Son attente ne fut pas longue, et il accrocha un large sourire à son visage encore marqué par la dernière pleine lune. Mais la voir si rayonnante lui faisait oublié qu'il avait la encore la tête que quelqu'un qui sortait d'une mauvaise grippe. Il grimaça à sa première question.

- J'avoue avoir craqué pour un petit pain tout à l'heure... J'avais trop faim. Mais mon ventre crit encore famine, je peux te l'assurer !

Il s'inclina légèrement à son invitation et s'approcha du tableau et sans hésitation, il ouvrit le passage dissimuler vers les cuisines. Puis il s'effaça et se fendit en une révérence plutôt raide, le sourire en coin.

- Puisque apparemment je suis un gentleman, je dois me montrer fidèle à ma réputation. Après vous ma chère...

- Italie...

Un vague sourire éfleura ses lèvres alors qu'il regardait avec intéret l'agitation aux fourneaux autour d'eux. Puis il reporta son attention sur Laya et l'écouta, les yeux sintillants de curiosité. Cette idée d'immense carnaval lui plaisait. Caché derrière un masque, on peut être enfin ce que l'on veut. Mais après tout, ne portait-il pas un masque en dissimulant ce qu'il était ? Non, non et non ! Il refusait de penser cela. C'était sa vrai personnalité qu'il montrait. "L'autre", la bête, ce n'était pas lui. Les gens n'avait pas besoin de savoir qu'"il" existait pour savoir qui il était. Il n'empêche que... un masque serait parfois bien pratique... Il releva le fait que Laya insista sur le coté bal et danse du Carnaval. Malheureusement il n'était pas très bon danseur. En fait il n'avait jamais vraiment essayé.

- Ca doit vraiment être magnifique... Etre costumé, masqué, doit donner plus d'assurance... J'aurais aimé te voir dans ton costume de Vénitienne !Mais je suppose qu'avant d'aller au Carnaval de Venise, il faudra que j'apprenne assez de pas de danse pour ne pas être ridicule.

Rémus sourit.

- C'est gentil. Avec beaucoup d'effort, je dois pouvoir m'en sortir... Mais je suis persuadé de ne pas avoir ce petit quelque chose qui fait qu'on est un bon danseur. La grâce, ou je ne sais quoi, je me contente de l'admirer chez les autres.

Le dernier bal auquel il avait assisté était le bal de noël de l'an dernier. Rendez-vous auquel on pouvait assez difficilement échapper. Ce n'était pas un évènement qu'il détestait, au contraire, l'ambiance festive était plutôt agréable. Mais il préfèrait largement assister en tant que spectateur à cet espèce de théâtre où chaqu'un essayait attirer la lumière sur lui-même. Mais ce dernier bal de noël avait été aussi la première fois qu'il avait eu une cavalière. Le souvenir de Laura lui semblait de plus en plus flou, comme un rêve qui s'estompe petit à petit. Il avait réussit, dans un effort énorme, à dresser une véritable barrière entre eux, qui avait finit par faire place de son coté à l'acceptation qu'il avait agit au mieux. Plusieurs personne le lui avait reproché, même James et Sirius qui connaissaient ses raisons profondes. Ils en venaient à lui faire croire qu'il avait un coeur de pierre, insensible. Rémus trouvait cette idée certes un peu triste, mais rassurante, il était persuadé que dans son cas, la dureté de son coeur était une nécessité absolue.

Il continua, l'air de rien.

- Tu aimes donc danser. Est-ce que tu as eu l'occasion dans tes voyages de rencontrer aussi les danses des pays que tu a visité ? Je pense à la France, entre autre, mais tu as parlé de l'Inde la dernière fois non ? Ils dansent là-bas aussi je crois...

Alors qu'il était légèrement absorbé par les souvenirs que le mot "bal" faisait surgir, fut assez brutalement ramené à au moment présent lorsqu'il se rendit compte que ce que Laya venait de lui dire...

- Tu trouves que j'ai du... charisme ?? Tu... Tu m'admires ?

La surprise lui avait donné l'air certainement le moins intelligent que Laya at vu sur son visage jusque là. Les yeux ecarquillés, la bouche légèrement entrouverte, il reste en "bug" pendant deux secondes avant de se racler la gorge et de baisser les yeux pour se plonger dans l'obervation minutieuse d'une éraflure de la table en bois, ses doigts grattant machinalement une tache imaginaire. Ses lèvres pincées cachait à peine le petit sourire incontrôlable que ces compliments provoquaient.

La suite de la discussion sur la danse lui permit de reprendre un peu de contenance et il écouta avec intéret le récit de Laya. Il se surprit à penser déjà au prochain bal où il ne manquerait pas cette fois-ci d'admirer la mise en pratique de tout cela chez la jeune fille. Et de l'inviter peut-être ?...

L'arrivée des plats interrompit la Serpentard et Rémus respira avec délice le fumet irrésitible de son assiette. Il admira aussi l'agencement presque artistique de l'ensemble des aliments.

- Tu crois que quand ils inventent un recette, les gens pensent aussi au fait que ça donne une oeuvre d'art pour les yeux ? Mais là, je crois que je ne vais pas résister deux secondes de plus à détruire ce magnifique ensemble. Bon appetit !

Ni une, ni deux, attaqua son assiette. D'un geste peu accadémique mais plutôt efficace, il réussit à entortillé les spaguetti autour de sa fourchette et engloutit le tout sans s'en mettre partout, un petit miracle en soi. Il pencha la tête de coté, appréciant grandement cette découverte gustative. Une fois avala sa première bouchée, il dit avec enthousiasme.

- Miam ! C'est délicieux ! Pourquoi est-ce qu'on a pas inventé un truc pareil par chez nous ?

Le jeune garçon regarda Laya attaquer son assiette en souriant. Son enthousiasme était communicatif. Pendant quelques minutes, ils apprécièrent simplement le délice qui était dans leur assiette. Lorque sa compagne de tablée eut liquidé sa part, Rémus n'en était qu'au trois-quarts.

- Le plaisir d'un repas c'est aussi de le partager ! Mais quand c'est aussi délicieux, c'est encore plus agréable.

Il le pensait vraiment. Il se sentait bien, et ce petit moment complice était une magnifique découverte, et pas seulement de la cuisine, mais aussi de la compagnie de Laya. Il dévora encore quelques bouchés et une fois avalées, il ajouta :

- Dis-moi, toi qui aime tant la bonne cuisine, est-ce qu'il t'arrive aussi de cuisiner toi-même ?

Le jeune gryffondor réfléchit un instant... Il essayait de se remémorer ses rares expériences aux fourneaux.

- Et bien j'ai eu assez rarement l'occasion de m'excercer. Il faut dire que durant l'année, à Poudlard, on met toujours les pieds sous la table. Du coup je ne me suis jamais lancé dans des trucs savants mais disons que je pense pouvoir survivre le jour où je serais livré à moi-même.

Sa mère n'était pas une très grande cuisinière mais elle lui avait enseigné assez rapidement les bases. Il savait manier les oeufs très correctement sous presque toute leurs formes, mais préférait s'amuser avec les salades composées en tous genres. Toujours économique, jamais prétencieux...

- Donc si tu un jour tu veux absolument que je cuisine pour toi, je devrais pouvoir m'en sortir.

Son assiette vide, il posa ses couverts et soupira d'aise.

- Et bien ! J'ai moins faim !

Une idée lui vint en tête et le fit sourire. Il dit en riant :

- Au fait ! Ca tombe sacrément bien qu'on soit préfet tous les deux ! On n'aurais pas pû aussi facilement se retrouver à une heure aussi tardive. Niveau exemple à suivre, on peut faire mieux !

- Ma première réaction a été de chercher un fauteuil pour m'asseoir. Ensuite... Et bien c'était une grande fierté. J'ai pris ça comme une marque de confiance, ça fait vraiment plaisir. Mais plus ça va, plus j'ai l'impression que c'est quand même une grosse responsabilité et que je serais incapable d'être complètement à la hauteur...

Rémus pensait au fait d'avoir une certaine autorité, chose dont il se sentait pas franchement capable. Il savait se faire entendre de certaines personnes, mais pas de tous. Ceux de sa maison qui avaient le plus besoin d'être cadrés étaient justement ceux qu'il n'aurait jamais le coeur de punir. Il savait très bien qu'il ferait passer l'amitié avant sa responsabilité de préfet, et cette conscience était la certitude pour lui qu'il n'était pas un préfet parfait.

- Et je serais moins sévère avec toi-même. Tu sais aider les autres, tu l'a prouvé en cours de potion.

- Chacun a sa façon de "rendre la justice". On ne nous demande pas d'être parfait non plus, heureusement. Mais il est impossible que Dumbledore se soit trompé, avec les autres professeurs, en te donnant l'étoile de préfet. Le directeur fait parfois des choix qui de l'extérieur peuvent parraître étonnants, voir irresponsables, mais il sait ce que valent les personnes en qui il a confiance. Parfois même mieux qu'elles-mêmes.

Des choix irresponsables, comme que laisser un loup garou étudier au milieu de tous ces jeunes sorciers... Pour Rémus, le fait que Laya doute elle-même de sa capacité à être juste était la preuve d'une grande lucidité et d'un recul par rapport à soi qu'il appréciait. Selon lui, Laya était une fille impulsive, sans aucun doute, probablement peu diplomate, et qui restait, hors de ces moments de tête à tête, plutôt renfermée et cynique. Mais ce caractère ne lui permettait pas de la juger injuste ou irresponsable. Invoquer le jugement de Dumbledore lui permettait, en quelque sorte, de justifier aussi pour lui-même sa conviction que Laya était quelqu'un de bien et le plaisir qu'il avait à passer ces moments avec elle.

Semblant se rendre compte du contre sens que Laya pouvait saisir dans son discours, il s'empressa d'ajouter, embarrassé.

- Euh... Je ne voulais pas dire que ça semblait irresponsable de te nommer préfète ! Je... euh... parlait d'autres chose qu'il a pû faire.

Rémus se détendit en voyant que sa petite bourbe amusait plus Laya qu'elle ne la vexait. Sa question le fit sourire plus largement et il dit avec une fausse indignation.

- Cela voudrait dire que les Italiens dans leur ensemble seraient en moyenne plus justes que les Britaniques grâce à leur cuisine ! Hum... Je pense que le peu de chauvinisme que j'ai m'oblige quand même à ne pas accepter une telle idée.

Il eut un petit rire avant d'ajouter, amusé :

- Mais si tu tiens vraiment à "rendre justice" ce soir, il faudrait que tu me retire des points pour non-respect du couvre-feu entre autre... Et moi de même !

Rémus réprima un baillement. Il se sentait effectivement repus, et serait bien allé directement se coucher. Mais le devoir, c'est le devoir. "C'est bien beau de dire ça alors que tu viens de faillir à ton rôle en t'eclipsant pour prendre un sympathique diner en charmante compagnie". Sa conscience n'avait pas tord mais il l'ignora superbement.

- Tu as raison, si il se passe quelque chose pendant une de mes premières rondes, ma crédibilité va en prendre un coup... Mais j'ai demandé à mes amis d'éviter les jours où c'est moi qui patrouille pour sortir en douce. Honnêtement, je ne sais toujours pas comment je vais gérer le fait que devoir un jour les obliger à suivre le règlement...

Il haussa les épaules et se leva de la table.

- En tous cas, merci vraiment beaucoup pour ce petit moment gastronomique fort sympathique. C'était délicieux.

Rémus parlait aussi bien de la nourriture que du reste. Il avait réellement passé un bon moment.