Bouger, être active, ne pas rester au même endroit, c’était sans doute ce qu’il fallait faire. Ou plutôt ce dont elle avait besoin. Yelena s’en remettrait forcément, elle avait fait partie de la décision, mais cela ne l’empêchait pas d’avoir besoin d’action. Cette rupture était en soi logique avec leurs situations. Objectivement il ne se passait plus grand chose depuis qu’elle avait changé de poste. Même si les choses auraient pu être différentes. Et dans tout ça, l’école supérieure de magie n’offrait pas une grande activité physique. Les choses se passaient bien, les élèves étaient en soi plus intéressants qu’à Poudlard, Yelena avait l’occasion de mieux creuser ses sujets. Sa vie n’était en soi pas si terrible. Mais ce besoin d’action se faisait pressant. Alors à la suite d’un nouvel entraînement musclé en compagnie de Marius, la slave avait été enchantée de savoir qu’il aurait éventuellement une occasion à lui donner. Il arrivait qu’il organise (indirectement bien sûr, toujours, c’était une évidence) quelques combats du genre bien cachés. Elle faisait de son mieux pour être plutôt régulière en général. Mais déborder parfois un peu des limites de la loi n’était pas exclu d’office. Et ces petits moments de violence et de sueur avaient de quoi la soulager de sa vie bien trop calme loin de ses bêtes.

Ce soir-là elle avait donc un sourire aux lèvres au moment de placer les bandes de cuir sur ses mains. Les cheveux attachés, une tenue souple et proche du corps, simple haut court et un de ses pantalons de travail avec les grands écailleux, les pieds nus sur ce qui était entre le sable et la terre battue, elle sautillait sur place, trop pressée de se lancer. Un homme, comme souvent. Pas un qu’elle connaissait ceci dit. Peu importe. Le résultat serait le même. Ou en tout cas Marius semblait le penser. C’était parfait. Une fois salué, il était temps de se lancer. Pas de règle, pas de limite, l’un d’eux devrait rester au sol. Simple, efficace. Yelena n’avait pas porté le premier coup, en revanche elle l’avait esquivé. Concentrée, les sourcils froncés, elle l’avait rendu rapidement, touchant faiblement un bras de son adversaire. Ils commençaient doucement, toujours, prenaient la température. Un deuxième coup esquivé pour elle, un deuxième touché pour lui. L’arrière de l’épaule, ça pique plus déjà. Allez, ça y est, elle l’a agacé. Les choses vont devenir intéressantes. Il esquive un coup à son tour, elle aussi, encore lui, cette fois c’est elle qui en prend un premier, un coup de pied dans la hanche. Sur le coup elle est un peu déstabilisée et recule un peu. Elle sourit pourtant, laissant échapper un petit rire. On reprend. Un pas, deux pas, un coup manqué pour elle, un coup reçu au visage cette fois. Elle prend sur elle et le rend rapidement, touché au bas-ventre. Il se plie légèrement, c’est sa chance. La slave essaye de lancer le poing vers le côté de sa tête mais il a encore des réflexes et l’attrape, venant se mettre derrière elle pour la bloquer, la tenant avec fermeté. Pas assez rapidement ceci dit et l’arrière du crâne de la dragonnière termine dans le nez de son adversaire dans un son qui présage quelques soins pour la suite. Immédiatement il la lâche mais n’entend pas la laisser enchaîner, lui assenant un coup violent dans les côtes. Probable que ça laisse des marques. Avec ses nombreuses cicatrices, un peu plus ou un peu moins, ce n’était plus son problème. Il est temps de reprendre pourtant, vite. Pas le temps, il lui envoie déjà un nouveau coup dans les jambes, la faisant chuter sans ménagement. Il s’apprête à venir sur elle pour la bloquer quand ses réflexes se font une nouvelle fois très efficaces et son genoux rapidement replié vers elle se loge dans l’entre-jambe de l’adversaire. Là ça calme. Yelena se redresse rapidement pour envoyer sa jambe au niveau de sa tempe. L’homme perd l’équilibre et doit porter une main au sol pour se maintenir. C’est le moment qu’elle choisit pour que son poing aille rencontrer sa mâchoire et finir par tomber cette fois. Il peut encore se relever et ce n’est pas négociable. Quelques coups portés du pied au niveau de ses côtes ont l’air dissuasifs. Il ne bouge plus, ayant visiblement eu son compte pour cette fois, laissant Yelena essuyer les quelques goûtes de sangs qui perlent de sa pommette ouverte. La respiration forte et rapide, elle le jauge jusqu’à ce qu’on annonce sa victoire. Elle n’y avait finalement presque pas réagi, le prenant comme une simple façon de l’autoriser à sortir de la zone et aller prendre un verre qu’elle estimait mérité. Elle avait bougé, fait monter son adrénaline, reçu quelques coups, elle s’en sentait mieux.

C’est avec un grand naturel qu’elle s’était dirigé vers le bar bricolé dans un coin de la cave. On avait chaud ici, l’endroit sentait la sueur, l’alcool, la cigarette, et surprenamment les désinfectants. Les lumières n’étaient pas assez fortes pour offrir une visibilité optimale en dehors de cette zone de combat au centre. A peine sortie et son adversaire évacué, deux autres combattants prenaient la place. Il en serait ainsi quelques heures encore. Yelena s’était donc assise au bar, passant une main sur ses côtes douloureuses en demandant une vodka au barman. Doucement, elle avait retiré les bandes de cuir de ses mains, bougeant ses doigts qui retrouvaient un peu de souplesse malgré les marques qu’ils portaient encore. Une fois servie, elle fit un signe pour demander de laisser la bouteille à porté de main. Le premier verre fut vite avalé, lui donnant une légère grimace, les sourcils encore froncés, sentant doucement l’adrénaline retomber. Bientôt, un jeune homme était arrivé près d’elle. Sans lui accorder immédiatement son attention, remplissant un second verre elle-même, elle s’était finalement tourné vers lui. Il lui disait quelque chose, mais l’endroit manquait de lumière.

-Je peux faire quelque chose pour vous?

Elle retrouverait sans doute vite ses esprits, après quelques instants de plus et en voyant un peu mieux ses traits, sans doute. Mais il était certain qu’elle le connaissait.

On m’a vendu l’endroit comme quelque chose d’acceptable.
Du moins, dans ce que moi, je peux considérer comme socialement acceptable. Ça s’est déroulé après un match contre une équipe dérisoire qui a voulu se mesurer aux Faucons de Falmouth, sans grande réussite. Alors, que je me suis changé pour revêtir quelque chose de bien plus confortable, je suis interpellé par un homme. Ce dernier me tend un prospectus qui me fait hausser un sourcil sans que je ne lui prête une réelle attention. Or, il compte à ce que je le regarde avec plus d’intensité. Au moment, où je me vois en droit de lui poser quelques questionnements, il disparait. J’ai face à moi, quelque chose d’annoté à la hâte et griffonné rapidement, ce qui me rend encore plus interdit et encore plus curieux. Et, avec ma veine et ma chance, ça a tout l’air de se passer ce soir.

Si, j’ai bien compris. Refourguant le papier que je chiffonne allègrement dans la poche arrière de mon pantalon, je décide néanmoins de m’entraîner encore sur le terrain. Sans équipement préalable mais seulement avec ma batte et un seul Cognard. Je ne vois généralement pas le temps passer et encore moins lorsque le ciel commence à s’assombrir pour un mois de Novembre. Au centre du terrain, je fais bouger mes muscles, car j’ai besoin de cette adrénaline et cette action violente qui pulsent toujours dans mes veines. Chaque jour, que je foule sur cette terre, j’ai un besoin de cette animosité qui m’anime. De ce besoin vital de tout faire exploser et de tout détruire. Les Cognards et ceux sur qui je les envoie, ne me suffisent généralement pas. Rejetant ma tête en arrière, je me mets à pousser un léger grognement, avant de sentir un bruissement. Un léger bruit. Qui fait que je reporte mon intérêt sur le papier.

L’encre à moitié partie, je peux tout de même y déceler quelque chose, convaincu que ça se passe dans un quartier que je connais. Un de ceux qui sont mal famés et dont il vaut mieux faire attention avant d’y mettre les pieds. Tout pour moi, en l’occurrence. Avec un petit rire, je range ma batte d’entraînement ainsi que les Cognards dans les vestiaires et décide de me rendre à l’endroit que je pense être indiqué sur le prospectus à moitié déchiré. Sur ce dernier, il est bien certifié que je dois parier quelques mises et que ces dernières doivent être correctes. Surtout, qu’une femme a l’air de combattre ce soir. J’imagine mal, voire très mal, une femme mettre au tapis un adversaire mais je compte bien me faire ma propre idée. C’est donc avec une certaine appréhension mêlée à de la curiosité mal placée que je décide de transplaner.

Ce que j’ai en face de moi, n’est pas ce à quoi j’ai pensé. Je me retrouve face à un vieil édifice quasi en ruines qui doit tenir encore debout par une magie sûrement ancestrale. Haussant un sourcil interrogateur, je reste comme un con sans bouger, m’étant sûrement trompé. Alors, que je m’apprête à repartir, je vois tout un petit groupuscule de sorciers qui semble se diriger vers le bâtiment dévoré par les âges. Il m’en faut peu pour que je les suive, et je décide d’y aller. Suivant le petit groupe de près, je m’aperçois qu’à l’intérieur l’ambiance est tout autre. Différente. L’atmosphère sent les tripes, la sueur et le sang et je suis accessoirement dans mon élément. Avec un léger rire malsain, je fais face à ce que je considère être comme le tenancier de cette geôle et fais en sorte de poser mon pari. Idiotement, j’ai choisi la femme.

C’est comme si, je me retrouve dans l’Antiquité Romaine, avec son arène et ses gladiateurs. Pour satisfaire un public venu se repaître de chair et d’hémoglobine. Bousculant les quelques personnes présentes, je prends place et constate qu’il n’y a pas que moi qui apprécie ce genre de spectacle. Le combat a l’air d’avoir commencé, si j’en juge par les coups portés. Une grimace pour le gars qui vient de se prendre un front dans le nez. De là, où je suis, je peux étrangement entendre le craquement produit par le choc inévitable. Un léger frisson de satisfaction m’étreint tout entier, tandis que j’émets un sifflement plus qu’appréciateur. La femme, clairement bandante, si j’en crois son attirail, se défend assez bien. L’homme est presque désavantagé face à l’agilité de cette brune qui bouge telle une danseuse en ne se privant pas de lui asséner quelques coups bien sentis au passage. Finalement, j’ai peut-être bien fait de parier sur la brune, plutôt que sur le gars qui prend cher. Impériale, la femme le toise alors que l’homme est en position de faiblesse, mis à terre. J’applaudis bruyamment l’exploit, m’attirant quelques regards surpris ou courroucés. Mais, qu’est-ce que j’en ai à foutre, franchement.

Comme je l’ai fait à l’aller, je le fais au retour. Passant dans la rangée où j’ai pris place, bousculant un nombre incalculable de personnes au passage, avec ma haute stature imposante, je décide d’aller rejoindre la combattante au bar. Non sans me priver de la reluquer, alors qu’elle se trouve être de dos. J’en apprécie chaque courbure et encore plus la cambrure de reins, repensant à comment elle a pu se battre quelques instants auparavant. Lorsque j’arrive à sa hauteur, elle se soumet à l’alcool et avec un ordre silencieux, je demande à être servi moi aussi. Et là, tandis qu’elle se tourne vers moi dans toute sa splendeur d’Amazone, je reste sur le cul.

Elle.
Ici ?
La Dragonnière ?

- Beau combat. C’est tout ce que je trouve à dire, alors que je regarde les stigmates du combat présents sur ses traits. J’ai parié sur toi.

Il est loin le temps de Poudlard et son vouvoiement absurde.
Quant à savoir si Yelena Dratsena m’a reconnu, c’est une autre paire de manches.

Voilà qui la soulageait déjà. La dragonnière n’avait absolument rien contre cet homme. De même il n’avait sans doute rien contre elle. Mais eux comme les autres avaient en eux ce besoin par moment de savoir s’affronter, de pouvoir échanger quelques coups. Se faire mal quelque part faisait partie du jeu, des enjeux. Sans être étrange ou malsaine, il y avait dans cette douleur simple quelque chose de rassurant. Cause, conséquence. Tout était clair et logique dans un échange sans but à part celui de nourrir les paris qui avaient été faits sur leur dos. Il était arrivé qu’elle perde. Ce n’était même pas le plus important finalement. Affronter des adversaires différents, des méthodes différentes, elle aussi apprenait toujours un peu plus. Droite et fière, elle faisait souvent pâle figure face à des hommes forts. C’était aussi ce qui plaisait à Marius dans ce genre de situations, et cela provoquait souvent une forme de surprise qui amusait le vieux cracmol.

La slave maintenant légèrement amochée mais toujours vaillante ne s’était pas particulièrement ému de l’annonce de la victoire. Elle n’avait pas d’animosité envers cet homme couché au sol qui semblait encore courageusement retenir quelques gémissement. Elle ne souhaitait donc pas en rajouter une fois le verdict rendu. Elle avait fait sa part, soulagée elle-même d’avoir eu sa dose d’émotions et d’adrénaline, pouvant maintenant profiter plus tranquille de la fin de soirée. Les lumières étaient certes faibles mais elles faisaient luire sa peau de sueur. Si pour le moment elle ne le sentait pas, l’enseignante aurait certainement bientôt froid d’être humide de la sorte après un effort soutenu. Pour le moment, la brune avait d’autres priorités. Ses mains libérées, les dégâts constatés, un verre déjà descendu, elle pouvait commencer à se détendre et simplement laisser les tensions retomber. Elle ne fut pas seule longtemps cela dit. Ce qui là encore n’était pas forcément surprenant.

-Beau combat.

Un compliment, manière courante de démarrer une conversation. Yelena restait bien droite, tournée vers lui ceci dit. Il lui rappelait quelqu’un sans qu’elle n’arrive à remettre le doigt dessus pour le moment. Il faisait trop sombre et elle était encore trop vive pour arriver à se recentrer.

-J’ai parié sur toi.

Il était familier celui-là… Yelena n’avait pas pour habitude de tutoyer immédiatement. Mais il faut admettre que dans ce genre d’endroit, les règles de courtoisie étaient rarement réellement respectées. La belle fronçait légèrement les sourcils, droite et fière sur son siège.

-J’imagine que tu es plutôt heureux dans ce cas…

Remarque facile. Elle avait gagné, il avait donc certainement remporté un petit paquet. Ceux qui la connaissaient avaient sans doute fait comme lui d’ailleurs. La belle avait relativement peu de défaites à son faible actif. Cela ne l’empêchait pas de chercher qui était ce jeune homme. Ce fut quand il s’était tourné pour recevoir son verre, éclairant un peu mieux son visage, que Yelena eut comme un déclic. Difficile de l’oublier celui-là. Elle en eut un léger rire d’ailleurs avant de reprendre un verre.

-C’est un bien mauvais endroit pour retrouver un professeur Isaac, on y fréquente des gens peu recommandables, tu le sais? A moins que tu ne cherches à changer d’un camarade pour t’entrainer au maniement de la batte?

Comment oublier ce moment mémorable où elle l’avait pris sur le fait, donnant un grand coup de batte à un autre élève, se retrouvant en retenue immédiate dans les vestiaires. Il l’avait provoqué, cherché, poussée au mieux durant ce temps. Il avait même connu une certaine solitude alors que Yelena s’était retrouvée à expliquer à son collègue directeur de maison du jeune homme qu’elle se retrouvait contrainte de lui laisser la fin de la retenue pour éviter au jeune Wellington de passer le reste de la soirée avec une érection qu’elle avait remarqué bien entendu. La joie des hormones d’adolescent sans doute… Elle ne s’était pas souvent retrouvée à parler du contenu du pantalon d’un élève avec un collègue, c’était assez mémorable pour qu’elle le reconnaisse.

-Tu ne devrais pas être là, tu risques des ennuis. Et je ne parle pas de ta réputation. Pour un joueur comme toi c’est important de la préserver.

C’était presque un conseil sincère qu’elle lui donnait. Elle savait par sa précédente relation ancien joueur professionnel comme lui qu’une réputation ça se défaisait bien plus rapidement que cela ne se faisait. Sa voix était plutôt calme ainsi, un léger sourire restant sur ses lèvres. Yelena qui avait ses habitudes malgré tout remercia le barman qui avait pensé à lui fournir son habituelle poche de glace. Une poche qu’elle avait placé sur ses côtes durement touchées, le saignement déjà arrêté sur sa joue. Ce n’était rien, elle s’en remettrait très vite. Mais il faut admettre que la glace avait quelque chose de plutôt agréable actuellement.

La Dragonnière.
Dans toute sa splendeur et toute sa rudesse et qui a mis un homme à terre, avec une facilité presque déconcertante. Bien qu’il se soit montré retors à certains moments, l’agilité de mon ancienne Professeur a eu raison de l’homme. Le piétinant allègrement de toute sa superbe et de toute son autorité. J’ai été subjugué sans pour autant connaître sa véritable identité, du moins, jusqu’à ce que je la rejoigne. Autour d’un verre, offrande manifeste qu’elle peut s’octroyer après une telle rixe, un tel spectacle dans ce lieu qui pourtant ne m’est nullement familier. Bien que j’apprécie m’adonner à toutes formes de violence, aussi brutes soient-elles. Ici, ça m’a l’air cathartique, reposant, et en proie à certaines règles qui n’en sont pourtant pas vraiment. Tout ce qu’il faut faire, c’est cogner. Et mettre l’autre au tapis. Généralement, je suis bon dans ce domaine.

Je l’ai rejointe, tout naturellement, au bar. M’asseyant devant ce dernier et lui offrant un compliment pour entamer une éventuelle discussion. Dans son regard, je vois qu’elle ne se rappelle pas de moi, du petit con d’Isaac Wellington ayant fini en retenue, après avoir voulu saluer O’Mahony avec ma batte, d’un peu trop près. Or, au regard d’une retenue toujours un peu trop exagérée pour seulement un seul et unique coup de batte, je me suis retrouvé à jongler avec des hormones un peu trop perturbées pour un jeune adolescent de dix-sept ans. Yelena Dratsena, me faisant clairement de l’effet et m’en faisant toujours, apparemment. Si je suis heureux d’avoir empoché une petite somme d’argent suite à mon pari d’avoir misé sur la femme ? Je le suis. Assurément. D’ailleurs, un large sourire satisfait orne mes labiales, et s’en trouve encore accentué lorsqu’enfin, elle me reconnait.

J’entends néanmoins son petit rire tandis que je vois l’éclat de compréhension présent dans les iris bruns de mon interlocutrice. Vu notre passif commun pour le moins volcanique, je me concède à avoir un petit rire entendu. Sachant que j’ai terminé ma retenue avec mon Directeur de Maison, les hormones en ébullition ainsi qu’une étroitesse somme toute désagréable dans le pantalon. Autant dire que se concentrer tout en copiant des lignes sur des parchemins n’a pas été aisé. Étant donné, que je suis resté encore un long moment à penser à la femme qui me fait face. La retenue la plus en demi-teinte de ma vie, probablement. Je fronce les sourcils, lorsqu’elle remet cette barrière entre nous : professeur et élève. Ancien élève plutôt, qui se ramasse une morale à deux Noises.

- Comme tu peux le voir. Je continue sur le tutoiement, tant qu’à faire. Je n’ai ni batte, ni tête d’O’Mahony qui se trouve à portée. Et, comme pour certifier mes dires, je montre mes mains vides. Surtout la gauche, celle qui tient ma batte.

Buvant une gorgée de mon verre servi avec une certaine attention et minutie dans cet endroit plus que folklorique, je détaille silencieusement, maintenant qu’elle se trouve à ma portée, la tenue de la Dragonnière. Je toussote légèrement lorsque je vois la peau, du moins ce que je peux entrapercevoir, se perler de sueur, vu la chorégraphie qu’elle a exécuté quelques instants plus tôt. La nuque dégagée et relevée par une coiffure tressée, le haut court et le pantalon moulant ainsi que des bottes lacées. Là, je suis mal. Comment après onze années sans la voir, je peux prétendre à me retrouver comme un satané gosse de dix-sept ans ? C’est l’effet que la brune volcanique m’octroie lorsque je la fixe avec mes iris bleu clair.

Well. Je suis bel et bien, dans la merde.

- Je fais profil bas sans attirer l’attention. Mais merci du conseil et de l’inquiétude qui y est associée. Je suis plus venu par curiosité que par réel engouement, finalement. Commence-je avec un petit sourire, avant de continuer plus sérieusement. Attends. Je retire mon manteau, que je pose doucement sur ses épaules nues.

J’y suis allé délicatement, histoire qu’elle ne me colle pas une rouste en traîtresse. Satisfait d’une pareille vision, je continue à boire dans mon verre, quand un questionnement m’étreint soudainement. Ça fait combien de temps, qu’elle s’adonne à ça ? A cet Art somme toute manifeste de faire tomber les hommes à ses pieds. Au sens propre, comme au figuré.

- Depuis combien de temps, tu fais ça ? Ces combats ? Demande-je vraiment intéressé tout en scrutant l’emplacement de la poche de glace présente sur les côtes.

Merlin, que j’aimerais être à la place de cette poche de glace. Mes mains, du moins.

Yelena avait toujours connu cet environnement, elle avait toujours eu affaire à une forme de violence et de difficulté. Mais pas comme certains pourraient en connaître ici. Les multiples cicatrices sur son corps n’étaient pas les résultats de mauvais traitements connus en famille ou de maltraitance. Elles étaient une fierté pour elle, preuve de son travail et de son courage face aux grands reptiles volants. Son caractère rude n’était pas un manque de confiance ou d’amour dans son enfance qui l’avaient empêché de se construire. Elle avait grandi entre une mère aimante et un frère qu’elle avait adoré au plus profond de son coeur. Il était plutôt le résultat d’une forme courante d’incompréhension entre habitudes et langue qu’elle n’avait pas toujours appréhendé de la bonne manière. Elle avait même un très bon fond, une femme fiable et généreuse avec ses proches, avec beaucoup d’humour même, à condition de savoir l’apprécier.

Ce soir-là elle n’avait pourtant fait preuve ni de douceur ni de beaucoup de compassion. Cet homme et elle s’étaient presque lancé dans une forme de ballet douloureux et salvateur autant pour l’un que pour l’autre. Ou Yelena le présumait puisqu’on ne se lançait pas dans ces activités violentes et en soi interdites par simple plaisir de se faire admirer par une foule? Il devait un minimum y trouver son compte? Ou alors il y était forcé par quelqu’un d’autre… Yelena ne chercherait pas à savoir pour le coup, elle n’était pas là pour ça. Non, pour le moment, son attention était dans son verre et cet homme qui semblait avoir envie de discuter. Un compliment, une belle somme gagnée indirectement grâce à elle, il était bien entendu de bonne humeur. La conversation se commençait donc assez naturellement et avec bonne humeur. Ils se tutoyaient, et le fait qu’elle finisse par reconnaître son ancien élève n’avait pas retiré cette appellation. Après tout, ils n’étaient pas à l’école. Elle n’y enseignait même plus…

-Comme tu peux le voir. Je n’ai ni batte, ni tête d’O’Mahony qui se trouve à portée.

Le voilà qui lui montrer ses mains vides comme pour justifier une bonne foi dont elle doutait légèrement. Difficile de le prendre pour un saint en le retrouvant ici. Elle n’était cela dit pas bien placée pour juger et elle lui avait accordé un léger rire à ce geste avant de vider un nouveau verre. Verre qui s’était rapidement rempli à nouveau. Non elle n’entendait pas rentrer sobre, mais après tout ce n’était pas comme si elle avait encore quelqu’un pour l’attendre et lui reprocher…

-Ravie de voir que tu t’es assagi. A moins que ce ne soit qu’un coup de chance?

Levant un sourcil en le regardant, elle gardait ce fin sourire sur les lèvres, visiblement plus détendue qu’à l’époque où leurs échanges se limitaient à une permanente confrontation. Ce soir elle n’était en rien responsable de ses actions à lui et n’avait rien à surveiller. Forcément le rapport était plus facile, bien moins musclé. La belle slave s’était ensuite détourné, redressant son dos jusqu’à entendre un craquement qui l’avait soulagée dans l’instant, le torse bombé, tournant ensuite sa tête en fermant les yeux jusqu’à entendre un son similaire. Elle était toujours un peu raide sortie de ces échanges musclés. Mais heureusement cela passait souvent assez vite. Quelques mouvements, une respiration profonde, et avec un verre cela serait encore plus simple. Une légère toux de la part de son interlocuteur lui donnait presque l’impression qu’il n’était pas habitué à aussi fort que le contenu de son verre. A moins que quelque chose l’ait perturbé? Sa remarque au sujet de sa réputation peut-être? Ou alors c’est cet air lourd et chaud qui règne ici qui le met mal à l’aise?

-Je fais profil bas sans attirer l’attention. Mais merci du conseil et de l’inquiétude qui y est associée. Je suis plus venu par curiosité que par réel engouement, finalement.

Son inquiétude? On ne pouvait pas franchement dire qu’elle était inquiète pour lui. Elle n’était clairement pas assez impliquée pour se sentir réellement inquiète. Yelena s’était contenté d’un conseil qu’elle aurait donné à un inconnu si il s’était trouvé dans la même situation.

-Ne t’emballe pas, je ne suis pas inquiète pour toi, je te souhaite de savoir te débrouiller sans moi d’ailleurs, autrement tu n’irais pas loin…

Elle aussi exagérait un peu pour lui faire comprendre son idée. Yelena espérait d’ailleurs qu’il y avait une base de plaisanterie dans ses propos à lui. Autrement on était proche du triste. Ou de l’étrange… Au choix…

-Et tu as de bien étranges curiosités pour atterrir ici sans avoir avant un intérêt pour la chose. A moins que tu ne me dise pas tout?

Pour le coup c’était elle qui le titillait. Outre le ton de la plaisanterie qui s’installait, il y avait une véritable motivation derrière la question. Si l’endroit devenait assez connu pour attirer le simple curieux sans motivation, il y avait sans doute un problème dans la sécurité souhaitée par l’organisateur des rencontres et Marius devrait certainement s’en occuper rapidement!

-Attends.

Isaac s’était levé, la belle le suivant du regard les sourcils froncés, se demandant ce qu’il comptait faire. Elle s’était même un peu tourné, poche de glace sur les côtes, lorsqu’il était passé derrière elle avec prudence (oh comme il avait raison de se méfier!). Ce petit manège pour qu’il dépose avec délicatesse son manteau sur ses épaules. La slave senti ainsi ses cheveux se prendre sous ce dernier, allant se plaquer dans sa nuque et son dos humides de sueur et peut-être même pas que. Retourné à son verre, le jeune homme avait l’air satisfait, et elle perplexe. Finalement elle rit en le regardant, car bien que galant elle trouvait le geste un peu ridicule finalement.

-Ai-je l’air d’avoir si froid pour te dévêtir? Presque chevaleresque cela dit, mais je me sent assez peu l’âme de la demoiselle en détresse, pardonne-moi.

Pour le coup ça l’écorcherait presque de le remercier sincèrement. La fière slave ne pouvait pas s’empêcher de s’en sentir faible. Ayant peur de le vexer si elle devait retirer son manteau elle n’y toucha donc pas. Même si elle ne pouvait s’empêcher de penser que c’était un peu idiot pour une autre raison très simple. En effet, en le récupérant il sentirait maintenant l’humidité de sa sueur et peut-être même du sang (qu’il s’agisse du sien ou celui de son adversaire). Ce qui devait sans doute être plutôt désagréable, ou elle l’imaginait.  Elle se reporta donc sur son verre à vider une nouvelle fois, vérifiant ensuite l’état externe de ses côtes sous la poche de glace avant de la replacer. Un peu plus ne ferait sans doute pas de mal…

-Depuis combien de temps, tu fais ça ? Ces combats ?

L’enseignante lui adressa un regard un peu surpris, suivi d’un rire un peu gêné. Comment dire les choses. Dans l’idée, cela faisait déjà plusieurs années qu’elle combattait ainsi à l’occasion, sans compter les combats plus officiels qu’elle faisait avec Marius dans un but d’entrainement. Mais cette activité n’était ni légale ni à révéler à n’importe qui. Il avait beau être présent dans l’endroit, elle n’avait pas l’intention de lui en livrer trop.

-Quels combats? Ces combats n’existent pas, cet endroit non plus d’ailleurs.

Son regard brillait de malice et d’assurance finalement. Il comprendrait sans doute le message, n’est-ce pas?

-Actuellement vois-tu je suis chez moi à corriger des copies d’astronomie avec un thé aux agrumes.

Un sourire satisfait sur le visage, Yelena porta un regard vers son verre avant de le vider comme réponse à ses paroles précédentes. Elle reporta ensuite à nouveau son attention vers Isaac, visiblement amusée par la situation et ses réponses.

-Tout ce que je peux dire c’est que j’ai plus ou moins toujours eu à faire preuve de force. Le reste vient avec l’entrainement et les échange avec d’autres… expérimentés .

Quoi de mieux que de pouvoir en apprendre toujours plus des méthodes des autres? C’était aussi valable pour les techniques de combat, en tout cas pour elle.

Yelena Dratsena.
J’ai un étrange passif avec elle, soumis à une retenue qui ne s’est pas bien forcément terminée pour moi. Pire encore, devoir l’expliquer à mon grand-père paternel Hernan Wellington a été un lourd et douloureux supplice. A côté, la retenue de la Dragonnière et mes explications sommaires envers mon Directeur de Maison n’ont été que de la trivialité pure et dure. Je me rappelle encore, comment cet homme m’a hurlé dessus à peine, mes valises posées dans la demeure des Wellington. Déjà mis à mal par une fin d’année avec Ares Zabini, je lui ai pourtant apporté une maigre consolation en lui certifiant que mon équipe des Serpentard a eu à cœur de remporter la Coupe. Mais, connaissant l’ardeur de mon ancêtre à me punir devant pareil affront, ce dernier ne s’est pas privé de m’en retourner une. Assortie de sa chevalière aux initiales H.W. Ma mâchoire d’adolescent de dix-sept ans s’en souvient encore.

Tout comme l’ancienne Professeur que j’ai rejoint au bar, après une démonstration réellement « virile », d’un charmant combat contre un représentant de la gente masculine qu’elle a mis à terre. Sans aucun ménagement. Idéalement, j’ai tenté de mémoriser chaque mouvement et la grâce dont elle a pu faire preuve en combattant. Mes iris bleu clair n’ont eu de cesse de contempler comment la combinaison dont elle s’est vêtue a eu cet air irrévérencieux d’épouser toutes ses formes. C’est ainsi que je la détaille sommairement, quand je me retrouve à ses côtés. A discuter. En la tutoyant et en en oubliant le protocole de Poudlard. Car, j’ai quitté l’école de Magie, il y a onze années de cela et je me vois mal lui imposer ce vouvoiement bien trop cérémonial. Surtout, au vu du lieu dans lequel nous sommes présentement. Elle m’a attaqué sur O’Mahony et la raison toujours injustifiée de ma retenue, et je lui ai prouvé ma bonne foi en lui présentant mes deux mains, vierges de toute batte.

- Assagi ? Je n’aurais pas choisi ce qualificatif me concernant. Vu que je suis Batteur professionnel. Mais assagi, dans le sens où je n’ai pas choisi O’Mahony comme futur Cognard. Un petit trait d’humour bien senti et une pique aussi. Qu’est-ce que ce connard peut me gonfler, putain.

La belle et incendiaire slave, vient à bomber son torse et m’offrir une vision totale sur cette poitrine qu’elle met en avant. Et moi, afin de ne pas perdre la face devant pareille observation, je m’offre un toussotement conséquent. Ce n’est pas le verre d’alcool fort qui me prodigue une telle chose, c’est cette promiscuité étrange dont je n’ai pas l’habitude. A part, pour une confrontation perpétuelle avec elle. N’hésitant pas à la pousser dans d’ultimes retranchements. Comme elle l’a fait de nombreuses fois avec moi, ce qui a fait que j’ai éprouvé pour elle, une Haine cuisante et maladive. En plus de la trouver magnifique. C’est ce qui ponctue cet échange singulier. Et décidément, même si je suis un joueur émérite et connais mes stratégies sur le terrain, ici, je ne sais pas où me placer. Décidément. Pas. Où. Me. Placer.

- Je crois que j’arrive très bien à me débrouiller sans toi, Yelena. Un petit sourire assorti d’une grimace imperceptible. Car cela me semble réellement étrange de placer son prénom.

Néanmoins, je lui ai dit que je suis venu en ce lieu plus par curiosité que par réel engouement. Et cela est bien véridique en soi, ne m’attendant toujours pas à tomber sur elle en train de se battre sans baguette et à la seule force de ses poings et de ses pieds. Vu le public environnant auquel je jette une œillade rapide, il est vrai qu’en tant que joueur de Quidditch professionnel, je dénote légèrement parmi mes pairs. Bien que généralement, on ne me cherche nullement des noises, étant connu pour ma violence bestiale et primale. En dehors et sur le terrain. Cognant quand le besoin se fait plus que sentir et quand j’ai besoin de cette dose d’adrénaline qui fait pulser mes veines et me sentir vivant. Quand j’ai vu combattre la slave, j’ai eu envie de rentrer sur le ring et d’user de mes poings, bien plus violemment qu’à l’accoutumée. Pour essayer. Et pour avoir ce feu me dévorant les entrailles, quand j’ai envie de castagner, de mettre à sang, ce qui peut se trouver alentour.

- J’ai peut-être quelque chose à cacher. Petite pause qui entretient une sorte de mystère. Si tu connais mon jeu, tu as ta réponse.

Je me suis attendu à me faire dérouiller quand je me suis levé et ai posé sur les épaules de la slave, mon manteau. Comme une sorte de gentleman, et de pardon silencieux. Ainsi habillée de mon long manteau sombre, je la trouve vraiment splendide et d’une beauté sans égale. Sauf que, les quelques paroles dites par la belle russe sont teintées d’un sarcasme qui n’est pas caché. Me passant la main sur le visage, j’émets pourtant un rire car j’y reconnais une énorme once de fierté. Or, je vais récupérer mon habit avec du sang qui n’est probablement pas le sien et de la sueur. Mais, à vrai dire, je n’en ai strictement rien à foutre. Étant habitué aux entraînements qui se terminent souvent dans le sang et les larmes –pour mes équipiers-, et la transpiration. Ça m’est purement et simplement égal.

Mes interrogations se sont vues dévier sur ces « combats » à proprement parler et depuis combien de temps, elle en fait. Combien de temps, s’adonne-t-elle à ce genre de choses ? Je perçois le rire gêné, qui me trouble et me fait sourire, avant qu’elle ne me lâche une confidence qui me fait éclater de rire, alors que mes lèvres trempent dans le breuvage puissant et alcoolisé. On part donc sur la maxime : « ce qui se passe ici, reste ici ». Le regard brillant d’espièglerie atteste les palabres, ainsi que leur suite. Ce qui me fait là encore, bien rire.

- Pas de combats donc, vu qu’ils n’existent pas. J’espère que le thé aux agrumes est bon. Réplique-je avec un clin d’œil.

Là, par contre.
Elle m’intéresse.
Cruellement.
Tant et si bien, que j’en oublie mon verre et bois littéralement ses dires.
D’un signe distrait, je fais signe au barman de remplir une nouvelle fois mon verre tandis que mon attention est reportée essentiellement sur la Dragonnière et ses explications. Qui me satisfont au-delà de tout ce que je peux imaginer, jusqu’à présent.

- Tu veux dire, que ce n’est donc pas la première fois. Et, que tu as acquis de l’expérience avec d’autres combattants. Je marque une césure, courte, avant de continuer. J’aurais besoin de plus d’agilité pour me démarquer encore de mes adversaires.

Je bois mon verre d’un trait, avec un large sourire.

- A l’avenir, tu pourrais m’apprendre ? Je la questionne en sachant pertinemment que je vais me prendre un Cognard métaphoriquement parlant, en pleine gueule.

Mais, j’aurais essayé.

Il arrivait après quinze années d’enseignement que Yelena se retrouve en contact avec d’anciens élèves. Il lui arrivait d’en oublier certains tout de même, ou ne pas les reconnaître. Il faut dire que certains avaient été particulièrement discrets et voire même assez peu doués dans sa matière, la poussant assez injustement sans doute à les oublier. Pas forcément sympathique mais assez honnête. Isaac en revanche, si elle n’y avait pas pensé depuis un moment, elle ne l’avait pas totalement oublié. Comment l’oublier en même temps? Il avait fait fort en son temps. Pas en cours, non, il s’était fait remarquer autrement. Entre une violence totalement inadaptée, une arrogance exaspérante, puis des pensés visiblement très en-dessous de la ceinture. Une situation exaspérante et assez imprévue qu’il lui serait difficile d’oublier. Elle n’avait pas souvent eu à laisser la main à un collègue parce que son élève avait le balais au garde-à-vous. Surtout ne pas chercher la raison de cette réaction, ça serait sans doute pire. Sans être particulièrement choquée ou s’en sentir mal, elle avait simplement trouvé la situation ridicule et visiblement insoluble par elle-même.

Ils en étaient donc rendus à ce bar, côte à côte, Yelena déjà prête à se laisser plonger au fond de son verre, déjà soulagée par cet échange violent, prêtre également à passer à autre chose. Elle n’avait pas prévu ni même envisagé ni encore imaginé qu’Isaac pourrait la rejoindre ici. Le laissant lancer la conversation, elle le suivait un peu amusée. Ni totalement ouverte ni complètement fermée, la conversation se lançait quoi qu’il en soit. Et forcément cela s’était commencé par une part de ce souvenir particulier.

-Assagi ? Je n’aurais pas choisi ce qualificatif me concernant. Vu que je suis Batteur professionnel. Mais assagi, dans le sens où je n’ai pas choisi O’Mahony comme futur Cognard.

Il semblait d’humeur à plaisanter. Elle était un peu plus retenue, principalement concentrée sur les verres qui s’enchainaient. La slave n’avait pas de grande peine à noyer ou de gros malaise. C’était une expression de détente quelque part, une façon de se laisser aller. La belle n’était pas alcoolique, elle appréciait simplement la facilité du procédé.

-Dans ce cas j’imagine que “calmé” ne correspond pas non plus? Mais j’espère que tu as retenu qu’on n’utilise pas une tête comme Cognard, c’était la leçon principale de cette affaire tout de même.

Comme si c’était plus fort qu’elle, Yelena souriait, ayant quelques instants reçu l’image du jeune Isaac de cette époque dans son humiliante position de faiblesse. C’était amusant, il faut l’avouer. Dérangeant, mais amusant avec le recul. Et un peu d’alcool aussi. Ils continuaient ainsi à échanger, sur un ton général assez détendu et humoristique tout de même. Se remettant doucement de son combat, elle remettait en place son corps qui avait bien encaissé comme d’habitude tandis que le jeune homme semblait avoir du mal avec l’alcool, toussant même assez fort. Il ne lui venait pas à l’idée que cette réaction puisse être provoquée par sa personne.

-Je crois que j’arrive très bien à me débrouiller sans toi, Yelena.

La slave n’était pas habituée par cette voix à entendre son prénom. Elle ne fit pas de remarque pourtant, se contentant de continuer à sourire en terminant un nouveau verre. Mais c’était décidément assez étrange. Yelena avait quelques instants songé à son amie rousse qui elle avait l’habitude désarmante dès la fin de leur scolarité de les pousser à la tutoyer et l’appeler par son prénom. Elle était généralement plus mesurée. Mais dans un contexte pareil, il avait commencé, elle le laissait faire. Cela ne serait sans doute pas très grave.

-J’ai peut-être quelque chose à cacher. Si tu connais mon jeu, tu as ta réponse.

Pour le coup, si elle avait entendu parler de sa carrière, elle n’y avait pas accordé une grande attention. Yelena n’était en général pas spécialement attentive sur le sujet. Le Quidditch n’était pas sa spécialité, vraiment pas. Et pourtant sa dernière relation avait été joueur professionnel lui aussi. C’est d’ailleurs sur un terrain qu’elle l’avait vu la première fois. Mais Isaac, pour le coup, elle ne l’avait pas suivi. La belle lui avait donc accordé une légère grimace en première réponse.

-J’avoue ne pas avoir réellement suivi ta carrière, non, désolée. C’est peut-être une bonne chose ? Tu peux encore avoir des secrets pour moi? L’inverse serait sans doute déplaisant à mon avis.

Désireuse de ne pas le vexer et souvent maladroite dans ses paroles, elle s’était certainement un peu empêtrée dans sa réponse. Ce n’était pas comme si il ne la connaissait pas en même temps. Et elle n’avait jamais été réputée pour sa finesse finalement… ce qui était souvent accentué par son accent tranchant…

La suite avait été assez surprenante. Par volonté soudaine de se changer en chevalier servant peut-être, qui sait, Isaac avait souhaité déposer sur ses épaules son manteau. Elle n’avait pas su s’en empêcher. C’était sans doute une charmante volonté de sa part, un geste tout à fait agréable qui montrait qu’il se souciait de son bien être finalement. Mais c’était plus fort qu’elle, comme toujours, elle avait fait preuve d’un sarcasme presque incisif. Il n’était pas impossible qu’elle s’en veuille par la suite. Impossible pourtant de s’en empêcher, c’était un peu son fonctionnement naturel. Et finalement elle s’en mordit un peu la lèvre en le voyant se frotter le visage. Un nouveau verre dans la foulée. Son prochain questionnement les remet sur les railles ceci dit. Il enchaine, ce qui convient parfaitement à Yelena, lui permettant de reprendre une certaine assurance.

-Pas de combats donc, vu qu’ils n’existent pas. J’espère que le thé aux agrumes est bon.

C’est cette fois un petit rire qu’elle lâche en détournant le regard, le voyant entrer à son tour dans son jeu. Une position plus naturelle et agréable pour elle. Il lui confirme par un clin d’oeil. Souriante, la belle se redresse et se tourne un peu vers lui.

-Excellent oui. Un peu fort peut-être, mais c’est là qu’il est le meilleur.

La dragonnière se lance dans une forme d’explication peut-être un poil plus explicites sans trop en dire, cherchant à ne pas tout dévoiler non plus. Mais il semblerait que cela soit suffisant.

-Tu veux dire, que ce n’est donc pas la première fois. Et, que tu as acquis de l’expérience avec d’autres combattants.

Ce n’était pas ce qu’elle avait dit, pas tout à fait. Ce n’était certes pas la première fois qu’elle venait en découdre ici. Mais ce n’était pas ce contexte qui était le plus instructif pour elle. Yelena apprenait bien mieux avec une autre personne, une personne avec qui les méthodes s’échangeaient. Si avec Marius ils ne faisaient pas franchement preuve de tendresse entre eux, ce n’était pas dans le but gratuit de se faire du mal. C’était pour apprendre. La slave avait donc pris une inspiration, le visage assez neutre, prête à lui répondre, quand il la coupa dans son élan.

-J’aurais besoin de plus d’agilité pour me démarquer encore de mes adversaires.

Voilà qui était surprenant. Pourquoi lui confier ce détail? Qu’est-ce qu’il espérait exactement? Yelena ne le suivait pas. L’agilité au combat c’était une chose. L’agilité sur un balais, à son sens, s’en était une autre. Peut-être une question d’équilibre? Voulait-il rejoindre le petit cercle des combattants illégaux?  Elle trouvait que cela manquait de sens. Ce qui se lisait sur son visage. Isaac avait terminé son verre d’une traite, souriant presque comme un gamin impatient.

-A l’avenir, tu pourrais m’apprendre ?

C’était sorti tout seul. La détente du lieu, l’alcool, la conversation… c’était sorti tout seul. Un rire, comme si il venait de dire une absurdité, assorti de grand yeux surpris. Il était sérieux? Qu’elle lui apprenne à se battre? Voilà qui serait sans doute comique… Reprenant un peu de sérieux, Yelena termina à son tour son verre, constatant au passage la fin de la bouteille. Descente rapide ce soir… Sans doute l’effet de la conversation…

-T’apprendre à te battre pour te démarquer sur un terrain? Je ne suis pas sûre que ça fonctionne… A vrai dire je ne suis pas certaine que tu puisses tenir le rythme. Je ne suis pas un professeur très calme…

En astronomie comme pour le reste, Yelena avait tendance à être expéditive. Pouvoir se rendre pédagogue oui, très certainement, mais à sa manière. Et pour ce qui était du combat, ça n’avait très clairement pas le même impact qu’en astronomie. Au sens très propre du terme. Après une petite réflexion la slave avait finit par reprendre, décidant de concevoir l’idée.

-Je pense que c’est une discipline où on ne peut pas réellement voir sans y avoir été…

Et en même temps elle n’allait pas le jeter dans l’arène où se tenait déjà un nouveau combat.  Elle était déjà sûr qu’il ne ressortirait pas entier ni même si ses pieds. Il y avait peut-être une autre méthode cela dit. Se redressant sur ses pieds avec vivacité, déposant sa poche de glace (plutôt liquide il faut dire) sur le bar, faisant un signe au barman lui indiquant qu’elle s’arrangerait une fois de plus avec la patron pour régler sa consommation. Même ici elle avait ses habitudes. Retirant de ses épaules le manteau de son interlocuteur, elle lui rendit sans grand ménagement avant de lui faire signe de la suivre. Encore fallait-il se faufiler à travers la foule.

-On va tenter quelque chose, viens avec moi, tu verras bien comme ça…

Une fois la pièce traversée, passant devant un des “gardiens” des lieux, Yelena menant la marche, ils avaient passé une porte menant sur une autre salle sombre. Une fois la porte fermée les cris de la foule étaient presque éteints, lointains à leur oreilles. Yelena avait trouvé la lumière, faiblarde mais suffisante sans doute. Elle avait commencé par déposer ses bandes de cuir avec un petit tas de vêtements qui étaient les siens, laissés de côté pour la soirée, dans un coin de la pièce. C’était un endroit poussiéreux, sombre, avec quelques installations bricolées pour permettre l’entrainement des combattants qui le souhaitaient. La slave avait ensuite attiré Isaac au centre, là où un grand espace restait disponible et saurait leur suffire sans doute.

-Débarrasse-toi, en place, on va voir ce que tu as déjà…

Yelena elle n’avait pas beaucoup de changements à opérer pour être prête. Rapidement en place, la belle souriait presque derrière sa garde. Comme elle l’avait fait plus tôt, elle avait commencé quelques sautillements en se mettant en mouvement devant son adversaire. Le voyant prêt (ou à peu près) elle avait lancé le premier coup. Le pied, droit dans les côtes, sans ménagement.

La revoir dans de telles perspectives, ça me semble toujours étrange.
Elle n’est plus la Professeur d’alors, elle est autre. Et, dans cet état d’esprit, ça me plait. Yelena Dratsena, la Dragonnière, celle qui a été l’instigatrice de mes heures de retenue avec une saveur bien différente, de ce que j’ai pu escompter en étant un simple adolescent. Sa rudesse et son accent sec, ont éveillé en moi, des sensations différentes qu’il m’a été difficile d’expliciter face à un Directeur de Maison, peu affable. Le pire étant devant Hernan Wellington, mon grand-père. Lui dire, qu’une femme a su museler son petit-fils et lui offrir un appétit singulier qu’il a toujours connu mais qui a radicalement changé, ce jour-là ? Hors de question d’en venir à arpenter ce terrain glissant. Surtout, face à cet ancêtre que j’ai toujours abhorré et qui, malgré sa disparition récente, a toujours laissé quelques traces.

Du coup, ma colère grandissante, que ne s’est d’ailleurs jamais tue, vient sûrement de lui. De cet homme vers qui je me suis toujours vu courber l’échine et qui ne m’a jamais réellement apprécié. Étant selon ses propres dires : l’engeance impure et peu flatteuse, teintée de déshonneur. Il a toujours reporté l’affront de mon père sur moi et s’est toujours gardé de me le faire admirablement savoir. La Haine, que j’ai éprouvée pour cet aïeul et que j’éprouve toujours en secret, maximise cette Ire qui fait que je ne me suis jamais assagi. Jamais calmé. La preuve étant que je souhaite toujours, et ce, même après des années, foutre une branlée monumentale à O’Mahony. Ce satané connard.

- J’ai retenu la leçon. Vu le savon parfaitement passé de mon ancien Directeur de Maison, et mon grand-père. Je crois que c’est rentré facilement dans ma caboche d’adolescent.

Note que je n’ai pas mentionné le terme « adulte », ça va de soi. Si je ne suis pas féroce sur le terrain, à quoi peux-je servir ? On ne me surnomme pas le Boucher Vert, pour rien non ? Alors j’estime encore prendre et user des têtes de mes adversaires sur le terrain, comme de vulgaires Cognards. Là, où je peux prétendre à être déçu et piqué dans mon égo de joueur professionnel, c’est quand je vois la grimace de Yelena Dratsena. La confuse, celle qui fait que finalement, elle ne s’intéresse pas à ma carrière. Je fronce les sourcils et la fixe de mon regard bleu clair, entendant ses excuses et l’entremêlement qui en résulte. L’Isaac Wellington de dix-sept ans, a du mal à ravaler le fiel présent dans sa bouche. Pire encore, pour le joueur professionnel que je suis. Attaqué dans sa fierté. Implicitement qui plus est. Merde.

- Hum. Je dois me reprendre et vite, ayant l’apparence évidente d’un gosse frustré au possible parce qu’on ne lui a pas fait plaisir. En le brossant dans le sens du poil. Et de son sacro-saint amour-propre. C’est con. Et, dommage.

Heureusement que la suite prend une autre tournure et c’est tant mieux pour moi. Balayant de côté mon immonde condescendance, je me concentre de nouveau sur sa petite boutade. Où avec une certaine dérision, j’ai décidé de rentrer pleinement dans son jeu. Pas de combats, juste une volcanique Professeur qui corrige des copies, accompagnée d’un thé aux agrumes. Ce qui me fait encore rire. Alors, que je l’observe du coin de l’œil. Lui jetant une œillade de connivence, suite à son petit manège. Manège, qui me plait bien en fin de compte.

- En étant fort, c’est bien là qu’il est le meilleur. Je le reconnais.

Néanmoins, j’ai d’autres idées qui me traversent l’esprit. Comme celles, d’être entraîné par elle, afin de me mouvoir bien mieux sur le terrain. Autant dans les airs, que sur le sol. J’ai bu mon breuvage alcoolisé d’une traite pour en attester. Attendant qu’elle daigne me répondre et faire en sorte de m’offrir ce que je peux désirer. Levant un sourcil interrogateur, je me mets à rire. Bien plus fortement, qu’auparavant. Car, je me l’imagine alors, comme une enseignante cruelle et sans vergogne. Usant d’une « pédagogie » peu recommandable. Mais, ça me plait. Putain. J’écoute ses palabres, avec attention et discernement. La voyant réfléchir, peser le pour et le contre, avant de se redresser de son siège et seulement là, j’ai compris. J’ai gagné. D’un geste fluide, elle me lance mon long manteau, que je rattrape au vol, mais que je n’enfile pas. Préférant le porter à la main.

Adressant un sourire au barman, qui m’adresse un froncement de sourcils en retour, je quitte mon siège et suis rapidement mon interlocutrice en tentant de me frayer un chemin parmi la foule encore présente. La remerciant intérieurement, de ne pas m’avoir jeté en plein dans l’arène. Bien que je sache me battre d’ordinaire, mais face à des adversaires plus aguerris, qui en font peut-être leur gagne-pain, c’est assuré que je perds. J’adresse un large sourire au « gardien » prêt à lui tapoter son épaule massive, mais me retrouve dans une pièce à l’allure sordide et mal engagée. Où, nous ne sommes que tous les deux. Elle est déjà en place et se débarrasse de son attirail. En ce qui me concerne, je jette mon long manteau un peu plus loin, afin qu’il n’entrave pas mes futurs mouvements.

Sauf que.
J’ai à peine le temps de relever mes manches, que mes iris bleu clair la voient sautiller. Quelques pas. Quelques foulées. Et, par Satan, je n’ai pas le temps de parer. Un coup de pied qui vient m’assaillir directement sur le côté droit. Elle y a mis une putain de force, que je suis surpris. Sous l’impact. Et, ne me recule que de quelques pas. Pour garder une distance somme toute raisonnable, si je veux cogner. J’ai oublié la perspective qu’elle est une femme, vu le coup que je viens de recevoir en plein dans le flanc droit. Avec un large sourire, je suis prêt à frapper. Mon point faible est peut-être ce côté gauche que je veux absolument préserver. Quitte à parer exclusivement du côté droit.

Je lance mon premier coup de pied, dans le genou gauche. Pour la faire fléchir et embraye rapidement avec mon poing droit qui se dirige vers sa mâchoire. Éclatant de rire, parce que je commence à ressentir cette putain d’adrénaline qui me parcourt tout entier.

Il était rare de croiser des gens connus par surprise dans ce domaine. Le monde des combats illégaux on se connaissait, au moins de loin. Elle n’aurait donc pas imaginé par elle-même retrouver un ancien élève face à elle à ce bar. En soi c’était une possibilité et elle aurait pu l’imaginer. Avec ses quinze ans d’expérience, les premiers à être passés entre ses mains et à subir sa pédagogie plutôt forte étaient des adultes libres de faire les pires choix comme celui de se rendre dans ce genre d’endroits. Isaac, sur tout ce lot, était loin d’être le plus sage ou encore le plus calme. En cherchant bien et en étant un peu tordue sans doute elle aurait pu imaginer le retrouver là. Mais Yelena préférait finalement être capable d’une vague dorme d’innocence de l’esprit par moment et avoir cette surprise.

Ce garçon qu’elle avait autrefois corrigé jusqu’à s’en trouver dans une posture délicate ne semblait pas avoir décidé de changer, pas assez pour s’assagir et éviter ces endroits lugubres où régnait encore une odeur de sang et de sueur sous la chaleur de ces personnes entassées dans un endroit mal ventilé en sous-sol.

-J’ai retenu la leçon. Vu le savon parfaitement passé de mon ancien Directeur de Maison, et mon grand-père. Je crois que c’est rentré facilement dans ma caboche d’adolescent.

Yelena avait eu un léger rire, assez léger pour être présent, pas assez pour sembler être une moquerie. C’était un simple reste de cette image assez mémorable qu’il avait laissé dans ses souvenirs de professeur. Le détail risible de cette affaire était la tête faite par son directeur de maison quand elle lui avait laissé le jeune homme.

-Pardonne-moi, mais la situation avait été assez étonnante je dois dire.

Et pas la situation de départ avec une batte sur le crâne de Shannon, mais bien la suite lorsque l’élève et le professeur s’étaient retrouvés seuls dans les vestiaires. La suite de la conversation a le don gêner un peu plus l’enseignante d’astronomie. Peu renseignée sur le Quidditch elle n’avait pas suivi avec attention la carrière de son interlocuteur. Ne souhaitant pas lui mentir au risque de lui déplaire, elle lui avait avoué. Lui permettant de noter la déception dans les yeux du jeune homme. Si la dragonnière regrettait un peu avoir blessé son égo, elle assumait parfaitement sa position et son choix de ne pas être parfaitement attentive à cette part de sa vie. Si il savait. Elle n’avait pas non plus suivie celle de Ragmar entre leur première rencontre où il évoluait sur les mêmes terrains qu’Isaac et leur retrouvailles à Poudlard. Ce n’était donc réellement pas contre lui de manière personnelle. Simplement un manque d’intérêt assez fort de la slave pour ce sport.

-Hum. C’est con. Et, dommage.

Mince, elle l’avait vexé, à coup sûr. Yelena avait vidé un nouveau verre autant pour se donner un peu de temps que de contenance. Fondamentalement, le blesser n’était pas un drame. Mais elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que cela devait être terriblement désagréable et donc s’en vouloir un peu tout de même.

-Ne le prend pas mal Isaac, ce n’est simplement pas mon domaine.

Rien de personnel dans ce choix pourtant parfaitement assumé de la dragonnière. Bien qu’elle ait été au courant qu’il avait fini dans cette branche particulière et très sélective. Elle n’avait d’ailleurs pas été particulièrement attachée à ce garçon à l’époque, cela aurait peut-être changé un peu les choses. Isaac lui avait laissé une impression particulière et pas forcément des meilleures.

La suite avait été sur un tout autre sujet. Yelena semblait l’intriguer sous cet angle improbable. Elle avait soigneusement contourné le sujet trop direct cela dit, donnant sa version des faits de cette soirée où elle n’était pas supposée être ici. Comme toutes les personnes présentes d’ailleurs. Une pile de copie et un thé, voilà ce qu’elle était supposée faire actuellement. Ce qui faisait bien rire son interlocuteur lui aussi.

-En étant fort, c’est bien là qu’il est le meilleur. Je le reconnais.

Un thé russe par nature était très fort et il était souvent arrivé qu’on demande à la dragonnière pourquoi elle ne préférait pas le café à cette chose pourtant tout aussi noire qu’une tasse d’expresso. Elle n’en buvait pas moins un verre d’alcool dans une cave sordide plutôt que ce breuvage.

La suite aussi incongrue que prévisible avec deux personnes pareilles. Il voulait qu’elle lui apprenne à se battre, voilà qui était improbable. Elle n’était d’ailleurs pas certaine ni d’en être capable ni plus simplement d’en avoir envie. Ce n’était pas son domaine d’enseignement habituel et à vrai dire c’était devenir presque assez instinctif pour qu’elle ne puisse pas tout en expliquer avec précision. Prise entre l’alcool, l’adrénaline et la curiosité, elle avait voulu essayer tout de même, l’entrainant dans une autre salle que celle où ils s’étaient retrouvés.

Se préparer, l’affaire de quelques minutes. Se mettre en place, quelques secondes. Lui coller une rouste méritée, difficile de savoir réellement combien de temps cela prendrait. Il pouvait aussi bien succomber aux premiers coups que faire preuve d’une résistance surprenante. Pour le savoir, il fallait s’y mettre. C’est donc sans attendre de signal de sa part que la slave avait porté son premier coup. Un impact net et franc sur le côté droit qui le fait reculer de quelques pas. De quoi donner un rire à la slave qui prise par les premières brumes de l’alcool en oublie de faire preuve d’assez de prudence. Il lui envoie un coup de pied dans le genou qui en plus de lui extirper un léger grognement. Cependant cela avait le don de la remettre dans le rythme, assez pour attraper au vol ce poing qui arrive sur son visage (très très proche du dit visage cela dit). Il avait commencé à rire, semblant se prendre au jeu. Elle-même avait osé un sourire, son poing serré dans sa main. Un tour habilement réalisé et la belle s’était retrouvée dans son dos, ayant emmené avec elle le bras de son adversaire. Elle se retrouvait ainsi tout contre lui, dans son dos, levant le poing du jeune homme pour bloquer ses mouvements quelques instants. Le bougre était coriace pourtant et avait réussi à reculer assez pour la coincer à son tour, lui faisant au passage prendre un coup qui avait réveillé sa douleur aux côtes. Relâché, il avait de nouveau pris place face à elle, balançant le poing vers son ancien professeur. Un nouveau coup évité, lui faisant terminer sa route dans le fameux mur où il l’avait coincée juste avant. C’est à elle de répliquer, profitant de s’être baissée pour éviter son coup pour lui en donner un dans le ventre, assez pour le faire se courber. La belle se passe à nouveau derrière lui et lui assène un coup dans l’arrière du genou pour finir de le mettre à terre. A son tour, elle se place à genoux, derrière lui, passant ses jambes de chaque côté des siennes pour les bloquer, passant ses bras sous les siens en plaçant ses mains à l’arrière de la tête de son adversaire, bloquant ses mouvements. Dans cette position, il pouvait peut-être se tortiller, il ne bougerait pas, la prise de la belle était sûre et ferme. Ainsi contre lui, elle souriait de satisfaction d’avoir su faire preuve d’assez de force cette fois encore malgré l’alcool et ses blessures précédentes.

-Je crois que tu as encore du chemin à faire Isaac.

Pour le coup on entrait dans le domaine de la moquerie. Reprenant doucement son souffle, elle avait finit par le relâcher, libérant ses bras en premier lieu, puis s’éloignant un peu pour lui rendre ses jambes. Après avoir reculé, la belle s’était assise, un peu en arrière, appuyée sur ses mains posées au sol derrière elle, le souffle toujours un peu court, mais souriante. C’était assez amusant finalement…

Finalement, ce n’est pas une journée de merde, comme je l’ai pensé.
C’est mieux. Bien mieux. Parce que j’ai retrouvé un visage familier, que je n’ai plus vu depuis mes dix-sept ans, depuis que j’ai quitté Poudlard. En ayant remporté mon dernier match de Quidditch, celui qui a fait que j’ai embrassé cette carrière de sportif. Qui n’a pas commencée admirablement, vu que j’ai été quelques matches sur le banc de touche, mais qui s’est tout de même conclue de la meilleure manière qui soit. Je suis reconnu, pour mon excellence sur le terrain et mon jeu hors norme. Ayant brisé quelques os et établi un sacré palmarès dans le domaine. Bon nombre de mes adversaires, se souviennent de ma batte et de mes Cognards. Adversaires que je n’ai jamais épargnés, comme eux l’ont fait avec moi. Comment être au mieux de sa forme et de sa violence, si on se fait des simagrées sur le terrain ? Même en étant malade comme un chien, j’ai usé et abusé de ma batte.

Comme ce fameux jour, où je me suis fait prendre comme un bleu. Comme un abruti, tentant de fendre le crâne en deux d’O’Mahony avec ma précieuse batte de Serpentard. Ce petit con, m’a échappé en ce jour, et je lui voue toujours une haine conséquente. Augmentée par cette punition hors norme que j’ai dû subir. Par sa seule et unique faute : celle de ne pas se faire dérouiller comme un bon petit connard, qu’il est. Et, qu’il reste. A cette pensée, je me mords l’intérieur des joues, avant d’éclater de rire, suite à la déclaration de la Dragonnière. Situation assez étonnante ? J’en conviens.

- Je suis entièrement d’accord. Commence-je en tentant de contenir mon hilarité. Surtout que bon, j’ai été en bien fâcheuse posture. Autant devant toi, qu’après. Là, je me stoppe de rire. Mais, c’est un souvenir mémorable.

Et encore, je suis loin de tout avouer. La honte que j’ai pu engendrer sur la famille Wellington et les pensées peu chastes sur la Professeur qui ont suivi. Hors de la retenue, et bien plus espacées dans le temps. Dès lors que je pose mon regard bleu clair sur elle et repensant au fait que je l’ai vue combattre avec aisance et force, je me mets à penser à d’autres formes de danses. Bien moins violentes mais tout aussi puissantes. Surtout avec elle. Néanmoins, mes pensées peu conventionnelles et totalement assumées, sont vite balayées par un égo effrité. Comment ne peut-elle pas prétendre me connaitre ? Ni même suivre, ma carrière ? J’en reste con et vexé. Moi, l’illustre joueur des Faucons de Falmouth, blessé dans sa fierté si mal placée.

Cependant, je perçois une tentative d’excuses de la part de la splendide combattante et je récupère ce sourire, suffisant. Celui, qui me colle à la peau. Celui que les « autres » connaissent et qui est bien souvent, ma marque de fabrique. Me frottant l’arête du nez, je lui adresse un sourire en coin, oubliant un tant soit peu, que j’ai été clairement offensé dans mon choix de carrière.

- Pas de soucis. Alors que quelques minutes plus tôt, elle a été à deux doigts d’un incident diplomatique. Je comprends parfaitement que cela ne puisse pas être ton domaine de préférence. Ne t’en fais pas. Je lui adresse un large sourire, histoire de tirer un trait, sur cet affront manifeste.

Par une envie purement grandiose de me mesurer à elle, surtout lorsque je l’ai vue évoluer dans l’arène, j’ai eu à cœur de me proposer d’essayer. De combattre avec elle. Ou plutôt contre elle. Avec une délectation satisfaisante, si j’arrive à lui foutre une dérouillée. Chose, que je n’ai pas pu faire en étant un élève de dix-sept ans, soumis à une retenue que je n’ai toujours pas digérée. Même après onze ans. J’ai la rancune tenace, surtout lorsque cela vient d’une femme et que cette dernière fait preuve de son pouvoir, lié à l’enseignement. Sauf qu’ici, on est logés à la même enseigne, n’ayant plus cette hiérarchie établie par Poudlard, entre nous deux. Là, je peux lui asséner une sale rouste, sans avoir mon Directeur de Maison, sur le dos. Et ça, c’est magnifique. Mais à peine, ai-je le temps de me mettre à l’aise qu’un premier coup est porté. Par elle. Dans mon flanc droit, ce qui me fait reculer de quelques pas. Sous l’impact. Et, grimacer. Parce que je ne m’y suis nullement attendu, ni préparé. J’aurais dû être plus efficace, mais trop tard, c’est fait.

Je réplique. En riant. Parce que toute cette décharge d’agressivité non contenue me satisfait. Atrocement. Et que, je me plais même à lui faire plier le genou, l’un de mes poings s’avançant dangereusement vers son visage. Cependant, à mon grand désarroi, la Dragonnière ne l’entend pas de cette oreille, car mon poing se fige dans son mouvement, constatant qu’il est arrêté par l’un des siens. Me retrouvant alors bloqué, dans une position délicate, elle, se trouvant dans mon dos. Grognant, je dois agir vite et c’est ainsi que le dos de Yelena Dratsena rencontre le mur le plus proche. Avec fougue et détermination. Retrouvant la pleine capacité de mes mouvements, je me décide à lui asséner un nouveau coup de poing. Décidé, à frapper le visage. Une nouvelle fois.

Merde.
Je lâche un sale juron, quand mon poing vient rencontrer le mur, ce qui m’offre une petite douleur cuisante mais ce qui ne m’empêche pas de rire. Vérifiant tout de même, si rien n’est cassé. Au pire, je le sens après, là, je suis plus occupé à vouloir en redemander. Or, mon souhait est arrivé plus vite que prévu, et je me retrouve avec l’un de ses poings dans l’abdomen, ce qui me fait me courber sous l’impact. C’est moi où je me fais dérouiller par une femme ? Apparemment oui. Et, salement en plus. Avec le combo qu’elle se permet de m’octroyer, je suis littéralement bloqué et ça me frustre. Tentant de m’extirper de sa prise certaine, mais n’y parvenant pas. Mon regard bleu clair teinté d’un éclat sombre, surtout lorsque je l’entends se moquer. Mais, je ne peux lui donner tort. Alors, je baisse ma tête brune et je me marre. Parce qu’elle a raison. Malheureusement.

- Ça prouve une chose au moins. Commence-je doucement. Que je dois encore m’entraîner. Avec toi. Sous-entendu : la prochaine fois en étant en pleine possession de mes capacités.

Elle vient enfin de mettre fin au supplice et je peux rebouger mes bras, ainsi que mes jambes. Tous mes membres se satisfont de ne pas être ankylosés suite à sa prise. Bougeant ma tête et l’intégralité de mon corps, je me décide à la rejoindre et de me mettre dans la même position qu’elle. Regardant le plafond de bois pourri avant de poser mon regard bleu clair sur elle. Il y a un moment de flottement que je ne peux décrire, mais ce que je ressens, en revanche, c’est qu’elle est diaboliquement tentante. Un peu trop même. Quitte à me faire, exploser la gueule. Autant que ce soit maintenant. Lentement, je me soustraie à son regard pour ensuite n’être plus que son champ de vision. La fixant alors de mon regard bleu clair, n’attendant pas une réaction de sa part. Elle n’a pas fait gaffe à la mienne, de toute manière. Fronçant les sourcils, je la détaille. Avant de lui offrir un baiser abrupt, à l’image de sa castagne.

Oh. Et. Puis. Merde.

Tout n’était pas à jeter dans sa vie, loin de là. La slave avait eu de belles expériences, menait de front deux carrières exigeantes mais tellement enrichissantes. Les dragons avaient développé son caractère et son endurance. L’enseignement sa patience et son envie de transmission. Une vie bien remplie finalement. Mais pas encore assez il semblerait. Avec ces premières activités, elle trouvait moyen d’avoir envie de plus d’activités encore. En contact avec Marius et quelques unes de ses activités douteuses, elle s’était occasionnellement laissé aller à participer à certaines. De la protection de personnes, des combats comme celui de ce soir-là, il y avait de quoi faire. Là encore comme si ce n’était pas suffisant, elle avait rejoint avec une grande fierté les rangs de l’Ordre du Phoenix. Une vie bien chargée pour une femme en perpétuelle recherche d’activité.

Ce combat, un nouveau, avait été agréable. La conversation qui en suivait était surprenante. Isaac était un garçon impulsif qui finalement ne faisait pas trop tâche dans le paysage, au fond de cette cave étrange pleine de ces personnes qui réclamaient autant de sang que d’alcool. Elle gardait un souvenir impérissable de lui, mais sans doute d’un point de vue bien plus amusé qu’il ne l’aurait espéré… A en croire le sourire qu’il faisait presque au bord du rire, il devait en convenir au moins un peu.

-Je suis entièrement d’accord.

Un sourire amusé aux lèvres,  Yelena n’en rajoute pas encore, se remémorant un peu cette scène bien plus comique après les années que sur le moment. Reportant son verre à ces lèvres courbées par le souvenir, elle l’entendait déjà reprendre sans oser le regarder directement.

- Surtout que bon, j’ai été en bien fâcheuse posture. Autant devant toi, qu’après. Mais, c’est un souvenir mémorable.

Cette fois le rire s’échappe, manquant de la faire avaler de travers. Si devant elle il n’avait effectivement pas réussi à rester fier et impassible bien longtemps, face à son collègue cela avait sans doute été assez cocasse. Un pauvre adolescent perturbé par les hormones qu’elle n’avait pas eu la clémence d’épargner.

-Excuse-moi, mais j’ai encore le regard de ton directeur de maison en tête quand je t’ai laissé, il n’a jamais osé m’en reparler, je n’ai  même jamais su comment ta retenue s’était terminés!

En temps normal ils se faisaient au moins un petit compte-rendu, un petit bilan, un suivi quoi, les grandes bases. Pour cette fois rien, jamais. Comme si son collègue avait souhaité oublier cet évènement lui aussi. Yelena le comprenait, mais cela restait très amusant… La slave s’était rapidement repris tout de même, ne souhaitant pas lui laisser entendre qu’elle se moquait de lui. Ce n’était pas le cas, ou pas vraiment. C’était surtout les réactions de son collègue qui l’avait beaucoup fait rire. Isaac lui avait surtout été un adolescent qui avait eu du mal à maîtriser ses réactions et sans doute ses idées. Elle n’était pas naïve pour autant, elle savait que les jeunes connaissaient ce genre de troubles, surtout à vivre toute l’année avec eux, enseignants de Poudlard. Son ex-compagnon lui aussi avait éveillé son lot de fantasmes. Elle imaginait qu’ils avaient tous eu ce “privilège”.

-Pas de soucis.  Je comprends parfaitement que cela ne puisse pas être ton domaine de préférence. Ne t’en fais pas.

Il souriait. Yelena avait finit par changer son léger regard de culpabilité en un délicat sourire, admettant ainsi que le sujet était clos et qu’ils pouvaient reprendre sagement leur conversation. Quoi qu’il semblait avoir de quoi relancer dans un autre registre.

Il voulait en apprendre plus, apprendre à se battre. Mais pas avec n’importe qui en plus. Il voulait apprendre avec elle. Comment lui faire comprendre que c’était assez dangereux et probablement désagréable? Par les mots cela semblait compromis. En revanche, lui montrer à quel point il avait du chemin à faire en lui donnant quelques coups bien placés, c’était envisageable.

Sans plus attendre, poussée par l’excitation du lieu, le combat précédent, et surtout l’alcool, Yelena avait fini par l’entrainer dans une salle à côté, histoire de pouvoir tranquillement lui en mettre plein les yeux… et les dents… et sans doute d’autres endroits. Si il fallait cela pour lui faire entendre et lui donner une forme de leçon presque amicale (en retirant la douleur qui le tiendrait après ce qu’elle imaginait déjà pouvoir lui mettre…). Au final, ils avaient tous les deux pris de bons coups. Et assez étrangement ils avaient l’air tous les deux amusés par cette activité douloureuse. Quoi qu’elle restait la plus satisfaite par sa victoire. Prévisible selon elle. Même si elle pourrait avoir eu un doute à un moment. Mais son esprit fier et son ego démesuré avaient fini par lui faire oublier l’idée qu’elle pourrait échouer face à ce jeune homme impétueux. Cette pensé un peu aidée là aussi par l’alcool, il faut savoir l’admettre.

-Ça prouve une chose au moins. Que je dois encore m’entraîner. Avec toi.

Elle le tenait toujours avec une grande fermeté, la belle toujours contre lui dans l’idée de garder immobile toute partie de son corps à lui. Yelena n’avait visiblement pas frappé assez fort, il en demandait encore. Cela lui avait d’ailleurs arraché un petit rire. Même légèrement coupé par ses propres douleurs. Avec ces deux combats, c’était surtout ses côtes qui avaient bien pris… Mais le tenir encore un peu était tentant. Le voir coincé ainsi avait un côté assez amusant. Elle pouvait le sentir essayer de se dégager, restant aussi solide qu’un roc de son côté. La fougue de la jeunesse ne faisait pas tout!

-J’ai été gentille avec toi ce soir, je le serai sans doute moins sobre, tu le sais?

Il lui fallait reconnaitre la faiblesse qui la tenait pour le moment. Relative, et pas assez fort pour l’empêcher de l’emporter ceci dit. La belle brune avait finit par le relâcher, permettant aux deux de se détendre un peu. Chacun retrouvait ses mouvements, un peu de sa respiration aussi qui s’était parfois faite plus difficile. Assise, appuyée en arrière, elle l’avait vu lui aussi se remettre doucement. Il avait finit par venir s’installer à côté d’elle à son tour, imitant sa position pour admirer le piteux plafond. Dans cette optique, elle s’était mise en arrière encore un peu plus, s’appuyant maintenant sur ses coudes. Laissant aller sa tête en arrière aussi, elle en avait fermé les yeux, laissant ses poumons s’emplir et se vider avec régularité, profondément. Au moment de se redresser, elle avait vu Isaac face à elle, la fixant étrangement. Elle avait donc relevé un sourcil, se demandant un peu ce qui retenait à ce point son attention.

-Quoi?

D’une voix assez grave et presque sèche, elle avait du mal à le situer, ou plutôt à situer sa pensé derrière ses sourcils froncés à lui aussi. Cela ne s’était pas fait attendre cela dit. Il était brusquement venu à elle pour l’embrasser avec fougue.

1: La surprise n’était pas encore passé qu’elle se laissait déjà tomber, cédant à son impétueuse demande non verbale. L’heure tardive, l’alcool, sans doute aussi un peu de ses regrets des derniers jours, elle songeait peut-être pouvoir se laisser les oublier entre ces bras qui la saisissaient déjà.

2,3,4 : Elle ne l’avait pas vu venir, ni même envisagé qu’il pourrait y mettre autant de volonté et d’envie. Mais finalement, était-ce si grave? Ils n’étaient plus liés par ces obligations scolaires, elle ne l’avait forcé à rien d’ailleurs. C’était sa volonté à lui et pourquoi pas la sienne après tout? Embrumée par les évènements de la soirée, brouillée par l’alcool, elle avait décidée de ne pas se poser plus de questions, cherchant déjà à prendre le dessus sur cette surprenante situation, cherchant à se redresser, prête à prendre les commandes si il acceptait de lui laisser cette place. Ce qui n’était pas gagné, mais il était hors de question de simplement lui abandonner.

5,6: Si la surprise a accordé quelques secondes sans doutes délicieuse au jeune homme, Yelena n’était pas encore assez fatiguée ni assez alcoolisée pour se laisser aller à de telles dérives. Adressant un coup de poing bien placé sur le côté de la mâchoire d’Isaac, il s’était rapidement retrouvé à terre à côté elle après lui être passé par-dessus la jambe dans le mouvement. La slave s’était redressée dans la foulée, comme folle de rage. “Je peux savoir ce qui te prend??!” Quelle que soit la réponse, elle risquait de ne pas être convaincante…

Le membre 'Yelena Dratsena' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

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'Le dé ' : 4

Si je l’avais su, je serais venu bien plus tôt.
Dans ce bar miteux et sordide où le public attend son lot de sang et de tripes. D’os et de dents pétés, d’adrénaline et de sueur, juxtaposés à un cloaque sans nom. C’est là, où je me suis rendu ce soir, peu convaincu par la chose. Ne m’attendant pas à un combat de la sorte, surtout une femme. Et, comprendre après quelques réflexions intérieures, que je l’ai connue. A Poudlard. Étant l’un de mes premiers fantasmes d’adolescent, que je n’ai pu qu’assouvir en étant en retenue avec elle. Retenue, qui s’est malencontreusement mal passée, du moins pour mon booste d’hormones conséquent. En plus, d’avoir cette honte sourde sur ma conscience de jeune adulte en devenir, j’ai terminé ma retenue avec mon Directeur de Maison. Autant dire, que la douche –mentale et physique-, qui s’en est suivie a été rude pour l’élève de Serpentard. Quelle merde.

Repenser à cette histoire avec un certain recul, me fait sourire. Agréablement. Car l’atmosphère de ce lieu piètre se prête aux confidences et ça me plait. Surtout, qu’il n’y a plus cette position d’autorité entre nous : je suis l’immense joueur de Quidditch reconnu par ses pairs pour son jeu violent et elle, la Dragonnière. Toujours Professeur, mais plus de l’Isaac Wellington, d’il y a onze années. On se trouve sur le même pied d’égalité, sans dissonances. Juste que pour moi, cela fait bien longtemps que je n’ai plus de pensées bien chastes à son envers. Depuis que je l’ai vue combattre et observé ce ballet furieux qu’elle a pu produire sur cette scène pour le moins improvisée. Elle est clairement bandante et l’occulter n’est pas dans mes principes.

On discute. Ça me fait bien rire cette affaire.
La fixant de mon regard bleu clair, je ne peux qu’avoir un immense sourire quant au rappel de la tête octroyée par mon Directeur de Maison. Ce dernier ne s’attendant pas à ce que j’apparaisse dans son bureau, prêt à me ruiner la main gauche à copier des lignes stupides sur un parchemin. Alors, que l’instant d’avant, j’étais avec Yelena Dratsena.

- Comment elle s’est terminée ? La questionne-je en riant. Je me suis retrouvé comme un con, dans une salle vide à copier des kilomètres de parchemin, pour tenter de me calmer.

Cette vaste blague.
Ça m’a pas vraiment calmé, faut se l’avouer.
Parce que je suis encore plus retors, encore plus violent et encore plus sadique qu’avant.

C’est ce qui m’a entraîné à poursuivre la voie du Quidditch professionnel pour seule et unique finalité. Tout comme rentrer dans l’équipe la plus violente qui soit, celle des Faucons de Falmouth, où j’y fais mes armes depuis quelques temps maintenant. Alors, la rudesse de la castagne, et les branlées monumentales, je dois dire que ça me parle assez. Surtout, quand j’en suis venu à demander à mon interlocutrice si je peux me prétendre « disciple » à ses côtés. Suivre ses enseignements, et parfaire mon jeu autant sur le terrain qu’en-dehors. C’est du moins, ce que je peux certifier. Ma grande et immense carrure, m’offre quelques avantages mais aussi des désagréments.

La preuve en est, comme elle est venue à me ceinturer et avoir le dessus sur ma personne, bien que satisfait, je lui ai porté quelques coups bien sentis. Mais, pas assez maitrisés à mon sens. Or, porté par l’excitation du petit duel entre nous, de l’alcool pulsant dans mes veines et de l’ancienne Professeur ultra excitante et attrayante, j’ai bien d’autres pulsions qui me trottent dans les méninges. Surtout, ces quelques palabres relâchées alors qu’elle me tenait sous son joug, ont littéralement fait accroître mon excitation. Gentille avec moi ce soir, parce que bourrée ? Ça, ça me fait encore bien rire et je ne peux m’empêcher d’hausser un sourcil appréciateur. Si par le plus grande des hasards, nous sommes amenés à nous revoir, je veux qu’on se boxe en pleine possessions de nos moyens. Surtout les siens, il me faut plus que quelques verres d’un tord-boyaux dans un bar franchement peu recommandable, pour me foutre à genoux.

- J’aimerais idéalement te voir, mais pas sobre pour une Mornille ! M’exclame-je tout en éclatant de rire, alors que mon regard bleu clair la suit.

A la dérobée, je me mets à la reluquer, sans pour autant m’en cacher. Positionné dans le même état du corps et de l’esprit, je me suis assis à côté d’elle. L’envie me broyant les tripes, s’en trouvant accrue avec la proximité de son corps. Il ne me faut pas longtemps pour en exprimer toutes les composantes et me retrouver à lui cacher son champ de vision. Champ de vision remplacé par ma colossale stature, qui la surplombe allègrement. Son questionnement, je l’ai vite oublié alors que je m’emploie à lui choper les lèvres avec brusquerie et fougue. Well. Elle n’a pas l’air de vouloir me rosser pour un tel affront.

Quinze ans dans la carrière d’un professeur de Poudlard c’était à la fois énorme et très court. Pour ceux que Yelena avait vu occuper le poste de professeur de Défense Contre les Forces du Mal, chaque année une personne différente, cela devait être effectivement énorme. Pour d’autres comme son ancien collègue aux potions, c’était si peu. Et pourtant, en quinze ans, elle avait connu de nombreux changements. A commencer par certains choix dans ce qui était les conditions de réprimandes. Si même à son arrivée elle avait rapidement vu la différence avec son ancienne école, la très stricte et exigeante Durmstrang, Yelena avait connu la fin de cette période où il arrivait encore de voir quelques sévices corporels sur les cas les plus graves. les choses avaient évolué avait-elle entendu, et elle avec, se pliant sans broncher aux demandes de la direction. Les punitions accordées par la suite avaient été bien plus faciles, plus délicates presque. Des remontrances orales, quelques points supprimés dans les grands sabliers, des retenues. Isaac avait été de cette époque. Considérée comme une des plus difficiles, Yelena lui avait octroyé quelques instants charmants avec un balai brosse et des serpillères dans les vestiaires. Elle s’était retrouvée bien surprise de l’état dans lequel il s’était mis et elle restait presque sûre qu’il en avait été de même pour lui. Elle doutait qu’il se serait volontairement mis dans un tel état d’excitation face à elle de manière consciente et volontaire. A l’époque cela avait été une situation délicate dont elle s’était déchargé auprès de son collègue. Lui aussi devait en garder un souvenir impérissable. Isaac ne semblait pas si rancunier, riant avec elle. Répondant même à son questionnement.

-Comment elle s’est terminée ?

Oh, et bien, d’après ce rire, cela s’était sans doute terminé de façon assez calme. Si son collègue s’était montré plus incisif, Isaac aurait sans doute moins ri, même aussi longtemps après. Amusée, Yelena souriait en le regardant, attendant la suite avec malice.

-Je me suis retrouvé comme un con, dans une salle vide à copier des kilomètres de parchemin, pour tenter de me calmer.

Yelena avait ri une fois de plus. Un rire un peu jaune cela dit. Noircir des parchemins à n’en plus finir n’était pas forcément la méthode qu’elle préférait appliquer. Lui faire écrire quoi d’ailleurs? “Je ne dois pas avoir de barreau en pleine punition”? “Je n’assommerai pas mes petits camarades à coups de battes de Quidditch”? “Je ne ferai plus le malin devant mes professeurs”? Quel intérêt?.. Elle n’y croyait pas…

-Comme si ça avait déjà calmé quelqu’un de faire couler de l’encre…

Elle n’était plus son professeur, elle n’était plus même à Poudlard. Autrement elle ne se serait pas permis un tel discours. Même si c’était le fond de sa pensé. La distance, l’alcool, le lieu aussi quelque part, elle se faisait sans doute plus bavarde dans ces conditions si particulières. Des conditions qui faisaient en grande partie la cocasse situation qui s’en était suivie. Isaac voulait apprendre, il voulait essayer d’être plus combatif. Si elle n’était pas convaincue par ses motivations. Se faire plus agile et violent sur un terrain, ce n’était pas sa vision des choses. Mais si il voulait s’y frotter, après tout, pourquoi pas. Elle n’était plus à ça près, plus même à un combat près ce soir. Bien attaquée par cette bouteille terminée, elle ne s’était pas sentie si affaiblie et avait accepté de lui en montrer un peu plus. Et pour en montrer plus, elle n’était pas adepte des petites démonstrations tranquilles et précisément expliquées. Si un coup devait être expliqué, il le serait en étant ressenti par l’apprenti. Et Isaac en avait ressenti ce soir. Si on lui demandait son avis à elle, ce n’était pas encore grand chose. Peut-être une mise en bouche. Mais se faire ceinturer par une femme plus petite que lui ne devait pas être des plus confortable. La slave en revanche s’en amusait assez franchement.

-J’aimerais idéalement te voir, mais pas sobre pour une Mornille !

L’ayant déjà relâché, elle avait un peu ri à cette nouvelle provocation. Il ne savait sans doute pas à quoi il s’exposait en lui faisant une telle propositions. Elle n’aurait aucune forme de scrupule à lui briser une côte si il poursuivait sur cette voie avec elle. La slave ne faisait que très rarement dans le sentiment et il pourrait très bien en faire les frais si il poursuivait.

-Même si j’acceptais de répondre à ta demande et te briser un os ou deux, je ne suis pas non plus seule dans ces entraînements. Peut-être suis-je la plus douce des deux…

Marius serait sans doute pire encore, ne s’arrêtant peut-être même que parce que le jeune homme resterait cloué au sol. C’était plus ou moins ce qu’il s’était appliqué comme règle avec elle. Mais finalement elle en faisait autant avec lui. Et sans vouloir se vanter ces derniers temps c’était plus souvent lui qui repeignait le sol de son sang lors de leurs joutes toutes amicales.

Cette conversation amusée pourtant n’avait pas perduré. Yelena commençait même à sentir une forme de fatigue et quelques douleurs se réveiller. L’heure tardive, ne plus avoir cette animation qui bouillonnait autour d’elle, les cris et les rires de la salle d’à côté, elle commençait à ressentir les nombreux points touchés de son anatomie malmenée ce soir. Au moment de rouvrir les yeux, Isaac semblait avoir changé d’idée et quelque part d’envie. Il était objectivement bien plus imposant qu’elle et la toisait presque de sa stature, posant sur elle un nouveau regard. La russe avait à peine eu le temps de se poser et lui poser la question qu’elle s’était retrouvée devant l’évidence qu’il avait bien d’autres idées qu’un combat avec elle. Saisissant avec fougue voire même passion ses lèvres, hésitante tout de même quelques instants, la belle avait fini par se laisser glisser dans cette tentation, se prenant même au jeu portée par la fougue de cet impétueux adversaire.

Ah. Cette punition.
Que j’ai toujours malgré moi, en travers de la gorge. Comme une sale potion préparée par Vacaresco, qui a du mal à passer. J’ai toujours à cœur de me venger d’O’Mahony, même onze années après. Parce que je ne suis pas arrivé au bout de cette journée, sans me retrouver à écrire et écrire des lignes, sous la surveillance peu enchantée ni courtoise, de mon Directeur de Maison. Il ne s’est pas privé de me faire rentrer dans la tête, mais surtout dans les mains, tout ce que mon comportement a eu de désobligeant. Haussant les sourcils, face à cette remontrance, je m’y suis plié. Bien, que l’idée de revenir en retenue avec la slave, Dragonnière de son état, m’a traversé salement l’esprit. Parce que, reluquer mon vieux Directeur de Serpentard, ça n’a pas été accueilli de la même façon par mes pensées troublées. D’adolescent, qui a fantasmé considérablement sur Yelena Dratsena.

Haussant un sourcil interrogateur, je suis témoin après des années à être sorti de l’enceinte du Château séculaire, que de telles méthodes ne sont pas au goût de cette femme incendiaire. Néanmoins, je ne peux m’empêcher de rire, conscient que ça doit l’emmerder, de faire en sorte d’offrir à ses étudiants présents en retenue, de coucher sur des kilomètres de parchemin, leurs conneries. J’en ai fait les frais à l’époque. Abîmant, cette main gauche qui peut-être, s’est vu être renforcée après des châtiments littéraires interminables.

- C’est sûr que calmer un adolescent, et lui enseigner l’art ô combien magnifique de récurer des vestiaires, ça forge un homme. Et, je peux te dire que mes coéquipiers ont été mis au pli après. Une pause assortie d’un immense ricanement. Ça a plus bronché, après. Tu peux me croire. Et, même si elle ne me croit pas, ça reste la seule et unique vérité.

Pour la suite, me faire ceinturer par cette femme volcanique qui m’a foutu en retenue durant mon adolescence, -notamment ma dernière année-, a été une sorte de supplice. Malgré, que je me sois admirablement bien défendu, elle n’en reste pas moins avec l’avantage de l’expérience. Ce qui me frustre. Même, en étant légèrement éprise par l’alcool, elle reste une adversaire efficace. Que je veux voir avec la pleine possession de ses moyens. Ainsi donc, je pourrais avoir le temps de m’entraîner de mon côté et de me mesurer à elle. De la plus exquise des manières. En ne lui laissant aucune chance : ayant eu à cœur d’observer, ce que je juge être comme des points faibles. Forte, je suis d’accord, mais ça reste une femme. Bien moins apte à encaisser les coups portés.

- On se refera une session de combat. Quitte à me faire briser un os ou deux, dans la rixe. Commence-je en souriant, mon corps n’est plus à ça près. C’est pas comme si, j’en avais pas l’habitude. Le Quidditch, tout ça.

A croire que ce que j’ai vécu en combattant avec elle, se répercute sur mes envies. Elles ne sont pas soudaines. Elles se sont vu juste muselées durant onze années, à imaginer ce corps de femme nu. L’embrassant à lui en dévorer les labiales, je la sens hésitante. Mais, il ne me faut pas longtemps pour qu’elle bascule avec moi et se laisse convaincre. Happée par la fougue.