Emely resta silencieuse, le regard perdu dans une lame de plancher. C'était la première fois qu'elle voyait Jeremiah dans cet état. Elle sentait dans sa voix qu'il souffrait de cette situation. Les frères, qui apparaissaient ou réapparaissaient comme ça, du jour au lendemain, ça chamboulait tout un monde.
La vampire écoutait, sans broncher, retenant même sa respiration lorsque le jeune homme parlait. Elle se contentait juste de caresser doucement la pointe de son épaule droite, comme pour le calmer, comme une mère calmerait son enfant ou... comme une épouse épaulerait son mari.
« Mais ça n'est pas le pire dans l'histoire », finit-par dire Jeremiah, laissant en suspend la fin de sa phrase.
Emely, pour lui montrer qu'elle était là, qu'elle écoutait, lui déposa un baiser sur l'épaule gauche. Puis elle lui demanda :
« Qu'est-ce-qui est le pire, mon ange ? »
Elle n'était pas curieuse, elle ne voulait pas connaître tous les petits secrets de son amant, les choses tordues de la famille Orwell. Elle n'était pas du genre à se servir de ce qu'on lui disait pour alimenter les conversations de ses clients qui se saoulaient au comptoir. Et ça, Jeremiah le savait, il savait qu'il pouvait tout lui dire.

Lorsque Jeremiah se détacha d'elle, Emely ne chercha pas à le retenir. Elle se contenta de le regarder en balançant ses pieds dans le vide. Il semblait vraiment chamboulé par ses histoires de famille et la vampire se sentait bien impuissante face à tout cela. Alors elle garda le silence, jusqu'à ce que celui-ci soit brisé par Jeremiah.
« Mais bien sûr, il a fallu que ce frère soit un loup-garou ! »
A ces mots, Emely frissonna. Les vampires et les loups-garou, toute une histoire. Ainsi, la suceuse de sang n'avait jamais pu encadrer ces bêtes de poil. L'odeur, peut être. Ou les puces qu'ils trimbalaient sur leurs vêtements à longueur de temps. Non, ça devait être tout simplement l'effet qu'ils lui faisaient. Entre dégoût et bestialité. Oui, près d'eux, Emely reprenait sa vraie nature de vampire. Il n'y en avait eu qu'un, peut être... Mais Jeremiah poursuivit.
« Un putain de loup-garou à moitié dingue à la solde de Greyback, qui plus est, qui... »
Emely n'entendit pas la suite. Lorsque son amant prononça le nom de Greyback, la vampire se figea, retenant son souffle. Quand on parlait du loup...
« Fenrir n'est pas... commença Emely à voix basse.
— Je t'embête avec mes histoires, la coupa Jeremiah. N'aurais-tu pas vu ma chemise ? »
Emely baissa la tête, elle n'en dirait pas plus. Elle sauta à terre et récupéra la chemise et le pull de Jeremiah sur lesquels elle s'était assise. Elle lui tendit en s'approchant doucement de lui. Puis elle le regarda enfiler ses affaires en enfonçant les mains dans les poches de son jean. Lorsqu'il eut terminé, elle osa un pas dans sa direction et déposa sa main sur la hanche du jeune homme. Elle leva les yeux vers lui et lui sourit tendrement.
« Rentre bien... » lui dit-elle en lui déposant un baiser sur les lèvres.