois où elle avait déserté la salle à la vue seule d'un visage un peu trop familier à son goût, et dans ce cas, rien ne remplaçait la compagnie de certains Serpentards qui à défaut de lui apporter un peu de joie présentaient l'avantage certain d'être silencieux. Mais ce jour-là le hasard fit bien les choses car la salle, du moins dans les première minutes, fut vide. La fortune avait amené à se croiser deux jeunes filles différentes en bien des points, deux êtres qui en toute logique appartenaient à des mondes si différents qu'il est impossible qu'elles partagent la moindre chose hormis leur chevelure rousse. Minerva Moon avait les yeux bleus et ceux de Lily Evans étaient vert. Voilà une des nombreuses différences. Pour tout dire les adolescentes ne se connaissaient pas si bien que ça, et même pour être honnête, hormis leur nom de famille et les rumeurs les plus courantes à leur sujet il n'y avait rien de plus à ajouter.

Malgré l'évidence de leur seule présence Minerva restait aux aguets, persuadée d'être à la merci d'un vent de malchance car pour rien au monde personne ne devait savoir qu'une Moon peut se montrer supportable avec une née moldue. La sorcière bornait sa bonne volonté à un léger réchauffement de sa voix sans pour autant s'accorder l'ombre d'un sourire car Lily Evans avait beau lui faire une bonne impression elle n'en demeurait pas moins une inconnue. Méfiance toujours songea Minerva en prêtant une oreille à la Gryffondor.

-Je me demande pourquoi tu connais mon nom. Je ne suis pas très populaire dans ce collège.

Minerva ne répondit pas mais s'octroya un sourire en demi teinte à la fois ironique et amusé. Si la Gryffondor souhaitait conserver l'anonymat ce n'était certainement pas dans les projets immédiats de James Potter qui la courtisait inlassablement. C'était plutôt drôle à voir d'ailleurs avec quelle obstination le poursuiveur des Gryffondor encaissait refus après refus. Un grand moment de rire à coup sur!


-Non pas tout a fait. En fait c'est vrai que je ne m'entend pas beaucoup avec Potter et Black. Mais avec rémus je m'entends plutôt bien. Il est moins vaniteux qu'eux.

Black. Un voile ombra son regard clair qui exprimait tout sauf la sympathie. A ce stade son inimitié avec Sirius Black était de notoriété publique. Le garçon ne l'appréciait pas et il en allait de même pour elle à la différence près qu'elle ne s'acharnait pas à essayer de lui pourrir la vie. A nom Minerva fit une moue dédaigneuse comme un enfant qui s'écœure d'un mets inconnu. Quand à Potter elle avait à son égard des sentiments plus mitigés qui oscillaient avec son humeur du jour. Lupin, certainement un garçon fréquentable de ce qu'elle avait pu observer mais qu'elle n'avait jamais eu l'occasion de rencontrer, du moins avec qui échanger quelques mots sans que cela ne tourne au vinaigre.

- Vaniteux ?! Le hasard fait parfois bien les choses, car si Minerva avait eu le malheur de boire un quelconque liquide à cet instant, nul doute qu'elle se serait étouffée d'indignation tant le terme lui paraissait faible, tellement en deçà de la réalité! La jeune sorcière s'était exprimée avec cette même moue de dédain qu'elle agrémenta d'un ton caustique cette fois. Potter ne sait plus quoi inventer pour attirer ton attention, quant à Black, il n'a même pas l'excuse d'être soumis à ses hormones pour se comporter comme le dernier des imbéciles.


-En tous cas merci de l'information. Je prends cela bien que tu m'informe de cela.

La Serpentarde se contenta de hausser les épaules puis détourna son attention de la Gryffondor le temps de sortir de son sac de cours son plus précieux trésor. Ils étaient là, à les voir elle s'imaginait sans mal les grenouilles chocolatées trépigner d'impatience à l'idée de finir dans son estomac. Non, elle n'était pas une fille cruelle, elle ne laisserait pas les chocogrenouilles s'impatienter un peu plus. Ouvrant le sachet neuf, Minerva plongea sa fine main blanche et en saisit une qu'elle mordit à pleines dents et engloutit sans prendre la peine de mâcher correctement. Puis une seconde qu'elle mangea normalement avant de tendre le paquet à la Gryffondor.

Les chocogrenouilles, une des inventions gustatives les plus brillantes! Comme des générations de sorciers l'adolescente s'en délectait, en mangeait jusqu'à l'overdose et collectionnait les cartes représentant de célèbres sorciers de son temps et de lointaines époques. Naturellement un paquet de chocogrenouilles tendu peut être prit pour un signe d'amitié, mais de sa part ce n'était que de la politesse, rien de symbolique dans ce geste. Elle en aurait proposé à n'importe qui d'autre, enfin, presque.

-Il sais plus quoi inventer c'est vrai mais il ose toute même draguer des filles devant moi.

Ah James Potter... Avec Black ils formaient un duo infernal, deux bourreaux des cœurs! Seulement Potter ne désespérait pas d'ajouter Lily Evans à son tableau de chasse et la Gryffondor résistait avec un acharnement tout aussi pugnace. Quel idiot pensa Minerva, le comportement de ce pauvre correspondait exactement à tout ce qu'il ne fallait pas faire. Cependant les nombreux refus de Lily Evans alimentaient les commentaires de Poudlard et sans se hisser au niveau de Bertha Jorkins Moon n'était pas insensible aux commérages. L'adolescente leva les yeux au ciel d'un air exaspéré, amusé aussi car il fallait bien l'avouer, elle n'était pas à sa manière insensible au charme du Gryffondor. Il la faisait rire lorsque ses farces n'étaient pas trop méchantes.

- Soit disant, il est attirée par moi, je dis bien soit disant mais pour lui je ne suis qu'un défi, je le rembare mais il persiste pour la simple raison qu'il n'aime pas quand des filles lui resistent mais bon.

Drôle de conversation. Minerva ne pouvait en dire autant, elle n'était pas autant courtisée qu'Evans, sa froideur n'avait rien d'engageant mais elle comprenait parfaitement le paradoxe de ce comportement. Parfois les garçons sont de véritables corniauds avec un pois chiche à la place du cerveau se dit la Serpentarde. Elle avala sa chocogrenouille puis répondit à la Gryffondor :

- Surtout ne t'arrêtes pas, c'est très drôle à voir. Elle avait dit cela avec un sourire moqueur. C'eût été mentir de prétendre le contraire, voir James Potter, le Casanova de service se faire rembarrer comme le premier des puceaux avait de quoi vous décrocher un sourire, au minimum.

- Ce serait peut être mieu de changer de sujet...Potter n'est pas des plus interessant...

- Foui , articula difficilement Minerva, la bouche pleine d'une nouvelle friandise chocolatée, puis la chogrenouille avalée, elle rajouta : - Les garçons sont parfois bizarres. Si ça se trouve c'est un moyen grossier de te faire comprendre que tu comptes plus qu'il ne le laisse paraître... L'adolescente se permit un sourire, fière de sa trouvaille, c'était peut-être ça la raison de cet acharnement. - Ou alors c'est juste un troll amélioré conlut Minerva.

-Merci.

- De rien, répondit sobrement Minerva.

Lily, comment dire... Si je jure sur tous les dieux de l'informatique et du Rp de répondre la prochaine fois plus rapidement et de me faire offrir à Noël une mémoire, tu me crois ?!

A vrai dire Minerva Moon, celle qui fricote avec de futurs Mangemorts commençait à apprécier la tournure que prenait cette conversation avec Lily Evans, cette même Evans qui finira tuée par Lord Voldemort dans quelques années, mais ça à cette période de leur existence aucune des deux le soupçonnait. Des rumeurs à Serpentard circulaient sur le compte de cette " sang-de-bourbe", rien de très beau à entendre, et bien que la Serpentarde ne soit pas du genre à croire les mauvaises langues, elle ne pouvait s'empêcher d'être agréablement surprise par cette rencontre inopinée. Peu importe leur naissance, leur différence d'âge ou encore leurs maisons respectives, les garçons, le jeu de séduction, l'amour idéalisé ou plus terre à terre sont autant de sujets qui n'en forment qu'un seul et réunissent toutes les adolescentes. Minerva et Lily n'échappaient pas à cette règle de bon sens.


-C'est vrai que les garçons sont bien compliqués mais nous sommes compliquées pour eux aussi apparement...

Les garçons, bien compliqués... Minerva se laisse la liberté d'un rire moqueur en songeant aux priorités de ces chers garçons. Non, elle doutait, en tout cas pour les sujets d'étude que faisaient Potter et Black que leur fonctionnement amoureux soit bien compliqué. La remarque de Miss Evans la ramena à sa propre situation, du reste plutôt délicate à son goût. Il y avait bien un certain Drew Johansson de deux ans son aîné pour qui elle reconnaissait volontiers éprouver une indéniable attirance physique mais après ? Cette question occupait son esprit à ses heures perdues. Ami proche mais mal réparti selon les Serpentards, Johansson avait le sang pur ce qui lui facilitait la tâche, mais leur relation amicale souffrait des fréquentations douteuses de Minerva.

-Je te gènes pas en te racontant la moitié de ma vie ? J'exagére peut être un peu mais bon...

Lily Evans semblait gênée de sa propre question, certainement la réputation peu engageante de Minerva agissait et ce blason de vert et d'argent achevait de troubler la Gryffondor. Jamais Minerva ne lui aurait accordé une seconde d'attention si un élève ou une élève de son cercle d'amis se trouvait dans les parages, mais leur intimité, née d'un hasard, favorisait cet échange. Miss Moon aurait volontiers poursuivit la conversation mais elle ne pouvait se permettre de donner des signes trop encourageants à Lily.

- Tant que tu ne cries pas sur tous les toîts qu'on a débattu de questions existentielles en mangeant des sucreries tu ne me gênes pas répondit Minerva à sa manière, douce et sans prétention. Elle ne doutait pas de l'intelligence de la Gryffondor, certainement comprendrait-elle les raisons qui la poussaient à tant de discrétion.

- Compliqué c'est vite dit... En fait quand ils sont seuls ils ont un cerveau mais avec leurs amis c'est une catastrophe. De toute façon on ne peut pas porter un jugement général en se basant sur Potter et Black, ces deux-là sont... Les mots lui manquaient pour décrire les manières drôles mais souvent ridicules des deux garçons, du moins était-ce drôle venant de Potter, mais Black il suffisait qu'elle prononce son nom pour comprendre le peu d'amitié qu'elle lui portait. Ils font la paire.